Parce que nous sommes en 2018 ! Rien pour nous, sans nous dans la nouvelle loi canadienne sur l'accessibilité

Le 11 mars 2010,  en ratifiant  la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées,  le Canada s’est engagé  à éliminer les obstacles qui empêchent les personnes handicapées de profiter pleinement de leurs droits humains.  La discrimination systémique s’exerce partout dans les secteurs relevant de l’autorité fédérale, notamment les terminaux de points de vente et les boîtes numériques en câblodistribution qui obligent les usagers à  interagir avec des repères visuels, sans alternative pour les usagers aveugles ; les aides à la mobilité systématiquement endommagés par les transporteurs aériens ; les lieux publics , depuis les postes de travail dans la Fonction publique jusqu’aux parcs nationaux, absolument pas conçus pour répondre aux besoins des personnes en divers situations de handicap.  En 2015, le Premier Ministre Trudeau a demandé à la ministre des Sports et des Personnes handicapées de l’époque, l’honorable Carla Qualtrough, replacée aujourd’hui par l’honorable Kirsty Duncan, d’élaborer une loi sur l’accessibilité.  Huit ans plus tard, la loi sur l’accessibilité a le feu vert, ouvrant la voie l’application de la CDPH au Canada.

Le succès de la CDPH repose surtout sur le principe « Rien pour nous sans nous ».  Ce principe a incité les auteurs de la CDPH à impliquer les personnes handicapées et leurs organisations et à les intégrer totalement dans l’élaboration de la Convention.  Les Canadiennes et les Canadiens en situation de handicap cherchent à nouveau à l’appliquer à la loi sur l’accessibilité.  L’Alliance pour un Canada inclusif et accessible ne ménage pas ses efforts pour véhiculer cette vision « Rien pour nous, sans nous » de la loi sur l’accessibilité au moment même où le gouvernement du Canada se penche sur son élaboration aux fins d’examen au printemps prochain. 

Reconnaissons toutefois qu’en plus d’organiser ses propres consultations relativement à la loi sur l’accessibilité, le gouvernement du Canada a financé plusieurs projets de consultation soit par la collectivité des personnes handicapées soit par des organisations de personnes autochtones afin de recueillir des idées et des commentaires quant aux principaux éléments qui devront façonner cette loi.  Le plus important de ces projets, l’Alliance pour un Canada inclusif et accessible, a conclu un partenariat particulier avec seize organismes également axés sur la défense des droits et la prestation de services.   Barry McMahon, consommateur d’Ottawa, a été élu à la présidence de l’Alliance « La loi sur l’accessibilité est une chance unique, a déclaré Steven Estey, coordonnateur de l’Alliance.  Mais pour en assurer la pertinence, le gouvernement du Canada doit s’instruire auprès de la collectivité des personnes en situation de handicap afin de prévoir la meilleure élimination possible des obstacles que nous connaissons si bien. »

Depuis un peu plus d’un an maintenant, soit depuis janvier 2017, l’Alliance a écouté les citoyens et recueilli des conseils vis-à-vis de la loi sur l’accessibilité.  Et qu’a-t-elle entendu ?  Que les Canadiens handicapés veulent une loi rigoureuse, ayant le pouvoir d’éliminer les obstacles et d’en prévenir de nouveaux.    À maintes et maintes reprises, nous avons entendu les personnes handicapées refuser carrément des mesures basées sur le volontariat.  Comme le  Code de pratique volontaire des autobus interurbains, adopté en 2011 et qui représente pour Transports Canada   « un engagement volontaire de la part des exploitants des services d’autocars à servir les personnes ayant une déficience de façon sûre et avec considération. »  De tels codes sont appliqués dans d’autres secteurs affectant nos vies.

Les Canadiennes et les Canadiens en situation de handicap ont affirmé que parce que nous étions en 2018, pratiquement dix ans après la ratification de la CDPH,   il était plus que temps de lâcher  l’approche volontaire vis-à-vis de l’accessibilité, une approche ayant favorisé l’éclosion de la discrimination,,,’  Nous  avons entendu tellement de gens réclamer une loi avec du mordant,  a ajouté M. Estey.  L’article 9 de la CDPH incite les pays à « élaborer et promulguer des normes nationales minimales et des directives relatives à l’accessibilité des installations et services ouverts ou fournis au public … »

À travers le pays, les Canadiens Sourds ont participé en grand nombre à ces consultations, demandant que la nouvelle loi reconnaisse leurs langues, ASL et LSQ, comme langues officielles.  L’article 21 de la CDPH stipule que « les États parties prennent toutes mesures appropriées pour que les personnes handicapées puissent exercer le droit à la liberté d’expression et d’opinion, y compris la liberté de demander, recevoir et communiquer des informations et des idées, sur la base de l’égalité avec les autres et en recourant à tous les moyens de communication de leur choix… » .  Ce sont des droits fondamentaux !  La CDPH a ouvert la voie et la nouvelle loi sur l’accessibilité devra respecter ces normes.  Ne pas les respecter reviendrait tout simplement à renier les obligations que le Canada a acceptées en 2010  en ratifiant volontairement ce traité.

Plusieurs membres de la collectivité des personnes handicapées   ont demandé que la loi sur l’accessibilité élimine les obstacles reconnus dans la législation actuelle.  C’est notamment le cas pour la Loi électorale.   À cause des dispositions de la Loi, Élections Canada ne peut remplacer le vote par  bulletin-papier par un vote téléphonique ou électronique qui permettrait aux électeurs aveugles d’en vérifier l’exactitude  en toute confidentialité.  Le bulletin-papier ne le permet pas.  Or, l’article 29 de la CDPH oblige le Canada à « veiller à ce que les procédures, équipements et matériels électoraux soient appropriés, accessibles et faciles à comprendre et à utiliser. »

Outre les consultations avec des Canadiennes et des Canadiens handicapés de la collectivité, l’Alliance s’est également entretenue avec des spécialistes juridiques du handicap de tous les coins du monde.  Si vous avez manqué ces sessions,  vous pouvez les retrouver sur la chaine YouTube de l’Alliance à   https://www.youtube.com/watch?v=c8_D5M4pvdY&feature=youtu.be.
Lors de ces sessions, les experts ont confirmé que la loi canadienne sur l’accessibilité devait s’inspirer de la vision du handicap stipulé dans la CDPH.  Ils ont notamment déclaré que le préambule de la Convention stipule «  Reconnaissant que la notion de handicap évolue et que le handicap résulte de l’interaction entre des personnes présentant des incapacités et les barrières comportementales et environnementales qui font obstacle à leur pleine et effective participation à la société sur la base de l’égalité avec les autres… » .  Cette perception plus étoffée du handicap doit être enchâssée dans la nouvelle loi afin de retracer tous les obstacles auxquels sont confrontées les personnes ayant diverses déficiences et que des stratégies soient instaurées pour les éliminer. 

Par ses rapports soumis au gouvernement du Canada, l’Alliance a transmis aux rédacteurs  de la nouvelle loi sur l’accessibilité les idées et commentaires des personnes handicapées.  Nous saurons ce qu’ils en auront retenu ;  nous saurons s’ils ont entendu les personnes handicapées lorsque cette loi historique sera déposée  en première lecture à la Chambre des communes, ce qui devrait survenir lors de la session du printemps.  Et après, il nous faudra intervenir pour nous assurer que le gouvernement du Canada s’inspire du principe « Rien pour  nous, sans nous », lorsqu’il élaborera, adoptera et appliquera la loi sur l’accessibilité.  Voulez-vous y participer ?  Pour suivre l’évolution de la loi, consultez le site Web et les comptes des médias sociaux de l’Alliance ainsi que ceux de ses organisations membres http://alliance-canada.org/en/home/  ; @TheAllianceCA (Facebook et Twitter).

L’Alliance pour un Canada inclusif et accessible regroupe comme membres :  l’Alliance canadienne des troubles du spectre autistique; l’Alliance for Equality of Blind Canadian; l’Association Canadienne pour la santé mentale ; l’ Association Canadienne pour l’intégration communautaire ; le Conseil des Canadiens avec déficiences ; l’ Institut national canadien pour les aveugles ; la Marche des dix sous du Canada ; Realize/anciennement Canadian Working Group on HIV and Rehabilitation ; - Réseau d’Action des femmes handicapées du Canada ; le Réseau national pour la santé mentale ; Personnes d’Abord du Canada et  la Société Alzheimer du Canada .

Ses organisations partenaires sont :  le Service ontarien de la surdicécité;  Dystrophie musculaire Canada ; l’Association nationale de étudiant-e-s handicapé-e-s du niveau postsecondaire et Spina Bifida & Hydrocephalus Association Canada.

Steven Estey
Coordonnateur de l’Alliance
Alliance pour un Canada inclusif et accessible.