Cette Voix qui est la nôtre: Numéro special de janvier 2008

Numéro spécial: Mettons fin à l'exclusion 2007

Avec trois cents soixante-dix (370) participants, trois ministres fédéraux conférenciers et un plan national d'action endossé par plus de quatre-vingt-dix (90) organisations nationales, provinciales et locales, le forum Mettons fin à l'exclusion 2007 a certainement connu un très vif succès. Le Conseil des Canadiens déficiences (CCD), l'Association canadienne pour l'intégration communautaire (ACIC) et l'Association canadienne des centres de vie autonome (ACCVA), maintenant Vie Autonome Canada, étaient les trois principaux partenaires de cet événement

Dans ce numéro spécial de Cette Voix qui est la nôtre, le CCD fait un tour d'horizon des événements qui se sont déroulés lors de la journée Mettons fin à l'exclusion 2007.

Sommaire:


La vision ne suffit plus!

par Marie White (version écourtée des remarques formulées par Marie White, présidente du CCD, lors de l'événement Mettons fin à l'exclusion, le 22 novembre 2007. Marie se concentre sur certaines sections du Plan d'action et sur les futures activités)

Plus de quatre-vingt (80) organisations ont endossé notre Plan d'action national Mettons fin à l'exclusion. Le gouvernement fédéral s'intéresse à nous - la preuve, le ministre Solberg était ici ce matin et les ministres James Flaherty et Peter McKay viendront un peu plus tard. Nous espérons que cette mobilisation Mettons fin à l'exclusion catalysera la communauté.

Il nous faut tous nous mettre à la tâche, identifier nos priorités et nos enjeux sur lesquels devront agir les gouvernements, à tous les paliers… depuis le nettoyage des trottoirs par les gouvernements municipaux jusqu'au leadership fédéral en passant par l'investissement provincial dans les mesures de soutien liées aux limitations fonctionnelles.

Désormais, notre leitmotiv sera: la vision ne suffit plus – des mesures s'imposent!

Je ne crois pas que les ministres fédéraux aient, jusqu'à présent, parfaitement saisi notre vision. Ils commencent à l'appréhender toutefois; mais si voulons prendre un tournant décisif, si nous voulons évoluer, c'est avec eux que nous devons le faire.

Nous sommes arrivés à un point en 2007 où les paroles ne suffisent plus. L'an passé nous avons présenté notre vision et notre vision était claire. Cette année, il faut arrêter de parler, il faut agir. Et pour ça, il faut que nous participions toutes et tous. C'est important!

Nous n'y arrivons que si toutes les personnes ayant des limitations fonctionnelles, les membres de leurs familles, leurs partisans et leurs défenseurs s'engagent avec nous. Parce que c'est ensemble que nous pourrons progresser et faire bouger les choses.

De nouvelles façons s'imposent. Et elles doivent être adoptées par les employeurs, les gouvernements et les fournisseurs de services publics. Nous connaissons les solutions. Nous pouvons les fournir. Nous pouvons en discuter. Et nous savons qu'il est possible d'innover au niveau des politiques.

Les solutions sont complexes et intergouvernementales. Mais nous ne serions pas ici aujourd'hui si nous avions laissé cet écueil nous barrer la route. Cela ne peut justifier l'inaction. Nous l'accepterons pas et ne l'autoriserons plus.

La situation des Canadiens et des Canadiennes handicapés peut être améliorée de diverses manières. Le gouvernement a déjà pris plusieurs engagements pour traiter nos enjeux sur la scène internationale. Nous savons qu'avec l'adoption de la Convention relative aux droits des personnes handicapées, les enjeux des personnes handicapées ont été nettement projetés sur la scène internationale. Le Canada doit aussi manifester son leadership à cet égard et il doit régler les questions de pauvreté, de chômage, le manque de mesures de soutien liées aux limitations fonctionnelles et le déni de notre droit fondamental à l'autodétermination. En dans un tel cas, il faut être prophète dans son propre pays.

Une stratégie nationale d'accès et d'inclusion des personnes handicapées

Une stratégie nationale s'impose. Il ne s'agit pas d'une injection ponctuelle de fonds. La stratégie nationale devra combler les besoins des Canadiens handicapés et de leurs familles – un revenu adéquat, des appareils et accessoires fonctionnels, des mesures de soutien individualisées, des médicaments, des accommodements physiques dans tous les secteurs de la société canadienne, auxquels les Canadiens avec des déficiences auront un accès universel.

Nous connaissons tous les trois pôles de «À l'unisson» — l'emploi, le revenu adéquat et les mesures de soutien liées aux limitations fonctionnelles. Ce sont ces facteurs qui autorisent et facilitent la participation citoyenne des personnes handicapées et édifient un Canada accessible et inclusif.

Nous devons commencer à utiliser les deux termes ensemble. L'accès ne nous suffit pas. Nous voulons aussi l'inclusion. Nous pouvons souvent nous rendre jusqu'à la porte. Mais une fois que nous y sommes, sommes-nous inclus? Sommes-nous capables de faire ce que font nos amis et voisins? Nous devons, je pense, commencer à parler d'inclusion car c'est un mot fédérateur, un mot qui nous situe. Et où voulons-nous être?

Nous voulons vivre dans un pays où nous pouvons choisir notre lieu de résidence. Où nous pouvons aller à l'école du coin. Où nous pouvons choisir nos propres carrières; des carrières basées sur nos compétences et nos capacités. Nous voulons avoir des aspirations. Nous voulons être égaux. Nous voulons profiter des ressources et de la richesse d'un pays qui a tant à offrir.

Et n'oublions jamais ça car nous savons que le Canada a un surplus. Nous savons que des investissements peuvent être effectués. Un plan national pour les personnes handicapées doit transcender la traditionnelle approche, réactive et fragmentaire; il doit aller au-delà. Il doit prévoir des composantes à court, moyen et long termes.

Leadership fédéral

Le Canada ne sera réellement accessible et inclusif que si le gouvernement fait preuve de leadership. Il faut maximiser des mesures de soutien porteuses d'autonomie, d'active citoyenneté et de pleine participation. Nous avons besoin d'un gouvernement plus que jamais déterminé à atténuer l'abjecte et totale pauvreté dans laquelle vivent tant de personnes handicapées et leurs familles. Ainsi, des fonds pourront être dégagés aux niveaux provincial et territorial pour de nouveaux investissements dans les mesures de soutien. Il nous faut un gouvernement qui sache prendre les commandes sur les scènes fédérale, provinciale et territoriale; sinon, nos avancées seront freinées.

Nous avons besoin de mesures d'inclusion dans la force active. Nous avons besoin d'un rôle de développement social au niveau national pour promouvoir l'accès et l'inclusion communautaire; Car voyez-vous mesdames et messieurs, nous ne voulons pas la charité; nous voulons la parité. Nous ne voulons pas l'exclusion; nous voulons l'inclusion.

Et n'oublions jamais que si, en tant que collectivité, nous ne retournons pas auprès de nos gouvernements municipaux et provinciaux en revendiquant et recommandant de claires mesures concertées, nous nous retrouverons ici encore une fois sans voir le mouvement dont nous avons besoin.

Mesures de soutien pour personnes handicapées

Nous ne pourrons être inclus sans les mesures de soutien cruellement requises. Nous pouvons avoir les compétences. Nous pouvons refaire l'ingénierie du monde; nous pouvons être des gens de média, de relations publiques. Mais si nous n'avons pas les soutiens requis pour pouvoir actualiser ces compétences et poser les gestes qui s'imposent, alors nous ne pourrons profiter des possibilités d'emplois qui s'offrent à nous. C'est Mary Poppins, je crois, qui a déclaré: «commençons par le commencement». Et pour nous, le commencement ce sont les mesures de soutien afin que l'inclusion devienne une réalité quotidienne et l'exclusion un fait du passé.

Plan d'action national de mesures de soutien pour personnes handicapées - nos exigences:

Nouveaux investissements dans les mesures de soutien liées aux limitations fonctionnelles - Ces nouveaux investissements, correctement instaurés, susciteront des changements dans la vie des personnes handicapées. Grâce à un investissement adéquatement ciblé en mesures de soutien, les Canadiens avec des déficiences pourront se prévaloir de programmes d'apprentissage et de garde des jeunes enfants, être scolarisés, obtenir un emploi, vivre dans une plus grande autonomie, prendre soin de leurs familles.

Pour la collectivité des personnes handicapées, l'obtention d'un tel investissement est devenue une priorité. C'est sur cette trame que doit s'élaborer un Plan d'action complet pour les personnes handicapées. La désinstitutionnalisation et l'éradication de la stigmatisation liées au handicap en sont des composantes essentielles.

Le gouvernement canadien doit:

  • Créer des conditions politiques, économiques et sociales pour permettre aux personnes handicapées de s'auto-habiliter et d'atteindre leur plein potentiel.
  • Collaborer avec les provinces et territoires pour explorer de nouvelles manières d'accroître l'accès aux mesures de soutien liées aux limitations fonctionnelles et d'élargir la gamme des mesures disponibles.
  • Collaborer avec les provinces et territoires afin d'appuyer la construction de logements sécuritaires, accessibles, abordables et avec services de soutien;
  • Reconnaître que les établissements institutionnels n'ont rien à faire dans la vie des personnes handicapées et encourager les provinces et territoires à parachever leur procédure de fermeture.
  • Travailler avec les Conseils de bandes afin de garantir aux personnes handicapées des Premières Nations vivant dans les réserves, une égalité d'accès aux mesures de soutien.

La pauvreté et les personnes handicapées

La pauvreté des personnes handicapées est une honte nationale. La réalité, c'est que l'incidence de la pauvreté est deux fois plus élevée chez les Canadiens avec des déficiences et leurs familles que les personnes handicapées. Et elle est encore plus forte chez les personnes handicapées autochtones et des Premières Nations. L'actuel système de soutien n'est certainement pas une panacée pour les personnes avec des déficiences. Le gouvernement du Canada doit s'engager à régler la question de pauvreté.

Plan d'action national: de nouvelles initiatives pour atténuer la pauvreté

La pauvreté est Canadiens handicapés est une honte nationale. L'incidence de la pauvreté est deux fois plus élevée chez les Canadiens handicapés et leurs familles que chez les personnes non handicapées et elle est encore plus forte chez les autochtones handicapés. Les actuels systèmes de soutien du revenu sont loin d'être une panacée pour les personnes avec des déficiences. Le gouvernement du Canada doit s'engager à régler la question de pauvreté et à réformer les programmes de soutien du revenu destinés aux personnes handicapées.

Parmi les premières étapes:

  • Rendre remboursable le crédit d'impôt pour personnes handicapées;
  • Que les bénéficiaires de la prestation d'invalidité du Régime de pensions du Canada soient automatiquement admissibles au crédit d'impôt pour personnes handicapées;
  • Que la prestation d'invalidité du Régime de pensions du Canada ne soit pas imposable;
  • Prolonger jusqu'à 52 semaines le paiement de la prestation-maladie de l'assurance-emploi.
  • Que les provinces et territoires ne récupèrent pas, chez les prestataires de l'aide sociale, les nouveaux avantages accordés par le gouvernement fédéral, notamment ceux du Régime enregistré d'épargne-invalidité.

Les réformes à long terme pourraient inclure:

  • Rôle accru du gouvernement fédéral dans le soutien du revenu pour les Canadiens handicapés, grâce à de nouveaux investissements dans les mesures et services de soutien provenant de fonds dégagés aux niveaux provinciaux/territoriaux.

(Consultez le site Web Mettons fin à l'exclusion pour voir le reste du Plan d'action)

L'après Forum Mettons fin à l'exclusion 2007

Pour ceux et celles qui n'ont pas eu la chance de le consulter ou pour ceux et celles qui veulent endosser notre Plan d'action, notre site Web est très simple.

Pour résumer la Journée: nous sommes liés à ce Plan d'action et nous espérons qu'après aujourd'hui, qu'après l'avoir relu et en avoir discuté avec vos organisations locales, provinciales, territoriales et nationales, vous aussi serez convaincus qu'avec cette orientation et les mesures requises, de véritables changements transformationnels se produiront enfin.

Au cours de la prochaine année, nous revendiquerons des avancées dans quatre secteurs fondamentaux. Notre Plan d'action regroupe quatre composantes au sein desquelles nous avons cerné quatre secteurs fondamentaux.

Nous demandons au gouvernement fédéral de faire preuve de leadership et de réactiver et re-dynamiser les processus fédéraux-provinciaux-territoriaux portant sur les mesures de soutien pour personnes handicapées. Les mesures de soutien pour personnes handicapées - faites-en votre mantra. Sans elles, il n'y a pas d'inclusion. La Table fédérale-provinciale-territoriale sur les mesures de soutien doit-être réinstaurée.

Nous demandons, pour commencer à régler le problème de la pauvreté dans laquelle nous visons tous, que le crédit d'impôt pour personnes handicapées devienne remboursable.

N'oublions pas non plus les ententes de développement de la main-d'œuvre négociées avec chaque gouvernement provincial. Je vous recommande vivement d'aller en discuter avec votre ministre provincial chargé du Travail et de l'emploi. Nous demandons des cibles spécifiques d'inclusion des personnes handicapées.

Mais surtout, nous demandons un changement de comportement. Et c'est ainsi que nous avons commencé la journée, en parlant de revirement d'attitude…garantissant l'accès dans toutes les facettes de notre quotidien – les transports, le logement, les technologies, le processus électoral, l'environnement bâti, notre tissu culturel et les communications.

Nous voulons une société que pourraient cristalliser les propos tenus par ma fille. Oui, avez-vous pensé, nous avons passé la journée sans qu'elle nous parle de ses enfants. Pas de chance, cela n'est jamais arrivé. Il y a environ deux ans, et je ne sais ce qui m'a pris si ce n'est de savoir ce que mes enfants – actuellement âgés de 11 et 12 ans – pensaient d'avoir une mère handicapée. J'ai donc demandé à ma fille – elle est importante dans la famille parce que c'est une fille de douze ans -. Je lui a donc demandé: «qu'est-ce qu'il y a de différent dans notre famille? David, m'a-t-elle répondu…c'est son frère. Oh, ai-je ajouté, tu ne penses pas que je suis différente? «Elle m'a regardée et m'a dit «mais qu'est-ce qu'il y a de différent avec toi?». Et voilà le Canada que je veux. Un Canada où les gens diront: mais qu'est-ce qu'il y a de différent?»

Nous voulons un Canada où l'inclusion sera un fait de la vie. Nous savons que c'est un défi et nous sommes prêts à le relever. Nous pouvons bâtir un Canada accessible et inclusif. Et encore fois, parlez fort….soyez fort. Votre place n'est pas encore garantie dans la société. Nous l'atteindrons…mais nous ne pouvons le faire seuls.

Nous sommes une forte, forte collectivité. Et nous ne laisserons jamais quelqu'un restreindre cette force.

Au nom du CCD, de l'ACIC et de l'ACCVA, je vous remercie…merci…Merci.


Atténuer la pauvreté – les mesures à prendre

par le Professeur Michael J. Prince (version écourtée des remarques formulées par le Professeur Michael J. Prince, lors de l'événement Mettons fin à l'exclusion, le 22 novembre 2007 à Ottawa)

On m'a demandé de vous parler des prochaines étapes, de bâtir sur de nouvelles initiatives visant à atténuer la pauvreté. J'étais ici l'an passé et aujourd'hui, je suis heureux de constater que nous allons passer de la vision à des mesures concrètes.

Le premier point que je veux établir est que la réalisation de la première priorité du mouvement des personnes handicapées, à savoir une maximisation de la prestation et de la qualité des mesures de soutien -, passe par une refonte des programmes du revenu. Les diverses réformes énoncées dans le Plan d'action en matière de politiques et de programmes ne sont pas des options. Elles se complètent les unes et les autres. À mon avis, et à moins que le gouvernement ne s'engage en ce sens, nous ne verrons jamais dans ce pays d'augmentation substantielle ni de régime s'apparentant quelque peu à un système pancanadien de mesures de soutien pour les personnes handicapes et leurs familles. Le gouvernement ne se lancera pas à cette fin dans des ententes concertées avec les gouvernements provinciaux et territoriaux. La seule façon d'ouvrir cette voie et de provoquer un leadership fédéral, c'est d'imposer une refonte de la sécurité du revenu.

Limiter les réductions d'impôt

En me préparant ce matin, je me suis demandé: quelle est la plus importante mesure fédérale touchant les personnes handicapées? Et la réponse: la plus importante initiative du gouvernement fédéral touchant les personnes handicapées et ayant un impact dans leur vie, c'est le programme de réduction d'impôt ou d'allègement fiscal.

D'après le Budget 2007, les réductions d'impôts atteindront cent quatre-vingt dix (190) milliards de dollars au cours des six prochaines années. Le taux d'imposition du gouvernement fédéral est le niveau le plus bas jamais atteint depuis un demi-siècle. C'est un legs dont s'enorgueillit ce gouvernement. Je peux parfaitement comprendre la popularité des réductions d'impôts au niveau politique. Je suis conscient de la popularité qu'engendre cette mesure pour ceux et celles qui en bénéficieront. Mais il faut que je le dise: trop c'est trop.

Plus nous réduisons les impôts, plus nous réduisons la capacité fiscale du gouvernement fédéral et moins ce gouvernement ou le prochain, pourra assumer un rôle de leadership en ce qui a trait aux enjeux des personnes handicapées. Franchement, nous avons atteint un point charnière où des ressources financières du gouvernement fédéral sont à un tel niveau que cela entrave la mise sur pied d'importantes réformes sociales, quelles qu'elles soient.

Je pense que nous avons eu assez de réductions d'impôt. Vous pensez qu'il s'agit une hérésie? Mais je vous le dis, cela handicape notre capacité d'entreprendre de nouvelles initiatives sociales. Oui, vos députés fédéraux vous parleront de réductions d'impôt lors des prochaines campagnes fédérales. Mais voir les partis tomber dans la démagogie des réductions fiscales m'inquiète beaucoup. Parce qu'ils croient que c'est ce que les gens veulent. C'est facile à dire, politiquement, surtout avec les surplus. Lorsque l'économie est vigoureuse, que les revenus prospèrent, ce ne sont pas des promesses difficiles à tenir pour les politiciens.

L'aide sociale vecteur d'exclusion sociale

L'aide sociale devait être un filet de sécurité sociale, un programme de dernier recours. Malheureusement, pour de nombreux Canadiens et plus particulièrement de Canadiens handicapés, c'est un programme de premier recours. Dans ma province, en Colombie britannique, le nombre de personnes handicapées prestataires de l'aide sociale a triplé au cours des dix dernières années, atteignant cinquante pour cent du nombre total de bénéficiaires britanno-colombiens. Ce taux est peut-être plus élevé dans d'autres provinces.

L'aide sociale n'est plus vraiment une forme de sécurité sociale. C'est une forme d'exclusion sociale. C'est une trappe, un facteur de stigmatisation et de ségrégation des bénéficiaires. Ce n'est pas dans ce Canada que je voudrais vivre. Ce n'est pas le Canada pour lequel les défenseurs de politique sociale et les membres de ce mouvement ont si longtemps lutté depuis les quarante ou cinquante dernières années et qui devrait offrir un décent filet de sécurité. Alors, si nous devons parler de fardeau fiscal, revenons cinquante ans en arrière, rappelons-nous luttes et nos parcours et ne les oublions pas.

Le Plan d'action

Laissez-moi vous parler du Plan d'action. Ce que j'aime le plus, c'est qu'il est stratégique. C'est un creuset de projets de réformes, certains à court terme avec, notamment, quelques concepts pragmatiques, modestes et progressifs. D'autres sont plus ambitieux qui demanderont du temps pour faire l'objet d'un consensus, non seulement au sein du mouvement mais encore dans la population canadienne et surtout, auprès de nos principaux partis politiques.

Nous avons beaucoup à faire pour sensibiliser nos partis politiques. Et je n'en stigmatise aucun. Je ne critique pas ce gouvernement. Il y a quelques semaines, M. Dion a dévoilé le plan d'action libéral de lutte contre la pauvreté. Il n'a pas du tout mentionné les personnes handicapées. Il parle des personnes âgées, des enfants et d'autres groupes. Mais le groupe ayant l'un des taux les plus élevés de pauvreté ne fait pas partie de la vision libérale. Voyez, nous avons du travail à faire. Même auprès de ceux que nous avons cru, pendant des années, partisans de notre cause et sympathiques à nos enjeux.

Étape à court terme: un crédit d'impôt remboursable

Maintenant, le gouvernement va devoir se poser la question suivante: parmi les premières étapes énoncées, (cinq en tout), laquelle sera notre priorité? Je lui suggèrerai la première : transformer le crédit d'impôt pour personnes handicapées en un crédit remboursable, avantageant réellement tous les bénéficiaires canadiens de ce programme, nonobstant leur revenu. Et que ce soit une prestation en espèces et non un allègement fiscal pour ceux qui ont les moyens de bénéficier d'un tel allègement. Que cela devienne un modeste mais néanmoins important ajout au menu fiscal du gouvernement fédéral.

Trois des quatre premières étapes traitent visent les personnes intégrées dans le marché du travail. Mais la première, rendre remboursable le crédit d'impôt pour personnes handicapées, suscitera des avantages, qu'elles soient ou non dans la force active. Pour moi, c'est un autre incitatif. La première mesure à court terme doit être l'option la plus attrayante.

Nous avons, ce matin, entendu M. Monte Solberg, ministre des Ressources humaines et du Développement social du Canada, parler de la dernière mesure à court terme du Plan d'action, à savoir le Régime enregistré d'épargne-invalidité. Le texte législatif afférent sera adopté par ce parlement, sauf réserve toutefois d'un déclenchement inattendu d'élections au cours des prochains mois. Pour moi, c'est un acquis. Je sais que le gouvernement fédéral négocie actuellement avec les gouvernements provinciaux et territoriaux pour éviter toute récupération financière, comme nous l'avons subi dans le passé avec d'autres mesures fédérales. Certains gouvernements provinciaux réagissent en effet en réduisant les prestations allouées au titre d'autres programmes.

Par conséquent, à court terme, des mesures peuvent rapidement être instaurées, notamment transformer le crédit d'impôt pour personnes handicapées en prestations de revenu remboursables, une réforme relativement simple et que nous devrons fortement revendiquer.

Mesure à plus long terme: un nouveau programme national de revenu et des réinvestissements dans les mesures de soutien

En ce qui a trait aux réformes à long terme…nous suggérons tout un éventail d'idées et propositions intéressantes. En plus d'enjoindre le gouvernement fédéral à prendre plusieurs modestes mesures progressives au cours des premières années, le plan formule l'audacieuse vision d'une importante réforme à long terme de la sécurité du revenu. Cela me ramène à mes remarques d'ouverture où j'affirmais que la route vers un vaste et viable système de mesures de soutien de grande qualité passait par des programmes du style Supplément de revenu garanti ou Sécurité vieillesse, offerts aux personnes âgées au Canada.

Ce que nous visons surtout, c'est que tous les Canadiens ayant de graves limitations fonctionnelles (et quelles qu'en soient les définitions), soient admissibles à des prestations indexées, fondées sur le revenu et allouées mensuellement par le gouvernement fédéral. En vertu de ce nouveau programme, entre quatre cent mille et six cent mille Canadiens et Canadiennes handicapés, actuellement prestataires de l'aide sociale provinciale, recevraient entre seize et dix-huit mille (16 et 18 000) dollars par an.

Ces bénéficiaires n'émargeraient plus aux programmes provinciaux/territoriaux d'aide sociale. Ils se qualifieraient pour ce nouveau programme fédéral de soutien du revenu destiné aux Canadiens handicapés en âge de travailler (entre 18 et 64 ans). Les gouvernements provinciaux engrangeraient alors d'importantes économies, entre un et un milliard et demi de dollars par an.

Si elles étaient ensuite investies dans des mesures de soutien pour personnes handicapées, ces économies représenteraient une injonction massive de nouveaux fonds destinés à optimiser l'approvisionnement actuel et à améliorer la qualité et l'accessibilité. Nous pourrions apposer un règlement plus pragmatique et valable à ces questions. Certes, les communautés rurales, éloignées et nordiques ont désespérément besoin d'accéder aux mesures de soutien. Mais les centres urbains aussi. Un telle mesure faciliterait la mobilité sous toutes ses facettes et donnerait un véritable sens à la prestation de soutiens à domicile, à la vie autonome ainsi qu'à la participation accrue au marché du travail, préconisée par le Premier Ministre. Ce type de réinvestissement encouragerait les cinq ou six cent mille Canadiens handicapés, actuellement sans emploi, à se tourner vers la force active et faciliterait leurs démarches. Comme l'a déclaré Marie White, présidente du Conseil des Canadiens avec déficiences, des mesures de soutien abordables, accessibles et appropriées ne favoriseront pas uniquement l'accès à l'emploi, même à temps partiel. Imaginez le potentiel…illimité!

De magnifiques possibilités

En terminant, permettez-moi d'affirmer que cette importante réforme s'inscrit parfaitement dans la Constitution canadienne, notre traditionnelle pratique de politique sociale du pays qui nous permet aussi de préciser et comprendre le rôle du gouvernement fédéral vis-à-vis des provinces.

Et si, comme l'affirmait le ministre Solberg des RHDSC, le gouvernement fédéral recherche une « magnifique possibilité » pour maximiser la participation au marché du travail, voilà un demi million de Canadiens prêts à travailler et désireux de le faire. Ils ont tout simplement besoin d'un petit investissement dans les services et mesures de soutien liés aux limitations fonctionnelles.


Faits saillants de la Journée mettons fin à l'exclusion

Honorable Monte Solberg

L'honorable Monte Solberg, sur la photo à gauche a déclaré: «Nous avons besoin du talent de tous les Canadiens, y compris des Canadiens handicapés. Prenons note du thème de la Journée internationale des personnes handicapées, du 3 décembre prochain, «Travail décent pour les personnes handicapées». Les gouvernements, les entreprises et les établissements postsecondaires ont tous la possibilité – et la responsabilité – d'aider les personnes handicapées à obtenir la formation requise pour obtenir les emplois voulus et mérités.

L'honorable James Flaherty (photo ci-dessous) a déclaré: «J'ai été très heureux lorsque je suis arrivé ici – et malgré toutes les mesures que nous avons mises en vigueur – de recevoir le Plan d'Action pour la création d'un Canada accessible et inclusif. Et Laurie m'a déjà indiqué la mesure que je devrais intégrer dans le prochain budget: elle a trait au crédit d'impôt remboursable……… Je n'ai pas dit que nous allions le faire…. En fait, il ne faut jamais rien dire avant le budget. Mais J'examinerai attentivement cette question, soyez certains.» Après avoir remercié le ministre Flaherty de son allocution, Marie White lui a répété que la collectivité des personnes handicapées aimerait recevoir un crédit d'impôt remboursable comme cadeau de Noël. Toute la journée, Marie a rappelé aux représentants du gouvernement et aux participants que les politiques sociales canadiennes ont actuellement un statut de sans-abris. Elle a donc encouragé le gouvernement du Canada à régler ce problème en relocalisant les politiques sociales au sein de son programme et en s'engageant à exécuter le Plan d'Action de la collectivité des personnes handicapées pour la création d'un Canada accessible et inclusif.

Honorable James Flaherty

Se prononçant sur la nouvelle Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées, l'honorable Peter McKay a déclaré: «Comme vous le savez, le Canada a été l'un des premiers pays signataires. Cela cristallise nettement la volonté du gouvernement d'aider les plus vulnérables d'entre nous. Nous sommes profondément déterminés à créer une société accessible à tous. Nous voulons maximiser la participation de tous nos citoyens, de toutes les personnes handicapées.»

Meenu Sekand, représentante de l'ACCVA a déclaré: «Les mesures de soutien pour personnes handicapées doivent être adaptées aux besoins des personnes handicapées. Elles doivent être transférables. Par exemple, aujourd'hui, je suis ici à Ottawa et non à Toronto. Par conséquent, c'est ici, à Ottawa, à l'hôtel Marriott que mes mesures de soutien doivent être dispensées et non pas à Toronto.»

Robin Acton, mère d'un enfant handicapé a affirmé: «Ce n'est pas en tant qu'individu que je parle mais en tant que représentante familiale. Je n'ai pas d'étiquette. J'aime quelqu'un qui en porte une. Sans les mesures de soutien, ma famille ne peut profiter des mêmes avantages que les autres citoyens. Et pour atteindre cette égalité, nous devons élargir la définition communément acceptée des mesures de soutien pour y inclure l'aide aux familles.»

Heather Tracy a exemplifié le besoin d'une réadaptation des emplois, le besoin d'aménagements et d'autres mesures favorisant la continuité dans le travail. Présidente sortante de Personnes d'Abord du Canada, Heather a déclaré: «J'ai travaillé pendant trois ans dans un atelier protégé et, grâce à l'aide du directeur, j'ai pu obtenir un emploi au bureau de poste, que j'ai pratiquement géré seule et ce pendant quatre ans et demi. Mais j'ai dû démissionner car à cause de ma déficience, j'étais incapable de rester huit heures par jour debout. J'ai une déficience permanente et je vis avec environ 750 $ par mois. Après dix années de chômage, j'ai trouvé un emploi à temps partiel chez un vétérinaire: je nettoie les planchers et les cages où sont installés les animaux après les opérations chirurgicales. Si j'ai choisi de travailler à temps partiel, c'est que je ne veux pas perdre mes prestations. J'aime le bowling mais je ne peux pas me le permettre financièrement. C'est très difficile de faire des activités. J'aimerais bien mais je n'en ai pas les moyens. Autant je veux vraiment faire partie de la communauté autant il semblerait que je ne puisse y arriver qu'en adhérant aux Jeux Olympiques spéciaux ou à une quelconque organisation.

L'universitaire, multi-artiste, visualiste et consommatrice, Diane Driedger, a commencé par un poème: «Aujourd'hui, j'aimerais vous proposer un poème que j'ai écrit il y a une dizaine d'années, lorsqu'on m'a déclaré que j'étais atteinte de fibromyalgie, maladie chronique, sorte d'arthrite musculaire. J'ai composé ce poème intitulé: «La classe d'exercices pour fybromyalgie», après être sortie de la clinique de réadaptation de Winnipeg.

«C'est une condamnation à vie»
déclare une femme au premier rang
pendant que le physio lit
les symptômes de la fibromyalgie
Et je me demande:
Quel genre de condamnation?
Une condamnation de ma vie
Ma vie condamnée?
L'unique vision pour ma vie?
La seule vie?
Quoi?
Prison ou récit?

(Tiré de The Mennonite Madonna de Diane Driedger, Gynergy Books, 1999)

Greg Pyc, représentant de la Société Neil Squire a déclaré: «Les comportements constituent, bien sûr, l'un des problèmes systémiques. Nous devons les explorer, les analyser puis trouver des moyens de les corriger.»


La marche vers la Colline parlementaire

Susan Ralph and colleagues with banner

Suite la photo ci-jointe, Susan Ralph et des collègues défilent avec la bannière du CCD, lors de leur croisade vers la Colline parlementaire pour se regrouper autour de la Flamme du centenaire sur la Colline. Les organisations nationales y ont tenu une séance de sensibilisation publique, et ont proclamé leur première priorité d'action.

cold, snowy day

Il faisait froid et il neigeait abondamment ce 22 novembre 2007. Mais ces conditions rigoureuses n'ont pas endigué le sentiment de solidarité qui animait les manifestants pendant la marche vers la Colline. (Sur cette photo, John Rae, vice-président du CCD et d'autres participants défilent vers la Colline)

Parlons haut et fort!

Roy Muise, Marie White, Tim McIsaac, and John Rae

Des représentants de divers secteurs – mouvement syndical, parlementaires, organisations en quête d'égalité, se sont joints aux participants du forum Mettons fin à l'exclusion, sur la Colline parlementaire. Parlant haut et fort autour de la Flamme du centenaire, de droite à gauche: Roy Muise, trésorier du CCD, animateur de la manifestation; Marie White, présidente du CCD, Tim McIsaac, membre du Conseil du CCD parlant, au micro, au nom de l'Association canadienne des étudiants handicapés du niveau postsecondaire et John Rae, vice-président du CCD et représentant de l'Alliance for Equality of Blind Canadians.

Shane Haddad

Les partisans de Personnes d'Abord du Canada ont participé en force à l'événement Mettons fin à l'exclusion.

Sur cette photo, entouré de nombreux collègues, Shane Haddad énonce la priorité de Personnes d'Abord du Canada auprès de la Flamme du centenaire.

Tout au long de la journée, divers parlementaires se sont joints aux participants de l'événement Mettons fin à l'exclusion, notamment Jack Layton, Carolyn Bennet, Judy Wasylycia-Leis, Steven Fletcher, Peter Julian et d'autres.


Déclaration à la Chambre des communes

Le jeudi 22 novembre, la députée Judy Wasylycia-Leis de Winnipeg Nord, a déclaré en Chambre en parlant de l'événement Mettons fin à l'exclusion:

«Monsieur le Président, Mettons fin à l'exclusion 2007 est un rassemblement extraordinaire qui se déroule aujourd'hui à Ottawa.

Plus de 300 délégués qui représentent au-delà de 90 organisations des quatre coins du pays et qui préconisent une véritable égalité pour les personnes handicapées sont ici pour élaborer un plan d'action en vue de faire de leur vision d'un Canada inclusif et accessible une nouvelle réalité vivante.

Ils ont un message pour nous tous: le temps des études et des promesses est terminé, il faut passer à l'action. Le gouvernement fédéral doit maintenant bâtir un Canada où toutes les personnes handicapées auront ce qu'il faut pour jouir d'un plein accès et profiter pleinement de tout ce que le pays peut offrir, où tous travaillent ensemble pour éliminer les obstacles et faire en sorte que les Canadiens handicapés soient réellement des citoyens à part entière.

Nous sommes à un tournant. Il est temps que le gouvernement fédéral fasse preuve de leadership et améliore la vie quotidienne des Canadiens handicapés qui représentent 12 p. 100 ou plus de la population. Le moment est venu de construire un Canada où tous les citoyens seront des citoyens à part entière et où nos valeurs seront basées sur l'égalité, l'autodétermination et l'accessibilité. Nous devons agir maintenant pour que toutes les générations puissent être fières de ce que nous aurons accompli aujourd'hui.»

Photos: Kier Martin, ACIC.