Obtenir et conserver un emploi : les clés de la réussite

Assiniboine Credit Union

La préparation de cette brochure a été rendue possible avec l'appui de l'Assiniboine Credit Union.

 

Table des matières

 

Introduction

Tony Dolanprésident du CCD

Ouvrir la voie

Les personnes handicapées : La population en attente
Marie Ryan, Chairperson CCD Social Policy Committee 

Accommodement 

Les accommodements - Toute une différence pour moi
Tracy Odell       
Des feuilles de mûrier aux Nations Unies
Vangelis Nikias     
Apte au travail :  les tribulations  d’une employée
Rhonda Wiebe 
Un bon entendement judiciaire pour une nouvelle avocate malentendante à Toronto
Leah Simeone      
Si vous ne réussissez pas la première fois, essayez encore et encore et encore
Marie Laporte-Stark     
Collaboration au travail
Shelley Ann Morris    
Ma carrière :  une formidable odyssée!
Paula Keirstead     
Trouver sa voix
Susan Forster   
Un travail qui semble différent
Diane Driedger    
L’emploi et les personnes handicapées - Quelques réflexions
Harry Wolbert  

Mesures de soutien liées

Démanteler les obstacles comportementaux : une réussite professionnelle
Gary Malkowski    
L’accès aux appareils fonctionnels – La clé de la réussite dans l’emploi
Mary Ennis    
La réussite professionnelle – au-delà de la survie dans l’emploi
David Best   
Facilitants et obstacles dans le cheminement d’une traductrice malentendante
Mai Nhu Nguyen    
Mon cheminement professionnel – persistance, persévérance et acceptation de soi
Karen Tarry    
Le point de vue d’une étudiante
Alena Wickware    
Le succès …une question d’interprétation
Alan Conway    
Obtenir un emploi et le conserver – Les clés de la réussite
Anne M. McPhee    
Vous n’êtes pas seul
Carole Willans    
Travailler avec une déficience auditive
Doreen Gyorkos    
Les pôles de le la réalisation professionnelle
Anu Pala   
Mon cheminement professionnel
Colleen Watters   
L’importance des mentors
John Rae 
La voie du succès : pavée par l’auto revendication
Natalie Martiniello 


Éducation et formation      

Apprentissage continu :  Une clé de la réussite professionnelle
Gary Birch    
La vie comme chercheur aveugle en cancérologie
Dr. Mahadeo A.  Sukhai    
Une formidable et passionnante carrière propulsée par la formation en milieu de travail
Yvonne Peters    
La valeur du travail
Sandra Carpenter    
L’inclusion scolaire:  la clé du marché du travail
David Martin    
Un continuum de services – le bon vieux temps!
Traci Walters    
Planifier ses succès
Neil Graham    
Se faire offrir un emploi sur  un plateau d’argent
Marie-Josée Martin    
Aller au-delà de la confection de poignées de plats
Nancy Blain    
Obtenir et conserver un emploi de technologue en santé animale
Audrey Thorhaug    
Un cheminement professionnel vers des destinations locales, nationales et internationales
Jim Derksen    
Cheminement de carrière
Daniel Halechko    
De l’idéalisme à la réalité : d’hier à aujourd’hui
Maria Barile    

Appui transitoire

Pas besoin des petites annonces :  Becky crée sa propre carrière
Becky Brownlee     
Obtenir un emploi et le conserver
Amber-Joy Boyd    
Les mesures de soutien, pôles du succès
Teresa Beauregard   
Des encouragements inspirants – un atout dans l’emploi
Deanna Ng    
Je veux travailler
Greg Plosz and Jay Plosz    
Comme tout l’monde!
Marie B.-Lemieux    


Soutien aux entrepreneurs       

Des papillons en papier
Milli Flaig-Hooper    
Mes succès professionnels
Nora Carnegie    
Miss Ability
Sarah Wilson   

Attitudes

Une attitude prometteuse
Claredon Robicheau    
Expériences en emploi
Monique Beaudoin    
La carrière :  un  lien avec la communauté
Paul Young   
Réflexion personnelle sur le travail
Emily Ternette    
Réussir au travail :  depuis l’apprentissage et le perfectionnement professionnel de mes débuts jusqu’à l’emploi rémunérateur et permanent
Frances Sinclair-Kaspick    
S’accepter : la clé du succès en emploi
Karen Lai    
Obtenir un emploi et le conserver – Qu’est-ce qui fait la différence?
Donna J. Jodhan    
Prendre sa carrière en main
Chris Stark    
Les emplois d’hier et d’aujourd’hui
Catherine S. Fichten    
Mon parcours professionnel
Paula Ann Stewart    
Les clés du succès : Aimer son travail et bien performer
Derek Legge    

Annexe

Analyse documentaire de la mesure des interrelations entre les personnes handicapées et le maintien en emploi/la progression professionnelle
Centre canadien d’études sur les personnes handicapées

 

Introduction

Tony Dolan, président du CCD

Maximiser les possibilités d’emploi des personnes handicapées a toujours été l’une des priorités du CCD et ce, depuis ses premiers jours.  Par  notre slogan, Cette Voix qui est la nôtre, nous affirmons  que  nous, personnes handicapées, sommes  capables  de nous prononcer sur les questions qui nous touchent car nous possédons les connaissances expérientielles requises pour éliminer les obstacles à notre participation.  Après avoir reçu de nombreux rapports axés sur les meilleures pratiques en matière d’emploi des personnes en situation de handicap, le CCD a demandé à ses membres et alliés,  en 2012,  d’écrire un article sur les clés de leur réussite professionnelle. Les personnes handicapées et leurs familles ont répondu avec enthousiasme et le CCD a compilé ce recueil de sages conseils sur les meilleures pratiques en matière d’emploi,  transmis par de talentueux et dévoués travailleurs handicapés.  C’est Marie Ryan qui ouvre la porte aux lecteurs, surtout aux lecteurs peu familiers avec les questions liées au handicap.  Ex-présidente du CCD et présidente du Comité de politique sociale de notre organisation, Marie raconte ce qu’est la vie avec une déficience au Canada. 

Ce recueil de témoignages est une mine d’or pour les Canadiens cherchant à inclure les travailleurs handicapés dans la force active car les auteurs ont dégagé, de leurs expériences personnelles, les clés de la réussite professionnelle pour les personnes avec des déficiences.  Outre leur engagement personnel à obtenir un emploi et à le conserver, ils ont identifié plusieurs pôles autour desquels s’articule l’emploi des personnes handicapées :  les aménagements  en milieu de travail, les mesures de soutien liées aux limitations fonctionnelles (même celles fournies par les organisations de personnes handicapées), l’accès à l’éducation et à la formation, l’aide pendant la transition de l’éducation/formation à l’emploi, l’accès aux possibilités d’entrepreneuriat, les attitudes positives.

Dans leur récit, les auteurs ont souligné l’importance des accommodements en milieu de travail.  Selon Tracy Odell, ils peuvent faire la différence entre une vie de travail ou une vie dans la pauvreté.   Dans la  Convention relative aux droits des personnes handicapées,  les aménagements sont ainsi définis : ce sont  les modifications et ajustements nécessaires et appropriés,  n’imposant pas de charge disproportionnée ou indue,   apportés en fonction des besoins dans une situation donnée pour assurer aux personnes handicapées la jouissance ou l’exercice, sur la base de l’égalité avec les autres, de tous les droits de l’homme et de toutes les libertés fondamentales. »

La valeur de l’éducation fut le thème de plusieurs essais. De nombreux contributeurs ont renforcé l’analyse du Dr Gary Birch: « Quant aux facteurs clés de ma réussite, le plus important est sans aucun doute la formation que j’ai obtenue à l’université et les occasions de perfectionnement professionnel qui m’ont été données tout au long de ma carrière. »

Pour certains auteurs, les mesures de soutien liées aux limitations fonctionnelles jouent un rôle déterminant dans l’obtention et la conservation d’un emploi.  Il s’agit des biens et services aidant une personne handicapées à surmonter les obstacles.  Pour Mary Ennis, les appareils et accessoires fonctionnels ainsi que  les informations sur la technologie fournies par les organisations ont été  vecteurs de succès professionnels. John Rae a expliqué comment ses mentors l’avaient aidé à naviguer à travers les obstacles.  La valeur des personnes capables de faciliter l’inclusion ne peut être occultée.

Les personnes handicapées ont mis sur pied toute une  gamme d’organisations sans but lucratif qui ont joué un rôle essentiel quant à la sécurisation d’un emploi et la participation à la vie active.  Les auteurs ont reconnu que les organisations de personnes handicapées ont  efficacement aidé les personnes en situation de handicap à réaliser leurs objectifs en matière d’emploi.

Les auteurs ont également décrit plusieurs modèles d’aide à la transition pouvant entrainer  l’obtention d’un emploi.  Dans certains témoignages, les membres de la famille agissaient comme  éléments moteurs dans les relations établies avec un employeur au nom de leur parent handicapé.  D’autres ont retracé les bienfaits de l’aide à la  transition,  offerte par les organismes communautaires.  Il faut toutefois retenir, en ce qui a trait à ce type d’assistance, qu’il n’existe pas d’approche uniformisée susceptible de régler les besoins d’emploi des personnes handicapées.   D’où l’importance d’instaurer une gamme d’options suffisamment souples pour s’adapter au marché du travail actuel et combattre le taux élevé de chômage chez les Canadiennes et les Canadiens en situation de handicap,

L’entrepreneuriat et le travail autonome sont très alléchants pour certaines personnes handicapées.  Ainsi, Milli Flaig-Hopper, une artiste ayant une déficience intellectuelle, explique dans son article « Papillons en papier » que grâce à l’entrepreneuriat, «  elle obtient l’aide requise mais est libre d’exprimer sa créativité, à sa façon. »

De nombreux auteurs ont insisté sur  l’importance des attitudes personnelles et ont reconnu que  la détermination, la conscience de soi et la souplesse sont prépondérants dans l’obtention et le maintien d’un emploi.  D’autres ont souligné l’influence des attitudes des employeurs et des collègues sur les résultats professionnels.  Dans « Une attitude prometteuse », Claude Robicheau explique comment la souplesse de son employeur et le soutien de ses collègues ont pavé la voie de sa réussite dans le secteur bancaire.

En terminant, le CCD invite les Canadiens à adopter les meilleures pratiques décrites dans cette anthologie (plusieurs d’entre elles d’ailleurs peuvent être appliquées hors du cadre professionnel).  Elles nous aideront à bâtir  ensemble un Canada plus accessible et plus inclusif.

Contributors described different models of transitional support that can lead to the attainment of employment.  In some essays, family members were the driving force that cultivated a relationship with an employer on behalf of an emerging worker with a disability.  Other individuals wrote about how they benefitted from the transitional support offered by community organizations.  An important lesson to take away from the authors' experiences with transitional support is that there is no "one size fits all" approach that will address the needs of all jobs seekers with disabilities.  A range of flexible options relevant to today's job market is what is required to overcome the high levels of unemployment faced by members of Canada's disability community.  People with disabilities have developed a range of nonprofit organizations which play a vital role in assisting people with disabilities to secure and maintain attachment to the labour market by providing a range of necessary services –  training, peer support, information and referral. 

Entrepreneurship and self-employment offer the type of rewards that appeal to some people with disabilities.  For example, Milli Flaig-Hooper, an artist with an intellectual disability, explained in "Paper butterflies" that with entrepreneurship, "she has support where she needs it, but is free to express her won creativity her way!"

Contributors noted the importance of an individual's personal attitudes and they emphasize the contribution that determination, self-awareness, and flexibility play in attaining and retaining employment.  Other writers recognized that employers' and colleagues' attitudes also influence employment outcomes.  For example, Claredon Robicheau in "The can-do attitude" described how his employer's flexibility and the support of colleagues were factors in his success in the banking industry.

In conclusion, CCD invites Canadians to adopt the best practices presented in this anthology (many of them apply beyond the employment setting), because they will help us create together a more accessible and inclusive Canada.

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Ouvrir la voie


Les personnes handicapées : La population en attente

Marie Ryan

Je vais vous faire part de mes opinions et de mon point de vue sur ce que c’est que de vivre avec un handicap au Canada, en vous racontant en partie mon histoire qui, je me plais à le dire, ferait un bon feuilleton, compte tenu qu’on y trouve nombre des divers éléments nécessaires, y compris l’émotion, le drame, l’incertitude, le triomphe de l’esprit et du courage et ultimement, la réussite.

Je suis gestionnaire-conseil chez Goss Gilroy Incorporated (GGI) et je viens juste de terminer un mandat de huit ans à titre de présidente du Conseil des Canadiens avec déficiences, dont le principal objectif est de promouvoir l’égalité pour les personnes handicapées dans tous les aspects de la société canadienne, mais ce n’est pas là que je me serais imaginée il y a environ 20 ans, en 1987, à l'âge de 27 ans. Ma formation professionnelle à l’époque était celle d’une enseignante au niveau élémentaire et à l’école intermédiaire; j’ai travaillé environ six ans, avant d’être frappée par une maladie virale très rare et dévastatrice qui, faute d’une meilleure description, m’a écorché les nerfs et a fait de moi une paralytique en moins de quatre mois.

Il est important de signaler que la toute première leçon que j’ai apprise, lors de ma descente dans un monde inconnu, est que les handicaps ne font pas de discrimination. Les handicaps arrivent à quiconque, n’importe quand, à la naissance ou par une maladie ou une blessure, quel que soit notre statut économique, nos antécédents, notre santé, notre religion, notre orientation sexuelle et notre culture. À ce propos, ce n’est pas un groupe qui existe, il n’y a pas de « ceux là », les handicapés, car, à n’importe quel moment, n’importe quelle personne d’entre vous ou de votre famille, de vos amis ou collègues, et même leurs enfants, pourrait être de « ceux là ».

En juillet 1987, 10 jours après mon mariage, je suis entrée à l’hôpital et j’en suis sortie sept semaines plus tard et je n’ai pu remarcher que 10 ans plus tard. Dans l’intervalle, j’ai fait un voyage à la Clinique Mayo, pour consulter le spécialiste qui avait étudié à ce moment environ 40 personnes atteintes de ma maladie en Amérique du Nord et il m’a dit quelque chose d’intéressant : vous devez commencer à revenir dans la vie.

Cette pensée était écrasante, car tandis que je demeurais indépendante sur le plan de la pensée, j’étais pour tout le reste totalement dépendante des autres, de ma famille et de mes amis. Mon univers, la maison, la voiture, la ville, la province, étaient physiquement relativement inaccessibles, et en conséquence des points de vue et des attitudes moins que favorables de la part de ceux qui, je le croyais, étaient à même, par leur situation d’autorité, de m’aider, le monde m’apparaissait un peu comme un abîme. Ce n’est pas très différent de l’univers que connaissent nombre de personnes aujourd’hui, des parents qui font de leur mieux pour élever leurs enfants handicapés, des personnes qui grandissent avec leurs handicaps et/ou que des handicaps viennent frapper, et qui essaient de faire leur chemin dans un monde de systèmes complexes, intimidants et souvent peu coordonnés, dirigés par des gens qui ne voient tout simplement pas les réalités des personnes handicapées, mais qui sont guidées par des politiques non réceptives aux besoins de ces personnes.

En 1988, j’ai fait un arrêt respiratoire et je me suis retrouvée aux soins intensifs pendant quatre mois. Il en allait comme au début de mon invalidité – j’étais submergée par le « nuage de négativité » et on me ressassait encore et encore cette litanie : vous ne respirerez jamais par vous-même, vous ne marcherez jamais, vous ne travaillerez jamais, vous n’aurez jamais d’enfants. Par contre, dans chaque nuage, je voyais un ou deux rayons d’espoir, disposés à m’aider sur ma route vers une vie d’indépendance, vers le succès.

Lorsque la maladie et l’invalidité m’ont frappée, j’ai épuisé mes économies et suis devenue pauvre, et c’est une autre réalité pour nombre de ceux que l’invalidité frappe ou a frappé, et pour nombre de ceux qui grandissent avec un handicap et qui n’ont pas d'accès équitable aux études, qui ne disposent pas des services et produits de soutien nécessaire pour fréquenter les établissements postsecondaires, qui ne peuvent participer au marché du travail. Pour nombre de familles qui ont des enfants handicapés, leur réalité peut être faite de spécialistes, de réunions, de constantes demandes de soutien, sollicitant les systèmes pour obtenir le soutien nécessaire pour leur enfant et tout cela jalonné de factures menant à un gouffre financier.

L’une des priorités du CCD et, en fait, des organismes de l’ensemble du pays s’occupant des handicapés est de s’attaquer à l’état de pauvreté abjecte dans lequel tant de ces personnes vivent. Pouvez vous imaginer vivre avec moins de 8 000 $ par an, soit le plancher du taux de l’aide sociale dans notre pays actuellement?

Pouvez-vous imaginer être pauvre parce que les produits et services de soutien aux personnes handicapées dont vous avez besoin sont liés à l’aide au revenu et que si vous essayez de vous sortir de la pauvreté, vous n’avez pas les moyens d’obtenir ces produits et services d’aide aux personnes handicapées?

Lorsque je suis retournée chez moi au début des années 1990, je recevais des soins en permanence, car mon mari était à la faculté de médecine et je n’avais pas demandé à ma mère, vieillissante, de venir et de m'aider quotidiennement. Et pourtant, trop souvent, c’est cette attente que l’on impose aux membres de la famille.

Mon assurance a été épuisée en deux mois et ensuite, quoi donc? Je ne pouvais rien faire par moi-même et j’étais atteinte d’apnée du sommeil pendant cette période et parfois, ma respiration s’arrêtait, 30 à 40 fois par nuit, de sorte qu’un soutien 24 heures par jour était essentiel.

Et que dire de l’appel du sous-ministre de la province, qui disait en substance : Vous coûtez trop cher pour être maintenue à domicile; vous devez donc retourner en institution.

Vous savez quelle a été ma première réaction : pleurer. Et ensuite, j’ai appelé mon avocat qui estimait que je devais les écouter… et ensuite, j’ai appelé un autre avocat, qui était disposé à m’écouter, et puis, j’ai téléphoné à mes médecins, qui ne pouvaient pas être d’accord avec cette solution parce que entrer dans une institution équivalait pour moi à une sentence de mort, en raison de mon système immunitaire fortement déficient.

Imaginez-vous une femme de 85 livres, immobilisée, avec une trachéotomie, faisant la tournée des politiciens provinciaux. Par bonheur, j’étais scolarisée et j’étais même alors une excellente communicatrice et je ne me laissais pas repousser. Nombre de personnes handicapées vivent dans un contexte où elles ne peuvent avoir cette confiance et cette capacité et ont été marginalisées et exclues; elles n’ont pas l’énergie requise pour faire ce que j’ai fait. Et, pour être honnête, elles ne devraient pas avoir à le faire.

Je me suis assise à une table avec un groupe de ministres et quand j’ai entendu dire : la meilleure chose que puisse faire votre mari est de divorcer, afin de ne pas perdre tout son argent – je me suis reculée de la table et j’ai dit : « Aucun d’entre vous ne se soucie de moi, nous partons. »

Après des semaines de lutte, j’ai réussi à recevoir les services et produits de soutien dont j’avais besoin et j’en ai eu besoin pendant deux ans. Le traitement auquel j’ai eu droit des bureaucrates et politiciens insensibles m'a motivée, tout au long des années, à parler de mes expériences comme exemple de ce qui peut arriver lorsque des gens bénéficient d’un soutien approprié et ne sont pas simplement rejetés en raison d’une invalidité.

J’ai vécu sur l’aide sociale environ un an et demi. C’était plutôt démoralisant, mais adouci par ceux qui travaillaient dans les systèmes provinciaux de santé et de services sociaux, et qui s'efforçaient de comprendre mon point de vue. L’invalidité m’a volé ma mobilité, mais non mes compétences. Et pourtant, j’ai rapidement appris une leçon de vie, c’est-à-dire que pour, bien trop de gens, l’invalidité est ce qui vous définit.

Lorsqu’il a été établi que je serais institutionnalisée – alors, la question qui se posait était : qu’allais-je faire, du point de vue de ceux qui paient les factures, qu’allaient-ils faire de moi pour réduire leurs coûts. Vous savez, j’ai coûté pas mal d’argent au gouvernement au cours de ces deux années et, vous savez quoi, je ne m’en excuse pas. J’étais une citoyenne positive et qui payait ses impôts avant d'être handicapée, et il en a été ainsi pendant de nombreuses années depuis.

Alors, qu’est-ce que j’étais, une enseignante – enseigner dans mon fauteuil roulant, malgré mon agilité et ma mobilité réduites?

Si je laissais le soin de répondre à quelques-uns de ces gens du gouvernement qui dirigent des programmes à l’intention de personnes comme moi, j’aurais été placée en recyclage ou dans des cours de cuisine. Ce n’est pas exactement ce qu’il faut à une première de classe, à une diplômée boursière méritante et enseignante exceptionnelle, qu’en pensez-vous?

S’il vous plaît, n’oubliez pas qu’avoir des choix, ce n’est pas comme avoir le choix, si ces choix ne sont pas le moindrement appropriés dans votre cas, pour votre vie ou vos buts et objectifs.

Après quatre années de rétablissement difficile, j’ai refait les premiers pas dans la vie à la fin de 1991. Une pensée m’a frappée : le genre et l’ampleur de mon handicap m’empêcheraient de retourner à l’enseignement et peut-être serais-je condamnée à ne rien faire pendant le reste de ma vie car je n’avais pas d’autre formation – que pourrais-je faire d’autres?

Parlons d’autodépréciation – cela a peut-être été ma leçon la plus précieuse – trop fréquemment, nous glissons dans le piège de nous encarcaner d'après un diplôme, une profession ou un mode de vie, et pourtant, nous avons tant à offrir si nous tenons compte de notre combinaison de compétences et si nous nous demandons de quelle façon les mettre à profit.

J’ai rapidement appris que ma scolarité/mes capacités étaient précieuses pour la collectivité et, de la sorte, je suis entrée dans l’univers du bénévolat. Les personnes présentes dans la collectivité des handicapés étaient les experts – même si, après toutes ces années, je qualifie – mais j’avais la capacité nécessaire d’écrire, de parler et de formuler des stratégies, aptitudes requises pour tirer parti des connaissances de la collectivité et de faire servir cela à notre avantage collectif.

Fait intéressant à signaler, à l’époque où mes besoins étaient les plus grands, tandis que je luttais contre la bureaucratie gouvernementale, l’aide m’est venue de la collectivité des personnes handicapées – dans une certaine mesure, je leur dois ma renaissance dans ma nouvelle vie. Ces gens m’ont aidée aux moments les plus sombres. Ils ne m’ont pas définie par mon invalidité, mais ont plutôt vu qui j’avais été, qui j’étais et qui je pouvais devenir.

La variété de mon travail comme bénévole dans la collectivité m’a donné confiance en moi, la certitude que je pouvais suivre divers cheminements professionnels, comme j’en avais eu initialement l’intention. J’ai siégé à des conseils de la santé, conseils de développement économique, conseils communautaires – c’était une époque où j’étais constamment occupée. Mon expérience de l’enseignement, ma force dans l’utilisation de la langue anglaise, ma personnalité sociable, mon don de la parole, m’ont amenée à préparer des ateliers et des trousses de formation et d’animation.

En revenant dans le monde du travail - au départ, je travaillais pour des organismes s’occupant des personnes handicapées - j’ai réalisé que, contrairement à mes quatre années noires de rétablissement, nombre de personnes handicapées se débattent interminablement et, dans certains cas, perdent le potentiel de toute une vie en raison d’un manque de produits et services de soutien pour handicapés dont elles ont besoin pour devenir pleinement des citoyens participants. Vous voyez que, même maintenant, après toutes ces années et après avoir connu autant de succès, je me repose sur trois produits importants de soutien pour personnes handicapées, ma canne, ma marchette et mon fauteuil roulant, dans lequel je retombe tout simplement, à la fin de mes très longues journées.

Mais revenons quelques instants à mon incursion dans le monde du travail en tant que personne handicapée – que m’auriez-vous offert, en voyant cette femme dans un fauteuil roulant – auriez-vous vu un actif, une occasion ou auriez-vous plutôt vu mes limites en raison de celle que vous avez vue et de l'état dans lequel elle était?

Vous seriez-vous interrogés sur mes aptitudes et capacités, en voyant mes handicaps? M’auriez-vous dirigée vers le programme destiné à « ceux là » ou auriez-vous vu en moi une personne qui pouvait faire sa part et devenir un membre essentiel de la fonction publique?

Bref, ou suis-je allée? Mes compétences et aptitudes ont été canalisées par un travail de consultant indépendant, de mon fauteuil roulant et malgré ma mobilité limitée. De là, je suis devenue échevin à St. John’s. Bien sûr, je reconnais que c’était décidément un tournant étrange dans ma vie, car je dois avouer que j’étais totalement apolitique avant d’être handicapée. Mais ce sont les paroles d’une autre personne de la collectivité, qui m’a dit que je ferais un bon modèle de rôle pour les jeunes souffrant d’une invalidité, pour leur faire voir que rien n’était hors de portée de leurs rêves et cela m’a amenée à essayer, et à ma grande surprise, j’ai été élue.

Ce fut pour moi une époque d’étonnement, de surprise, car j’ai rapidement appris les rouages internes d’un sanctuaire politique et je soupçonne que, collectivement, nous pourrions nous échanger des histoires. Toutefois, à mesure que j’apprenais, ceux qui étaient autour de moi apprenaient aussi, tant à l’échelon politique qu’à celui des fonctionnaires. Dans le mandat suivant, je me suis portée candidate sans opposition au poste de pro-maire. À l’époque où j’ai fait de la politique municipale, j’ai eu de nombreuses possibilités d’influer sur l’environnement physique et les politiques publiques concernant l’invalidité. J’étais l’illustration vivante, et même « roulante », de ce qu’il était possible de faire.

En 2001, j’ai quitté la politique, car le seul poste qui me restait était celui de maire et puisque mes deux enfants étaient à la maternelle et en première année, j’ai choisi de leur offrir une plus grande disponibilité pour leurs premières années, au lieu de consacrer mon temps à d'interminables soirées, inaugurations, événements, déjeuners, etc., vous savez comment cela fonctionne!

Je suis revenue encore une fois à la profession de consultant et, il y a deux ans, je me suis aussi jointe à GGI en tant que gestionnaire conseil, en travaillant à partir de St. John’s.

Alors, pourquoi ont-ils recruté cette femme handicapée, qui avait besoin d’un bureau sans obstacle, qui parfois devait travailler de chez elle, qui n’entre pas au bureau si c’est trop glissant ou verglacé. Je puis vous garantir que ce n’est pas par charité ou en vertu d'une politique voulant qu’ils doivent le faire. Personne, dans mon univers, ne dit « Marie White » et « cette pauvre femme handicapée » dans la même phrase. On dira plus probablement de moi que j’ai des compétences étonnantes, de vastes connaissances, que je suis bien connue et respectée dans l’ensemble de la collectivité, dans le milieu gouvernemental et dans le secteur privé.

On vous parlerait de la femme handicapée qui voyage beaucoup, pour le travail et pour le plaisir. Cette femme qui vient d’avoir 50 ans l’an dernier et qui est allée en Roumanie pour fêter, oui, tout simplement pour fêter. Et ici encore, une histoire s'est répandue. Puisque j’étais une anomalie dans ce pays, une personne handicapée utilisant une marchette, comme je le fais quand je voyage. J’adore marcher, et j’ai été une grande enthousiasme des sports avant mon handicap et je marche deux milles par jour et je voyage – donc au total, cela fait peut-être cinq ou six milles par jour.

Bucarest était une ville qui se sortait tant bien que mal d’années d’oppression et je suppose que les personnes handicapées sont enfermées chez elles ou en institutions. Puisque j’ai failli être mise en institution, je puis vous garantir que j’estime que ce n’est pas comparable au foyer de qui que ce soit. Est-ce que vivre dans une chambre, partager une chambre, pendant toute votre vie, pouvez-vous dire que cela est votre chez-vous? Ne supposez pas que c’est correct dans le cas de personnes handicapées car, en fait, ce ne l’est pas.

Pourquoi vous ai-je raconté mon histoire? Peut-être pour vous dresser un tableau des réalités qui existaient et de celles qui perdurent encore.

Nombre de personnes handicapées sont encore reléguées dans un « ailleurs » de la société, un ailleurs qui a des incidences sur leur progrès, leurs perspectives, leur scolarité et ainsi, sur leur emploi. Certains d’entre nous doivent encore faire face à des rôles tout tracés – pour les personnes handicapées, même aujourd’hui, on parle encore trop souvent des « programmes pour vous ». Certains d’entre nous luttent encore contre les idées désuètes, par exemple savoir où est la place d’une personne, mais la vérité est que chacun a sa place quelque part.

Les personnes handicapées sont ce que j’aime appeler la « population en attente » – qui attend d’être vue comme un élément intégral du tissu de notre pays.

Nombre de personnes handicapées ont bénéficié des améliorations intervenues dans l’ensemble des systèmes, notamment l’institution de programmes provinciaux de lutte contre la pauvreté, certaines mesures fiscales, une attention accrue aux mesures physiques d’accessibilité, la création de la Commission sur la santé mentale et du Régime enregistré d’épargne-invalidité, sans oublier les améliorations concernant l’accès au PPIRPC, et l’orientation accrue vers des handicaps plus nombreux et plus variés, mais il reste encore beaucoup à faire.

Il ne fait pas de doute que les changements progressifs que nous avons constatés depuis 40 ans sont intervenus parce que les personnes handicapées se sont exprimées et ont exigé des améliorations. La collectivité des personnes handicapées a été le catalyseur du changement.

Avec la mise en œuvre de la Convention relative aux droits des personnes handicapées (CDDPH), nous croyons que nous entrons dans une nouvelle époque où la priorité, l’attention et les interventions seront axées sur la promotion, la protection et la garantie d’une jouissance pleine et égale de la totalité des droits humains et des libertés fondamentales pour toutes les personnes handicapées et la promotion du respect à l’égard de leur dignité inhérente. La CDDPH est ce que nous attendons de neuf.

Nous savons que les choses ne peuvent changer du tout au tout. La CDDPH porte sur la concrétisation progressive et nous sommes tous bien conscients que nos droits ne seront pas pris en considération tous en même temps. Mais il est également vrai que nous croyons que nous devons progresser en ce sens plus vite que nous ne l’avons fait au cours des 50 dernières années, car le gradualisme implacable ne suffira tout simplement plus.

La CDDPH veille à une orientation sur l’invalidité au-delà des services traditionnels et, de la sorte, tous doivent voir dans l’optique de l’invalidité. Au-delà de l’orientation interministérielle, soyons clairs : l’invalidité est absolument non partisane. Elle transcende les lignes de ce que nous définissons comme la politique, les plateformes qui distinguent chaque partie l’un de l’autre. Il y va de notre responsabilité collective de faire que la citoyenneté sociale, économique, culturelle et politique soit accessible et inclusive pour tous les citoyens de notre pays.

Vous avez un rôle de leadership à jouer, sans égard à votre titre, à votre travail, sans égard à votre orientation politique ou à vos ambitions : vous pouvez apporter une contribution importante en faisant en sorte que notre pays soit inclusif et accessible.

En terminant, j’aimerais simplement vous rappeler le fait que toutes les personnes de ce pays qui sont nées avec un handicap, celles qui vivent actuellement avec un handicap et celles que l’invalidité frappera à l’avenir, ne deviendront pas nécessairement une meneuse ou un meneur bien connu, fougueux, s’exprimant bien et maintenant vieillissant mais, par le Ciel, chacune de ces personnes mérite d’avoir la possibilité de participer et d’arriver à ce qu’elle peut être de mieux.

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Accommodement


Les accommodements - Toute une différence pour moi

Tracy Odell

Quelle est la différence entre la personne capable de travailler toute sa vie de manière productive et la personne qui doit vivre sous le seuil de la pauvreté avec des mesures de soutien?  Très souvent, ce sont les mesures d’adaptation qui peuvent soutenir et encourager le désir et la capacité de travailler.

En 1981, lorsque j’ai obtenu mon diplôme de professeure d’anglais et d’éducation spécialisée, de l’université York, le marché des enseignants était saturé.  Au lieu de travailler dans une classe, comme je l’avais imaginé, j’ai accepté le poste que l’on m’offrait au Collège Frontière.  La philosophie d’enseignant-ouvrier appliquée au College s’inscrit parfaitement dans ce cadre particulier où les employés s’entraident les uns les autres.  Le vice-président du College a fait construire la rampe qui me permet d’entrer dans l’édifice; d’autres employés m’ont fourni les services d’auxiliaire dont j’avais besoin à cause de ma déficience physique.

Cet environnement m’a permis de m’épanouir – d’abord comme coordonnatrice du programme d’alphabétisation, puis comme formatrice nationale.  Quel bonheur que d’aller, d’un océan à l’autre, apprendre à des organisations locales à établir des programmes inclusifs d’alphabétisation.  Si je fais un petit retour sur le passé, je me demande comment tout cela a pu être réalisé.

En 1987, j’ai accepté un poste au gouvernement de l’Ontario qui, à l’époque, était en train d’instaurer des programmes d’alphabétisation.  Étant donné  mon travail et ma réputation au Collège Frontière, j’avais été invitée à poser ma candidature puisque les programmes gouvernementaux allaient désormais devenir inclusifs.  À cette époque-là, il n’y avait pas de services d’auxiliaires en milieu de travail.  Pour pouvoir assurer cet accommodement, mon chef aurait dû prélever, dans son budget, des fonds destinés à des programmes d’alphabétisation communautaires en grand besoin de financement et dont le succès était notre raison d’être.  À la place, j’ai bénéficié d’un horaire de travail souple, me permettant de terminer mon travail à la maison où j’avais accès à un auxiliaire.

Quelques années plus tard, le gouvernement provincial a établi le Fonds d’adaptation des emplois de la fonction publique de l’Ontario pour les personnes handicapées.  Et à partir de ce moment-là, mes besoins d’accommodements n’ont plus été en concurrence avec les activités fondamentales de l’organisation.  J’étais enfin en mesure de fonctionner comme une collègue contribuant sur le même pied d’égalité (puisque je pouvais rester au bureau toute la journée) et capable d’exécuter ses tâches en toute autonomie (puisque je n’avais plus à dépendre de la gentillesse de mes collègues pour m’aider).

Sans accommodements – officiels ou non – je n’aurais jamais été en mesure de travailler.  J’aurais été une assistée sociale, vivant en deçà du seuil de pauvreté.  Les mesures d’adaptation sont fondamentales pour les personnes handicapées voulant travailler et capables de le faire.  Lorsque leur financement est centralisé, elles ajoutent un autre degré de dignité au processus; tenant compte de cette disponibilité, les chefs d’entreprise n’hésiteront plus à embaucher des personnes handicapées ayant besoin de mesures d’adaptation.

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Des feuilles de mûrier aux Nations Unies

Vangelis Nikias

L’incidence du chômage chez les personnes handicapées, y compris chez celles qui comme nous vivent dans des économies relativement avancées, demeure élevée.  De ce fait, la question d’emploi n’est pas uniquement une préoccupation personnelle, elle est d’un urgent intérêt public, tout au moins à mon avis.  Dans les prochains paragraphes, j’essaierai de revivre mon expérience d’emploi qui s’étale sur plus de trente ans et qui touche ces deux facettes.

En plus d’être une source de rémunération monétaire avec tout ce que cela comporte, notre type de travail a pratiquement défini les autres importantes possibilités et expériences de la vie.  La déficience a traditionnellement accru la chance de non participation et de marginalisation ou carrément d’exclusion.  Je ne fais pas exception à la règle.

Pourtant, lorsque je repense à mon expérience de travail, et dès que j’ai surmonté les inévitables « et si…. » qui auraient pu se solder par différents, voire meilleurs, résultats, je ne suis pas mécontentù.  Actuellement employé du Conseil des Canadiens avec déficiences, chargé de conscientiser la population à la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées (CDPH), j’ai un travail enrichissant.

Mon travail a dépassé ma réalité; mais les deux sont, comme pour la majorité des gens, inextricables.  Enfant, issu d’une famille pauvre, je participais par mes travaux, à la survie économique de la famille.  Je me souviens notamment de deux activités : grimper à nos mûriers et en couper les feuilles pour nos animaux, des chèvres et un âne qui avaient un rôle important dans notre existence.  Pendant pratiquement toute mon enfance, nous n’avons pas eu l’eau courante.  Avec ma mère, nous parcourions de longues distances sur des terrains accidentés et difficiles pour aller à une source commune remplir de lourds récipients d’étain et les charger sur notre âne.  Aux fins d’efficacité, nous en remplissions aussi de plus petites que nous transportions sur notre dos jusqu’à la maison.  Remplir ces vases, les charger et les décharger étaient physiquement très exigeant.  Si ma cécité m’a amené à faire les choses différemment, elle ne m’a cependant pas dégagé des tâches à accomplir.

Ces expériences ont, je crois, forgé mon comportement pour ma quête ultérieure d’emploi.  J’ai eu également la chance d’interagir avec d’autres aveugles et personnes handicapées qui, comme moi, tentaient de s’attaquer aux difficultés de la recherche d’emploi.  Et c’était très important car cela m’a permis de comprendre le rôle des obstacles sociétaux et de placer en perspective les problèmes auxquels j’allais être confronté.

Plus tard, en travaillant comme chercheur, comme arbitre ou comme chef de service et analyste de politique publique, outre mon éducation, ma compréhension du travail comme activité toujours ancrée de manière visible ou non dans des contextes socio-économiques,- y compris d’intérêts-, m’a grandement aidé.  Autrement dit, j’ai toujours gardé en tête, ou essayé de garder en tête, le fait que le travail n’est pas une activité individuelle mais plutôt une activité sociale.  Et c’est dans une telle perspective que le mot accommodement prend tout son sens.  En tant que personne aveugle, mon obstacle le plus concret, et il n’est pas seul, a été l’inaccessibilité des informations.  En fait, même dans le contexte de solides cadres législatifs, les chefs de service ont tendance, pour diverses raisons, à traiter cette inaccessibilité comme « une normalité ».  J’ai essayé de parer à cet état de fait en transposant « le problème » d’un cadre individuel à un cadre social.  Ainsi, l’engagement associatif et l’entraide ont été, selon mon expérience tout au moins, irremplaçables.  De plus, cette compréhension est devenue un atout dans toutes mes tentatives, y compris celles liées à l’emploi.

J’aimerais, en terminant, souligner combien l’adaptation aux dynamiques et aux environnements évolutifs est une véritable stratégie de succès.  Et quand j’y pense, je suis frappé par l’importance de s’ajuster aux éléments novateurs et de les comprendre.  Pour moi, l’harmonisation à un milieu en constante évolution est une évidence.  Ainsi, mon adaptation culturelle et linguistique s’est révélée extrêmement bénéfique.  Je n’aurais pas réussi si je ne m’étais pas adapté aux nouveautés.

Finalement, en revenant une fois encore à la dimension sociale du travail, j’aimerais attirer l’attention sur le fait que le travail rémunérateur n’est pas uniquement une préoccupation individuelle.   Sans d’adéquats soutiens stratégiques, il ne pourra être fructueusement  vécu par tous, y compris par les personnes avec des déficiences.  Et à cette fin,  une initiative sociale concrétisée, non exclusivement mais inévitablement, par une action gouvernementale, s’impose.

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Apte au travail :  les tribulations  d’une employée

Rhonda Wiebe

Déceler nos capacités et prendre les moyens pour y arriver…voilà la clé du bonheur.
~ John Dewey

« Vous le serez pour le restant de votre vie ».  C’était en 1974.  J’avais treize (13) ans et je venais d’être diagnostiquée de diabétique, type I.  À cela se greffait une éventuelle et ultérieure cécité, une insuffisance rénale, une crise cardiaque, un accident vasculo-cérébral et de multiples maladies terminales.  Puis, à 23 ans, j’ai été atteinte de polyarthrite rhumatoïde.  Personne ne m’a alors expliqué comment je pourrais travailler avec des maladies chroniques.  Les professionnels qui se sont occupés de mon cas à cette époque n’ont peut-être jamais pensé que ces deux facteurs pourraient aller de pair ni même que vivre avec un état de santé handicapant pouvait solidement créer des voies de participation et de contribution citoyennes.

Après de multiples complications de santé, des séjours à l’hôpital et seize (16) opérations, mon cheminement professionnel est une véritable mosaïque – depuis serveuse de nuit dans un relais routier, jusqu’à professeur de piano en passant par fournisseur de services à l’enfance, accompagnatrice, répétitrice de théâtre, rédactrice de discours, chercheure en matière d’éthique pour les personnes handicapées, directrice de chorale, nettoyeuse de maisons, analyste de politiques, intervenante communautaire et éducatrice d’adultes.  À l’heure actuelle, je coordonne, pour le Bureau des personnes handicapées du Manitoba, la mise en vigueur intra-gouvernementale des politiques d’accessibilité.

En tant que personne ayant des déficiences invisibles, j’ai été confrontée à de nombreux obstacles.  J’ai fini par réaliser qu’ils étaient à la fois internes et externes, inextricablement entrelacés, chaque catégorie se répercutant lourdement sur l’autre.  Pour arriver à les surpasser, j’ai dû apprendre à accepter le fait que j’étais le vilain petit canard qui ne pourrait jamais s’intégrer dans une vie rythmée par huit heures de travail, cinq jours sur sept.  Ce n’est pas facile – je veux être cette personne différente mais une fois ce fait accepté, je dois aller encore plus loin et convaincre mes employeurs qu’un mode de travail différent peut se solder par d’extraordinaires résultats.  Cela signifie rassembler son courage, son vocabulaire et son estime personnelle et affirmer que mes besoins d’accommodement ne se résument  pas à un investissement ponctuel, comme la construction d’une rampe ou la création d’un espace de stationnement accessible (je ne peux conduire de toute façons puisque ma déficience visuelle s’est manifestée très tôt.)

Donc, de quoi ai-je besoin de mon employeur?  La clé d’une bonne relation de travail, c’est la souplesse.  Dans ma ligne d’occupation, (la recherche), le concept de résultats attendus est judicieux.  Je ne suis peut-être pas tous les jours au bureau, mais mon travail est fait et bien fait.  Et l’employeur qui en douterait n’aurait qu’à me payer lors de la livraison du produit final.

Le problème du travail à contrat et du concept de résultats attendus, c’est qu’il n’y a ni sécurité à long terme ni avantages sociaux.  Lorsqu’un employeur ne connaît pas la qualité de mon travail, nous pouvons tout d’abord commencer par fixer les résultats attendus.  Puis, dès que j’ai prouvé mes compétences, nous pouvons nous lancer dans une relation de travail normale.  Mais il faut aussi beaucoup de souplesse - J’étais gâtée avec l’université du Manitoba où, en tant que chercheure au département des sciences de la santé communautaire, j’ai pu travailler à partir de chez moi et me rapportant à mes clients à plusieurs reprises.  Je n’ai pas autant de flexibilité dans mon poste actuel à la fonction publique; en revanche, je bénéficie d’un peu plus de souplesse quant au partage d’emploi.

La partie la plus importante de la flexibilité, c’est que mes employeurs comprennent que je fais face à des problèmes personnels.  Il m’est parfois terriblement difficile d’aller travailler.  Je dois faire d’énormes efforts pour aller dehors, uniquement aller dehors.  Mes articulations sont douloureuses, ma vision est trouble, la fatigue me terrasse à nouveau et il me parait totalement illogique de ne pas rester à la maison.  La douleur, l’épuisement et même un taux élevé de glycémie m’épuisent.  Mais j’adore mon travail et je veux aller travailler et donner mon maximum.  Je ne peux permettre que ma capacité soit remise en question et que ces doutes interfèrent avec ma performance.  En reconnaissant les efforts que je dois faire pour me mettre en train et en célébrant les ambitions et réalisations de notre équipe, mon superviseur et mes collègues pavent la voie de ma réussite professionnelle.

Certes, j’ai été confrontée à des comportements stéréotypés qui m’ont forcée à travailler deux fois plus que les autres; ces idées préconçues de à ma valeur en tant que « personne handicapée » doivent être anéanties.  Mais je ne peux succomber à la pitié ni m’arroger un point de droit à cause de ma déficience.  On ne me doit rien si je ne travaille pas; je dois tout simplement fonctionner de manière différente – et configurer mon horaire et espace de travail pour maximiser mon efficacité et mon efficience.  La clé de ma réussite?  Ma capacité d’expliquer clairement mes besoins pour exercer pleinement mes capacités et la volonté de mon employeur d’embarquer dans d’autres méthodes de collaboration. 

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Un bon entendement judiciaire pour une nouvelle avocate malentendante à Toronto

Leah Simeone

J’ai vingt-huit ans, j’ai une perte auditive bilatérale moyenne et je suis atteinte d’une grave neuropathie auditive.  Ma déficience ne se corrige pas facilement avec des appareils acoustiques ou autres prothèses.  Les signaux sonores se brouillent lorsqu’ils atteignent mon cerveau, réduisant radicalement ma compréhension du langage.  De plus, de fortes tensions physiques et psychologiques exacerbent ma perte auditive.  Il m’arrive, lorsque je suis malade, de perdre totalement l’ouïe.  Je me fie énormément sur la lecture labiale pour comprendre les discours.  Les gens doivent me faire face lorsqu’ils parlent et doivent prononcer normalement.  Il m’arrive souvent, quand je ne comprends pas, de demander aux autres de reformuler les phrases plutôt que de répéter.  Je n’utilise pas le langage par signes et je compense en m’intégrant parfaitement dans la collectivité entendante.

Je me suis concentrée sur mon éducation comme stratégie de survie.  À l’école, j’ai souvent travaillé avec des groupes revendiquant une conscientisation aux besoins des personnes handicapées et aux mesures d’adaptation.  Je suis devenue avocate en juin 2012.  Jusqu’alors, ma carrière s’était résumée à un stage rémunéré de dix mois, critère obligatoire pour être membre du Barreau ontarien.  J’ai travaillé comme avocate en formation auprès du gouvernement de l’Ontario.  Je ne m’étais pas auto identifiée lors de l’entrevue mais avant de commencer mon travail, j’avais appelé le chef de bureau pour réclamer des accommodements.  Je lui avais envoyé par courriel les coordonnées du modèle d’amplificateur téléphonique dont j’avais besoin ainsi que les deux écouteurs requis afin de pouvoir utiliser le téléphone interne.  Cet appareil m’attendait à mon arrivée.  Oh combien inestimable!

Pendant mon stage, j’ai assisté régulièrement à des audiences, ce qui présentait des problèmes particuliers. Les tribunaux se servent d’un système d’annonces sonores pour convoquer les avocats dans le  prétoire.  Or, je ne pouvais pas toujours comprendre.  De plus, ces avis sont fréquents et bruyants; ils créent un bruit de fond qui parasite les conversations personnelles dans les halls et les salles d’entrevue.  Et enfin, dans le prétoire, les juges et les greffiers sont assis à une certaine distance des avocats et de leurs clients, ce qui rend difficile la lecture labiale (surtout quand je ne porte pas mes lunettes).  Le fait de me présenter à l’avance au personnel des tribunaux et de m’auto-identifier comme personne malentendante m’a grandement aidée à m’adapter aux procédures judiciaires.  Je suis toujours restée à proximité des salles d’audience et le personnel venait me chercher si j’étais convoquée.  D’autre part, la plupart des cours ont des appareils fonctionnels pour personnes malentendantes, appareils dont la qualité varie selon les tribunaux, d’excellente à horrible. Mes expériences à ce sujet sont assez  mitigées.  Mais pour compenser, le personnel avisait les juges de ma déficience auditive et ces derniers s’assuraient souvent de me faire face lorsqu’ils parlent ou de hausser le ton de la voix, si nécessaire.  Dans l’ensemble, mon expérience auprès des tribunaux a été très positive et, franchement, une réussite pour moi.

Mais je crois sérieusement que mon parcours positif est dû, en partie, au fait que je m’intègre bien dans le monde des entendants.  Bien que légèrement accentuée, mon élocution est claire grâce surtout à l’intense entraînement à la parole que j’ai effectué dans ma jeunesse.  C’est très important dans mon métier car je parle fréquemment avec mes clients et je m’adresse oralement à des auditoires.  Malgré mes insécurités et ce que je risque de perdre dans les conversations, j’essaie de projeter assurance et assertivité afin d’amener les autres à avoir confiance en moi.  Je n’ai plus peur de m’autodéclarer personne malentendante ainsi que de réclamer des accommodements tout en étant circonspecte quant aux situations dans lesquelles je le fais.  Je sais pertinemment que ma réussite professionnelle serait différente si je parlais avec un accent « sourd » très prononcé et si ma capacité de lecture labiale était beaucoup moins développée.  Je me considère extrêmement chanceuse à cet égard.

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Si vous ne réussissez pas la première fois, essayez encore et encore et encore

Marie Laporte-Stark

Ma première revendication, je l’ai gagnée à l’école pour aveugles de Montréal, où j’ai convaincu les Sœurs Grises et mes parents de m’autoriser à apprendre la dactylographie avec doigté au lieu du piano.  À cette époque-là, dans les années 1960, les filles aveugles restaient à la maison ou dans des institutions, jouaient au piano ou à l’orgue et chantaient dans la chorale de l’église.  Moi, après l’école, j’ai voulu quitter la maison et vivre seule, aller à l’université, obtenir un diplôme, être autonome et, éventuellement, trouver un emploi.

Obtenir mon premier emploi à temps plein, en tant que professeure spécialisée en réadaptation auprès d’une organisation caritative, fut un véritable bonheur.  C’était la première entrevue de ma vie et j’ai eu le poste sur le champ.  C’était au début des années 1970, j’avais vingt ans, j’étais une étudiante éveillée rivalisant avec mes pairs, à une époque où l’enseignement postsecondaire était peu fréquenté par les filles aveugles.  Un véritable atout pour une organisation.

Je me suis mariée, je suis allée vivre au Nouveau Brunswick où j’ai élevé mes deux enfants.  Puis j’ai déménagé à Ottawa pour suivre mon mari qui allait y faire carrière.  J’ai ensuite travaillé à temps partiel sur de petits projets gouvernementaux et j’ai terminé mes études universitaires avec un diplôme en psychologie.

Mais tout a changé quand j’ai décidé de chercher un emploi à temps plein.  Mes enfants étant à l’école, je devenais alors une mère handicapée de trente-cinq ans. Frustrations et déceptions, larmes et des sentiments négatifs…sont devenus mon lot quotidien.  J’ai envoyé des douzaines de lettres avec mon CV à des organisations et je me suis inscrite à plusieurs  des concours spécifiques.  Rien!  D’entrevue en entrevue, j’ai été confrontée aux stéréotypes et aux attitudes négatives manifestés par des membres de conseils à l’égard des personnes handicapées; j’ai constaté leur ignorance des capacités des candidats aveugles, surtout lorsqu’on m’a demandé si je pouvais composer un numéro de téléphone ou me repérer dans le bureau; et j’ai ressenti leur crainte de travailler avec une aveugle qui ne serait peut-être pas capable d’assurer sa part du travail.  Puisque les ordinateurs n’étaient pas disponibles à l’époque, je n’ai eu que peu d’accommodements pendant ces concours, devant passer les tests oralement.  On m’a dit, à maintes et maintes reprises que j’étais qualifiée mais que j’étais la deuxième meilleure candidate et que mon nom allait être ajouté à la liste d’attente, pour considération future. Je n’ai jamais plus entendu parler de ces employeurs et je me suis demande si j’étais tombée dans l’oubli de ce sombre creuset de candidats éventuels.

Puis, finalement, un emploi m’a été offert : secrétaire d’une organisation caritative; je n’avais aucune formation en ce sens mais les conseillers professionnels m’ont suggéré de l’accepter afin de « mettre le pied dans la porte ». Plus tard, j’ai dû prendre un autre poste de secrétariat pour entrer dans la Fonction publique fédérale.  C’était la fin des années 1980, je travaillais avec des montagnes de papier, ne bénéficiant que des technologies d’adaptation basiques, comme le VersaBraille.  J’ai demandé un lecteur pour m’aider avec la paperasse.  Ma requête fut finalement approuvée, mais entre temps, un vice-président m’avait affirmé « nous ne voulons pas donner l’impression d’avoir à engager deux personnes quand nous embauchons une personne handicapée. »  J’ai estimé à l’époque, et je le pense toujours, que je m’étais fourvoyée en acceptant ces postes de secrétariat, que je n’avais pas su me vendre parce qu’après avoir mis le pied dans la porte, il m’a fallu longtemps pour grimper l’échelle.

Quand je suis enfin devenue permanente, j’ai dû travailler pendant plusieurs années dans des postes intérimaires ou des affectations de perfectionnement, assumant des responsabilités de niveau nettement supérieur à celui de ma propre description de tâches.

La persévérance et la détermination ont fini par porter fruits.  J’ai bien gagné ma vie pendant mes années de service à l’Équité en emploi (EE), un secteur lourd de frustrations et de déceptions mais riche en réussites et améliorations en ce qui a trait à l’inclusion et l’accessibilité.  J’ai bénéficié d’accommodements, comme des congés payés pendant la formation de mon chien-guide, des synthétiseurs de parole, de souples modalités de travail, comme le télétravail.  Mais d’autre part, de constantes luttes frustrantes et une revendication conséquente, dues à l’inaccessibilité des communications électroniques et à l’impossibilité d’utiliser certaines cyber-fonctionnalités, ont aussi émaillé ma carrière.

Je viens tout juste de prendre ma retraite comme Principale Conseillère en EE.  Je suis fière de mes vingt-cinq (25) années de services auprès du gouvernement fédéral. J’espère que mes petites réalisations ont pavé la voie de l’emploi pour les personnes handicapées qui se lanceront prochainement dans la force active.

Mon conseil : Vous éprouverez des sentiments de rejet et du découragement pendant votre recherche d’emploi ainsi que dans le milieu de travail.  Mais n’hésitez pas à vous acharner contre les obstacles qui entraveront votre cheminement.  Utilisez vos réseaux; ce sont vos relations qui font souvent la différence.  Intervenez et revendiquez en votre propre nom.  Soyez réaliste, ne vous sous-estimez pas.  Le jeu en vaut la chandelle.

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Collaboration au travail

Shelley Ann Morris

Je travaille dans le secteur sans but lucratif depuis les vingt dernières années, principalement dans le domaine de l’emploi où j’aide les chercheurs d’emploi confrontés à des obstacles à se préparer pour trouver un travail et le conserver.  Dans mon poste actuel auprès de Volunteer Ottawa (V.O.), j’aide les organisations membres à recruter des bénévoles.  Je gère aussi un groupe de conférenciers bénévoles qui représentent V.O. dans la communauté.  De temps en temps, j’anime des ateliers pour les personnes cherchant des occasions de bénévolat.

Je suis née avec une vision limitée.  Les technologies d’adaptation, l’éducation et un très fort système de soutien m’ont aidée à surmonter les obstacles érigés par la déficience visuelle.  Même si elle est très limitée, ma faible capacité de vision a quand même restreint les entraves dans le milieu du travail.

À l’adolescence, je me suis sentie exclue car la plupart de mes pairs travaillaient déjà, moi non.  À l’école secondaire, une sage orienteuse me conseilla judicieusement d’opter pour le bénévolat.  Son sage conseil m’a aidée à acquérir des compétences, de l’expérience, des références et, surtout, à développer la confiance dont j’avais besoin pour arriver à me faire une place dans le monde du travail.

Outre la recherche, la participation à de nombreuses « entrevues d’information », l’adhésion  des programmes de quête d’emploi et le réseautage, le bénévolat m’a aidée tout au long de ma carrière.  Maintenir une attitude positive et proactive pendant la recherche d’emploi est cruciale bien que difficile parfois.

À l’école et au travail, j’étais assaillie de problèmes qui semblaient totalement distincts de ma déficience visuelle.  En 2006, après avoir accumulé assez de courage (et d’argent), j’ai passé quelques tests qui ont confirmé ce que je pensais déjà :  j’étais atteinte de trouble d’hyperactivité avec déficit d’attention (THADA).  Ce diagnostic me donna l’impression d’être soulagée d’un grand poids.  Je pouvais commencer à guérir et à m’adapter.

Grâce à des conseils d’experts, à l’aide d’amis également atteints de THADA, à d’intenses lectures et beaucoup d’informations ainsi qu’à un style de vie très sain, j’ai pu structurer mon lieu de travail pour accommoder mes besoins personnels et réussir à contourner les duo déficiences qui cherchaient à dominer, au travail comme ailleurs.  Le codage en couleurs, les documents imprimés en gros caractères, les listes de vérification, les plans de travail et les signaux électroniques m’ont permis de rester sur la bonne voie et de me concentrer sur mon travail.

Ce n’est pas ce qui m’aide au travail mais qui m’aide.  Si la déficience visuelle est pénible, la déficience invisible est encore plus envahissante et difficile à gérer.  Les accommodements exigent une démarche de collaboration entre l’employeur et l’employé.  Nous négocions constamment l’équilibre entre le besoin de productivité de l’employeur et le besoin d’accommodements de l’employé.  Dans le milieu du travail, nous avons tous et toutes besoin d’accommodements, sous une forme ou une autre.  Mais la clé du succès, tel que je le vis à Volunteer Ottawa, c’est d’avoir un très bon chef et de très bons collègues.  Mes collègues adorent mon ordinateur vocal et ils acceptent que j’utilise mon enregistreur numérique lors des réunions.  Mon chef m’aide bien, notamment à coordonner des tâches concurrentes, à fixer des priorités, établir des échéanciers et à atteindre des objectifs.  Mes compagnons de travail font preuve de patience quand je pose plus de questions que les autres, cherchant à clarifier une affectation.  Nous nous sommes si bien adaptés que nous oublions parfois que j’ai une déficience.

Aujourd’hui, le milieu de travail nous demande d’être plus flexibles et plus mobiles.  Les changements de carrière et d’emploi deviennent la norme.  Si mon logiciel Zoom Text peut être facilement enlevé d’un ordinateur et réinstallé sur un autre, le plus grand défi est de sensibiliser ma plus importante ressource – les gens.  Tous les nouveaux soubresauts du travail peuvent être aggravés lorsque la déficience entre en jeu.  Souvent, les personnes handicapées sont assaillies de questions :  Est-ce qu’ils m’aimeront?  Me comprendront-ils?  Comprendront-ils pourquoi je fais les choses un peu différemment?  Voudront-ils me fournir les accommodements dont j’ai besoin?  Iront-ils  au-delà de la déficience, comme je le fais?

Si des progrès ont été réalisés, le nombre de personnes handicapées ayant réussi à trouver un emploi et à le maintenir est terriblement faible.  Continuons à espérer car l’éducation poursuit son éradication de la discrimination.

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Ma carrière :  une formidable odyssée!

Paula Keirstead

Pendant les vingt premières années de ma carrière, j’ai choisi de revendiquer les droits des personnes handicapées.  J’ai été  employée par des organisations créées par et dirigées par des personnes ayant des déficiences.  Le plus ironique, c’est que ma cécité innée a été considérée comme un atout. La majorité de mes postes et de mes activités ont porté sur la revendication systémique des droits des personnes handicapées.  La crédibilité de notre message a été décuplée par le fait que le personnel avait vécu les difficultés que nous avons contestées.  J’ai eu le privilège d’exécuter ce type d’action aux niveaux local, provincial, national et international.

Lorsque j’ai décidé de créer ma propre affaire, Paula M. Keirstead Consulting, j’avais déjà acquis une solide réputation en intervention, animation, entrevue, développement de stratégies politiques et sensibilisation publique.  J’ai donc pu, sans crainte, prendre des contrats non liés au handicap mais exigeant mes compétences affinées.  Je peux sincèrement affirmer que ma déficience visuelle n’a même pas pesé dans la balance lorsque mes services ont été sollicités, sauf peut-être pour les accommodements requis en cas de déplacements.

Je travaille depuis plus d’un an pour la Société d’aide juridique du Manitoba, exerçant des fonctions parajuridiques en droit administratif.  Je fournis des services d’intervention personnalisée, principalement dans le domaine de l’emploi et de l’aide au revenu (bien-être social).  Lorsque j’ai décidé de faire ce changement de carrière, la Société d’aide juridique avait tout intérêt à avoir des employés prêts à auto-déclarer leur déficience.  En effet, selon les statistiques du gouvernement du Manitoba, son pourcentage d’employés handicapés était lamentablement bas.  Par conséquent, le moment était on ne peut plus approprié.  Quelle belle occasion que d’avoir une future employée, handicapée, avec un solide coffre de compétences et d’expertise en lois anti-pauvreté et en revendication.

Le plus grand obstacle auquel j’ai été confronté tout au long de ma carrière a certainement été le malaise des gens devant mon strabisme et leur incertitude quant à l’ampleur de ma vision.  Pour contrecarrer ce mal-être, ils faisaient preuve d’une sollicitude accrue en essayant de m’aider à traverser; ou encore ils regardaient par-dessus leur épaule, se demandant qui j’observais pendant nos conversations.  Pour éradiquer ce problème, j’ai commencé  par me présenter en déclarant avec humour que j’avais une déficience visuelle, expliquant la cause de mon strabisme et mon incapacité à percevoir le relief; j’ai ajouté que j’avais besoin d’une intense luminosité pour manœuvrer de manière autonome et que je demanderais de l’aide, si nécessaire.  C’est exactement ainsi que je me suis présentée à mes employeurs, aux instructeurs, à mes collègues, mes clients et à quiconque devait être mis au courant ou était vraiment mal à l’aise avec cette situation.  Cela apaisait les tensions et permettait aux gens de s’adapter rapidement.

Dans tous mes milieux de travail, je n’ai eu besoin que de très basiques accommodements, facilement réalisables.  Les documents devaient être imprimés avec une police de caractères Arial 14; j’avais besoin d’un très bon éclairage; je devais pouvoir rapprocher mon ordinateur et le clavier du bord du bureau, aux fins d’optimisation, et je devais disposer d’un budget de frais de déplacement pour assister à des réunions organisées dans le cadre de mon travail et/ou voyager hors de la ville.  Je ne vois pas assez bien pour conduire.  Je déclarais à mes employeurs qu’ils pouvaient soit me rémunérer pour le temps passé en autobus le cas échéant, soit défrayer mes déplacements et me permettre ainsi d’être plus efficace.  Je dois avouer que tout au long de ma carrière, l’aide à mes déplacements particuliers a rarement été refusée.

Je n’ai jamais eu le sentiment d’avoir été privée d’une formation ou d’une promotion à cause de ma déficience.  Bien au contraire.  Dans l’ensemble, mes divers employeurs ont valorisé et appuyé mes compétences et mes capacités.  Je suis privilégiée de pouvoir l’affirmer et j’ai grandement apprécié les possibilités qui m’ont été offertes de m’épanouir en tant que spécialiste et de faire un travail que j’adore.

Je suis fermement convaincue que les clés de ma réussite sont doubles.  Ma volonté de présenter des informations sur ma déficience et de supprimer ainsi toute gêne, tout en conscientisant mes interlocuteurs aux limitations fonctionnelles, a certainement été un facteur clé dans ma carrière, non seulement pour obtenir des emplois mais encore pour les conserver.  L’autre clé, tout aussi importante, a été l’ouverture d’esprit manifestée par de nombreuses personnes en acceptant ma déficience et en m’évaluant selon mes mérites.

Je suis convaincue que c’est grâce au travail accompli depuis plus de quarante (40) par le mouvement de défense des droits des personnes handicapées afin de modifier les perceptions et comportements et d’amener la société à accepter les personnes avec des déficiences comme des travailleurs participants, ayant les mêmes droits et responsabilités que les autres citoyens, c’est grâce donc à ces avancées que mes expériences d’emploi ont été si positives.

Quelle formidable odyssée!

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Trouver sa voix

Susan Forster

Comme de nombreux Canadiens handicapés, je suis actuellement en recherche d’emploi.  Pourtant, quand je réfléchis à ma carrière, je me souviens du moment crucial où j’ai réalisé que porter ma propre voix était le sésame du succès quant aux accommodements dans l’emploi.

Il y a quelques années, le gouvernement ontarien m’avait proposé un poste à contrat de courte durée.  Lors de l’entrevue, je me suis auto identifiée comme personne aveugle au sens de la loi.  Lorsque la discussion a porté sur les mesures d’adaptation, les responsables m’ont parlé d’une ancienne employée, également malvoyante, qui occupait à présent un poste dans un autre ministère.  Les aides techniques qu’elle utilisait pourraient me servir, ont-ils ajouté.  Une réunion a alors été fixée avec l’employée.  Je me suis vite aperçue qu’elle avait moins de vision que moi avec ses deux yeux.  Quant à moi, j’ai une vision utilisable avec l’un de mes yeux.  J’ai alors conclu que le large écran d’ordinateur qu’elle utilisait ne me conviendrait pas.  Dans mon rapport, j’ai déclaré que je j’aurais pas besoin de cette aide technique.  Et c’est alors que je fus allègrement avisée que l’appareil avait déjà été commandé, que j’allais l’adorer et que je pouvais en être sûre.  J’ai accepté de l’essayer.  Au début, tout allait bien.  Puis, j’ai commencé à ressentir des douleurs au haut du dos, dans le cou et à l’épaule, douleurs très intenses en fin de journée.  Elles étaient dues à la tension manifestée en position assise pour visionner ce large écran.  J’ai donc pris de longues pauses en me levant régulièrement et mes douleurs ont diminué.

Lorsque les douleurs ont commencé, en ai-je fait part à mon employeur? Malheureusement, non!  À l’époque, j’étais l’une des rares employées handicapées de ce ministère et j’étais nettement consciente de la précarité de mon statut de contractuelle.  Mais ce que j’ai appris de première main, c’est que les besoins d’accommodement diffèrent selon les personnes, même si ces personnes ont la même déficience.

J’ai ensuite été engagée par le gouvernement pour un contrat de longue durée, comme stagiaire aux ressources humaines d’un petit ministère.  Cette fois, je décidais d’être proactive.  Lorsque j’ai discuté de mesures d’adaptation avec Diane, ma chef de service, j’ai immédiatement demandé à participer efficacement au processus d’accommodement et à travailler en partenariat avec le spécialiste des T.I.  Elle a été tout d’abord préoccupée, voulant surtout s’assurer que je choisirai un dispositif compatible avec la technologie utilisée dans le bureau.  Je l’ai tranquillisée en lui disant que j’avais appris, au fil des ans, à sélectionner les dispositifs les plus appropriés et que le choix final serait le fruit d’une décision conjointe entre le spécialiste des T.I. et moi.  Elle a alors approuvé mon plan.  Cette démarche s’est révélée très efficace.  Je me suis ainsi familiarisée avec les T.I. et le spécialiste s’est sensibilisé aux aides techniques adaptées pour les personnes malvoyantes/aveugles au sens de la loi.  Ce fut une expérience positive pour tous.  Le soutien de mon employeur m’a également permis de m’intégrer plus facilement dans l’environnement de travail et de paver la réussite de mon stage.  C’est une démarche que j’utilise depuis lors, dans mes emplois au gouvernement comme dans la communauté.

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Un travail qui semble différent

Diane Driedger

Il y a quelques années, je discutais d’égalité avec une collègue et de la signification dece concept pour les personnes avec des déficiences.  Elle m’a répondu qu’en tant que personnes handicapées, nous voyons les choses différemment mais que nous pouvons tous être égaux.  Dans notre société, la différence est mal perçue.  Il n’y a pas d’égalité.  Depuis, ces mots ont résonné dans ma tête alors que je me suis concentrée sur les accommodements tout au long de ma vie professionnelle.  Différent mais égal pourrais-je ainsi résumer mon cheminement – en fait, l’égalité dans la différence perçue.

Notre société est encore pétrie de l’éthique protestante du travail, à savoir le travail acharné que l’on effectue devant les autres.  Par exemple, si vous êtes assis pendant huit heures dans votre bureau, on pensera que vous effectuez votre travail.  Mais si vous réalisez le même volume de travail à domicile ou encore allongé sur un futon dans un autre bureau, ce n’est pas du travail – cela paraît différent.

Atteinte de fibromyalgie et victime du cancer, je travaille à mon plein potentiel.  Le matin, chez moi, je me consacre à mes tâches de coordonnatrice provinciale de la Manitoba League of Persons with Disabilities.  Cela me permet de canaliser toute mon énergie et mon dynamisme à la paperasserie au lieu de perdre mon temps dans les transports.  L’après-midi, je suis au bureau de la MLPH.  Un divan est installé dans chacun de mes deux bureaux (maison et MLPH).  Je peux m’y reposer toute la journée ou encore travailler allongée.  Ces accommodements me permettent de maximiser ma capacité de travail malgré mon énergie limitée et mes intenses douleurs.

Dans le passé, je n’arrivais pas à obtenir ces accommodements.  En fait, il y a environ dix ans, un organisme sans but lucratif m’a offert un emploi à Winnipeg.  Quand j’ai demandé de travailler une partie du temps à domicile à cause de ma fatigue et de mes douleurs, on m’a répondu « oh non, vous devez être au bureau pour faire partie de l’équipe.  Maintenant, nous devons recommencer à nouveau nos entrevues.  »  Je n’ai pas obtenu l’emploi.  Est-ce que les équipes ne sont constituées que de personnes que l’on doit voir face à face?

Ces mesures d’adaptation de l’emploi ont été très efficaces.  Il m’a fallu quelques temps pour établir les meilleures pratiques de travail.  Ce n’est pas toujours facile de déterminer vos besoins quand vous venez d’être atteint d’une déficience.  Les employeurs ne sont pas formés en ce sens non plus.  D’errements en erreurs, j’ai énormément appris malgré les recrudescences de fibromyalgie et les rires suscités par le divan dans mon bureau.  Car peu importe l’apparence.  La véritable question est « est-ce que le travail a été effectué? »

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L’emploi et les personnes handicapées - Quelques réflexions

Harry Wolbert

Les personnes handicapées ne veulent pas travailler :  voilà un mythe que je tiens à dissiper en tant qu’intervenant avec une déficience.  Si, nous voulons travailler.  Nous voulons, comme les autres Canadiens, apporter une contribution marquante à nos communautés.

Tous les gouvernements provinciaux et territoriaux du Canada se sont politiquement engagés à encourager l’inclusion sociale.  Et l’emploi est l’un des « pôles » de cette inclusion dans la société canadienne.  Malheureusement, l’incidence de la pauvreté est deux fois plus élevée chez les personnes handicapées que chez leurs concitoyens non handicapés.

Quels sont les « facteurs » qui catalysent le succès de la recherche d’emploi ou de l’environnement de travail?  Ce sont les S.C.A.  (sensibilisation, comportement et accommodement) qui permettent d’obtenir et de conserver un emploi.

Sensibilisation :  Excellent point de départ.  La sensibilisation de l’employeur aux questions des personnes handicapées est toujours un atout.  Malheureusement, ils sont nombreux à ne pas comprendre nos enjeux.  Et malgré les avancées réalisées au cours des dernières années, la sensibilisation publique doit demeurer une priorité pour les intervenants handicapés.

Comportement :  C’est, à mon avis, le plus grand « obstacle » à surmonter pour de nombreuses personnes handicapées.  C’est aussi le moins coûteux à corriger.  Une fructueuse relation employeur-employé est fondamentalement basée sur la reconnaissance de votre capacité à effectuer vos tâches.  Il est très important que l’employeur reconnaisse vos habiletés au-delà de votre déficience.

Accommodement :  Étant épileptique, je ne peux conduire un véhicule.  Les accommodements ont donc été pour moi le plus grand défi à relever afin d’obtenir un emploi ou une promotion dans mon domaine. Malheureusement, de nombreux employeurs, même dans les secteurs touchant les personnes avec des déficiences, refusent d’adapter les lieux de travail.

Avoir un emploi est sans aucun doute le meilleur moyen de sortir du carcan de la pauvreté. Pour de nombreuses personnes handicapées, l’emploi est bien plus qu’un salaire, il offre davantage!  Il donne un sentiment d’appartenance en tant que citoyen à part entière.

Je n’ai jamais encore rencontré de personne handicapée qui ne soit pas capable de contribuer à sa communauté.  Selon le gouvernement manitobain, engager une personne avec une déficience est un excellent atout pour les affaires.  J’en conviens.  En plus d’être une excellente mesure d’entreprise, c’est la bonne chose à faire.

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Mesures de soutien liées


Démanteler les obstacles comportementaux : une réussite professionnelle

Gary Malkowski, D.L.Hum

M. Malkowski continue à travailler sans relâche pour les droits scolaires et professionnels des personnes sourdes ou malentendantes.  Intensément engagé auprès de nombreuses organisations, il a lancé de nombreuses initiatives pour améliorer la qualité de vie des Canadiennes et des Canadiens sourds.  La Gallaudet Université est fière de rendre hommage à un ancien étudiant dont le travail innovateur et ambitieux a nettement contribué au développement des collectivités de personnes sourdes et malentendantes.  Et c’est avec plaisir que nous lui décernons ce Doctorat honoris causa en lettres humaines à M. Gary Malkowski.

Dr Alan Hurwitz, président
Gallaudet University
Commencement Speech, mai 2011


À travers vallées et montagnes, le parcours de ma vie a été pavé de tremplins qui m’ont amené là où je suis aujourd’hui.  J’ai occupé divers emplois, depuis ouvrier agricole jusqu’à barman en passant par conseiller en ASL (American Sign Language) et instructeur en culture des sourds, conseiller scolaire pour mes pairs étudiants universitaires, conseiller en réadaptation professionnelle, directeur du développement des services sociaux à la Société canadienne de l’ouïe (SCO), député provincial de York East à Toronto (qui m’a permis d’innover en matière d’accessibilité et de personnes handicapées, grâce à mon projet de loi d’initiative parlementaire qui a conduit à l’adoption de la Loi sur l’accessibilité des personnes handicapées de l’Ontario – LAPHO), conseiller spécial du président directeur général de la SCO et récipiendaire d’un Doctorat honoraire de la Gallaudet Université, Washington, DC.  Ces expériences, mes vingt-deux (22) années de service à la SCO (de 1985 jusqu’à aujourd’hui) et mes cinq années de parlementaire ontarien (1990 à 1995) m’ont permis de mieux me comprendre et me connaître en tant que personne sourde et de grandir dans ma détermination de travailler à l’avènement d’un Canada qui prend fait et cause pour toutes les différences et toutes les déficiences, un Canada qui exalte les Canadiennes et les Canadiens sourds, qui épouse notre culture et valorise nos langues.

Avec mon manque d’intelligibilité de la parole, mon audition résiduelle et mes faibles aptitudes en lecture labiale, mon enfance, mon adolescence et mes premières années d’adulte furent marquées par de l’intimidation et de sérieux préjudices attitudinaux de la part de ma propre famille, de mes enseignants et conseillers et même de mes camarades de classe, mes pairs et mes collègues.  Harcèlement psychologique, commérages négatifs, taquineries, insultes faisaient partie de cette intimidation, sans oublier le fait d’être dévisagé avec mépris, injurié ou encore victime de commentaires blessants et inappropriés proférés devant mes amis et mes collègues, etc…  Je me sentais en danger, non respecté, craintif, honteux, embarrassé et humilié.  On me faisait croire que j’étais un bon à rien, incapable d’apprendre, de travailler, de participer ou de contribuer d’une manière ou d’une autre à l’école, au travail, à la collectivité, à la société.

La discrimination que j’ai subie a été exercée sous forme d’audisme, c’est-à-dire une discrimination fondée sur la surdité.  « L’audisme » implique que les personnes entendantes sont plus intelligentes, plus aptes, plus perfectionnées, plus qualifiées et plus brillantes que les personnes sourdes qui utilisent une langue par signes ou que les malentendants qui se servent d’appareils de communication pour mieux entendre.  Comme toutes les formes de discrimination, l’audisme est souvent exercée de manière déguisée, pour des questions de sécurité.  De tels comportements audistes sont basés sur un postulat erroné, à savoir que la personne sourde ou malentendante est incapable de communiquer.  On en déduit logiquement que ces personnes subiront ou créeront des problèmes de sécurité et de santé en milieu de travail et/ou en milieu scolaire.  Cette perception d’une incapacité de communiquer est utilisée pour justifier les obstacles environnementaux qui influent sur les divers types de participation, pris pour acquis par la majorité des Canadiens; par exemple :

  • Vous ne pouvez participer à une activité sportive à cause de votre surdité.
  • Vous ne pouvez participer à des activités de loisirs de très haut niveau à cause de votre surdité.
  • Vous ne pouvez conduire à cause de votre surdité.
  • Vous ne pouvez être ni enseignant, ni avocat ni médecin à cause de votre surdité (et ce, même si des personnes sourdes appartiennent déjà à ces différents secteurs dans notre pays).
  • Un employeur ne peut vous embaucher à cause de votre surdité.

J’ai grandi dans ce milieu négatif et défavorable, grouillant d’obstacles comportementaux établis, uniquement en fonction d’un critère de capacité auditive, sur les faibles attentes des éducateurs, de la famille et de la société à l’égard des personnes malentendantes et sur les présomptions de supériorité, droits, privilèges, et avantages des personnes entendantes.  Ce système m’avait amené à penser que je ne pourrais jamais apprendre ni acquérir une éducation supérieure ni réussir dans ma carrière.  En d’autres mots, que je ne pourrais jamais rien faire.  Aussi déconcertant qu’apparaissait l’avenir, je savais déjà dès mon plus jeune âge que je voulais faire une différence dans la société.

Même si elle valorise aujourd’hui la vie des personnes sourdes, c’est dans sa compréhension des capacités de la collectivité des personnes sourdes, que s’est ancrée la SCO au début des années 1970.  À cette époque-là, un conseiller m’avait avisé que je ne pourrais obtenir un emploi d’été ni un emploi à temps partiel pendant ma scolarité.  J’étais encouragé à perfectionner des aptitudes quelconques au travail ou à acquérir de l’expérience liée à l’emploi.  Ces suggestions émanaient d’une perception d’incapacité de communiquer, d’abalphabétisme et, bien sûr, des craintes non fondées de santé et de sécurité.  Je sais aujourd’hui que ces perceptions étaient dues à ma surdité.

Mais au fil des ans, la SCO a radicalement changé et m’a fourni les soutiens requis pour progresser dans mon cheminement de carrière. Soutenus par le ministère des Services sociaux et communautaires, les services de réadaptation professionnelle (SRP) de la CSO m’ont accordé des soutiens pré et post-emplois sous la forme de renseignements glanés d’évaluation de carrière et de travail, de counseling par encouragement, aussi bien en réadaptation que professionnel, de l’expérience liée au travail, grâce à des emplois d’été et des emplois à temps partiel, des subventions pour aller étudier à la Gallaudet University où j’ai obtenu un diplôme de premier cycle en travail social et psychologie et une Maîtrise en Counseling en réadaptation (Orientation des personnes handicapées avec spécialisation pour les personnes sourdes).

D’autres importants outils et appuis m’ont permis de poursuivre en toute sécurité sur mon cheminement  professionnel et de réussir.  Les rôles modèles ont fortement contribué à mon perfectionnement global en tant que professionnel sourd.  À la E.C. Drurey Provincial School, l’Ontario Association of the Deaf (OAD) et l’Association des Sourds du Canada nous ont présenté des professionnels sourds réputés; sans que j’en ai vraiment conscience, le sentiment de ma réussite professionnelle a commencé à se développer.  Puis à la Gallaudet Unversity, j’ai appris à reconnaître les obstacles auxquels étaient confrontées les personnes sourdes et j’ai acquis des habiletés d’adaptation pour combattre des obstacles comportementaux – non seulement ceux que je subissais mais encore ceux affrontés par les jeunes sourds à l’école secondaire, dans l’enseignement postsecondaire et en milieu de travail.

D’autres types de soutien m’ont été accordés lors de mon développement professionnel.  Par le biais de la SCO par exemple, j’ai acquis des compétences en intervention ainsi que de l’expérience en travail communautaire.  L’OAD, l’ASC et le ARCH Disability Law Centre ont stimulé mon intérêt pour les questions de droits de la personne en me fournissant les outils nécessaires pour mieux comprendre ces droits en Ontario, dans le contexte canadien et dans le monde entier.  Au fil des ans, et de pair avec des professionnels sourds, ces organisations m’ont incité à participer à des groupes oeuvrant sur les enjeux des personnes handicapées, sur les questions d’éducation et de droits de la personne, aussi bien au niveau provincial qu’au niveau fédéral.  Puis, pendant mes années de députation provinciale (où j’ai occupé mon seul « emploi » dans une organisation essentiellement composée d’entendants – à savoir le gouvernement de l’Ontario), j’ai occupé le poste d’Adjoint parlementaire du ministre de la Citoyenneté, responsable des droits de la personne, de l’Équité en matière d’emploi et des questions touchant les personnes handicapées ainsi qu’Adjoint parlementaire du ministre de l’Éducation, poste qui m’a permis d’apporter des modifications législatives à la Loi sur l’Éducation en Ontario, afin d’y enchâsser l’American Sign Language (ASL) et la Langue des signes québécoise (LSQ) comme « langues d’instruction ».

Les professionnels sourds, la SCO, l’ASC, l’OAD, la Gallaudet University et l’ARCH Disability Law Centre, m’ont enseigné les quatre principales étapes susceptibles d’encourager les personnes en quête d’emploi ou de bonifier une carrière déjà en cours.  À savoir l’apprentissage, la planification, la prise de décision et l’action.

  1. Apprentissage :  Sachez que vous pouvez apprendre tout ce que vous devez savoir, quelles que soient les perceptions des autres quant à vos capacités.
  2. Planification :  Vous n’êtes pas seul.  Utilisez les systèmes et mécanismes disponibles pour appuyer le développement de votre plan de carrière (par ex:  un conseiller en SRP/soutien en emploi à la SCO).
  3. Prise de décision :  Utilisez les informations pour fixer vos priorités, vous sensibiliser aux tendances sociales et du marché de l’emploi ainsi que pour évaluer les pour et les contre.
  4. Action :  Apprendre, planifier et décider ne sont que les étapes initiales.  Vous DEVEZ AGIR!  Efforts et acharnement sont de grands vecteurs de réussite dans une gestion de carrière.

Malgré les améliorations que je découvre dans la conscientisation globale de nombreux citoyens, l’audisme est toujours présent, se manifestant sous forme d’obstacles comportementaux issus des croyances non averties des gouvernements et autres autorités comme les professionnels médicaux et les éducateurs qui refusent d’accepter ce que la recherche scientifique a démontré à maintes et maintes reprises, à savoir que les langues par signes sont aussi effectives que les langues parlées, que l’on peut apprendre la langue par signe et apprendre à l’utiliser, que la capacité auditive n’a rien à voir avec l’intelligence ni avec la capacité d’apprendre et de travailler.  Et au lieu d’être reconnues comme grammaticalement complexes, les langues par signes sont dévalorisées parce que perçues comme des formes de communication incapables d’exprimer « véritablement » des concepts complexes ou abstraits.  Ce préjugé est si profond que la simple capacité de produire un langage parlé est perçue comme signe d’intelligence supérieure.  Les professionnels de l’ouïe ne prennent souvent pas le temps de se familiariser avec leurs patients/clients sourds.  Ils estiment que ma langue compromettra les chances de réussite professionnelle, de maintenir des amitiés, de contacts familiaux, et même d’autonomie et de participation citoyenne.  Il serait contre-intuitif de croire que de nombreux professionnels scientifiquement trempés, refusent d’accepter les données scientifiques relatives aux capacités de leurs clients/patients.  Mais ils le font! Ils refusent de reconnaître que nous sommes aussi capables que les entendants quand ils ne nous bombardent pas d’obstacles.

L’emploi reste toujours la préoccupation dominante des personnes handicapées.  C’est la même chose pour les personnes sourdes.  À la SCO, je travaille et interviens constamment pour des personnes sourdes, les personnes sourdes oralistes, les personnes devenues sourdes et les malentendants.  Nous avons constaté que la vaste majorité de nos clients a de grandes difficultés à garantir un plein accès aux services gouvernementaux et non gouvernementaux; sont sujets au chômage, au sous-emploi, aux obstacles en emploi; à la discrimination quotidienne; ils sont victimes de marginalisation et d’abus; ils ont des problèmes de santé mentale ou d’accoutumance; ils ont de faibles capacités de lecture et d’écriture; un grand nombre d’enfants vont à l’école publique où ni leurs enseignants ni leurs pairs sont en mesure de communiquer avec eux.  De plus, les attentes, perceptions, croyances et comportements des employeurs quant aux capacités et à l’employabilité des personnes sourdes sont pétris d’obstacles comportementaux et systémiques.

Dans ma province, l’Ontario, les statistiques sont renversantes :

  • Entre 2002 et 2011, le pourcentage des bénéficiaires du Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées :  soutien du revenu (ministère ontarien des Services sociaux et communautaires) a pratiquement augmenté de 70%.
  • 42% sont sous-employés, 37,5% sont au chômage (Association des Sourds du Canada).
  • Selon le Dr Gerald Buckley (président du National Technical Institute for the Deaf et vice-président du Rochester Institute of Technology), l’inscription de Canadiens sourds dans les cours universitaires américains a baissé de 122 à la fin des années 1990 à 14 à l’automne 2011.
  • Selon le Dr Alan Hurwitz (président de la Gallaudet University à Washington, DC – la seule université au monde d’arts libéraux (formation générale) pour les personnes sourdes – l’inscription des Ontariens sourds a décliné, passant de 90 au début des années 1990 à 11 à l’automne 2011.

La SCO avait remarqué que de nouvelles tendances s’étaient dégagées à la fin de 1998 lors du remplacement des SRP par le Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées :  aide à l’emploi.  Les conséquences suivantes en avaient résulté :

  • Augmentation du coût de l’aide sociale pour les personnes sourdes et malentendantes.
  • Coûts supplémentaires pour les soins de santé mentale et le logement et autres coûts liés à la santé.
  • Beaucoup moins de jeunes ayant une grave perte auditive s’inscrivent dans l’enseignement supérieur ou dans des programmes d’apprentissage.
  • Un grand nombre de jeunes ayant une perte auditive ont des compétences inadéquates en alphabétisation et autres pour entrer dans le marché du travail.
  • Un très grand nombre de citoyens sourds et malentendants s’enracinent de plus en plus dans le système d’aide sociale.

Devant ces statistiques aggravantes, il devient impérieux d’examiner sérieusement les obstacles auxquels sont confrontées les personnes sourdes au Canada, par exemple, où se les personnes sourdes obtiennent-elles leur diplôme secondaire en Ontario?  Sont-elles inscrites dans les universités canadiennes?  Il n’existe pas d’université au Canada où les étudiants ont accès à des professeurs utilisant une langue des signes.  Est-ce que les personnes sourdes ont des interprètes dans les universités canadiennes?  Le Canada n’a aucun programme susceptible de former des interprètes en ASL-anglais et LSQ-français pour travailler dans des cadres éducatifs – aux niveaux élémentaire, secondaire et postsecondaire.

Étant donné l’abondance d’informations, de connaissances et de recherches sur la situation critique de l’emploi des adultes sourds, on pourrait présumer que cette conscientisation constitue un irréfutable vecteur de changements radicaux pour les personnes sourdes dans la société canadienne.  Ce n’est pas le cas.

Le modèle de SRP des années 1990 a engendré toute une cohorte de personnes sourdes et malentendantes qui, après avoir terminé leurs études secondaires, ont réussi à obtenir des postes de leadership dans les affaires (par ex. :  PDG de la SCO), au gouvernement (première personne sourde à être élue député provincial au Canada), dans des secteurs professionnels comme l’enseignement, la médecine, le droit, le counseling, ou dans l’enseignement supérieur (professeurs dans des universités canadiennes)…la liste des différentes professions et occupations est loin d’être exhaustive.

Pendant ce temps, toute une vaste gamme de mesures de soutien pré et post-emplois, incluant des subventions pour l’enseignement supérieur, était mise à la disposition des personnes sourdes.  Certes, leur coût était nettement supérieur à celui de la formation ou des soutiens professionnels pour le Canadien moyen.  Mais puisque la vaste majorité des personnes sourdes et malentendantes ont fini par travailler, le gouvernement a profité d’une moindre dépendance sur l’aide sociale.

Selon le Centre de l’emploi du National Technical Institute for the Deaf (NTID), (2011), « après l’obtention de leur diplôme, plus de 94% des étudiants sourds et malentendants du RIT/NTID, qui avaient choisi d’entrer dans le marché du travail, ont trouvé des emplois dans les affaires, l’industrie, le gouvernement, l’enseignement et autres secteurs professionnels. »  Les étudiants canadiens faisaient partie de ces statistiques.  Mais avec la diminution d’étudiants canadiens inscrits dans cet institut (de 122 à la fin des années 1990 à 14 à l’automne de 2011), nous n’avons pas de données concernant les diplômés collégiaux/universitaires étudiants au Canada.

Puisque l’incidence des obstacles systémiques et comportementaux affecte grandement le taux de chômage des personnes handicapées en général et entrave fortement l’éducation et l’emploi des personnes sourdes en particulier, il nous incombe d’aider les autorités et les employeurs à mieux appréhender la création d’environnements favorables pour toutes les personnes avec des déficiences.  Des approches concertées s’imposent le plus rapidement possible, impliquant une collaboration avec les éducateurs, la communauté des affaires, la population, les groupes de personnes handicapées et leurs familles ainsi qu’avec les principaux fournisseurs de services intégrés, afin d’établir les meilleures pratiques de travail avec les personnes handicapées, les personnes sourdes et les malentendants.

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L’accès aux appareils fonctionnels – La clé de la réussite dans l’emploi

Mary Ennis

Lorsque je suis entrée dans le marché du travail, il y a de nombreuses années, j’ignorais que j’avais une déficience auditive.  Je me sentais quelque peu différente de mes amis et j’ai certainement été taxée de « sourde » à l’occasion.  Mais je ne pouvais comprendre – tout au moins consciemment – qu’il y avait peut-être quelque chose qui n’allait pas.  Il m’a fallu des mois pour trouver un emploi, autre interrogation saugrenue pour moi.  Après tout, j’avais toujours été considérée comme « intelligente », « bien organisée » et « travailleuse acharnée ».  Or, quelles qu’en soient les raisons, je ne trouvais pas d’emploi malgré d’innombrables entrevues.  Ma diligence finit par porter fruit puisque je fus engagée à plein temps par un phoniatre.

Peu de temps après, le phoniatre découvrit ma perte auditive lors d’un test effectué avec un nouvel audiomètre, utilisé pour mesurer l’acuité auditive de certains de ses clients.  J’obtins vite un rendez-vous chez un audiologiste qui confirma une très grave déficience auditive pour laquelle n’existait aucun appareil adapté (à savoir, des appareils acoustiques).  J’avais dix-neuf ans et ce n’est que dix ans plus tard que j’ai pu m’acheter un appareil pour ma « bonne » oreille.  Quatre ans après, l’appareil requis pour L’autre oreille devenait disponible.  À la fin des années 1970/début des années 1980, les avancées technologiques étaient plutôt lentes dans certains domaines.  Au début des années 1980, je découvris les appareils téléphoniques à volume réglable, une autre bénédiction dans ma quête d’une parfaite audition.  Puis, ce fut le tour des systèmes à modulation de fréquences au cours des années 1990.  Cette technologie sans fil facilite la compréhension du langage dans un environnement bruyant.

Au fil des ans, j’ai vécu dans différentes villes et, par conséquent, j’ai passé de nombreuses entrevues aux fins d’emploi.  Elles ont été plus fructueuses après l’acquisition de ma première prothèse et se sont nettement améliorées dès que j’ai eu la deuxième.  Mais le plus intéressant, c’est que quel que soit l’intérêt manifesté par l’éventuel employeur lors de la première rencontre et plus encore lors de la deuxième, son négativisme transparaissait dès que je mentionnais ma déficience auditive et mon besoin d’un téléphone équipé d’un contrôle de volume.  De plus, à cette époque-là, j’ai vu au moins un « spécialiste » de l’ouïe qui m’a prescrit le mauvais type d’appareils auditifs, moins visible que ceux que j’utilisais au préalable.  Ce furent des années difficiles!

Les technologies auditives peuvent être très dispendieuses, notamment en cas de grave déficience, et surtout, lorsqu’elles doivent être soutenues et maximisées par un système FM.  Elles peuvent coûter entre 8 000 $ et 10 000 $ et doivent être remplacées tous les quatre ans, au moins.

Si j’ai eu des emplois bien rémunérés au cours de ces années, j’ai rencontré des difficultés tout d’abord pour obtenir un poste et, ensuite, pour exercer davantage de responsabilités.  J’étais confrontée à plusieurs problèmes, notamment la lenteur des progrès technologiques, les comportements négatifs et la cherté des appareils auditifs.  Ce n’est qu’au début des années 1990, lorsque j’ai commencé à travailler au sein de la collectivité des personnes handicapées, que j’ai pu ne tenir informée de la disponibilité des services et des technologies et que j’ai pu apprendre comment éliminer les obstacles souvent affrontés avec une déficience auditive.

Tout au long des années 1990 et pendant la première décennie du 21ème siècle, j’ai surtout travaillé dans le secteur des droits de la personne, appliqués aux personnes avec des déficiences.  J’y ai acquis de très vastes expériences – postes de confiance aux niveaux provincial, national et international ainsi que plusieurs années de travail « pratique » pour la Convention relative aux droits des personnes handicapées.

À l’heure actuelle, je coordonne un programme provincial d’entraide pour les adultes plus âgés et les aînés et je travaille également à contrat, surtout pour les organisations communautaires chargées d’assurer l’accès et l’inclusion de la collectivité et des personnes ayant divers besoins.  La clé de ma réussite – à présent comme au cours de ces deux décennies – c’est certainement l’accès aux appareils fonctionnels et, surtout, aux informations requises pour prendre des décisions avisées quant à mes besoins.

Mais surtout, nonobstant ce qui précède, c’est l’extraordinaire travail effectué par les organisations de et pour personnes handicapées qui a vraiment été l’élément déclencheur dans le secteur de l’emploi.  Sans les connaissances émanant des expériences vécues qui bouillonnent au sein de ces organisations, je n’aurais pu – ni mes concitoyens ni mes pairs à travers la planète -, je n’aurais donc pu réaliser toutes mes entreprises et m’assurer une participation citoyenne au sein de la société.  Je leur serai à jamais redevable, autant aux organisations qu’à leurs membres, pour leurs conseils, leur force et leur volonté de partager leur vécu et leurs expériences.  Ils m’ont grandement aidée.

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La réussite professionnelle – au-delà de la survie dans l’emploi

David Best

La mesure du succès professionnel dépend des valeurs utilisées et des éléments de comparaison.  Selon de récents rapports, l’incidence de la pauvreté continue à être très élevée chez les Canadiennes et les Canadiens avec des déficiences.  Mais les causes en sont souvent mal comprises et les attentes de réussite professionnelle sont souvent sous-représentées.  Selon ces recherches, 75% des Canadiens aveugles sont au chômage et 20% vivent en deçà du seuil de pauvreté.  Dans ce contexte-là, j’ai réussi mais comparativement à mes collègues voyants, ma progression professionnelle n’a pas épousé mes ambitions.  La discrimination en milieu de travail, intentionnelle ou subconsciente est réelle.  Comprendre votre déficience et votre type d’interaction avec l’entourage provoquera un revirement perceptuel positif.

Après avoir obtenu un diplôme universitaire en informatique – qui à l’époque, m’a-t-on dit, n’était pas un choix de carrière approprié pour une personne aveugle, j’ai commencé à travailler en 1981 comme spécialiste de la T.I.  pour Air Canada.  J’avais compris à l’université, où les services de soutien ne répondaient pas à mes attentes, que pour réussir dans le marché du travail, je devais être autonome et assertif.  Mon premier emploi m’a appris que pour poursuivre une brillante carrière, je devais faire preuve d’ingéniosité et d’innovation pour relever les défis environnementaux et être très productif.  Je devais approfondir mes connaissances technologiques, sociales et éducatives.  Mon premier défi fut d’appréhender les forces et les faiblesses de mes limitations fonctionnelles et d’accepter ce que je ne pouvais changer.  Les expériences vécues par les autres ont permis de minimiser les luttes, les frustrations et les déceptions au travail.  Deuxièmement, pour aller au-delà de la simple survie dans le travail, je devais perfectionner des aptitudes qui allaient compenser mes faiblesses; c’est-à-dire, savoir appliquer les technologies et les ressources humaines pour maximiser les possibilités.  Troisièmement, pour être respecté et valorisé en milieu de travail, je devais cultiver les relations susceptibles de combler mes besoins en milieu de travail.

L’accès aux technologies et la capacité de les appliquer à mon travail furent des éléments fondamentaux de ma réussite professionnelle.  J’ai créé mon propre lecteur d’écran en lecture labiale/Braille et un concentrateur d’ordinateur pour brancher mon équipement adapté aux différents systèmes hôtes sur lesquels je devais travailler.  J’y ai réussi en m’alliant à des fabricants avant-gardistes de technologie adaptée et en travaillant avec les meilleurs ingénieurs de l’industrie. Ils m’ont aidé à résoudre les problèmes relatifs au milieu du travail et, par ricochet, je les ai aidés à concevoir et à tester de nouveaux appareils adaptés.  Bien que difficile dans les années 1980, cette tâche serait encore plus ardue aujourd’hui à cause des complexités technologiques accrues.  En d’autres mots, la clé du succès, c’est de mieux comprendre les technologies d’accessibilité et de connaître les spécialistes qui les fournissent.

La réussite professionnelle est aussi guidée par le réseautage social et les liens avec des « vraies » personnes.  Nous dépendons tous les uns des autres, d’une manière ou d’une autre; être autonome, cela implique de savoir quand demander de l’aide.  Il faut du temps pour créer un réseau de soutien efficace.  Il faut aussi savoir trouver les personnes fiables.  Je me suis acharné à connaître les chefs de file commerciaux ayant le pouvoir décisionnel et influençant les autres.  J’ai appuyé des mesures de diversité initiées par les ressources humaines, j’ai servi de mentor à des collègues et j’ai participé, autant que possible, aux activités des employés.  Les récentes et profondes mutations survenues dans les comportements sociétaux et les lois gouvernementales sur l’accessibilité ont facilité ce défi professionnel.  Mais s’il plus facile de réseauter socialement, il est devenu plus difficile de se lier à des « vraies » personnes.  Le virage vers le bureau virtuel a suscité de réels avantages pour les professionnels handicapés mais il a également érigé de nouveaux obstacles en milieu de travail.  Pour établir des relations respectueuses et basées sur la confiance, essayez de mieux comprendre les valeurs de vos collègues.  Cela contribuera à votre réussite professionnelle.

Autre élément-clé du succès :  l’éducation continue, non seulement dans votre domaine d’expertise mais aussi dans d’autres secteurs.  Planifiez votre progression professionnelle en vous tenant  au courant des plans de commercialisation de votre compagnie, des valeurs des clients et des tendances mondiales.  J’ai constaté que les  techniques d’autoapprentissage (éducation en ligne, webinaires, livres numériques, etc…) sont extrêmement efficaces pour rester à la page.  Malheureusement, l’éducation est devenue un véritable problème et exige des efforts soutenus à cause de l’inaccessibilité des logiciels administratifs et des documents de formation.  Les organisations de service doivent assumer un plus grand leadership et exercer davantage de responsabilités pour combler les besoins éducatifs des professionnels handicapés dans le monde moderne actuel.

Ma souplesse d’adaptation aux changements, ma très grande aisance en ce qui a trait à l’utilisation des outils et mon extrême confiance dans la capacité des autres à établir de fructueuses relations ont été les vecteurs-clés de ma réussite professionnelle.  Certes, j’ai connu de nombreuses déceptions dans mon cheminement mais ma capacité d’évaluer les attentes m’a permis de résoudre les conflits et de surmonter les obstacles.  En fait, les déceptions ne sont que des attentes non comblées, fruits de désirs exagérés ou d’informations trompeuses.  Si j’ai été trompé, je maintiendrai ma position; si j’ai des attentes déraisonnables, je modifierai ma stratégie.  Au cours des trente-deux (32) dernières années, j’ai eu la chance de travailler, comme spécialiste T.I. pour cinq grandes sociétés canadiennes.  Outre mes connaissances de T.I. en ordinateur central et en développement/conception de logiciels, j’ai acquis des compétences en gestion de projets, gestion de la diversité en milieu de travail, conception d’interface pour les usagers de sites Web, consultant en accessibilité.  En tant qu’employé d’IBM, je travaille actuellement sur des projets mondiaux de développement du Web, qui me permettent d’interagir avec des quantités de gens à travers la planète.  En tant que personne aveugle, j’ai eu une carrière très réussie, avec de nombreuses possibilités et défis.  Comme l’a déclaré un jour Pierre Elliott Trudeau, « soyez prêts à saisir les possibilités lorsqu’elles surviennent; la chance, c’est la jonction entre la préparation et les opportunités. » Et c’est, à mon avis, la clé de la réussite professionnelle.  Pour de plus amples renseignements, cliquez sur « mon profil » à l’adresse http://www.davebest.info

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Facilitants et obstacles dans le cheminement d’une traductrice malentendante

Mai Nhu Nguyen

Trouver un emploi et le conserver est capital, non seulement pour les récents diplômés mais encore pour tout changement de carrière.  C’est comme chevaucher sur de nouvelles ondes avec de nouveaux défis dans un tout nouveau domaine.

J’ai obtenu un Baccalauréat en psychologie en 2005; après avoir réalisé que je n’aimais aucun des emplois en counseling que j’avais exercés à court terme, j’ai cherché quelle était ma nouvelle vocation et cela a pris du temps.  Depuis les dix dernières années, j’occupe par intermittence le poste d’associée en recherche auprès du Réseau de recherche Adaptech.  Je rédige, révise et traduis des textes, collige des données pour nos études, élabore, gère et valide des questionnaires, analyse les résultats, prépare des exposés pour des conférences et publie nos conclusions dans divers médias.

J’ai réalisé que la tâche que j’aimais le plus était la traduction en français :  elle s’inscrit dans mes intérêts et compétences et élimine en outre certains obstacles auxquels je suis confrontée en tant que personne malentendante.  Je travaille sur l’ordinateur et j’aime communiquer par courriel.  IL va sans dire que ma scolarité a été difficile et je n’ai appris l’existence des accommodements qu’en dernière année d’école secondaire.  Ces dispositifs ont amélioré ma qualité de vie et, depuis lors, je les réclame chaque fois que possible.  Le programme d’aide à l’intégration en emploi du Québec m’a particulièrement aidée en subventionnant mon employeur pour couvrir une partie de mon salaire et le coût des accommodements requis.  (Et c’est ainsi que j’ai rencontré mon nouvel et meilleur ami, le logiciel  Facility Management System).  Cela a réellement facilité mon entrée dans le marché du travail et s’est positivement répercuté sur mon quotidien.  Ce qui m’a aidée aussi, c’est que mon employeur, le Réseau de recherche Adaptech, effectue des études impliquant des étudiants canadiens de niveau postsecondaire (collèges et universités), avec divers types de déficiences.  Donc, la disponibilité des accommodements, la compréhension et les soutiens en milieu de travail?  Vu, vu, vu.

Pendant ma quête de contrats ou d’emplois en traduction, j’ai réalisé que le plus grand obstacle était la méconnaissance générale de mes capacités; certaines personnes pensent que l’ouïe est d’une manière ou d’une autre liée à la rédaction.  Or, l’interprétation et la traduction sont deux tâches différentes!  N’oublions pas la crainte de dévoiler ma déficience et avoir été obligée de le faire à contre-cœur pendant une entrevue, à une foire de l’emploi ou lors d’un cocktail, c’est-à-dire dans des contextes peu favorables aux personnes ayant des déficiences auditives.  J’ai quelquefois perdu d’éventuels clients ou employeurs quand je leur ai dit que j’étais malentendante mais j’ai tenté de les convaincre de me donner une chance et de me permettre de leur envoyer un exemple de mon travail.  Les premières impressions sont difficiles à changer, mais le jeu en vaut la chandelle.

Et ce qui fait la différence en bout de compte, c’est d’avoir la possibilité de se prouver auprès d’un employeur et de collègues.  Si vous avez la chance d’obtenir votre premier emploi dans votre champ d’intérêt, agissez comme si c’était l’événement le plus important de votre vie.  J’ai acquis de précieuses expériences et je connais des gens qui se porteront garants de moi, en tant qu’employée et en tant que traductrice; mon réseau s’en est étendu.  Les employeurs et les clients doivent tout simplement faire preuve d’ouverture en embauchant des personnes handicapées en fonction de leurs capacités et non sur leur perception de leurs habiletés.

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Mon cheminement professionnel – persistance, persévérance et acceptation de soi

Karen Tarry

En 1999, grâce à mes réseaux, j’ai été engagée comme employée temporaire dans le secteur public.  Mon poste est vite devenu un poste à durée déterminée puis, trois ans plus tard, permanent.  Et je l’occupe depuis, étant chargé de la planification et de la gestion de projets, de la recherche et de la rédaction.

Au mitan des années 1980, à la fin de mon secondaire, j’ai passé un test d’orientation professionnelle dans mon hôpital local.  Cette batterie de tests neuropsychologiques devait m’aider à préciser mes choix de carrière et à identifier mes forces et mes faiblesses.  Selon les résultats, n’importe quel emploi de bureau me conviendrait puisque je serais assise et n’aurais pas à me déplacer beaucoup.  Suite à cette évaluation, j’ai suivi un cours de secrétariat administratif pendant un an.

À la même époque, j’ai hérité d’une certaine somme d’argent d’un ami de la famille; cette somme a été transférée dans un Régime enregistré d’épargne-retraite (REER).  De ce fait, à la fin de mon cours, j’ai perdu toute admissibilité, aux programmes d’emploi des services de réadaptation professionnelle.  Sans aide professionnelle ni conseil pour gérer ma déficience en milieu de travail, j’ai trébuché dans la force active; j’ai été confrontée à plusieurs limitations physiques, graves et non décelées pendant l’évaluation effectuée au centre de réadaptation; notamment, une incapacité de travailler rapidement, de mémoriser ce que l’on dit et de faire du multitâche.  J’ai été licenciée à moultes reprises, notamment de mon premier emploi.  Et là, peu importe ma solide éthique de travail et ma persévérance.  Mon estime personnelle en a été ravagée.

J’ai quelque peu réussi dans le secteur public en faisant du travail de bureau.  Mais il s’agissait de contrats de courte durée (six mois ou moins).  J’avais obtenu ces postes par l’intermédiaire des programmes d’équité en matière d’emploi, en vigueur à l’époque.

Puis, après avoir travaillé pendant trois ans environ comme réceptionniste dans une firme de haute technologie, j’ai vécu une longue période de chômage (de 1995 à 1999).  C’est en m’inscrivant au programme local d’emploi pour les personnes handicapées que j’ai obtenu ce poste de réceptionniste, mon premier poste permanent en fait. Mais j’ai été licenciée lors d’une réduction du personnel.

Étant au chômage, j’ai fait du bénévolat pour diverses organisations de la collectivité des personnes handicapées, offrant des services de communication (recherche et rédaction), qui sont encore mon forté aujourd’hui.  Là, j’ai été en mesure de repenser mes choix de carrière et de m’orienter vers des emplois davantage axés sur mes forces.  Je suis très reconnaissante envers la collectivité des personnes handicapées qui m’a appuyée pendant toute cette période et m’a aidée à modifier mon cheminement de carrière.

Puisque j’ai des problèmes de mémoire à court terme, je dois absolument écrire toutes les instructions.  J’ai donc toujours un carnet de notes avec moi.  Je communique par courriel avec mon superviseur au lieu de faire de vive voix.  De ce fait, j’ai un dossier sur les tâches à exécuter,  Je veille également à ne jamais être dans un environnement de travail stressant, fonctionnant sur un rythme rapide.

J’ai toujours eu accès à la formation dans l’emploi.  Mais je n’ai jamais bénéficié de promotion importante, sauf quand j’ai quitté mon poste actuel pour prendre, pendant un an et demi, une autre affectation.  J’ai essayé de passer des concours, à l’interne comme à l’externe, mais je n’ai jamais réussi.

Quand j’ai des problèmes ou des défis au travail, je me tourne vers mon solide réseau d’aidants auxquels je peux me confier.  J’essaie de penser positivement.  Certes, je suis très chanceuse comparativement à tant d’autres personnes de ma connaissance qui ont les mêmes limitations fonctionnelles que moi, qui ne peuvent travailler et qui luttent pour joindre les deux bouts avec leurs prestations.  J’essaie de me concentrer sur les belles choses de ma vie.  Et j’en ai beaucoup dont je suis reconnaissante.  C’est ce qui compte en fait.  Le travail n’est qu’une petite composante de ma vie.

La clé de mon succès professionnel est sans aucun doute la vigilance que j’apporte à mon travail, dont je sais exécuter les tâches et qui me donne confiance.  J’essaie de ne pas être trop sévère à mon égard quand je fais des erreurs.  Mes quinze années d’engagement dans la communauté des personnes handicapées m’ont été extrêmement utiles en me permettant de me rallier à d’autres personnes vivant des expériences analogues.  Je me sens appuyée.  Je me suis fait aussi de nombreux amis tout au long de ma route.  Et je continue à avancer.  Je crois en l’importance de persévérer, d’avoir une vision et surtout de faire preuve de réalisme quant à mes capacités; je crois important d’accepter mes limitations au lieu de les combattre.

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Le point de vue d’une étudiante

Alena Wickware

Je m’appelle Alena Wickware.  J’occupe actuellement, à contrat, un emploi d’été d’étudiants, auprès de l’Association des malentendants canadiens.  En tant que réceptionniste et commis de bureau, je réponds aux appels téléphoniques et m’occupe des courriels et visites de bureau.  J’oriente les demandes vers d’autres programmes et services lorsque nécessaire, je maintiens les dossiers de l’association, je fais des levées de fonds pour des événements et enfin, collige des publications et des ressources et les distribue à nos membres.

Lorsque j’ai été contactée pour une entrevue, je connaissais déjà mes besoins quant à l’exécution de mes tâches.  J’ai une déficience auditive modérément grave et bilatérale (les deux oreilles); j’utilise des appareils auditifs pour compenser mon audition résiduelle et m’aider avec la lecture labiale.  J’ai franchement exposé ma déficience à mes employeurs éventuels et leur ai fait part des accommodements requis en cas d’embauche.  J’ai précisé qu’outre l’utilisation d’un ATS, si nécessaire, je pouvais facilement me servir d’un ampli-téléphone (jusqu’à 50 décibels suffiraient).  Bien que j’utilise le téléphone du bureau pour les affaires officielles, je préfère correspondre par courriel et je le fais chaque fois que possible.  J’ai exposé mes besoins de communication à mes collègues, notamment de veiller à capter toute mon attention avant de commencer à parler, de me regarder directement et de parler clairement, posément, sur un rythme naturel.  Et chaque fois, mes collègues et mes patrons se sont conformés à mes demandes d’accommodement.  Je crois que le meilleur moyen de réussir dans le milieu de travail, c’est de connaître vos besoins et d’avoir le courage de demander qu’ils soient comblés.

Je me souviens des réactions que j’obtenais dans d’autres lieux de travail et en bénévolat aussi, quand j’indiquais que je préférais correspondre par courriel (surtout en l’absence d’ATS ou d’ampli-téléphone).  Certains personnes étaient surprises et me demandaient des explications.  J’ai toujours répondu honnêtement, précisant que c’était ce que je préférais à cause de ma déficience auditive.  La plupart du temps, les gens étaient contents de travailler avec moi, selon mes conditions.

À l’aube de ma carrière en travail social, je crains d’être délaissée dans le marché du travail à cause de la déficience auditive.  J’en suis très consciente.  Je me souviens de mes difficultés pour apprendre le français – même le plus élémentaire.  Et je sais que cette limitation fonctionnelle pourrait entraver mes éventuelles qualifications.

Pour y compenser et pour m’aider professionnellement et personnellement, j’ai commencé à apprendre l’American Sign Language (ASL).  Je me passionne pour les possibilités d’intervention et pour l’intégration de l’accessibilité universelle dans les milieux de travail, les écoles et les lieux publics.  Je sais que posséder l’ASL comme langue seconde sera un atout inestimable.

Connaître l’ASL, comme langue seconde, comme langue vraiment particulière, sera extrêmement bénéfique car seul un petit nombre de travailleurs sociaux la possède.  Et je suis fière de l’avoir apprise.  Avoir acquis de l’expérience et des connaissances professionnelles dans mon domaine a certainement contribué à mon embauche à l’AMC.  Je sais que je possède bien d’autres aptitudes qui me permettront de cheminer dans ma carrière.  Malgré mes inquiétudes, je peux certainement affirmer que ma déficience auditive ne m’a jamais arrêtée dans ma recherche d’emploi et ne l’a d’ailleurs jamais entravée.  Et je sais que je continuerai à faire une différence dans la vie des personnes pour lesquelles je travaille et travaillerai.

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Le succès …une question d’interprétation

Alan Conway

J’ai travaillé pendant trois ans comme traducteur et pendant vingt-sept ans comme interprète de conférences. En traduction, il s’agissait de  documents écrits que je transcrivais du français à l’anglais.  En tant qu’interprète,  je traduisais simultanément d’une langue à l’autre.  Mes prestations furent diverses, notamment dans les deux Chambres du Parlement, pour des Comités sénatoriaux et parlementaires, des audiences publiques, des Commissions d’enquête et des réunions internes de fonctionnaires.

Je devais être en mesure de lire les textes à traduire ou de consulter les documents fournis pour des affectations d’interprétation.

J’utilisais deux dictaphones pour lire les textes à traduire et enregistrer les textes que je dictais.  En tant qu’interprète, avant que la technologie informatisée ne me permette de transcrire en Braille les textes à emmener, je demandais à mes collègues de me lire certains types de renseignements. Quatre chiens  Seeing Eyes m’ont grandement aidé en matière de mobilité.  Quand les cellulaires sont devenus disponibles, il m’est devenu indispensable d’en posséder un.


Si j’ai eu de la formation en informatique lorsque j’ai commencé à utiliser cette technologie, je me suis retrouvé seul à résoudre les problèmes pour  utiliser mon téléphone cellulaire adapté.  J’ai eu une très bonne carrière d’interprète et je n’ai pas voulu  grimper les échelons pour des postes de direction.

Les clés de ma réussite – travail acharné, ténacité et volonté d’auto revendication.

Mais l’élément le plus déclencheur pour moi, ce fut la reconnaissance de mes capacités par mes superviseurs et par mes collègues m’ont montré qu’ils reconnaissaient mes capacités.  Lorsqu’une affectation exigeait un interprète ayant une excellente vue, mes collègues soulignaient rapidement l’excellence de mon travail, malgré ma cécité.  Ma superviseur a également insisté pour que j’accepte du travail à la pige maintenant que je suis à la retraite.

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Obtenir un emploi et le conserver – Les clés de la réussite

Anne M. McPhee

Trouver un équilibre – un véritable défi pour moi tout au long de ma vie.  Je dois avouer qu’à l’époque où je changeais constamment d’emplois, avec en plus la gestion d’une grande maison, trois jeunes enfants et une immense famille élargie, j’y suis rarement arrivée.

Tout a vraiment chaviré quand, alors que ma carrière d’infirmière agréée était bien entamée, j’ai commencé à souffrir de lombalgies.  On m’a alors affirmé qu’en me maintenant en forme et en fortifiant mes muscles lombaires, tout irait bien.  J’ai tout essayé, depuis les exercices jusqu’aux médicaments en passant par les chiropracteurs.  Rien!  Les douleurs ont persisté.  J’ai allégé ma charge de travail en transférant en pédiatrie; j’ai réduit mes heures de travail en partage de poste…En vain! En 1995, mon dos s’est soudainement paralysé et mes jambes ont refusé de fonctionner.  J’ai passé une semaine allongée sur le sofa, un genou à terre; incapable de marcher, je rampais jusqu’à la salle de bains.  Une scanographie a révélé une hernie discale et une rupture discale au bas du dos.  Je n’avais plus aucune sensation dans mes pieds et ma jambe gauche s’engourdissait.  Une chirurgie a été recommandée; les deux disques incriminés ont été enlevés; mais la douleur persistait, exacerbée par moments.  Après quinze ans de services infirmiers, j’étais incapable de retourner au travail.  La perte de ma profession était presque aussi intolérable que la perte de sensation dans mes jambes.  Qui étais-je si je n’étais pas infirmière?  Quel pourrais-je faire à l’avenir?

Les années suivantes évoluèrent autour de la douleur et des traitements.  Une série d’anesthésies tronculaires atténua les douleurs dans mes jambes mais pas dans mon dos; mes pieds et ma jambe gauche restaient à jamais engourdis; j’ai dû apprendre à vivre ainsi et à accepter le fait que je ne pourrais plus jamais travailler.  Heureusement, j’avais un excellent médecin qui m’a soutenue pendant ces moments difficiles et est intervenu pour mon admissibilité aux prestations d’invalidité du RPC, que j’ai perçues deux ans après mon opération chirurgicale.  Cela a vraiment fait une énorme différence dans ma vie.  J’arrivais enfin à trouver un équilibre et à graduellement accroître mes activités tout en gérant mes symptômes et mes douleurs chroniques.  Cela m’a permis de m’intégrer/davantage dans la communauté, de rencontrer des gens et de faire du bénévolat.  J’ai ainsi particié au projet Heart Health qui s’est soldé par une loi provinciale pour des lieux publics sans tabac.  Cette initiative m’a valorisée, me faisant comprendre que je pouvais contribuer, maintenant et à l’avenir.  L’espoir enfin!

J’ai essayé plusieurs emplois.  En tant qu’entrepreneure, j’ai donné de nombreux cours pour arrêter de fumer jusqu’à ce que le gouvernement s’empare du projet et me mette hors circuit.  J’ai tenté les contrats à plein temps, mais à cause des poussées de maladie, j’ai dû abandonner le projet avant la fin.  J’ai travaillé à temps partiel pour un centre de ressources familiales mais l’horaire manquait suffisamment de souplesse pour répondre à mes besoins lorsque la maladie se manifestait.

Je travaille actuellement onze (11h) par semaine dans la communauté et c’est parfait.  La flexibilité de mes tâches me permet de travailler à domicile quand je n’ai pas envie de sortir.  Je reste en contact avec mon agente du programme de PI-RPC afin de continuer à percevoir mes prestations même si je gagne plus que le salaire maximum autorisé.  Être capable de travailler tout en recevant ma pension-invalidité a illuminé ma vie, lui donnant enfin un sens.  Je dois en effet équilibrer le temps de repos dont j’ai besoin avec le travail et les loisirs.  Et tant que je suis capable de trouver cet équilibre, tout va bien.  Mais cet équilibre fluctue aussi quand ma condition s’aggrave et que la douleur s’intensifie puis s’estompe.

En 2006, j’ai eu la chance d’assister à Charlottetown à la Conférence nationale de l’Association des malentendants canadiens.  Bien que diagnostiquée malentendante dans mon enfance et portant des appareils acoustiques depuis ma vingtième année, c’est là que pour la première fois, j’ai pris conscience de toutes les difficultés auxquelles j’étais confrontée dans mon quotidien.  Connaître mes limitations et être capable de les communiquer aux autres m’ai aidé à performer davantage dans la vie.  Le téléphone est mon plus grand problème.  Même si j’ai un dispositif Bluetooth à la maison, le traitement des propos entendus est encore problématique. Fort heureusement, les communications informatisées sont devenues la norme, ce qui me permet de faire la plupart de mes contacts.  Ma vie en est encore plus simplifiée.

Je suis très active dans la communauté.  Je siège à plusieurs conseils, je joue d’un instrument de musique, chante dans une chorale et je m’implique dans la coordination de plusieurs événements communautaires.  Chaque fois que je peux, je participe à des ateliers et des conférences pour m’enrichir intellectuellement et pour réseauter avec d’autres intervenants de mes secteurs sélectionnés.  Toutes ces expériences m’ont aidée à développer des compétences et à accroître ainsi ma valeur d’employée.

L’isolement était le facteur le plus débilitant de ma déficience.  Sortir, raconter mon histoire, aider les autres…voilà ce qui m’a aidé à me retrouver, à savoir qui je suis vraiment et ce que j’ai à offrir.  L’auteure Rebecca Falls a dit « L’un des remèdes les plus précieux pour aider les autres à guérir, c’est d’écouter leur histoire. »  Reconnaître sa vulnérabilité est signe de force. En partageant notre vécu, nous pouvons nous aider nous-mêmes et aider les autres.  Ensemble, tout est possible.  La victoire nous appartient.  Tout est question d’équilibre.

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Vous n’êtes pas seul

Carole Willans

Je m’appelle Carole Willans et, en tant que membre de l’Association des malentendants canadiens, je tiens à contribuer à ce recueil.  Atteinte d’une grave déficience auditive bilatérale due à un accident domestique survenu lorsque j’avais quatre ans, je suis avocate avec trente et un ans (31) ans d’expérience.  J’ai porté deux puissants appareils acoustiques depuis ma cinquième année, jusqu’à ce que, il y a un peu moins d’un an, je remplace l’un d’entre eux par un implant cochléaire.  Diplômée de la Faculté de droit civil de l’université d’Ottawa, j’ai été reçue au Barreau du Québec le 1er mai 1981.  Avant d’obtenir leur permis d’exercer, les avocats doivent faire un stage impliquant une formation en milieu de travail sous la supervision d’un avocat sénior.  Il peut être très difficile de trouver de telles cléricatures, …c’est encore plus difficile pour les avocats avec des déficiences; et quand l’avocat a un trouble de communication, comme une perte auditive, le sort s’acharne vraiment contre lui/elle.  Je m’en  suis rendu compte rapidement en 1980 quand les cabinets d’avocats que je contactais à travers le Québec me fermaient la porte au nez, l’un après l’autre.  Désespérant de trouver un stage et de rentrer dans mes investissements  d’études, j’ai alors décidé de cacher ma déficience auditive.  Et j’ai trouvé un excellent stage dans ma ville natale.  Ont suivi ensuite dix ans de pratique privée, réussissant à m’attirer des clients jusqu’au jour où j’ai été prise dans l’engrenage d’une « mauvaise journée d’audience ».  À plusieurs reprises, j’ai dû demander au juge de répéter sa question.  Il a fini par me l’écrire.  Et ma carrière en pratique privée est morte ce jour-là.  Elle est enlisée pendant quelques mois encore jusqu’à mon «licenciement ».

J’ai alors vécu une période de profond désespoir avec deux jeunes enfants à charge et un mari qui n’avait qu’un succès mitigé dans sa pratique juridique.  Je ne me souviens plus comment cela s’est passé mais je me suis trouvée en contact avec Marilyn Dahl et l’Association des malentendants canadiens (AMC).  Il m’a fallu tout d’abord réaliser que des milliers d’autres Canadiens vivaient avec une déficience auditive (je n’étais pas la seule).  J’ai été engagée comme directrice générale et j’ai ainsi acquis les compétences qui consolident une forte capacité d’adaptation et de résilience afin de réussir en tant que personne malentendante.  Et quel tremplin pour revendiquer les droits des Canadiennes et des Canadiens malentendants, notamment auprès du gouvernement fédéral.  C’est ainsi que, l’année suivante, dans le cadre de la Stratégie nationale pour l’intégration des personnes handicapées, j’ai été engagée comme avocate par Justice Canada.  Et dès mon premier jour de travail dans mon ministère d’attache, j’ai dévoilé ma déficience auditive et j’ai bénéficié d’un immense respect ainsi que d’une grande reconnaissance pour mes réalisations.  J’ai travaillé en droit criminel, en droit constitutionnel, en relations intergouvernementales et extérieures et j’ai toujours activement promu l’accessibilité des lieux de travail au sein du gouvernement fédéral. Être transparente quant à ma déficience auditive, énoncer clairement et honnêtement mes besoins pour l’exercice de mes fonctions, être déterminée à aider les autres …..voilà les principes qui ont pavé ma carrière pour la rendre toute aussi merveilleuse que passionnante et enrichissante.  Et mes messages clés :  la résilience commence à l’instant même où vous réalisez que vous n’êtes pas seul et que l’aide requise est à votre portée, à condition d’exprimer clairement vos besoins.  Mais le facteur le plus catalyseur est sans aucun doute l’aide que vous apportez aux autres car c’est en tendant la main aux autres que vous construisez un monde meilleur pour tous (vous y compris).

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Travailler avec une déficience auditive

Doreen Gyorkos

Je travaillais depuis plusieurs années comme aide enseignante pour la Division scolaire catholique Holy Spirit quand, suite à la présence d’un caillot à l’arrière de mon cou, j’ai perdu carrément ma capacité auditive.  Quand c’est arrivé, j’étais à l’école en train de reporter les présences scolaires dans les dossiers.  Je suis rentrée rapidement chez moi, incapable de me débarrasser de cette impression de blocage que je ressentais dans mes oreilles.

J’ai ensuite été hospitalisée pendant trois à quatre semaines à cause de problèmes d’équilibre et pour faire dissoudre le caillot.  L’otorhino m’avisa d’abord  que dans trois mois, je pourrais avoir un appareil acoustique.  J’appris ensuite que ce n’était pas possible à cause de la gravité de ma déficience et que je serais incapable de fonctionner à l’extérieur.  Je suis rentrée chez moi pour combattre ma perte de mobilité  physique et, quatre mois plus tard, je suis allée expliquer mon cas à mon directeur, lui remettant ma démission car j’étais alors en congé maladie.

Son soutien m’a donné le courage de continuer à travailler – surtout en face à face avec des enfants du premier au 6ème niveau – mais sans aucune audition et dépendant de la lecture labiale.  Mon directeur déclara que les enfants et le personnel devraient désormais apprendre à me parler en me faisant fac, pour faciliter la lecture labiale.  Il m’encouragea fortement, estimant que j’avais encore beaucoup à offrir à l’école.

La salle de classe où je complétais les préparations pédagogiques pour les enseignants était équipée d’un téléphone accessible aux malentendants et d’une alarme incendie à lumière stroboscopique.  Un collègue était chargé de m’avertir de toute situation d’urgence.  Conscients de ma déficience auditive, le personnel et les élèves ont grandement coopéré.  Je n’ai jamais été l’objet de plaisanterie comme cela survient souvent aux personnes malentendantes.

Je suis diplômée en communication de la parole, programme impliquant l’apprentissage théorique de la formation de tous les sons conversationnels.  J’ai donc eu la chance de pouvoir devenir une adepte des discussions par lecture labiale.

Deux ans et demi plus tard, j’étais enfin prête à recevoir un appareil acoustique transmettant les sons par conduction osseuse.  C’est parfait dans des situations face à face  mais plus difficile dans des sessions de groupe ou dans des auditoriums.  Dans ces cas-là, je me fie à l’appareil auditif qui m’aide jusqu’à un certain point.

Les appareils acoustiques sont une merveilleuse invention certes mais ne remplaceront jamais l’audition perdue.  Chaque personne doit donc déterminer si il/elle veut participer à la communauté ou vivre reclus à domicile.  J’ai choisi de continuer à travailler et de m’impliquer car j’aime les gens.  Je suis à jamais reconnaissante à tous ceux et celles qui m’ont ont toujours fait confiance et qui m’ont encouragée à rester active.

C’est aussi mon vœu le plus cher pour tous les malentendants!

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Les pôles de le la réalisation professionnelle

Anu Pala

Je m’appelle Anu Pala.  Je travaille pour la Neil Squire Society non seulement dans les programmes d’emploi mais encore en tant qu’animatrice d’ateliers et assistante professionnelle (encadreure).  Nous aidons les personnes ayant des déficiences physiques à explorer les choix de carrière, à maintenir un bien-être intégral et à obtenir un emploi approprié.

Je suis une employée loyale et dévouée; j’aime la diversité, je m’implique dans des projets qui favorisent mon épanouissement et mon développement et je me passionne pour des travaux qui me permettent d’inspirer les autres, de les habiliter et de les aider à atteindre leur plein potentiel.

Je suis aveugle depuis une vingtaine d’années.  Je me suis tout d’abord trouvée démunie quant à l’orientation de ma carrière et de ma vie; puis, au fil du temps, en m’adaptant à ma nouvelle réalité, je me suis familiarisée avec le logiciel JAWS, un lecteur d’écran permettant aux personnes aveugles comme moi d’accéder à l’informatique grâce au clavier et aux sons.  Et là, s’est ouvert tout un monde de possibilités.

Au fil des ans, j’ai occupé plusieurs postes, surtout en radio et dans le secteur sans but lucratif.  J’ai été confrontée à plusieurs obstacles, notamment :

  • Documents imprimés inaccessibles (brochures et autres documents au formatage complexe)
  • Logiciels non accessibles avec JAWS
  • Manque de connaissances et de visibilité de sujets spécifiques

J’ai surmonté ces obstacles en assumant ma perte de vision et en étant bien dans ma peau.  De ce fait, j’ai alors été en mesure de discuter de mes besoins en toute confiance, notamment de demander des ressources et des technologies de communication électroniques.  J’ai développé d’excellentes et positives relations avec mes collègues, lesquelles  se sont avérées bénéfiques, notamment lorsque les formats électroniques n’étaient pas disponibles. En ce qui a trait au manque de connaissances et de visibilité, j’ai tout d’abord commencé par prétendre que je savais, jusqu’à ce que je les acquière.  Mais cela s’est retourné contre moi une fois.  Cette expérience m’a rapidement amenée à réaliser l’importance d’apprendre des autres, même de mon chef de service.  J’ai ainsi appris qu’en demandant de l’aide à la haute direction, je m’habilitais et  j’atténuais mon niveau de stress et réduisais l’accablement conséquent.  Demander de l’aide n’est pas un signe de faiblesse, bien au contraire.  Cela vous rend responsable de vos actions et rehausse votre niveau de professionnalisme.

J’ai eu la chance de travailler avec des employeurs qui ont encouragé mon perfectionnement professionnel.  La formation m’a été parfois offerte; d’autres fois, je l’ai sollicitée.  Les soutiens n’ont pas toujours été d’ordre financier.  Il s’agissait quelquefois de m’accorder des jours de congés pour aller suivre des cours ou encore de m’autoriser à travailler quatre (4) jours par semaine.

Je ne peux dire, à l’heure actuelle, que ma réussite est achevée, mais je crois fermement que mon attitude positive, ma capacité d’établir et de maintenir des relations, mon désir d’aventures et mon ouverture d’esprit ont été les pôles de mon incroyable odyssée de carrière et de ma croissance personnelle et professionnelle.  Conserver un emploi m’a permis d’améliorer ma qualité de vie, de voyager à travers la planète, de prendre soin de moi, de combler mes besoins personnels et, surtout….de participer à la société et de travailler dans un domaine où j’ai la chance de donner à mon tour.  Je n’oublierai jamais la quête d’orientation professionnelle et l’aide reçue pendant toute cette période et tout mon parcours.  Et aujourd’hui, je peux la  rendre.  Je suis privilégiée.

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Mon cheminement professionnel

Colleen Watters

Je n’ai sérieusement commencé mon cheminement professionnel qu’après l’obtention de ma maitrise en travail social de l’université du Manitoba (U.M).  Puisque la plupart de mes recherches étaient jusqu’alors axées sur la condition des personnes handicapées, et que c’était un domaine très intéressant, j’ai alors décidé d’orienter ma carrière vers les politiques et la recherche visant les personnes avec des déficiences.

C’est dans le secteur sans but lucratif où les salaires sont inférieurs à ceux du secteur public, que j’ai principalement travaillé.  J’ai été chercheure dans le domaine du handicap, coordonnatrice de la Semaine nationale pour l’intégration des personnes handicapées au Manitoba, consultante en matière d’incapacité à la Faculté de travail social de l’U.M. et enfin coordonnatrice de conférences et événements visant les personnes avec des déficiences.  La plupart de ces emplois étaient à contrat, avec très peu de sécurité d’emploi et aucun avantage social.  Mais je travaillais dans un secteur satisfaisant et avec des personnes que je connaissais.  Les contrats ont toutefois engendré une certaine souplesse dans mes emplois et je pouvais travailler à domicile.  L’inconvénient, c’est que je devais moi-même assumer les coûts des mesures d’adaptation liées aux déficiences (notamment embaucher une auxiliaire pour m’aider à formater les rapports et autres documents, tâche difficile à cause de ma cécité).  Parmi les autres dépenses liées aux limitations fonctionnelles, notons les transports (lorsqu’un service Handi-Transit n’était pas disponible) et l’achat d’un lecteur d’écran.  Ce logiciel informatique retranscrit par synthèse vocale le texte d’un écran d’ordinateur, permettant aux personnes aveugles de savoir ce qui est affiché.  Autre inconvénient du travail à contrat, le chômage qui suit la fin du contrat ou du financement.  Les contractants n’ont pas droit à l’assurance-emploi.  J’ai toutefois occupé quelques postes de longue durée, avec avantages sociaux et sécurité d’emploi.  Dans l’un d’entre eux notamment, j’ai coordonné le programme de mentorat pour les étudiants de la Faculté de travail social de l’U.M.

J’ai soumis ma candidature pour tous les postes vacants qui s’ouvraient au gouvernement ou dans de plus grandes organisations de personnes handicapées et dont les critères correspondaient à mes compétences.  Chaque fois que j’arrivais à avoir une entrevue, la question d’accommodements dans l’emploi se posait.  La plupart des employeurs comprenaient que j’ai besoin d’un lecteur d’écran pour exécuter mes tâches mais invoquaient mon manque d’expérience pour le poste.  Une fois, j’ai postulé comme coordonnatrice de soins à domicile.  Les intervieweurs se demandaient comment je pourrais, à cause de ma cécité, évaluer les besoins des clients et aller les voir à domicile.  J’avais toutefois anticipé ce genre de question et soigneusement préparé mes réponses.  Et j’ai eu le poste.

Et j’ai continué à cheminer jusqu’à présent.  Depuis trois ans, je travaille comme analyste des politiques au Bureau des personnes handicapées (BPH) du Manitoba.  Je coordonne la mise en vigueur intra-gouvernementale des politiques visant les personnes avec des déficiences, je surveille la participation du BPH à la Semaine nationale pour l’intégration des personnes handicapées, je représente le Bureau à des comités communautaires et à des comités de planification de conférences et je prépare les affectations ministérielles.  Dans mon environnement de travail, les accommodements requis pour pallier à ma déficience ont été instaurés et je bénéficie d’un horaire très souple.  J’ai d’excellentes collègues, sensibles à mes besoins liés à mes limitations fonctionnelles.  Un travail de rêve car j’ai la chance de performer dans le domaine des politiques visant la condition des personnes handicapées, secteur qui me passionne toujours autant. 

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L’importance des mentors

John Rae

Tous les jeunes doivent se poser l’inévitable question « qu’est-ce que je veux faire de ma vie? ».  Cette question n’est déjà pas facile en général mais elle est encore plus difficile pour nous, personnes handicapées, dont les options sont censées être plus limitées.

Jeune, j’avais envisagé deux possibilités :  le droit et l’enseignement.  À l’époque, obtenir les livres requis dans un format accessible à une personne aveugle était encore plus problématique qu’aujourd’hui.  J’ai donc décidé de laisser tomber cette voie même si, plus tard, j’ai rencontré d’autres avocats aveugles et que j’ai quelquefois regretté de ne pas avoir persévéré.  J’avais aussi réalisé dans ce temps-là que la pratique du droit et l’image qu’en donnait mon feuilleton favori, Perry Mason, n’avaient que peu en commun avec le travail d’un avocat.

Venait ensuite l’enseignement.  Or, peu de temps après mon entrée à l’université, les emplois d’enseignants en général et de professeurs d’histoire au niveau secondaire en particulier, se sont raréfiés et j’ai dû revoir mes projets.

Je m’appelle John Rae.  Je suis un Torontois dont la vision s’est graduellement détériorée à cause d’une rétinite pigmentaire.

De nombreuses  personnes, beaucoup trop d’ailleurs, qui grandissent avec une déficience doivent surmonter les effets d’un milieu surprotecteur mais bien intentionné.  Je ne fais pas exception à la règle.  Trois personnes, que j’appelle mes « mentors » ont joué un rôle prépondérant tout au long de mon évolution, depuis le jeune homme docile et surprotégé jusqu’à l’homme que je suis aujourd’hui.  J’ai grandement apprécié leur amitié, leur soutien et leurs conseils.

Pour échapper à mon milieu surprotecteur, j’ai quitté la maison et je suis allé étudier à l’Ontario School for the Blind (à présent la W. Ross MacDonald School).  Plus tard, j’ai entrepris une carrière en dents de scie à l’université de Windsor et j’y ai rencontré feu Gerry Gaughan.  Gerry était unique en son genre, un blanc, aveugle, qui avait passé de nombreuses heures dans les clubs de blues de Detroit.  Je pense que pendant nos rencontres j’en ai plus appris sur la vie que je n’ai pu le faire avec les personnes que j’ai rencontrées par la suite.

Puis vint Mike Yale qui m’a permis d’obtenir mon poste d’organisateur communautaire auprès de la Blind Organization of Ontario with Self-Help Tactics (BOOST) et j’ai sauté à pieds joints dans l’animation communautaire.  Ce poste est arrivé à un moment critique de ma vie :  il a déclenché mon engagement dans la défense des droits des personnes handicapées et, à plus grande échelle, dans la défense des droits de la personne.

Et vint enfin feu Barbara Earle, fondamentalement convaincue que je pouvais changer du jour au lendemain et abandonner mon important activisme au sein du mouvement de défense des droits des personnes handicapées pour devenir un fonctionnaire impartial.  Une idée saugrenue qu’elle a eue énormément de mal à vendre aux dirigeants du ministère du Travail de l’Ontario.  Mais heureusement pour moi, elle a cru en moi et a persévéré.  Je me suis finalement joint à son équipe en 1980 et, sans l’avoir vraiment cherché, j’ai commencé mon fonctionnariat auprès du gouvernement ontarien, une carrière qui a duré vingt-quatre ans dans différents postes.

C’est la foi de ces trois personnes en mes capacités qui a fait toute la différence.  Elles m’ont lancé sur la piste et, une fois engagé par le gouvernement, j’ai bénéficié du Fonds d’adaptation des emplois de la fonction publique pour les personnes handicapées afin d’avoir accès à l’équipement et aux lecteurs personnels requis pour exécuter mes différentes tâches.  Ce Fonds avait été créé pour que le coût des appareils et accessoires d’adaptation en milieu de travail soit puisé dans une caisse centralisée et non dans le budget des programmes.  Ainsi, tous les ministères s’en prévalaient pour fournir les accommodements appropriés à leurs employés handicapés.  De ce fait, plus aucune question ne se posait quant au coût de l’embauche et au maintien de l’effectif.

Je suis convaincu que nos expériences professionnelles peuvent grandement aider celles et ceux qui luttent désormais pour établir leurs carrières.  On prévoit d’ailleurs que tous les individus auront plusieurs carrières au cours de leur vie.  Par conséquent, l’aide est beaucoup plus importante de nos jours qu’elle ne l’était pendant ma jeunesse.

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La voie du succès : pavée par l’auto revendication

Natalie Martiniello , B.A.

J’ai toujours pensé que je travaillerais dans le secteur des déficiences (notamment la déficience visuelle et la cécité).  En tant que cliente du MAB-Mackay Rehabilitation Center, j’ai eu accès à un conseiller en emploi qui m’a aidée à trouver un travail dans mon secteur d’intérêt, à savoir les personnes handicapées, et qui, après l’obtention de mon diplôme au Collège Dawson en 2007, a facilité mon entrée au Réseau de recherche Adaptech.  À l’époque, il n’y avait pas de possibilité d’emploi dans ce Réseau mais j’ai communiqué avec Catherine Fitchen (l’une des codirectrices de l’équipe), espérant qu’elle penserait à moi à l’avenir.  Ce qui fut fait et depuis lors, j’ai travaillé chez Adaptech tous les étés.

Le Réseau de recherche Adaptech est composé de chercheurs et d’étudiants qui examinent les expériences éducatives des étudiants handicapés du niveau postsecondaire.  Avec l’aide du Conseil de recherches en sciences humaines et une subvention provinciale du Fonds québécois de la recherche sur la société et la culture (FQRSC), le Réseau Adaptech axe ses recherches sur les obstacles qui entravent et les facteurs qui facilitent la réussite scolaire de ces étudiants et l’obtention d’un emploi à la fin des études.  Mes années de service chez Adaptech m’ont non seulement permis d’acquérir des compétences professionnelles mais encore de me faire un nom et de réseauter dans ce domaine – une voie qui continue à ouvrir des portes.

J’ai dû, pour pouvoir travailler chez Adaptech, assimiler des aptitudes totalement nouvelles.  Dans le cadre du programme d’aide de la RAMQ, j’ai obtenu les technologies d’adaptation requises et j’ai immédiatement demandé au MAB-Mackay Rehabilitation Center, une formation en Excell et autre programme informatique.  En m’allouant des fonds pour défrayer le coût de certains accommodements, le Programme d’aide à l’intégration en emploi du Québec a également contribué à ma réussite chez Adaptech.  Après quelques semaines, j’étais non seulement capable d’exécuter toutes mes tâches mais je supervisais en outre le travail d’un autre étudiant d’été et coordonnais un vaste projet de recherche.

Malgré ma cécité innée, j’ai fait toute ma scolarité dans le système régulier.  Ces premières expériences ont été inestimables.  J’ai acquis, dès le début, les compétences requises pour réussir dans un environnement pas forcément conçu pour être accessible ainsi que la capacité de communiquer et de revendiquer en mon nom.  J’encourage les parents d’enfants aveugles ou ayant une déficience visuelle (ainsi que leurs enseignants), à reconnaître l’importance de ces habiletés car ce sont des pôles vecteurs de réussite.  Ainsi, si je n’avais jamais étudié le Braille dans mon enfance, je devrais mémoriser tous mes exposés de conférences et je serais incapable de me référer à mes notes devant l’auditoire.  Au contraire, je suis en mesure de travailler et de performer sur le même pied d’égalité que mes collègues.

Ma réussite chez Adaptech est due, en partie, à mes employeurs qui, interpellés par mon dévouement et mon intérêt, m’ont permis de me lancer dans un domaine totalement nouveau et, d’autre part, à ma propre capacité de m’organiser et d’accéder à des services disponibles.  J’ai la chance d’avoir un employeur qui comprenne la diversité et applique les principes de l’accessibilité universelle.  Pourtant, selon les résultats de nos recherches, de nombreux étudiants subissent de la discrimination dans l’emploi et sont confrontés à plusieurs obstacles en ce qui a trait aux accommodements.  Même s’il reste encore beaucoup de chemin à parcourir en ce qui a trait à l’égalité des chances, c’est par l’auto-revendication et par une constante sensibilisation  publique que nous bâtirons une société plus inclusive.

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Éducation et formation


Apprentissage continu :  Une clé de la réussite professionnelle

Gary Birch

Je suis quadriplégique de type C6-C7, suite à un accident de voiture survenu en 1975.  Je travaille depuis 1988, après avoir commencé comme directeur de la recherche et du développement pour une importante société nationale sans but lucratif, la Neil Squire Society. En 1992, j’ai été nommé directeur général tout en continuant à chapeauter le service au sein duquel j’avais été embauché.  Et c’est toujours le cas actuellement.  Je suis en particulier responsable de la rédaction de rapports, de la programmation informatique, de l’élaboration de demandes de subventions, des courriels, de la participation à une vaste gamme de conseils et de comités consultatifs, sans oublier les déplacements.

Pour moi, le plus important obstacle fut sans aucun doute l’accès physique à l’édifice et à mon poste de travail.  Fort heureusement, mon employeur a toujours veillé à ce que cet accès soit facilité.  Étant donné la teneur de mes tâches, c’est certainement l’accès aux technologies informatiques qui est l’accommodement le plus indispensable.  À mes débuts, j’utilisais des attelles (prothèses) pour les mains afin d’entrer les données sur ordinateur.  Puis, alors que s’amélioraient les technologies de reconnaissance vocale, j’ai adopté le logiciel Dragon Naturally Speaking comme principale technique d’entrée de données. Mon employeur en défraye les coûts et s’assure que j’obtienne le logiciel de reconnaissance vocale Dragon, le plus actualisé.  Il m’a également fourni la formation initiale pour utiliser cette technologie et continue à assurer ma formation en cas d’actualisation de mon ordinateur ou de la fonctionnalité de commande vocale.

Autre accommodement dans ma carrière, l’immense souplesse accordée au fil des ans par mon employeur quant à mon horaire.  Je travaille l’équivalent d’une semaine à temps plein.

Après ma blessure, j’ai eu la chance de recevoir l’aide financière et émotionnelle dont j’avais besoin pour aller à l’université et obtenir mon diplôme de premier cycle en génie électrique, puis mon doctorat en génie biomédical.  Cet investissement dans mon éducation et ma formation s’est révélé inestimable non seulement pour obtenir un emploi mais encore un emploi dans un secteur qui m’intéresse énormément et plus encore, me passionne.  Cela a été un facteur crucial en ce qui a trait à ma capacité de maintenir un emploi et en effet, de progresser professionnellement.

Quant aux facteurs clés de ma réussite, le plus important est sans aucun doute la formation que j’ai obtenue à l’université et les occasions de perfectionnement professionnel qui m’ont été données tout au long de ma carrière.  Autre facteur important, ma vigilance vis-à-vis de ma santé et de mon bien-être, renforcée par mon employeur d’ailleurs, non seulement grâce à l’assurance-maladie complémentaire mais encore grâce à la flexibilité accordée pour régler, de la manière la plus appropriée, les questions de santé qui se posent.

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La vie comme chercheur aveugle en cancérologie

Dr. Mahadeo A.  Sukhai

Je suis chercheur en cancérologie, particulièrement chargé de mettre sur pied un ensemble de nouveaux panels géniques du cancer, susceptibles d’être utilisés lors de diagnostics cliniques dans des centres de cancérologie;  je suis également chargé de gérer une équipe de chercheurs, collaborer avec des médecins, des professionnels de la santé et des chercheurs,  guider des étudiants et des stagiaires, élaborer et rédiger des propositions  de projets, des rapports et des documents.  Avec  mes travaux,  y compris ceux réalisés  lors de ma formation de doctorant et de mon stage en recherche au niveau postdoctoral, je cherche à accroître  notre compréhension des causes, du diagnostic et du traitement de la leucémie.

Atteint de cataracte à ma naissance, j’ai une très grave déficience visuelle. Cette caractéristique,  malvoyance et mon choix professionnel,  me différencie dans les milieux scientifiques et dans les collectivités de personnes handicapées.  J’ai toujours aimé les sciences et je n’ai jamais envisagé d’autre carrière.  De ce fait, je suis l’un des rares chercheurs biomédicaux canadiens avec une déficience visuelle et plus rare encore, l’un des  seuls scientifiques qui, bien qu’aveugle de naissance, ait choisi ce type de carrière, ait maintenu le cap tout au long de ses études et ait professionnellement réussi dans ce domaine.  Selon mes expériences, les étudiants handicapés se détournent souvent des carrières scientifiques,  non par manque de compétences ou d’intérêt mais par manque d’encouragements ou d’un  découragement actif de la part des enseignants, parents, pairs et de leur réseau de soutien. J’ai certes affronté une énorme résistance dans mes choix professionnels mais les encouragements prodigués par plusieurs de mes enseignants et professeurs illustrent  clairement la prévalence d’un mentorat  judicieux sur un négativisme persistant.

Malgré mon très fort désir d’axer ma carrière sur la recherche en cancer, mes succès reposent sur ma détermination à réorienter mon éducation vers les autres – les pairs, les membres de la faculté et le système postsecondaire dans son ensemble – afin de m’assurer qu’ils comprennent et respectent mon choix de carrière et  possèdent les outils requis pour le comprendre.  Ce fut une sorte de test pour tous les étudiants handicapés qui décidèrent de suivre mes traces – car et surtout pendant mon doctorat et mon post-doctorat,  de concert avec les superviseurs de la faculté, l’administration du service  et de l’université, les responsables du milieu hospitalier où je travaille,   j’ai  confronté, discuté et résolu des problèmes de faisabilité, de responsabilité, d’intégrité académique et de propriété intellectuelle, d’accommodements sous forme de technologies d’adaptation, d’aide aux expériences scientifiques, de modifications de projets et de responsabilités afin de les adapter à mon jeu de compétences et de m’assurer que je puisse réussir à partir de  mon propre engagement en ce qui a trait à mon choix professionnel.

D’une certaine manière, je ne peux concourir avec mes pairs voyants – je ne peux effectuer rapidement des expériences, je ne peux opérer et  je ne peux me lancer dans de délicates manipulations à cause de ma médiocre coordination dextérité-vision.  J’ai décidé, au début de ma carrière, que je me concentrerais sur ce que je fais le mieux, que je serais observateur et aborderais mon emploi de manière globale et intégrée :  ainsi, les compétences acquises dans d’autres  secteurs de ma vie seraient appliqués, de façon novatrice, à mon cadre de travail.  Le résultat, et malgré la perception égalitaire accolée à la recherche scientifique, c’est qu’au fil des ans j’ai été reconnu,  sollicité et récompensé aux niveaux national et international, apprécié comme chef de file au sein des laboratoires pour lesquels j’ai travaillé. Et c’est cette approche qui a catalysé mon succès et qui me permettra, à l’avenir, de saisir d’autres possibilités.

Il me faut absolument reconnaître que cela n’avait pas été programmé :  cette place ne m’était pas destinée.  Mon succès n’avait été ni ordonné ni  légiféré ni prescrit par des politiques d’équité en matière d’emploi et d’action positive.  Je suis un scientiste, chercheur en cancérologie, parce que je l’ai voulu, que j’ai travaillé durement pour acquérir les compétences requises,  pour que mon rêve devienne réalité; parce que j’ai eu d’excellents mentors et que tous ont manifesté énormément de souplesse et de créativité pour m’aider à atteindre cet objectif.  Cette définition du succès professionnel et cet argument qui s’y rapporte sont tout à fait personnels.  Ne l’oublions pas car nous en bénéficierons tous.  J’en suis convaincu!

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Une formidable et passionnante carrière propulsée par la formation en milieu de travail

Yvonne Peters

Pendant tout mon secondaire, j’ai été encouragée à poursuivre mes études à l’université.  Je n’ai jamais contesté ce point.  D’ailleurs, je rêvais d’une grande carrière après mes études. Quand le jour est arrivé (au milieu des années 1970), j’ai eu le choc de ma vie.  Le monde du travail regorgeait de comportements négatifs, de stéréotypes et de méprises quant au potentiel des employés aveugles. 

Quel réveil brutal!  J’avais toujours pensé être capable de dissiper tous les malentendus sur la cécité et prouver que j’étais compétente et performante. Je n’étais absolument pas prête à  faire face à cette  avalanche de clichés  sur les malvoyants, profondément ancrés chez les employeurs. 

Les directeurs que j’ai rencontrés ne m’ont pas interrogée sur mes qualifications ni sur mon éducation.  Ils se sont davantage inquiétés quant à  ma capacité de trouver les toilettes,  ma sécurité et quant aux éventuelles personnes qui voudraient bien déjeuner avec moi.  Ils ont évoqué les difficultés auxquelles leurs parents âgés avaient été  confrontés en perdant la vue.  Ils m’ont conseillé de contacter l’INCA qui savait comment aider les personnes aveugles.

J’ai eu la chance d’entendre parler d’un poste de conseiller téléphonique pour le Saskatoon Community Aid Resource Centre.  Je me suis présentée et j’ai rencontré le directeur, un Américain conscrit réfractaire,  au point de vue politique plutôt progressiste en matière de développement communautaire.  Mes antécédents l’intéressaient certes;  mais ce qui l’intéressait davantage sans doute, c’était mon éventuelle admissibilité  à une subvention de  formation en emploi, ce qui aurait alors  repêché sa petite organisation.

J’ai été engagée et j’ai suivi une formation en milieu de travail, cofinancée par mon employeur et par le gouvernement de la Saskatchewan.  C’était mon ticket  pour mon voyage professionnel vers une destination courue :  le monde du travail.  J’ai acquis des compétences pour les tâches quotidiennes, pour m’entendre avec mes collègues et pour concevoir des stratégies me permettant de vaincre les obstacles en milieu de travail.  Mais mon plus grand gain  fut  d’apprendre à travailler avec de nombreux groupes communautaires, œuvrant tous pour l’avènement d’un monde meilleur, de me conscientiser socialement, de reconnaître les diverses facettes et les divers niveaux de l’inégalité, de me lancer dans une carrière de travail social et de défense juridique des droits de la personne.

Grâce à tous ceux et celles qui ont cru en moi, j’ai eu une formidable et passionnante carrière.  Mais je suis particulièrement reconnaissante à Bruce McKee qui, motivé par son sens aigu de la justice et peut-être par quelques deniers de formation en emploi, m’a permis  de prouver que j’étais capable de gagner ma vie et de contribuer à la société.

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La valeur du travail

Sandra Carpenter

J’avais probablement onze ou douze ans et vivais dans un établissement pour enfants handicapés quand, un jour, plusieurs d’entre nous furent amenés visiter un atelier protégé.  Pour ceux qui l’ignorent, c’est dans les ateliers protégés que finissaient les personnes handicapées; elles y travaillaient à la pièce et étaient payées en fonction de leur rendement, jusqu’à un maximum leur permettant encore d’être admissibles à la pension-invalidité.  À cette époque, cela représentait dix à vingt dollars par mois, peut-être moins.

Nous avons donc fait une tournée de l’atelier.  Des personnes ayant diverses déficiences exécutaient différentes fonctions selon, bien sûr, leurs limitations fonctionnelles.  Ainsi, un groupe de personnes en fauteuil roulant, atteintes d’une forme relativement moyenne de paralysie cérébrale ou d’affections musculo-squelettiques, étaient assises autour d’une table et assortissaient des écrous et des boulons.  La dame en charge de la visite nous a dit « aujourd’hui, leur travail s’inscrit dans un contrat de production de petits paquets de quincaillerie pour l’industrie du détail.  Au fil des ans, nous avons eu différents types de contrats – comme les paquets de cartes de vœux….» et j’ai arrêté d’écouter.

Elle nous a ensuite amenés dans un endroit où des personnes handicapées plus ambulatoires tissaient des tapis ou des napperons sur des métiers.  Son débit s’était alors animé.  Ces travailleurs semblaient un peu plus satisfaits mais, comme je l’ai déjà mentionné, j’avais arrêté d’écouter.

J’étais en train de me dire « jamais, jamais je ne finirai ici».  Je venais de réaliser que la société n’avait que peu d’attentes quant à notre avenir.

Ma mère en revanche n’était pas du même avis.  Je me souviens que le premier jour de maternelle elle m’a déclaré (elle nie l’avoir dit à haute voix mais autant que je sache, je ne sais pas lire dans les pensées des autres) « eh bien, tu ne grandiras peut-être pas et n’auras pas de famille mais tu pourrais être comptable!  Tu as un cerveau. »  C’était remarquable et à plusieurs titres.  Tout d’abord, les femmes ne travaillaient pas comme comptables à l’époque.  Elles étaient infirmières, enseignantes ou secrétaires.  J’ai ensuite réalisé que ma mère était étrangement émancipée, à une époque où les femmes étaient censées ne vouloir qu’une chose : élever leur famille.  Et troisièmement, c’est sans doute de là que provient mon blocage en mathématiques.  Trop de pression, trop tôt.

Mais revenons à mon histoire.

À partir de ce jour-là, je me suis promis d’aller dans une école secondaire « normale » puis au collège.  Car sans diplôme – même à l’époque et il y a plus de quarante ans -, pas de bon poste; de plus, je ne pouvais physiquement exécuter les tâches qu’effectuent les non-diplômés.  Grâce à l’assistance des Services de réadaptation professionnelle de l’Ontario (SRP), je suis entrée au collège où j’ai passé un test de Q.I. – sans aucun problème puisque j’en avais déjà passé trois ou quatre auparavant.  J’ai obtenu d’excellentes notes en arts, journalisme et travail social.  Les SRP ont accepté de me parrainer en travail social.  Le domaine « arts » était trop incertain; et le journalisme comportait un composante photographie obligatoire, que j’étais incapable d’assumer.

J’ai finalement obtenu un diplôme collégial en travail social et j’ai été la seule étudiante, dans ma classe de travailleurs sociaux valides, à avoir un emploi avant même la fin de mes études.  C’est vrai.  Cela s’est passé comme ça.  J’ai obtenu mon premier emploi au Bureau des prestations familiales (pension-invalidité) qui partageait les mêmes locaux que les SRP.  Je crois que mon intervenante SRP avait fait marcher le piston pour que j’obtienne une entrevue.  Cet entretien, avec un comité de trois personnes, s’est très bien passé.  L’une d’entre elles voulait vraiment m’engager, je l’ai su plus tard. Mais une autre – à qui incombait la décision finale -, était beaucoup moins sûre.  Elle a raconté qu’elle était rentrée chez elle et avait prié toute la nuit.  Je suis un peu perplexe à ce sujet.  N’oublions pas toutefois qu’à l’époque, les personnes handicapées n’étaient même pas visées par le Code des droits de la personne et que le mot « accommodement » signifiait motels, hôtels, chambres et logement.

Contrairement à d’autres, je ne suis pas restée au gouvernement.   Je suis allée dans la communauté pour participer à la création du premier (et toujours le seul) centre de vie autonome à Toronto.  Quelques années plus, j’ai saisi une offre du Programme d’emploi des personnes handicapées du gouvernement ontarien.  Et là, je me suis confortée dans une approche fondée sur les droits pour accommoder les personnes handicapées en milieu de travail.  Nous étions chargés d’instaurer un Fonds d’adaptation centralisé pour éviter aux personnes handicapées d’être défavorisées lors de transferts dans de plus petits ministères ontariens.

J’ai occupé plusieurs emplois depuis, au gouvernement comme dans la communauté et j’ai pratiquement travaillé toute ma vie.  En terminant, si ma mère, les SRP et la chance ont contribué à mon succès, c’est surtout au dénominateur commun de tous mes emplois que je dois ma réussite : l’optique des personnes handicapées.

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L’inclusion scolaire:  la clé du marché du travail

David Martin

À la fin des années 1960 et au début des années 1970, à Edmonton, je suis allé dans une école adaptée pour enfants handicapés, le Glenrose School Hospital.  À cette époque, c’est dans ce genre d’établissement scolaire qu’étaient inscrits les enfants ayant de graves déficiences car on croyait que nous avions besoin d’un cadre spécial avec soutiens médicaux. Rares étaient ceux qui pensaient que nous pouvions aller dans une école régulière avec des enfants non handicapés.

Outre les infirmières, médecins et divers thérapeutes, le Glenrose employait aussi des travailleurs sociaux chargés d’aider les élèves à planifier leur avenir d’adulte.  Je n’oublierai jamais mon premier rendez-vous avec mon travailleur social.  J’avais environ 13 ans.  Nous avons entre autres parlé de la possibilité de travailler à la fin de ma scolarité.  Il m’a répondu qu’il était peu probable que je trouve un emploi à cause de ma déficience.  Le message était clair! Il était en train de me dire que je pouvais oublier toute carrière à l’avenir.  Aujourd’hui, cette histoire paraît choquante.  Mais au début des années 1970, le travailleur social traduisait la réalité de la plupart des personnes handicapées.  La société n’avait que peu d’attentes à leur égard et les chances d’emploi étaient rares.

En 1975, mon père a été transféré à Winnipeg par les autorités militaires.  Et pour la première fois de ma vie, j’ai rapidement appris ce qu’impliquait une scolarité régulière.  Contrairement à Edmonton, Winnipeg abandonnait déjà ses écoles adaptées pour enfants handicapés et j’avais été inscrit dans une école du voisinage en 9ème année.

Cela a eu un profond impact sur moi.  J’ai bien travaillé à l’école et j’ai réalisé que j’étais au même niveau académique que mes pairs.  Ma confiance s’est accrue et j’ai commencé à échafauder des rêves pour l’avenir.  Mon intégration avec des enfants non handicapés m’a appris que je pouvais les concurrencer dans plusieurs secteurs et  faire pratiquement les mêmes choses qu’eux.

Pendant toutes ces années de scolarité publique, l’entrée à l’université était devenue mon objectif.  Après mon diplôme, à la fin de ma 12ème année, et grâce à l’aide du Programme de réadaptation professionnelle des personnes handicapées, je suis entré à l’université.  La subvention accordée par ce programme à coûts partagés entre les gouvernements fédéral et provincial, couvrait mes frais d’inscription et mes livres.  J’y ai développé des compétences et une auto-confiance qui sont devenues de précieux atouts pendant mes trente années de carrière au sein du mouvement de défense des droits des personnes handicapées.  Grâce aux impôts que j’ai payés et à l’aide sociale que je n’ai pas touchée, l’investissement effectué dans mon cas pour m’envoyer à l’université a été plusieurs fois remboursé.

J’ai eu de la chance d’aller à l’école régulière, car cela m’a permis d’être intégré avec des enfants non handicapés et d’être éduqué sur le même pied d’égalité.  Si j’avais été de la génération précédente, je n’aurais probablement jamais su ce que c’était que de côtoyer des pairs non handicapés.  Mon épanouissement et ma capacité d’emploi dans la société en général en auraient été grandement affectés.  Développer mon sentiment d’appartenance sociétale et savoir que j’avais toutes les compétences requises pour exercer une participation citoyenne ont été plus que cruciaux.  Je me demande quelle serait la réaction du travailleur social qui m’avait déconseillé de penser à une carrière, si nous nous rencontrions à nouveau aujourd’hui.

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Un continuum de services – le bon vieux temps!

Traci Walters

Au cours de ma dixième année, mon corps commença à réagir étrangement : genoux, poignets, coudes, chevilles, doigts, orteils et même ma mâchoire devinrent enflés; ils l’étaient tellement que je ne pouvais les bouger.  Je pouvais à peine marcher ou m’habiller ou utiliser mes mains.  J’ai été immédiatement hospitalisée et, après plusieurs tests, le diagnostic fut posé : j’étais atteinte de la maladie de Still – une déficience du système auto-immun.  Pendant sept (7) ans, j’ai passé plus de temps à l’hôpital qu’à l’école.  J’ai eu la chance d’échapper à la douleur et j’ai été en rémission de 17 à 26 ans.  Enfin, un certain soulagement!

À 26 ans, ma vie a radicalement changé.  Ayant épousé un Sud-africain, j’ai vécu en Afrique du Sud pendant les années 1980.  C’était une nation en état d’urgence, auquel d’autres pays appliquaient des sanctions et des embargos afin de démanteler son système d’apartheid raciste.

Mes articulations commencèrent à enfler, l’une après l’autre, jusqu’à avoir 3 à 4 fois la taille normale.  Un jour, il y eut une alerte à la bombe dans le centre commercial où je magasinais habituellement ainsi que  dans une garderie locale.  Je me suis dit « je m’en vais! ».  J’étais sûre que mes troubles physiques étaient directement liés aux troubles politiques et environnementaux dans lesquels je vivais.  Le stress peut souvent déclencher d’actives poussées de maladie pour les personnes ayant un système auto-immun déficient.  Je n’allais vraiment pas bien et je décidais alors de rentrer au Canada.  J’ai été hospitalisée peu de temps après mon retour.

Quelques semaines après mon admission au vieil hôpital Wellesley de Toronto, une travailleuse sociale vint me voir et, après avoir consulté on dossier, conclut que je devrais être référée à un programme de réadaptation professionnelle (un programme à coûts partagés entre les gouvernements fédéral et provincial).  Elle m’a expliqué que le travail physique et le stress étaient vecteurs de mes poussées incontrôlées et que je devais absolument repenser mes aspirations de carrière.  Je devais, d’après elle, avoir un emploi qui ne m’accablerait pas physiquement.  Et le programme pourrait m’aider à tracer mon cheminement professionnel.

Peu de temps après ma sortie de l’hôpital, je reçus un appel d’un agent du programme de réadaptation professionnelle (souvent appelé réadapt. par les consommateurs.) qui m’avisa que la première étape à franchir était de passer ne évaluation.  Elle incluait un Myers-BriggsType Indicator (MBTI), un questionnaire psychométrique conçu pour mesurer les préférences spontanées en matière de perception du monde et de prise de décision.  Je ne débordais pas d’enthousiasme quant à ce test mais il faisait partie du programme.  Et si je ne le prenais pas, je ne pourrais accéder aux mesures de soutien.

Avant le test, la conseillère qui m’avait été affectée me demanda de sortir de chez moi afin de voir comment je fonctionnais en tant que mère et femme au foyer.  Quelle ne fut ma surprise.  Je n’arrivais pas à croire que cela soit de leur ressort.  Mais on m’expliqua que mon rôle de mère et de femme au foyer était une vocation tout aussi importante, que l’on pourrait m’aider à élaborer des stratégies ainsi qu’à acquérir des accessoires fonctionnels qui faciliteraient mon quotidien, le rendant moins stressant et qui atténueraient mes douleurs et ma fatigue.  Je commençais à avoir confiance :  enfin des gens comprenaient ma situation; je n’étais plus seule avec ma déficience.

Donc peu de temps après, je passais le test MBTI.  Fait intéressant d’après les résultats de l’évaluation, c’était en « services sociaux/humains » ou en « infographie » que je devais le mieux performer.  À partir de ces constatations, le programme pouvait financer ma transition professionnelle vers l’un ou l’autre de ces secteurs.  À l’époque, je ne pouvais absolument pas envisager une carrière en infographie.  J’optais donc pour les services sociaux/humains.  J’ai toujours aimé aider les autres.  Je me souviens que ma conseillère m’avait déclaré qu’un poste de gestion en services sociaux serait sans doute la meilleure option professionnelle.  J’y ai donc pensé; j’étais à un point tournant de ma vie.  J’avais le sentiment de canaliser mes capacités vers un avenir meilleur.  Et même si c’était bien avant que je ne connaisse le mouvement de vie autonome, je contrôlais réellement le processus.  Certains conseillers du programme de réadap. professionnelle, y compris le chef de service, étaient des personnes handicapées.  Cela a certainement contribué au sentiment de contrôle par les consommateurs que j’ai éprouvé lors de la prestation de ces services.

Avec ma conseillère, nous avons immédiatement convenu que pour me lancer dans une telle carrière, il serait préférable que je retourne à l’université.  J’ai pu faire transférer certains cours universitaires et collégiaux à la Brock University.  Le programme de réadaptation professionnelle m’a fourni l’aide morale et financière dont j’avais besoin pour réduire, voire éliminer, les obstacles.

Environ un an après mon début de carrière, le journal local publia une annonce d’emploi pour un poste de « coordonnateur » dans une toute récente organisation appelée la Niagara Association for Physically Disabled Persons.  Les personnes handicapées étaient particulièrement incitées à poser leur candidature.  J’en discutais alors avec Gerry Tullio, mon ancien conseiller en réadaptation devenu depuis directeur du programme.  Nous convinrent tous deux que le poste serait parfait pour moi.  Je l’ai obtenu et Gerry devint une de mes références.  Le programme continua à me fournir l’aide requise pour régler, le cas échant, mes difficultés de transition et de maintien dans l’emploi.  Les responsables savaient pertinemment que l’obtention d’un emploi n’implique pas automatiquement la disparition de la déficience ni l’élimination des obstacles.

Peu de temps après mon arrivée, les consommateurs transformèrent l’organisation en un Centre de ressources de vie autonome pour les personnes à multi-déficiences de Niagara (NCIL) et j’en devins la première directrice générale (poste de gestion en services sociaux/humains).  Pendant toute ma période d’adaptation à ce nouvel emploi, j’eus l’aide d’un conseiller en réadaptation professionnelle.  Si je me souviens de l’évaluation et de l’assistance accordée pour de nombreux accessoires, notamment un scooter, des attelles et une adéquate position assise à mon bureau, c’est surtout leur soutien moral qui m’a le plus marquée.  Les responsables de ce programme ont travaillé conjointement avec d’autres ministères pour me permettre de bénéficier d’autres programmes de financement.  Je savais que quel que soit l’obstacle, quel que soit le conseil requis, ils étaient à portée d’un appel téléphonique.

Après quatre années fructueuses au NCIL, je me sentis capable de poser ma candidature au poste de directrice nationale de l’Association canadienne des centres de vie autonome (à présent Vie autonome Canada).  Et je l’obtins; je n’arrivais pas à croire que j’étais l’heureuse candidate.  Rien ne serait arrivé sans l’aide et les encouragements assurés par les conseillers et les agents du programme de réadaptation professionnelle tout au long de mon parcours ainsi que par mes pairs au NCIL.

Au fil des ans, le programme de réadaptation professionnelle subit une mutation pour devenir le Programme d’Aide à l’employabilité des personnes handicapées (PAEPH).  Chaque province avait la possibilité de créer et façonner son propre programme sous réserve de conformité aux principes fondamentaux du PAEPH.

Selon ma propre expérience et mes revendications pour d’autres personnes, les programmes d’emploi – incluant le PAEPH, le Fonds d’intégration et autres programmes d’emploi généraux, ont radicalement changé au fil des ans; les interventions sont effectuées à plus court terme.  Les indicateurs de succès sont basés sur « le nombre de personnes ayant obtenu un emploi »; plus c’est rapide, mieux c’est.  De nombreuses personnes handicapées ont plus qu’une limitation fonctionnelle.  Par exemple, outre ma déficience physique, je suis atteinte de dépression chronique.  La majorité des bénéficiaires du programme devaient fournir rapidement à l’agence les indicateurs de succès.  Or, plusieurs d’entre eux n’avaient pas été confrontés à de multiples obstacles.  Le terme « crémage » devint très vite populaire au fil des ans.  Il implique que les responsables des programmes ne choisissaient que les personnes pratiquement employables, n’ayant pas besoin d’importantes interventions ni, dans plusieurs cas, d’accommodements.  Le financement dépendait du nombre de personnes ayant obtenu un emploi.  On ne pouvait pas consacrer trop de temps à une personne confrontée à de multiples obstacles.

Ceux qui avaient besoin d’aide prolongée étaient jugés inadmissibles à la plupart de ces programmes.  Tout à coup, les interventions qui s’étaient avérées vraiment payantes pour les consommateurs et avaient été vectrices de possibilités d’emplois rémunérés – comme trouver un appartement accessible, sortir d’une relation abusive, déterminer comment acheter une voiture pour les déplacements, suivre des cours de gestion de la colère, etc…. -, n’étaient plus considérées comme des indicateurs de réussite professionnelle.

En tant que ex-directrice nationale de VA Canada (je suis à la retraite), je me souviens fort bien des luttes que nous avons dû mener pour expliquer que de nombreuses personnes handicapées ne peuvent se lancer directement dans des emplois rémunérés et compétitifs.  Finalement, après vingt et un (21) ans de carrière, depuis mon entrée au Niagara Centre for Physically Disabled Persons, mon corps et mon esprit ont crié grâce sous les nombreuses poussées de maladies qui devenaient la norme.  Je sais maintenant qu’elles ne découlaient pas uniquement des exigences physiques de l’emploi; elles étaient également provoquées par le stress émotionnel.

La bonne nouvelle, ce sont mes deux décennies d’emploi extraordinaire; et si je me penche sur mon passé, cette réussite était principalement due à :

  1. Une plus vaste interprétation du cheminement vers l’emploi;
  2. La participation de personnes handicapées dans les services de prestation; d’emploi, qui ont également agi comme modèle (notamment Gerry Tullio)
  3. Un continuum de services et de mesures de soutien dont on pouvait se prévaloir chaque fois qu’on était confronté à un obstacle, avant, pendant l’emploi et entre les emplois;
  4. Des indicateurs incluant les succès dans la vie personnelle, succès qui peuvent également devenir vecteurs d’emploi ou de bénévolat.

Au fil des ans, et pendant mes temps libres, je me suis profondément passionnée pour les collages, j’ignore d’où m’est venue cette inspiration créatrice.  Elle est là, point.  Pendant quelques années, j’ai regardé les magazines, les cartes, les affiches avec photos, les mots et les phrases que je voulais découper et monter en collage.  Puis, les mosaïques m’ont fascinée.  J’adore en créer et quelquefois, j’enseigne la technique à d’autres.  Dans ces collages et mosaïques, j’aime transmettre un message, un sentiment, le plus étrange, c’est l’essence même de l’infographie.  Qui sait, un jour, je serai peut-être infographiste, la seconde carrière qui m’avait été suggérée.

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Planifier ses succès

Neil Graham

J’ai commencé sérieusement ma carrière en l’an 2000, après l’obtention de ma Maîtrise en sciences de l’informatique, à l’université de Toronto.  C’était un excellent domaine à l’époque avec les point.com qui faisaient fureur.  Après quelques incursions dans ce secteur, j’ai eu la chance d’atterrir à IBM, où j’ai été protégé lorsque la bulle a éclaté en 2001.

Embauché comme programmeur, j’ai passé mes quatre premières années dans la compagnie à assouplir mon muscle codeur et à tenter de rester à l’avant-garde des continuels changements apportés à des outils censés faciliter la vie des programmeurs et la rendre plus productive.  Tout au moins, celle des voyants.  Mais pour ceux d’entre nous qui utilisent des technologies d’assistance, croire qu’un changement technologique donné engendrera une hausse productivité, ou n’importe quel autre élément positif, est tout simplement un vœu pieux.  Ce fut l’un des facteurs qui m’a incité à me tourner vers des postes de direction (chez IBM, les cheminements de carrière « technique » et « direction » sont vraiment distincts.)  J’ai réussi à faire le saut et, au cours des huit dernières années, j’ai dirigé quatre différentes équipes, variant en nombre et en mission.

On ne peut se passer de nos outils de travail et je connais de nombreux programmeurs aveugles qui ont réussi leur carrière.  Personnellement, j’essaie de minimiser l’ampleur de ma dépendance à la technologie utltra-évolutive.  C’est ma zone de confort – une échappatoire bien pratique à avoir dans un monde de travail pulsant au rythme de la compétition et de l’inconfort.

Je puis affirmer, selon mes expériences d’employé et de directeur, que tout rôle professionnel est pétri dans une intense souplesse.  Par conséquent, si votre planification professionnelle et la recherche de possibilités s’inscrivant davantage dans la réalisation de vos objectifs, sont très importantes, il est encore plus crucial de tout mettre en œuvre pour ciseler votre rôle en fonction de vos forces et de vos zones de confort et ce, autant que possible. Cela exige une connaissance de soi, de l’assertivité et du tact qu’il vous faudra sans doute maîtriser; mais les gains sont énormes en ce qui a trait à la position concurrentielle au sein de votre organisation…sans oublier les niveaux de stress personnel.  Et une fois que vous serez établi dans votre compagnie, les possibilités de carrière viendront vers vous…elles sauront où vous trouver.

Aujourd’hui, le monde du travail est un monde dur.  Ne prétendons pas qu’il est plus facile avec une déficience.  Connaissez donc bien vos forces – et vos limites aussi – et appliquez-les pour gérer votre propre rôle et votre carrière.

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Se faire offrir un emploi sur  un plateau d’argent

Marie-Josée Martin

Se faire offrir un emploi sur un plateau d’argent, sans l’avoir cherché, c’est flatteur. Ça m’est arrivé deux fois plutôt qu’une. Pourtant, ce qui m’a procuré la plus grande fierté à ce jour dans ma carrière, c’est qu’une personne de la même profession, embauchée temporairement pendant une période de pointe, me dise en partant : « Tu es exigeante, mais j’ai beaucoup appris à travailler avec toi. »

Je m’appelle Marie-Josée Martin. Je suis traductrice de formation et je travaille aujourd’hui comme réviseure dans la fonction publique fédérale. J’ai vingt ans d’expérience dans le domaine langagier. Ma carrière a été partagée entre le secteur public et le secteur privé. Environ la moitié s’est passée entièrement en télétravail. À l’heure actuelle, je télétravaille trois mois par année (l’hiver); le reste de l’année, je suis au bureau. C’est une solution gagnante pour moi autant que pour mon employeur, puisque je me fatigue moins et que je m’absente donc moins souvent. Depuis quatre ans, j’ai aussi réduit ma semaine de travail à quatre jours afin de pouvoir consacrer plus de temps à ma carrière littéraire.  Je m’apprête d’ailleurs à publier mon deuxième roman cet automne aux Éditions David : Un jour, ils entendront mes silences.

Quelle est la clé de ma réussite professionnelle? L’éducation. 

Je suis paraplégique. J’ai perdu l’usage de mes jambes à dix mois; bref, j’ai grandi avec mon handicap. Quand j’ai commencé l’école, les enfants comme moi aboutissaient automatiquement dans une classe spéciale. J’ai eu la chance d’avoir pour institutrice une femme dévouée, qui a reconnu mon potentiel. Elle m’a enseigné pendant six ans et, à la fin du primaire, elle a appuyé mes parents dans leur lutte pour que la commission scolaire m’accepte comme élève à la polyvalente « normale ». J’y ai été la première élève handicapée. Après le secondaire, j’ai poursuivi mes études et j’ai obtenu un baccalauréat « avec distinction » grâce au soutien financier de ma famille (l’État, lui, n’accordait pas de prêts aux étudiantes ou aux étudiants ayant un handicap).

Je suis sortie de l’université pendant une récession. Les emplois étaient rares. J’ai occupé une série de petits boulots. Parmi ces boulots, il y a eu un contrat de courte durée comme commis dans une usine à Montréal; l’employeur a enlevé la porte d’une des cabines dans la toilette des dames pour que je sois en mesure de l’utiliser. J’étais au bout de mes bras pour faire des photocopies, mais je me débrouillais — c’était le principal.

J’ai été de boulot en boulot pendant un an, tout en continuant à postuler tous les postes annoncés dans mon domaine, qu’ils se trouvent à Montréal ou à Yellowknife. Finalement, les contacts établis pendant mon stage universitaire (un stage non rémunéré, que j’ai même prolongé afin d’acquérir plus d’expérience) ont porté des fruits, et j’ai décroché un poste au Bureau de la traduction du gouvernement du Canada, à Ottawa. Je n’ai pas ménagé les efforts, saisissant toutes les occasions qui se présentaient, qu’il s’agisse de perfectionnement ou de projets spéciaux. J’ai ainsi rapidement démontré ma compétence. Mes collègues étaient tous plus âgés; j’étais la seule personne handicapée de l’équipe et certains ne savaient pas trop comment interagir avec moi. Ma patronne a même déjà commis l’erreur de me tapoter affectueusement la tête comme on le fait à un enfant! Pas un son n’a franchi mes lèvres, mais je lui ai décoché un regard qui disait tout. Elle n’a pas recommencé. Par la suite, cette même patronne a quitté la fonction publique, et sur sa recommandation, son nouvel employeur m’a fait une offre.

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Aller au-delà de la confection de poignées de plats

Nancy Blain

Pendant mes études secondaires, nul n’était en mesure de m’orienter vers une profession que j’aurais pu exercer, le cas échéant, – moi non plus d’ailleurs.  En 10ème année, j’avais lu l’histoire d’une femme handicapée qui confectionnait des poignées de plats – cette image m’avait hantée.

Grâce à mes bonnes notes, j’ai pu entrer à l’université où j’ai obtenu un diplôme en arts, avec spécialisation en sociologie/psychologie – intéressant certes mais pas vraiment utile dans le marché de l’emploi.

Le premier été, j’ai travaillé comme bénévole à l’hôpital de l’université de l’Alberta…rien pour consolider ma confiance en moi.  L’été suivant, j’ai postulé comme bénévole au Glenrose Rehabilitation Hospital.  La coordonnatrice du secteur a pris le risque de m’engager comme assistante.  Cela a changé ma vie et  lancé ma carrière comme coordonnatrice en bénévolat.

Je me suis alors formée et spécialisée dans ce domaine au Grant McEwan College.  Pendant vingt ans, j’ai travaillé dans divers milieux comme coordonnatrice de bénévoles, notamment dans des écoles, des hôpitaux, des centres de soins de santé de longue durée, des associations de voile et des organisations de lutte contre le sida. Mais le milieu le plus intense t le plus passionnant pour moi, fut celui des soins palliatifs.

Ce fut la voie qui me conduisit vers ma carrière suivante, celle d’aumônière.  J’en avais assez d’être derrière un bureau et constamment au téléphone.  Je voulais être au chevet des patients.  Nos âmes sont l’essence même de nos êtres; elles enrichissent nos vies et nous aident à survivre.

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Obtenir et conserver un emploi de technologue en santé animale

Audrey Thorhaug

Je travaille comme technologue en santé animale auprès de la Société protectrice des animaux de Regina.

J’ai choisi ce domaine parce que j’adore travailler avec les animaux.  Dale Pearce m’a aidé à avoir des tuteurs et des preneurs de notes.  Il a toujours été là quand j’avais besoin de lui ou des difficultés ou des problèmes au collège Lakeland.  Ce collège est excellent pour les élèves malentendants ou sourds ou ayant d’autres déficiences, car ils peuvent compter sur les instructeurs, toujours très obligeants.  Pour savoir si le collège leur convient, les élèves peuvent faire un essai d’un ou deux jours dans la classe.  La direction du collège Lakeland m’a permis d’écrire mes examens dans une salle distincte et silencieuse et m’a accordé également du temps supplémentaire.  Tous les enseignements reçus m’ont été extrêmement bénéfiques et, lorsque nécessaire, j’ai eu droit à des explications supplémentaires.

J’ai fixé de nombreuses entrevues auxquelles je me suis rendue.  Plusieurs questions m’ont été posées sur ma perte auditive.  La plupart du temps, on m’a demandé si je pouvais répondre au téléphone mais j’ai des difficultés à entendre et à comprendre ce qui se dit.  À mon avis, les employeurs avaient peur de me donner une chance, incapable d’appréhender les capacités des personnes handicapées.

L’entrevue avec mon employeur a été différente.  On m’a fait travailler pendant quatre heures avec le vétérinaire et les animaux afin de savoir si j’étais qualifiée pour l’emploi, quelle que soit ma déficience.  Je me suis occupée des vaches au moment du vêlage, ce qui peut être dangereux lorsqu’elles n’aiment pas que des étrangers touchent à leurs veaux.  J’étais en 4-H et j’ai appris à monter à cheval ainsi qu’à faire plusieurs ouvrages.  J’ai toujours dû travailler fort, depuis les travaux de ferme pendant ma jeunesse jusqu’aux emplois d’été dans les parcs régionaux sans oublier le collège.

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Un cheminement professionnel vers des destinations locales, nationales et internationales

Jim Derksen

En novembre 2012, le CCD a interviewé Jim Derksen sur son cheminement professionnel et les expériences vécues en cours de route.   C’est une invitation au voyage avec Jim, un usager de fauteuil roulant.


Quels ont été  vos principaux emplois?

Jim : Lorsque j’étais à l’école secondaire, j’ai cherché et trouvé un emploi d’aide-comptable pour de petites entreprises de mon village natal – une teinturerie et un garage/station d’essence.  Pendant mes études universitaires, j’ai fait des relations média et relations internes pour un hôpital de Winnipeg.  J’ai mis sur pied une compagnie d’enregistrement d’audio-livres pour des personnes aveugles et des personnes dyslexiques.  J’ai dirigé une agence d’emploi pour les personnes handicapées, entrepris du développement communautaire et effectué des interventions revendicatrices.  J’ai été coordonnateur d’organisations provinciales et  nationales, directeur d’une agence de développement international et j’ai travaillé pour le gouvernement comme analyste de politiques et comme directeur général d’un  bureau stratégique.

Quels accommodements ont été le plus utiles dans votre milieu de travail?

Jim : Quand je travaillais au gouvernement et dans d’autres bureaux,  j’avais besoin d’aide pour sortir et classer les dossiers.  Je n’ai jamais été en mesure de le faire réellement;    en vieillissant, mes muscles se sont affaiblis et là, je n’ai plus du tout été capable. Des employés m’étaient assignés à cette fin.  Ce qui était certain, c’est qu’à intervalles réguliers, je devais parler au directeur du bureau afin qu’il/elle avertisse les employés de m’aider, dans le cadre de leurs tâches,  à classer  les dossiers.   Cela n’allait pas sans friction et résistance.  Mais j’avais suffisamment d’audace et de confiance en moi pour exprimer mes besoins  et m’assurer qu’ils soient comblés dans mon cadre de travail.
Puisque j’utilisais un fauteuil roulant manuel, ce n’était pas très difficile.  J’avais besoin d’aide pour installer le fauteuil dans le coffre de voiture.  En Afrique, j’ai eu  toute une  crevaison avec une épine dans la chambre à air.  Les gens sont allés au village avec le boyau défectueux,  l’ont changé et replacé dans la roue de mon fauteuil roulant.

Quelles sont vos expériences en matière de promotion?

Jim :  J’avais suffisamment confiance en moi pour solliciter des promotions et, pendant ma carrière de fonctionnaire, j’ai accédé à différents niveaux.

J’ai créé plusieurs des emplois que j’ai occupés, notamment avant d’entrer dans la fonction publique.  Je posais ma candidature pour un poste dans une organisation communautaire émergente puis, dans le cadre de mon travail, je cherchais des fonds pour me rémunérer.  J’ai décidé, stratégiquement, de me satisfaire du salaire minimum parce que je voulais être capable de choisir le travail qui me plaisait.  Les emplois nouvellement créés étaient peu subventionnés, pratiquement au salaire minimum.

Est-ce que la RPPH a été un vecteur pour  votre éducation?

Jim :  Oui, cela l’a été pour moi.  Sans l’aide du programme de RPPH, je ne serais probablement pas allé à l’université car ma famille n’avait qu’un faible revenu. Mon père,  personne handicapée également, fut  hospitalisé plus de la moitié du temps sur une période de vingt ans.  Pendant longtemps nous avons vécu de l’aide sociale par manque de soutien de famille. Ni ma famille, ni moi d’ailleurs, ne pouvions assumer les coûts universitaires.  Dans le cadre du programme de RPPH, j’ai obtenu une allocation de subsistance, une bourse pour les frais d’inscription et les livres et pour les transports.  Pour moi, la RPPH c’est toute la différence entre avoir une éducation postsecondaire ou ne pas en avoir. Il est très important que les personnes devant assumer des dépenses supplémentaires liées à leur déficience puissent,   pendant leurs études, bénéficier de ressources affectées à leur éducation.

Quelle a été la clé de votre réussite professionnelle?

Jim : Je pense que cela a été ma confiance en moi.  J’ai toujours estimé que je pouvais performer et que je serais un précieux atout en tant qu’employé. J’étais assez obstiné aussi.
Je me suis toujours lancé dans des emplois que je pensais aimer et que je jugeais appropriés.  Je crois que j’ai eu de la chance de faire le travail qui me plaisait.  Pour être honnête, j’ai eu beaucoup de chance :  j’ai posé ma candidature à  des postes judicieux  et j’ai rencontré les gens qu’il fallait. J’ai très peu été au chômage.

Quel a été le facteur positif et déterminant dans votre carrière?

Jim : L’avantage, c’est que j’ai travaillé pour obtenir de l’expérience et que j’ai occupé des emplois que plusieurs n’auraient pas voulu faire.  Par exemple, pour mon premier travail d’aide-comptable, je gagnais moins que le salaire horaire minimum.  J’aurais pu m’offenser mais j’ai décidé qu’ainsi, j’étais en train d’acquérir de l’expérience.  Mon premier poste dans la fonction publique se trouvait dans un édifice n’ayant qu’une seule toilette,  partiellement accessible,  pour tous les employés.  J’ai fait de nombreux compromis en termes d’accès et d’accommodements.  Cela m’a été profitable.

Permettez-moi d’atténuer mes propos :  c’était à l’époque où l’on innovait en matière d’accès.  Les accommodements étaient plus inhabituels qu’escomptés.   Stratégiquement, je n’avais pas la possibilité d’attendre un meilleur accès.  Je me suis débrouillé pour contourner cette carence et accomplir les tâches qui  m’équipaient pour de nouveaux horizons.  Mais aujourd’hui, j’encourage les gens à réclamer les accommodements et un meilleur accès.  Toutefois, comme dans le passé, il est quelquefois plus avantageux de prendre le poste et de se lancer dans le travail, même si ce n’est pas tout à fait accessible.

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Cheminement de carrière

Daniel Halechko

On m’a demandé de raconter comment j’avais obtenu mon emploi actuel.  Mais pour cela, il faut que retrace mon cheminement de carrière.  Comme vous le constaterez, ce n’était pas vraiment le cheminement que j’aurais choisi.  Ce sont plutôt les circonstances qui m’y ont conduit.

Jeune, j’adorais les activités physiques et la vie à l’extérieur.  Par la suite, je suis allé travailler comme charpentier.  Tout s’est bien passé pendant dix ans, jusqu’à ce qu’un accident en milieu de travail  provoque une blessure permanente et des limitations continues qui m’ont empêché de reprendre mon activité professionnelle.

Mes limitations post-accident étaient tellement envahissantes et omniprésentes qu’elles affectèrent  grandement d’autres sphères de ma vie;  je ne pouvais plus faire les activités physiques que j’aimais tant, notamment de la lutte avec mon jeune fils, des randonnées, etc… Lorsque ma dépression s’est quelque peu apaisée, j’ai décidé de reprendre mon éducation et je me suis inscrit en arts à l’université du Manitoba, sans carrière précise en tête.  À ma grande surprise, j’ai adoré mes cours universitaires et j’ai bien performé dans mes études.

Mon premier geste, après l’obtention de mon diplôme, a été de trouver un emploi.  Je pensais que de concert avec mes expériences de vie, mon éducation m’ouvrirait la porte à de nombreuses possibilités.  Quelle naïveté! Toutes mes candidatures étaient refusées pour manque d’expérience.   Il me semblait que tous et chacun possédaient un diplôme universitaire.

Je savais que j’avais besoin d’expérience.  J’ai donc fait du bénévolat pour les organisations avec lesquelles j’avais des affinités, soit de personnes handicapées, de protection des accidentés du travail et d’interventions.  Cela m’a permis de trouver un poste auprès de l’Injured Workers Association (IWA).  Je ne suis jamais revenu en arrière; j’ai accumulé des années d’expérience en emploi et en bénévolat et les offres d’emploi se sont multipliées. 

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De l’idéalisme à la réalité : d’hier à aujourd’hui

Maria Barile

En 1993, j’ai obtenu ma maîtrise en service social de l’université McGill. Quatre obstacles liés aux déficiences ont entravé mes objectifs dans ce secteur choisi.

Dans les années 1980 et 1990, j’étudiais, avec idéalisme, en travail social.  Je voulais absolument me lancer sur la scène internationale, changer le monde, améliorer les conditions de vie des personnes handicapées et plus particulièrement, celles des femmes avec des déficiences.  Mais cet idéalisme instillé par mon travail social s’est rapidement dissipé quand j’ai été confrontée à de nombreux et différents obstacles et même à de la discrimination directe, à savoir à un préjugé sur un(e) candidat(e) handicapé(e).  Lorsque je postulais dans une agence pour personnes ayant une déficience quelconque, on me disait, malgré ma maîtrise en travail social,  que ce serait certes  formidable de travailler avec les « patients » eux-mêmes mais que je ne  pouvais pas servir les familles de personnes ayant ce type d’incapacité.  Oui, des agences à modèle médical.  Le centre local de services communautaires (CLSC) invoqua le fait que je ne possède pas de voiture pour me refuser un emploi.  Autre obstacle,  ma méconnaissance de la langue officielle du Québec. Mais à l’époque, le plus grand obstacle fut le chômage des personnes handicapées, dure réalité montrant que 70% d’entre nous étions sans emploi, couplé au fait que j’avais choisi, personnellement et familialement, de vivre à Montréal. J’ai fini par trouver un poste temporaire comme enseignante-remplaçante au département de Service social du Collège Dawson.  Mais cela n’a duré qu’un semestre.  Les compressions gouvernementales ont eu l’effet d’une lame de fond et mon poste y est resté.  Ce n’est que deux ans après l’obtention de mon diplôme que j’ai eu la possibilité de travailler avec une chercheure chevronnée, la Dre Catherine Fichten du Collège Dawson.  Et, en compagnie de Jennison Asuncion, nous avons créé un réseau de recherche.  À l’heure actuelle, nous codirigeons le Réseau de recherche Adaptech, composé d’une équipe de chercheurs,  d’étudiants et de consommateurs.  Depuis 1996, nous avons mené  plusieurs études concernant les étudiants universitaires ayant divers types de limitations fonctionnelles au Canada.  Nous sommes basés au Collège Dawson, à Montréal.  Nos visons principalement trois domaines de recherche : les technologies d’information, incluant notre grand inventaire de logiciels gratuits ou peu coûteux facilitant l’utilisation des ordinateurs, les succès académiques, les facilitateurs de la réussite scolaires et les obstacles;  et, plus récemment, l’emploi.  Pour de plus amples détails sur nos travaux, consultez le site  www.adaptech.org

Pendant les seize années consacrées à ce domaine, nous avons obtenu plusieurs données indiquant le peu de participation des étudiant-e-s handicapé-e-s dans les établissements postsecondaires.  Puis lentement mais sûrement, les nombres ont commencé à grimper.  Cette hausse se répercute régulièrement dans le secteur de l’emploi. Selon une de nos récentes études sur une question d’emploi, 61% des 166 personnes interrogées ont répondu avoir un emploi.  Cent (100) d’entre elles étaient des femmes avec un taux  d’emploi de 63%;  59% des 66 hommes restants travaillaient également.

L’éducation est vitale; c’est la raison pour laquelle j’ai décidé de poursuivre mes études mais dans un nouveau secteur : obtenir une maîtrise en accessibilité et conception universelle, entrecroisant  ainsi mes deux passions : l’accessibilité et les politiques « vertes »;  mon désir de changer le monde a pris une toute autre tournure.  Je suis consultante auprès d’Eco-access, pour aider les groupes qui désirent avoir des bureaux ou des conférences inclusifs.   Je fais une vérification des édifices (audit) et j’oriente les personnes vers les ressources appropriées.   Pour de plus amples renseignements, consultez le site www.ecoaccess.info

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Appui transitoire


Pas besoin des petites annonces :  Becky crée sa propre carrière

Becky Brownlee

Je m’appelle Becky Brownlee.  J’habite à Brandon, Manitoba où j’ai la chance d’avoir non pas un mais deux emplois que j’aime beaucoup, qui me stimulent, me permettent de m’épanouir et d’apprendre constamment.

Je suis hôtesse d’accueil chez Walmart.  Mes tâches consistent, sans s’y limiter, à accueillir les clients dans le magasin, préparer les chariots, récupérer les paniers et les entasser face aux rayons à l’entrée, réapprovisionner des secteurs particuliers, sourire chaleureusement aux clients, les aider à trouver les produits nécessaires et enfin marquer leurs sacs lorsqu’ils ramènent des articles.  J’ai toujours une attitude positive et j’adore le travail que je fais.  Il me convient très bien car je suis une personne gentille, très obligeante et aimant les gens.  Je travaille très fort et j’ai le sentiment d’être valorisée pour mes efforts.

J’ai commencé à travailler chez Walmart en 1998 à l’école secondaire, dans le cadre du programme de préparation à la carrière.  Il devint évident, après l’obtention de mon diplôme, que j’étais prête à être une employée salariée mais j’avais besoin de personnel de soutien, non pas pour m’assister dans l’emploi, mais bien plus pour m’aider avec ma pompe à insuline puisque je suis une diabétique de type 1 (insulino-dépendant).  J’ai pu recourir à un programme de vie autonome, appelé « En compagnie d’amis » et recevoir des fonds pour engager la personne de soutien dont j’avais besoin afin de commencer ma carrière chez Walmart.  Les fonds couvraient également l’assurance de mon employée auprès de la Commission des accidents de travail, au cas où elle se blesserait en s’occupant de moi.  Cela étant réglé, j’ai commencé mon emploi rémunéré chez Walmart en 2004.  J’ai travaillé fort, bénéficiant d’augmentations salariales au fil des ans et acceptant de nouvelles heures de travail.  Je suis évaluée chaque année et me fixe de nouveaux objectifs; je profite de la formation informatique donnée aux fins d’enrichissement des tâches.

Puis, je travaille aussi en publicité pour le Shoppers Mall.  Je suis l’ambassadrice du Mall.  Deux après-midi par semaine, je donne à des enfants des ballons remplis d’hélium et arborant le logo du centre commercial.  C’est un travail unique parce que je l’ai créé avec l’aide de ma famille et de mes amis.  J’ai en effet exposé mon idée au centre et j’ai été engagé à l’essai.  Puis, quand je me suis rendu compte que j’étais à l’aise dans cet emploi, j’ai écrit à la direction du centre pour lui demander d’être payée pour mes services .  Elle a accepté, malgré ses réserves quant à capacité d’effectuer ce travail à cause de mes problèmes de santé.  Mais mon auxiliaire est en mesure de me rejoindre au centre, n’intervenant que lorsque j’ai besoin d’elle; il me suffit de l’appeler sur mon cellulaire ou de lui envoyer un texto.  Elle est sur le site certes.  Mais je fais le tour du centre commercial, toute seule, avec mon chariot rempli de ballons.  À Noël, j’ajoute de petits objets comme des autocollants ou des livres d’enfants sur ce thème.  J’adore les enfants, j’adore aider les gens et promouvoir un lieu où j’aime énormément travailler.

Mon succès dans ces deux lieux de travail est dû à :  1) ma pertinence pour l’emploi (personne extravertie au comportement positif), 2) ma formidable auxiliaire, 3) ma famille et mes amis qui m’encouragent et m’appuient en coulisses et 4) mes clients.  En personne ou par le biais de cartes de commentaires, ils soumettent leur appréciation à mes superviseurs.

Je suis très fière de recevoir un chèque de paye et des avantages sociaux pour mon travail.  Je me sens valorisée.  J’adore ce que je fais et je pense bien représenter les deux compagnies en travaillant très fort, en apprenant davantage jour après jour et surtout, en étant moi-même.

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Obtenir un emploi et le conserver

Amber-Joy Boyd

Je m’appelle Amber-Joy Boyd.  Je suis née avec une déficience visuelle; en fait, jusqu’à mes six mois, les médecins pensaient que je deviendrais totalement aveugle.  Fort heureusement, ils s’étaient trompés.  J’ai toujours eu une mauvaise vue (environ 20/175 pour ceux qui se le demandent), provoquée par un albinisme oculo-cutané, forme de tyrosinase négative (ty-neg) doublé de nystagmus…titre impressionnant, signifiant que je suis très très pâle, avec des cheveux blancs et que je porte des lunettes à verres épais bifocaux pour corriger ma mauvaise vue et le mouvement constant de mes yeux globuleux, qui bougent comme ceux de « Macaron glouton » (cookie monster), le personnage de Rue Sésame.  Le problème de ma vue a toujours été omniprésent.  À l’école élémentaire, le principal voulait que j’aille dans une école ontarienne pour aveugles.  Mais mes parents ont refusé, soutenant que je pouvais fonctionner comme les autres élèves.  Et c’est ainsi que j’ai été élevée, dans un système scolaire régulier mais avec des aides et des mesures de soutien.  Rétrospectivement, c’est le plus grand cadeau que mes parents pouvaient me faire, à savoir que je n’étais pas différente des autres.

En fait, ma déficience visuelle m’a donné un coup de pouce dans la vie.  En quatrième année, j’ai appris à dactylographier correctement – apprentissage assez rare à l’époque -.  Quand je suis entrée en 9ème année, j’étais capable de taper soixante (60) mots à la minute, ce qui m’a grandement aidée tout au long de ma vie.  Après le secondaire, je suis allée dans un collège biblique puis à l’université.  J’ai étudié le théâtre, un domaine d’études très concret.  Pour pouvoir  étudier et apprendre, j’avais un assistant en éducation; de plus, avec tous mes professeurs, j’appliquais certaines techniques, comme l’obtention  de copies de textes rétro-projetés ainsi que du temps supplémentaire pour mes examens.

Après mon diplôme, je suis entrée dans le vrai monde et j’ai rapidement réalisé qu’il n’y avait pas beaucoup de place, doux euphémisme, pour une décoratrice de théâtre, aveugle de plus est.  C’est cette spécialisation que j’avais choisie au cours de mes dernières années d’études.  Le marché était trop concurrentiel et je ne trouvais pas de piste. Mes travaux manquaient de précision parce que, contrairement à mes collègues voyants, je ne pouvais distinguer les petits détails.  J’ai fini par me réévaluer et, devant le remboursement  des prêts étudiants, j’ai accepté les emplois qui s’offraient, principalement dans la vente au détail et la restauration rapide - bien loin de ce que je voulais faire.

J’ai déménagé à Regina en 2010 et suivi un cours de développement professionnel au Saskatchewan Institute of Applied Science and Technology (SIAST).  Pas très convivial pour les personnes handicapées mais l’Institut a répondu à mes besoins en me donnant un moniteur à grand écran, une copie de Zoom-Text, un lecteur d’écran et un assistant en éducation.  On m’a demandé de préciser mon domaine de prédilection, le cas échéant, et j’ai répondu que je voulais aider les gens.  J’ai toujours éprouvé une tendresse particulière pour les gens qui, comme moi, avaient des déficiences et n’étaient peut-être pas en mesure de les gérer comme je le faisais.  Les responsables de SIAST m’ont suggéré de commencer à appeler les organisations sans but lucratif aux fins de placement professionnel.

L’une des premières contactées fut la Saskatchewan Voice of People with Disabilities.  C’est la directrice générale, Bev Duncan, qui m’a répondu.  Après m’avoir entendue, elle m’invita à aller la rencontrer pour une entrevue.  Là, elle me demanda ce que je pouvais faire et à quel(s) obstacle(s) j’étais confrontée.  Malgré les quelques contretemps survenus dans le passé, notamment quant à la grandeur d’un écran et le positionnement du clavier,  je n’avais pas affronté d’obstacle, ai-je rétorqué.  J’avais désormais un écran à gros caractères et une copie de Zoom Text…Par conséquent, je ne coûterais rien à l’organisation si on m’embauchait.  Le fait d’avoir mentalement maîtrisé, avant de la rencontrer, les éventuels obstacles auxquels je pourrais être confrontée, a semblé l’impressionner.  Elle m’a interrogée sur mes compétences.  Bien qu’aucune ne soit directement liée au secteur à but non lucratif, j’en possédais des centaines, transférables, notamment mes connaissances en informatique, la compassion envers les autres, l’aide à autrui, la gestion du temps.  Bev déclara que le placement professionnel serait pertinent et qu’à la fin du stage, si j’étais aussi compétente que je le prétendais, ils essaieraient de me trouver un poste.  C’était en février 2011.  En avril 2011, j’étais engagée comme adjointe administrative.  Dévouée, acharnée au travail, ayant désir d’exceller et d’excéder les attentes de la description de tâches, je dus promue directrice des programmes en octobre 2011.

C’est le meilleur emploi de ma vie et celui qui m’a toujours fait rêver.  Chaque journée est un nouveau défi, celui d’aider les personnes handicapées à surmonter les contretemps et à ne pas les considérer comme des obstacles.  Mais surtout, une attitude positive, un esprit conquérant et le refus d’abandonner quand j’avais décidé quelque chose, m’ont permis d’aller très loin dans mes activités.  Quand je ne sais pas faire quelque chose, j’apprends; quand je ne connais pas la réponse, je demande.  Et je me perfectionne et grandis constamment.  Chaque nouveau défi m’ouvre la voie vers l’excellence, voie parfois ardue, parfois parsemée de situations difficiles mais oh combien exaltante.  Avec un sens de l’humour et la capacité de ne pas se prendre trop au sérieux ni de se cantonner sur ses déficiences….on peut avancer.

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Les mesures de soutien, pôles du succès

Teresa Beauregard

Notre fille ne veut pas de vous écrire ses expériences de travail; elle n’en est pas capable.  Mais je peux le faire à sa place et contribuer ainsi à votre recueil.

Notre fille travaille dans un magasin d’approvisionnement (entrepôt) à Winnipeg, où elle fait des inventaires, garnit les rayons, marque les prix, fait des ventes et s’occupe aussi du service à la clientèle.

Elle a grandement été aidée par notre gouvernement provincial (programme de réadaptation professionnelle); d’autres mesures de soutien ont été fournies par le gouvernement fédéral (Options pour les jeunes) et par le Sair Learning Centre de Winnipeg.  Sans toutes ces aides et sans son employeur actuel qui l’a bien accueillie et lui a donné la chance de se prouver en tant que personne employable et loyale, notre fille n’aurait jamais été capable de conserver un aussi bon poste et ce, à cause de sa récente intégration dans la force active et de son incapacité à s’exprimer dans de nouveaux contextes.

Une formation lui a été fournie en milieu de travail ainsi qu’une formation en service à la clientèle.  Étant donné le nombre limité d’employés, les promotions sont rares dans cette entreprise.  Mais notre fille a bénéficié d’un nombre constant  d’heures de travail, en deçà de son seuil de tolérance.

C’est dès sa seizième année que notre fille, encore scolarisée, a commencé à recevoir de l’aide du programme de réadaptation professionnelle.  Elle était déjà inscrite même si elle n’a commencé à travailler qu’à partir de dix-neuf (19) ans.  Dès qu’elle a obtenu son diplôme, ils ont demandé à un centre d’apprentissage (Sair) de trouver une entreprise qui accepterait de prendre en stage et sans aucune promesse d’embauche, une jeune personne ayant des difficultés.  Cette introduction au monde du travail s’est parfaitement bien déroulée et, après les trois mois probatoires, l’entreprise a envisagé de prolonger de six mois cette période probatoire, mais avec rémunération.  Le programme de réadaptation professionnelle a alors chargé Options Jeunesse d’établir un accord de travail et une entente salarials.  Six mois plus tard, notre fille était engagée à temps plein.  Les services d’Options Jeunesse avaient alors expiré.  Notre fille travaille toujours dans cette entreprise, à raison de trois jours complets par semaine, ce qui s’inscrit parfaitement dans sa capacité de tolérance.

Notre fille n’aurait jamais été capable de se promouvoir dans son cadre de travail.  Elle ne possède ni les compétences sociales ni la confiance requises pour chercher un emploi; elle ne s’affirme pas non plus comme une avide salariée; mais au travail, elle est l’essence même d’une employée :  loyale, dévouée, méticuleuse, méthodique, fiable et une travailleuse acharnée.

La clé de son succès?  L’aide apportée par toutes les agences susmentionnées ainsi que le soutien indéfectible de ses parents.  Sans cette assistance, notre fille n’aurait été qu’un esquif balloté dans un vaste océan.  Ces agences lui ont vraiment ouvert la porte.

Le fait d’être employée a donné à notre fille une grande assurance et un sentiment de valorisation personnelle, qu’elle n’aurait jamais éprouvé si sa quête d’emploi avait été autrement effectuée.

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Des encouragements inspirants – un atout dans l’emploi

Deanna Ng

J’aime vraiment mon travail d’assistance de programmes pour la Manitoba League of Persons with Disabilities (MLPD). Depuis un an, je suis chargée de répondre au téléphone et de rediriger les appels, de rédiger les procès-verbaux des diverses réunions de comités, de préparer et d’écrire des articles pour l’association ainsi que pour le bulletin trimestriel Update.  Plusieurs possibilités de perfectionnement me sont offertes dans le cadre de mon emploi, notamment des ateliers professionnels novateurs et des congrès ainsi que les événements communautaires auxquels je participe.

Étant une personne malvoyante, je suis confrontée à des obstacles visuels.  La MLPD s’est alors tournée auprès de l’INCA qui m’a fourni un ZoomText, un logiciel d’agrandissement d’écran, un CCTV – loupe pour lire les documents; et un PAC Mate – un ordinateur portatif en Braille afin de prendre des notes pour les procès-verbaux aux réunions. L’INCA a également appuyé la MLPD auprès de SPHERE-Québec, afin de financer mon apprentissage de l’emploi pendant un an.

Avant mon embauche, les agents de l’INCA m’avaient encouragée à terminer mon éducation à l’université du Manitoba et au Collège Red River et à exceller dans mes cours.  Ils m’ont poussée et même si j’ai quelquefois eu l’impression de me heurter à un mur, ils m’ont vivement encouragée à poursuivre mon cheminement.  Ils m’ont fourni des accommodements pédagogiques, du counseling, des fonds et ont constamment été à ma disposition.  L’INCA, le Collège Red River et Reaching Equality Employment Services (REES) m’ont appuyée pendant ma quête d’emploi. Grâce à eux, j’ai appris à élaborer des stratégies de recherche d’emploi, à présenter mon C.V., à rédiger des lettres de motivation et des soumissions de candidature ainsi qu’à acquérir les habiletés d’entrevue appropriées.  Ils m’ont également appris les techniques de suivi aux entrevues, comme des lettres de remerciements et à conserver un emploi avec des communications positives, de la persévérance et le souci du travail bien fait.

La clé de ma réussite, c’est l’aide fournie par mes conseillers.  Je leur suis reconnaissante d’avoir pris le temps de m’aider, dans une approche globale, tout en tenant compte de mes questions et mes préoccupations.  Pour eux, aucune question n’était stupide.  Si j’ai continué ma quête, c’est grâce à leurs encouragements; avoir quelqu’un qui vous pousse vers le succès est très inspirant.  À mes « je ne peux pas », ils répondaient « oui tu peux », manifestant ainsi leur confiance en moi.

L’assistance reçue, le financement de l’équipement et les agents de programme ont été les précieux pôles du succès de ma quête d’emploi.  Il est difficile de poser sa candidature à un poste; le processus est très pénible, éreintant et chronophage.  L’aide devient source de motivation.  Permettez-moi de souligner l’importance du travail accompli par les agences d’emploi et d’apprentissage pour les personnes avec des déficiences.  Il faut avoir quelqu’un qui croit en vous et qui vous aide à atteindre votre but, avec les soutiens requis.  Je remercie sincèrement mes agents de traitement des cas.

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Je veux travailler

Greg Plosz  et Jay Plosz

Mon fils est atteint du syndrome de Down.  J’écris à sa place car il n’est pas capable de le faire pour raconter ses expériences.

Mon fils Jay est actuellement employé par une firme d’ingénierie et travaille dans un bureau.  Il est autonome et effectue toute une liste de tâches, notamment veiller à la propreté de trois aires de café, nettoyer les comptoirs, placer la vaisselle dans le lave-vaisselle et remplir les réfrigérateurs.  Il range les salles de conférences en enlevant les tasses à café usagées, essuyant les tableaux blancs et les tables puis en alignant les chaises.  Il ramasse et distribue le courrier.  Il vide les poubelles bleues contenant du papier recyclable et fait du classement.  Il travaille ainsi cinq heures par jour.  Il est payé au salaire minimum et bénéficie d’avantages sociaux comme les congés de maladie et les soins de santé.  Il contribue également à un Régime de retraite enregistré.  Il occupe ce poste depuis quatre ans.

Le plus grand obstacle a été l’inexpérience de l’employeur vis-à-vis des personnes ayant diverses capacités.  J’avais visité le lieu de travail et avais fourni à l’employeur une liste des tâches que Jay pourrait effectuer pour lui.  Jay avait un ami qui a servi de formateur en milieu de travail, lui apprenant comment se rendre au bureau et en revenir avec les transports publics et comment accomplir diverses tâches.  Le formateur a passé environ dix (10) jours avec Jay.  L’employeur a également chargé deux employés d’agir comme personnes-contacts.  C’est avec elles que je communique et c’est vers elles que Jay se tourne s’il a besoin de quelque chose ou d’une aide quelconque.  Il a fallu nommer deux employés pour palier à toute éventualité de vacances et ou de congés de maladie.  Ils aident également Jay à comptabiliser ses heures de travail, etc.  Mon fils n’a pas d’ordinateur au bureau et toutes les communications de l’entreprise sont informatisées.  En embauchant Jay, l’administrateur a clairement affirmé qu’il voulait que cette initiative soit un succès.

C’est moi qui ai aidé Jay à trouver un emploi.  Les agences chargées de son placement voulaient soit lui faire une évaluation – pour laquelle elles sont payées – soit recommander un atelier protégé.  Je crois que de telles agences s’occupent davantage de personnes pratiquement « normales », car leur placement est plus facile.  Souvent les autres clients n’ont pas de permis de conduire.  Cela n’encourage pas les employeurs à envisager l’embauche de personnes ayant de graves déficiences.  Je sais, par expérience, qu’il vaut nettement mieux que l’employeur soit contacté par un membre de la famille.  Je connais mon fils et je sais qu’il est capable de fournir un service à ses employeurs.  Il a obtenu son premier emploi chez un concessionnaire automobile où j’avais acheté des véhicules.  Il a eu son deuxième emploi grâce à notre gérant bancaire.  Son troisième, c’était avec mon employeur.  Il a trente-six (36) ans et sait pertinemment ce qu’il veut faire.  Il a obtenu son récent emploi grâce à sa sœur qui travaille dans un bureau semblable et qui a été en mesure de dresser la liste des tâches que Jay pourrait accomplir sans supervision.  Depuis son embauche, l’employeur a ajouté de nouvelles fonctions que Jay maîtrise parfaitement, car il est très fiable et déterminé.  Un matin, il est arrivé en retard au travail car la rue où il prend l’autobus était bloquée par des travaux.  Il a marché jusqu’à l’arrêt d’autobus suivant.  Au moins dix rues plus loin.

Selon les recherches, l’équation parfaite exige un employeur déterminé à réussir cette initiative et un employé déterminé à travailler.  À mon avis, on devrait aussi pouvoir compter sur les écoles pour aider les étudiants handicapés diplômés à se trouver un emploi.  Elles aident bien les autres étudiants à obtenir des bourses et à faire des choix professionnels.  Elles devraient s’investir davantage dans la transition école-travail.  Pour les familles d’enfants ayant diverses déficiences, le départ du système scolaire est un peu comme « subir le supplice de la planche » (sur un bateau de pirates).

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Comme tout l’monde!

Marie B. Lemieux

Je me permets d’être la plume de mon fils Gabriel Lemieux jeune homme trisomique de 28 ans. Ce dernier travaille depuis déjà trois ans à la Fringale (traiteur livrant des repas chauds pour les centres de la petite enfance et les écoles de la région de Québec). Il y travaille comme plongeur, responsable du recyclage et autres taches diverses. Le parcours pour arriver à un travail rémunéré a été difficile. Le point de départ fut sans contredit notre croyance en son potentiel, les différentes avenues prises pour l’aider à le réaliser ainsi qu’une bonne dose de concertation.

À la sortie de l’école à 21 ans, un avenir incertain se dessinait pour mon fils malgré les nombreux stages scolaires effectués. Nous avons cherché des cours de cuisine et des stages de plongeur dans des restaurants pour lesquels il avait un grand intérêt. Certains employeurs le contactaient, mais lorsqu’ils apprenaient qu’il présentait une déficience intellectuelle, on n’avait plus de nouvelles. Par la suite, nous avons accepté un emploi rémunéré à temps partiel dans une pharmacie près de chez nous toujours dans le but de développer ses aptitudes au travail. Après son travail à la pharmacie qui débutait tôt le matin, Gabriel fréquentait également l’éducation des adultes. Ainsi après avoir pris connaissance des intérêts de Gabriel; une enseignante nous a dirigés vers un restaurant école (spécialisé dans l’accueil des élèves décrocheurs) où il a pu faire un stage de trois jours/semaine comme plongeur pendant plus d’un an. Ces derniers plaçaient leurs stagiaires au rythme des demandes qu’ils recevaient de la part des restaurateurs.

Gabriel y était le premier stagiaire ayant une déficience intellectuelle, et malgré ses capacités et sa fiabilité ainsi que le manque criant de main-d’œuvre dans ce secteur, sa candidature n’était pas retenue. Jusqu’à ce que M. Vachon de la Fringale se dise intéressé et le convoque… Bien que ce soit une deuxième  occasion d’entrevue pour lui, il avait besoin d’accompagnement pour bien saisir l’offre qui lui serait faite. J’avais également, dans la rédaction de son curriculum vitae, parlé de la possibilité d’obtenir un contrat d’intégration au travail et cette option semblait les intéresser. Nous étions plusieurs à nous présenter à cette rencontre déterminante : le représentant d’Équitravail l’éducateur spécialisé relevant du centre de réadaptation, Gabriel et moi-même. Ainsi même si, au début de l’entrevue, il était timide et stressé l’employeur a su le mettre à l’aise et il est sorti du bureau en faisant des blagues avec le patron et en ayant un nouvel emploi. C’est avec l’aide des membres de cette équipe que les gestionnaires ont mis en place une structure relative au bon fonctionnement de ce dernier. Cet encadrement impliquait une personne-ressource à qui s‘adresser, du renforcement positif et une liste de tâches à faire qui s’est allongée au fur et à mesure qu’il s’appropriait les tâches et l’environnement. Quelques adaptations physiques mineures ont également été prises ainsi qu’une adaptation de son horaire.

Voici comment M. Pierre-Étienne Vachon décrit son employé après plus de trois années à son service: « Gabriel est quelqu’un de très travaillant dont notre compagnie aurait peine à se passer. Il assume une position très importante au sein de notre organisation et son rôle est crucial au bon fonctionnement de notre production ainsi qu’à l’image corporative chez la clientèle. » Selon M. Vachon, Gabriel a amené une nouvelle atmosphère au travail avec ses blagues et sa « partisanerie » inconditionnelle pour son équipe de hockey préférée les Canadiens de Montréal.

Pour Gabriel, ce fut une occasion de croissance et de fierté exceptionnelle! Enfin, il se sentait utile et était payé pour une tâche qu’il accomplissait! Enfin, il faisait partie d’un groupe de travailleurs avec lesquels il a vite développé un sentiment important d’appartenance. Il a toujours hâte d’aller travailler et sait maintenant qu’avec l’argent gagné il peut se payer de petits luxes bien mérités : un cadeau pour sa douce, des vacances, des sorties au baseball ou un spectacle. Il est fier et parle régulièrement de son travail comme tout l’Monde! Ce travail a changé le regard que les autres portent sur lui. Autre gain non négligeable pour nous les parents, c’est qu’il ne reçoit plus les prestations de solidarité sociale et a une plus grande autonomie financière. Il demeure que nous devons le supporter dans la gestion de son patrimoine et des nouvelles obligations que cela comporte. Mais c’est également une grande fierté de dire qu’il contribue à la société comme tous en payant ses impôts plutôt que d’en dépendre.

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Soutien aux entrepreneurs


Des papillons en papier

Milli Flaig-Hooper

Milli Flaig-Hopper est une papetière douée qui dirige sa propre entreprise « The Paper Fidrildi » (un ancien mot norvégien signifiant papillon).  En tant que personne ayant une déficience intellectuelle, qui avait fait ses études dans une école intégratrice, elle ne pouvait accepter l’idée rétrograde de passer sa vie dans un programme uniquement destiné aux personnes handicapées (la seule possibilité de travail à l’époque).  Son réseau de soutien a alors envisagé d’autres possibilités.  Il n’y avait pas d’emploi disponible, même à temps partiel; et le bénévolat s’avérait problématique dans le milieu rural.

Après l’obtention de son diplôme d’études secondaires de la Gimli High School, Milli s’est découvert une passion pour la fabrication du papier à l’automne 2007, en commençant avec une trousse prévue à cet effet.  Le papier recyclé traduit sa créativité et chaque feuille est unique.  Tout le papier utilisé garde sa couleur initiale et il n’y a pratiquement pas de déchets.  Son intérêt et sa capacité se sont épanouis jusqu’à l’amener à produire de très belles pièces, notamment des cartes, des photos à encadrer, des boucles d’oreilles et des autocollants de réfrigérateurs.

Grâce à la souplesse du programme « En compagnie d’amis », service de financement individualisé, Millie a pu poursuivre son aventure entrepreneuriale et être soutenue de la manière la plus efficace pour elle et pour son réseau, à savoir obtenir l’aide requise mais être libre d’exprimer sa créativité, à sa façon.

Milli a vendu sa première oeuvre en 2008 au Artists First Show, à Ottawa.  En 2011, elle a obtenu la 3ème place dans la catégorie expérimentale de l’Interlake Juried Art Show.  Elle participe à la tournée des studios d’artistes dans le cadre de l’Interlake Artist’s Show, deux fois par année, ainsi qu’à de nombreuses ventes d’œuvres d’art et d’artisanat.  Et elle vend ses cartes chez McNally Robinson au centre commercial Grant Park.

Millie est membre du Manitoba Crafts Council, de la Winnipeg Beach Arts et Culture Co-operative (www.watchthewave.ca) et de l’ International Association of Hand Papermakers & Paper Artists (IAPMA).  Elle a récemment adhéré au Arts et Disability Network Manitoba.  Plusieurs articles ont été écrits à son sujet, dans le Interlake Spectator, l’Entreprise News et sur le site www.cartizan.com.

Outre la fabrication du papier, Milli adore le sport, la musique, les jeux questionnaires, le tricot, le yoga et un bon verre de vin blanc. En 2012, elle était représentée sur l’affiche du Marathon du Manitoba, qui collecte des fonds pour les personnes ayant des déficiences intellectuelles.

Au fil des ans, Milli a été en mesure de prouver que le fait d’avoir un chromosome supplémentaire (Syndrome de Down) et d’être autiste ne devra pas limiter vos capacités.

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Mes succès professionnels

Nora Carnegie

Je suis au début de ma cinquantaine et, malgré mes déficiences, j’ai connu de nombreux succès professionnels.  Ils sont dus à plusieurs facteurs, certains contrôlés ou influencés par notre gouvernement.  Malgré la détermination et l’ingéniosité que l’on m’attribue, je n’aurais jamais été capable de réussir professionnellement si je n’avais pas bénéficié des ressources du gouvernement, notamment de diverses subventions de santé.  J’anticipe d’autres succès futurs, soutenus,  voire entravés par des facteurs contrôlés ou influencés par le gouvernement.

Pendant mon adolescence et au début de ma vingtaine, j’ai travaillé comme serveuse et barmaid.  Mais à la mitan de cette décennie, à cause du caractère extrêmement physique de ces emplois, j’ai été incapable de marcher pendant quelques mois.  À cette époque-là, les chiropracteurs ontariens recevaient suffisamment de fonds de l’Assurance-santé de l’Ontario (ASO) pour ne pas facturer, au-delà du remboursement gouvernemental, les soins administrés à des patients qui, comme moi, avaient de graves besoins.  Mon médecin m’avait prescrit des décontracturants musculaires, des anti-inflammatoires et des médicaments antidouleurs et m’avait aussi fourni des renseignements afin de me faire financer un fauteuil roulant; mais seul un chiropracteur local a réussi à me remettre sur pied.  J’étais aussi une mère célibataire et les services à la famille de l’Ontario (l’allocation familiale, désormais le Programme ontarien de soutien aux personnes handicapées – POSPH) ont reconnu mes besoins immédiats et m’ont alloué suffisamment de fonds pour m’empêcher de m’entraîner dans une spirale financière (et éventuellement une spirale psychologique au moment où j’étais physiquement handicapée). Entre les soins du chiropracteur, les services à la famille de l’Ontario, les emprunts personnels pour la formation et l’équipement, j’ai pu me remettre sur pied et me lancer dans les affaires.

Vers la mitan des années 1980, la santé de mon plus jeune enfant (il souffre d’asthme, nettement aggravé par un climat humide) et la récession m’ont incitée à déménager mon foyer et mon entreprise du sud ontarien au nord ontarien.  Vers la fin des années 1980, mon état physique commença à nouveau à se détériorer et mon docteur me conseilla de trouver une autre carrière car, en tant qu’électrolyste, je devais rester assise, le cou penché, les mains courbées et ce, pendant de longues heures.  J’ai réussi à vendre ma boutique à une femme de la région qui agrandissait son affaire et qui continue d’ailleurs à fonctionner.

Grâce à mon expérience des affaires, j’ai pu facilement gérer un petit centre de villégiature, construit par mon mari et, grâce à l’enseignement à distance, terminer mes études universitaires à temps partiel tout en élevant mon petit dernier né en 1990.  Peu de temps après la vente de la station en pleine récession, j’ai terminé mon Bac ainsi qu’une année de collège en informatique et, en 1999, j’ai commencé à chercher un nouvel emploi.  Bien qu’interviewée pour de nombreux postes de premier échelon, être une fraîche diplômée à l’aube de la quarantaine n’était pas un atout; en effet, la majorité des fonds disponibles visaient surtout l’embauche de jeunes diplômés de moins de trente ans.  Dans plusieurs de mes entrevues, on m’a avisé que je n’étais pas admissible au poste pour lequel je postulais puisqu’il était financé pour les récents diplômés de moins de trente ans.  Pour terminer l’année, j’ai eu deux emplois à temps partiel, puis j’ai été engagée comme commis de bureau pour une compagnie de construction où j’ai travaillé jusqu’à l’automne de 2003.  C’est alors que j’ai été embauchée comme adjointe au développement professionnel pour le programme « Navigating the Waters » assuré par les Centres de ressources de vie autonome et subventionné par le Fonds d’Intégration du RHDCC .  J’aidais alors les personnes handicapées (individuellement ou dans des événements/ateliers collectifs) à préciser leurs objectifs ainsi qu’à élaborer et appliquer un plan de carrière basé sur leurs intérêts personnels, leurs capacités, leurs valeurs et leurs communautés.  J’ai aidé des clients à acquérir des compétences en employabilité et en préemploi.  En appliquant un cadre global, j’aidais les clients à se préparer pour et à obtenir une éducation/formation, des postes de bénévoles et/ou un emploi.  La majorité d’entre eux n’avaient jamais cru être employables et devaient d’abord régler leurs problèmes de santé/besoins liés aux limitations fonctionnelles afin de s’adapter le plus possible; ils devaient aussi atténuer leurs propres entraves jusqu’à pouvoir bénéficier d’accommodements pour  l’emploi ou la formation.  La plupart d’entre eux avaient été isolés tout au long de leur vie; il m’incombait donc de les familiariser aux ressources, activités et événements publics (des secteurs social, de santé et d’emploi) non seulement aux fins de réseautage mais encore pour créer l’assise  d’un équilibre vie/travail.  Je me suis découvert une véritable passion pour ce travail.  Quelques mois plus tard, j’étais promue comme responsable du développement professionnel,  à plein temps.  Je le suis restée jusqu’en 2005, lorsque le financement a été coupé.

Ma santé commença à se détériorer à nouveau et je devins handicapée pendant quelques semaines.  À cette époque-là, la physiothérapie/ergonomie pour les « activités de la vie quotidienne » étaient financées comme soins de santé fournis par les services de consultation externes des hôpitaux ou par les Centres d’accès aux soins à domicile/communautaires.  Après quelques semaines de physiothérapie et quelques accommodements personnels (déterminés d’après une évaluation d’ergothérapie, à savoir des talonnettes compensatoires pour les chaussures, un corset lombaire et un rehausseur sous les hanches pour la position assise), je dus à nouveau en mesure de chercher du travail.

Grâce à l’expérience que j’avais acquise, j’ai rapidement été engagée par une autre agence comme conseillère en emploi.  Cette agence offrait,  à divers secteurs de la population, des programmes d’emplois financés par plusieurs paliers du gouvernement (Ontario au travail, POSPH, MFCU  et le RHDCC/Service Canada).  J’ai pu appliquer facilement l’expérience vécue dans mon précédent emploi et me spécialiser en perfectionnement professionnel et maintien en emploi.  J’ai obtenu plusieurs augmentations salariales et je suis restée dans l’agence pendant presque six ans, jusqu’en août 2011 où mon état de santé s’est tellement aggravé que j’ai dû quitter mon travail.

Ma santé s’était aussi aggravée en 2007.  Mais comme j’étais employée et malgré les références de mon médecin de famille, je n’ai pu accéder aux services de physiothérapie/ergonomie pour les activités élémentaires, services assurés  par le Centre d’accès aux soins communautaires.  J’ai cependant bénéficié de l’aide du Programme de soutien de l’emploi pour les personnes handicapées (du POSPH), pour une évaluation ergonomique en milieu de travail ainsi que pour certains appareils d’adaptation que mon employeur ne pouvait me fournir étant une agence sans but lucratif (comme un fauteuil ergonomique, un clavier surélevé, des appareils acoustiques).  J’ai également commencé à utiliser le plus possible un logiciel de dictée et je me suis rapprochée de mon lieu de travail pour réduire les déplacements quotidiens.  Entre l’évaluation de physiothérapie/ergothérapie, prescrite par mon médecin et la thérapie, et grâce aux appareils d’adaptation acquis, j’ai pu continuer à travailler pendant pratiquement un an, malgré une détérioration constante de mes capacités physiques et des douleurs de plus en plus intenses.

En 2011, il devint évident que ma colonne vertébrale ne supportait plus la position assise adoptée pour le travail à l’ordinateur, ni le climat humide de l’Ontario.  Bien que l’ergothérapeute ait suggéré l’Arizona comme échappatoire, j’ai découvert par mes recherches, que je pouvais trouver un certain soulagement à Calgary (qui se classe après la région de Kamloop comme climat sec canadien).  J’ai donc déménagé à Calgary le 9 octobre 2011; quelques semaines plus tard, j’arrêtais tous les médicaments prescrits.  Malheureusement, j’ai nettement compris, d’essais en essais en échecs, que j’étais encore limitée avec le travail physique, avec la position assise pour l’ordinateur et avec les déplacements routiers.  J’ai donc appris à m’adapter en utilisant un ordinateur à domicile (allongée, avec l’ordinateur portatif surélevé, utilisant une souris intégrée et Dragonspeak, adaptant fréquemment et doucement ma position).  Mais je n’avais ni charge de travail ni horaires, contrairement à un emploi formel.  Je n’ai pu trouver, dans le secteur du soutien à l’emploi, un poste capable de m’accommoder; jusqu’à présent, mes recherches dans d’autres secteurs se sont révélées infructueuses.  J’ai récemment identifié un secteur du commerce du détail qui semble répondre à mes besoins physiques et où des ouvertures de postes sont prévues.  J’ai soumis des demandes cette semaine.

J’ai également élaboré un projet d’affaires qui me permettrait de poursuivre le counselling professionnel en tant que chef d’entreprise, m’accommodant personnellement; selon le Programme local de travail indépendant, mon plan est viable à condition que je puisse survivre le démarrage de mon entreprise.  Malheureusement en Alberta, le Programme de travail indépendant ne prolonge pas le versement des prestations d’A-E et les miennes s’achèvent.  Certes j’ai quelques économies mais elles ne me suffiront pas pour lancer mon entreprise et vivre pendant le démarrage.

En tant que bénéficiaire de l’A-E, je ne suis pas admissible au Fonds d’intégration.  L’an passé, j’ai invoqué ma déficience de longue durée en milieu de travail car la compagnie d’assurance a tout d’abord déclaré « les conseillers en emploi ne font que traîner et parler aux gens toute la journée »; puis, acquérant une différente opinion quant aux diverses positions de travail avec mon employeur, elle soutient encore que pour certaines postes de counselling en emploi, la tâche d’informatique reste encore dans mes limites, (mes problèmes quant à la position assise et aux déplacements n’ont même pas encore été réglés).  Et même si la compagnie d’assurance a initialement contesté mon déménagement en Alberta, elle semble à présent se réjouir du fait que j’ai quitté ce climat humide ainsi qu’un employeur qui – elle commence à le réaliser -, m’a accommodé autant que possible mais pas dans toute l’envergure de mes besoins.  La compagnie n’a toujours pas identifié un poste lié à l’emploi où mes besoins d’accommodement seraient pleinement comblés.  Elle traîne la patte quant à l’envoi d’une décision définitive et une lettre de référence à un ombudsman.  Plusieurs interventions possibles faciliteraient mon parcours, entre autres, annexer un salaire vital automatique de l’A-E au Programme albertain d’emploi autonome, comme c’est le cas en Ontario; modifier les critères d’admissibilité du Fonds d’intégration qu’il s’applique à toutes les personnes handicapées, quelle que soit leur situation avec l’A-E; maximiser les interventions gouvernementales auprès des compagnies d’assurance qui pour nous, clients payeurs, dépassent ridiculement les bornes.  Nous nous interrogeons de plus en plus sur le bien-fondé de nos contributions.

Je suis certaine de trouver le moyen de travailler – j’ai besoin de m’occuper, d’avoir un sentiment d’utilité et d’être autosuffisante.  Dans le passé, ma détermination et les ressources financées par le gouvernement m’ont permis de connaître plusieurs réussites professionnelles malgré mes déficiences. Même si certains affirment que j’ai assez reçu de deniers publics, je n’aurais pu travailler sans cette aide et j’aurais certainement eu besoin de plus d’argent gouvernemental pour survivre et, par ricochet, je n’aurais pas autant versé de fonds dans les coffres de l’État.  Je crois que l’option la plus viable pour notre société – pas seulement en Alberta qui connaît une pénurie de main-d’œuvre spécialisée mais dans le reste du pays qui sera bientôt confronté au même problème-, je crois donc que l’option la plus viable est de continuer à fournir aux personnes handicapées les soutiens requis pour leur permettre de contribuer à la société, et au trésor public.

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Miss Ability

Sarah Wilson

J’ai eu plusieurs emplois au fil des ans, principalement dans les domaines administration et services sociaux.  Je suis diplômée, depuis 2007, du programme des intervenants en services sociaux, du Collège Algonquin.  Mes emplois, à temps partiel ou par quarts de travail, ont toujours été de courte soit à cause du financement soit parce que je suis allée suivre des cours ou ai accepté un autre emploi.

Je crois avoir suivi parfaitement les instructions en temps que travailleuse sociale; je suis très organisée et travaille bien en équipe.  Mais j’ai récemment découvert que je ne voulais pas être intégrée dans l’échéancier d’autrui.  Si je me penche sur ma carrière, je me souviens de deux postes où des accommodements se sont révélés indispensables.  Dans le premier d’ailleurs, ils n’ont été effectués qu’en mi-mandat et n’ont pas fait l’objet de suivi jusqu’au moment de mon départ pour un autre poste.  J’ai alors éprouvé un sentiment négatif et je n’ai pas eu l’impression de faire partie de l’équipe.  En ce qui a trait à la formation/promotion…le vide total jusqu’à ce que je lance ma propre entreprise.

Le premier poste dont je me souviens est celui de représentante du service à la clientèle  (RSC) auprès de la Banque TD Canada Trust.  Peu de promotion mais énormément de formation qui m’a permis de réaliser que ce n’était pas mon forté.  J’ai compris que je n’avais que peu d’affinités pour les chiffres et j’ai constaté qu’il y avait  trop, BEAUCOUP TROP d’informations à retenir.  Occuper un emploi où vous vous sentez submergé, où vous n’avez pas l’impression d’obtenir l’aide requise, pour lequel vous n’avez aucun penchant et où vous avez le sentiment de ne pas bien performer, n’est certainement pas une panacée.  Ajoutez à cela le fait que les changements requis dans ma succursale et ma station de travail n’ont pratiquement été effectués qu’à la moitié de mon terme; c’était très irritant.  Quelle honte que des personnes ne puissent facilement exercer leur pleine capacité à cause d’obstacles qui auraient dû être préalablement éliminés.

J’ai vécu ma deuxième expérience dans un poste de la banque RBC.  Les nouveaux employés faisaient partie d’un système de copinage, afin d’apprendre sur le tas quand ils étaient libérés de la formation informatique; le problème c’est qu’il n’y avait qu’une seule personne dans ce poste avec laquelle je ne m’entendais pas.  Nous venions de deux milieux différents et je crois qu’elle ne reconnaissait pas ma déficience.  Elle s’en servait comme d’une excuse.  Après avoir passé environ un mois dans ce poste, à être constamment misérable et voir ma santé s’aggraver à cause du stress, j’ai décidé de partir.  Cela ne valait pas la peine de rester.

Ma réussite professionnelle est survenue en 2011, quand j’ai décidé de lancer ma propre entreprise « Miss Ability ».  Je me suis entourée de personnes qui avaient des buts identiques et qui comprenaient que je ne voulais pas seulement un travail; je voulais créer quelque chose qui s’intègrerait dans mon style de vie.  Lancer ma propre entreprise a énormément bonifié ma vie professionnelle.

Je suis en train de fonder une société d’expert-conseil, sous le nom de Miss Ability, afin d’aider les entreprises accessibles aux fauteuils roulants à mettre en vigueur les lois d’accessibilité adoptées à Ottawa ainsi que les autres programmes destinés à améliorer la qualité de vie des personnes ayant des problèmes de mobilité.  Je cherche à créer un environnement sécuritaire où les personnes pourront partager leurs expériences et éradiquer les obstacles et préjugés négatifs toujours appliqués.

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Attitudes


Une attitude prometteuse

Claredon Robicheau

Brèves descriptions :  vous en tant qu’employé et votre emploi

Banque TD de 1980 à 1993.  En 1980, j’ai été accepté dans le programme de gestion bancaire.  J’avais vingt-cinq ans.  Je suis atteint de dystrophie musculaire (DM) depuis l’âge de dix-neuf ans et je marche avec une canne depuis mes trente-neuf ans. J’ai commencé comme caissier de banque (difficile de rester debout toute la journée, il n’y avait pas de repose-pieds à l’époque), puis je devins gérant de comptes et agent administratif la première année.  Au cours de la septième année, je devins agent de prêts puis agent de prêts hypothécaires.  J’avais une très solide éthique du travail et j’ai dû effectuer des efforts supplémentaires.  Ma vie sociale était fortement réduite.  La DM fatigue énormément.

Quels obstacles ont dû être éliminés pour votre embauche?

J’ai été embauché pendant l’Année internationale des personnes handicapées, des Nations Unies, ce qui a  pratiquement éliminé les obstacles comportementaux.  J’ai dû avoir constamment un comportement prometteur.

Quelles mesures d’adaptation avez-vous utilisées pour éliminer les obstacles?

Étant donné la progression de mes limitations fonctionnelles et mon transfert dans d’autres succursales, mes employeurs se sont vraiment assurés que leurs locaux soient accessibles aux fauteuils roulants.  De plus, la ville de Moncton possède un système de transport parallèle depuis 1989.

Quelles ont été vos expériences en ce qui a trait à la formation et aux promotions?

Ma déficience a ralenti mes capacités de formation; la banque m’a donc laissé progresser lentement au lieu d’exercer des pressions pour que je grimpe rapidement les échelons.

Quelle a été la clé de votre réussite?

Un employeur accommodant, des collègues très obligeants et une très solide éthique du travail.

Pour vous, quel a été l’élément déclencheur en matière d’emploi?

Une très bonne éducation et une progression professionnelle à mon rythme.

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Expériences en emploi

Monique Beaudoin

Pourquoi travailler? Pour une personne handicapée, le travail constitue une valorisation mais aussi un long cheminement rempli d'embûches en allant de la recherche au maintien en emploi.

En terminant mes études en relations industrielles, j'aspirais à une carrière dans les programmes Équité en matière d'emploi ou conseillère en ressources humaines au gouvernement.  J'ai dû déchanter rapidement de cet objectif.  Les coupures de poste et le peu de considération apportés aux programmes d'équité en matière d'emploi font que je dois penser à autre chose.

Obstacle majeur :  les gens voient la déficience avant les capacités d'un individu au moment de l'embauche, peu importe l'employeur.  En tant que personne ayant une déficience visuelle, j'ai eu à subir ces obstacles qui mènent bien souvent à des frustrations.  Dans un monde de productivité et de performance, les employeurs voient les limitations avant le potentiel.  Bien souvent, ils ne connaissent pas les technologies, ni les accommodements relatifs à un emploi.

Mon premier emploi débute comme correctrice d'épreuves de documents braille dans un organisme à but non lucratif. Après cet emploi, une recherche à temps plein s'amorce.  Grâce à ma détermination, je réussis à travailler ici et là, à contrat en donnant des formations à l'accueil des personnes handicapées, en plus de partir une petite entreprise de transcription braille.  Mais je voulais autre chose. Les formations constituant simplement un emploi occasionnel, je ne pouvais pas en faire une carrière.  La même logique s'applique aussi pour la transcription braille.

Depuis cinq ans, je travaille dans un organisme de personnes handicapées en défense collective des droits et de promotion.  J'occupe le poste de directrice générale.  J'aime mon travail dans ce milieu, toujours passionnant et rempli de défis. Je vois les vrais besoins.  Notre société devrait reconnaître davantage ce travail, essentiel à notre communauté.

Encore là, il n'est pas facile d'obtenir un emploi dans nos propres organismes.  Des gens craignent, voient nos limitations avant notre potentiel.  Pour réussir et compétitionner, je dois souvent travailler plus d'heures.  Aujourd'hui, l'information circule vite. Les gens veulent parfois des réponses dans les minutes qui suivent. J'ai aussi compris que des gens répondent plus rapidement aux courriels comparativement au téléphone. Mes expériences de bénévolat dans les groupes communautaires ont été très propices à mon emploi actuel.

Je trouve toutefois dommage que les organismes communautaires ne possèdent pas le financement ni les ressources pour des formations d'appoint.  Dans ma situation, je pense entre autres à Windows 7, MsWord 2010, les médias sociaux, etc. Pourtant, ce sont des outils utilisés au quotidien.  Avec les technologies adaptées, une formation devient nécessaire afin de bien s'approprier l'utilisation de ces outils.

En tant que personne handicapée, le marché du travail ne fait pas de cadeau.  Je dois toujours y consacrer des efforts, demeurer à l'affût de l'information.  Par contre, le fait de travailler en partenariat avec d'autres organismes et municipalités, permet à des gens voient mes capacités.  Pour participer pleinement, je demande régulièrement les documents à l'avance pour en faire la lecture.  Cela profite aussi à tout le monde.

Je pense que la scolarité et la détermination constituent les ingrédients qui mènent à un emploi et au succès.  Parfois, cela prend du temps et les résultats des efforts investis tardent à venir.

Quand enfin des personnes croient à nos habiletés, cela fait toute une différence!

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La carrière :  un  lien avec la communauté

Paul Young

J’ai travaillé comme technicien audio à la régie centrale de CBC Sydney de 1990 à 1998, date à laquelle j’ai pris ma retraite.  Je suis membre du Syndicat national des travailleurs et des travailleuses en communication (SNTC).

J’étais chargé d’enregistrer et de postsynchroniser toutes les alimentations radio provenant de Toronto et d’autres stations de la CBC.

Je devais performer à un très haut niveau de compétences, à savoir le niveau exigé des autres techniciens de la CBC à travers le pays.

J’ai d’abord été employé à contrat de 1980 à 1984, puis à temps plein par la suite.

Ce furent mes propres entraves, à la fois physiques et mentales, qui me fallut éliminer.  L’un de ces plus importants obstacles fut sans aucun doute mon scepticisme quant à ma capacité de performer, méfiance découlant de mon expérience de la marginalisation et du collectivisme dans un atelier protégé.

Autre défi majeur, dû à mon manque de coordination, le montage des bandes audio.  Ce n’est qu’avec énormément de pratique que j’ai réussi à le surmonter.

Il y a eu aussi les comportements des autres.  Et à cause de ces obstacles et de ces perceptions, j’ai été confronté à mes propres entraves.

Mais les gens ont changé d’attitude après avoir travaillé avec moi, réalisant ma compétence dans l’emploi.

Mes obstacles, je les ai éliminés en travaillant très fort et grâce également à l’appui de la CBC.  Car j’avais besoin de ce soutien pour exécuter mes tâches.

Avant que je ne sois engagé par la CBC, Walter Pretty, mon mentor, technicien de la régie centrale, se chargea officieusement de me former, en soirée et pendant les fins de semaine.  Un jour, m’entendant dire « c’est Walter qui m’a donné mon emploi », Walter réagit en s’exclamant « personne ne t’a donné un emploi…je t’ai simplement aidé à te qualifier pour le poste. »

Comme le syndicat voulait protéger les emplois, il fut convenu qu’un autre technicien radio serait constamment affecté avec moi dans la régie centrale.  Cela m’a permis de perfectionner mes compétences et m’a donné le soutien requis.  Donc, tout en voulant protéger les emplois, ils m’ont donné tout le soutien dont j’avais besoin pour performer.

J’ai suivi trois cours audio pendant mes années de service à la CBC.

Les clés de ma réussite :  mon travail acharné, un emploi valorisé en radio et mes collègues.

Pour moi, c’est certainement le fait d’avoir une carrière prisée qui a fait toute la différence.  Je n’avais pas qu’un emploi.  J’avais une carrière ancrée dans ma trame d’intérêts, mes connaissances et mon amour de la musique et de la radio.  Avoir un salaire appréciable a également accentué cette positive distinction.  Je connaissais des gens dans tous les différents services de la CBC.  Nombre d’entre eux m’ont aidé dans mon cheminement professionnel.  Et il y a toujours eu d’importants décideurs visionnaires qui se sont engagés à me faire progresser.

Mettre fin à l’exclusion, c’est avoir un emploi et une carrière valorisants qui vous connectent avec les autres membres de la communauté.

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Réflexion personnelle sur le travail

Emily Ternette

Quand j’étais jeune, je voulais devenir enseignante.  Je m’exerçais, debout devant un auditoire imaginaire, pointant le tableau noir – essayant de conserver mon équilibre.  J’avais mentalement établi toutes les positions à adopter pour ne pas être debout trop longtemps – m’appuyant sur le bureau, enseignant assise derrière le bureau ou encore sur une chaise à côté du bureau.

Mes parents ne m’ont jamais découragée.  Mais lorsque je suis arrivée au secondaire, mon rêve s’est évanoui car ma déficience s’est rappelée à moi, intensément et physiquement.  Je suis allée à l’université comme prévu.  Je n’avais aucune idée de l’orientation que je voulais prendre.  Je voulais toutefois suivre des cours d’anglais afin de pouvoir écrire.  Pendant mes années universitaires et collégiales, j’ai trouvé des emplois d’été comme les autres étudiants, par l’intermédiaire du bureau d’emploi estudiantin qui affiche les annonces des gouvernements fédéral et provincial.  Un été, j’ai travaillé pour la province, compilant un livret sur les sites touristiques de Winnipeg et des environs et notant leur degré d’accessibilité.

À la fin de mes études universitaires, j’ai réalisé que je n’avais pas d’expérience « réelle » et ne possédais que quelques compétences administratives.  Ce qui, bien sûr, n’allait pas faciliter ma recherche d’emploi à long terme.  J’ai occupé plusieurs postes à durée déterminée, puis j’ai trouvé un emploi permanent dans une clinique médicale.  J’y suis restée trois ans, même si le superviseur qui m’avait engagée estimait que j’étais surqualifiée et craignait que je m’ennuie.  (Il avait raison, mais c’était mon premier véritable emploi à temps plein).  Je suis partie et après un long chômage, j’ai trouvé un emploi dans un cabinet médical.  J’y suis restée quatre jours.  La femme du médecin présumait parait-il que je n’arrivais pas à assumer ma charge de travail.

J’ai continué ma série d’emplois à court terme, avec notamment une année au Manitoba Theatre Centre (que j’ai particulièrement aimée…il y avait tant de créativité.)  J’ai finalement été embauchée dans un poste permanent de secrétaire/réceptionniste par la Manitoba League of Persons with Disabilities (MLPD).  J’y suis restée dix-sept (17) ans, jusqu’à ce que me santé me force à prendre ma retraite.

Je me suis interrogée à maintes et maintes reprises « est-ce que ma déficience a entravé d’éventuelles embauches?».  Je crois que « non » dans la majorité des cas, surtout lorsque j’étais plus jeune et que je recherchais un travail.  On m’a appris dans ma jeunesse à ne pas considérer ma déficience comme un obstacle.  Et j’ai appliqué cette attitude dans le monde du travail.  Ce n’est que bien plus tard que j’ai commencé à remarquer le négativisme des autres à mon égard et que j’ai constaté alors que la recherche d’emploi était plus ardue qu’auparavant.

De nos jours, les lois sur la discrimination dans le travail soutiennent les personnes avec des déficiences dans leur recherche de travail.  Les employeurs ne peuvent plus invoquer les limitations fonctionnelles pour refuser un poste à une personne handicapée.  Nous pouvons être plus compétitifs désormais.

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Réussir au travail :  depuis l’apprentissage et le perfectionnement professionnel de mes débuts jusqu’à l’emploi rémunérateur et permanent

Frances Sinclair-Kaspick

Ce n’est pas avec le travail à temps partiel de mes débuts que j’ai acquis, en tant que personne handicapée, la confiance requise pour chercher un emploi à temps plein.  J’ai rapidement compris que des compétences limitées et de laborieuses tâches physiques allaient entraver mon cheminement.  J’avais besoin de fonctions plus faciles, d’un emploi de bureau et d’une interaction vocale ou par ordinateur.

Certes, j’étais physiquement capable d’exécuter des tâches, mais pas complètement toutefois.  J’ai donc proposé mes services comme bénévole afin de prouver à un organisme, et à moi-même, mes aptitudes professionnelles et ma capacité de fonctionner dans un cadre de travail.

Avoir besoin de me prouver m’a donné la confiance et les compétences nécessaires pour améliorer mes futurs emplois.  Ce perfectionnement m’a permis d’acquérir de nouvelles connaissances professionnelles et de concourir pour de plus gros salaires.

Si l’organisation est syndiquée, essayez  de connaître la convention collective en vigueur.  Soyez également conscient de vos droits en tant que personne handicapée.  Vous aimerez sans doute vous familiariser avec la Loi canadienne sur les droits de la personne et avec l’obligation d’accommoder.  Afin de vous tenir constamment informé, assistez aux réunions si vous en avez le temps.  Si vos droits sont contestés, vous pourrez vous défendre vous-même.

La vie peut nous surprendre par ses imprévus, ses tournants et ses virages et provoquer des problèmes personnels, affectant notre bien-être.  Vous risquez d’emporter cette tension dans votre milieu de travail.  N’hésitez pas à vous prévaloir des services d’assistance psychologique de l’organisation ou de trouver un service de counseling qui vous convienne.

Les journées de congé de maladie :  n’en abusez pas et soyez prêt à compenser chaque fois que possible.  Veillez à ne pas trop travailler tard le soir.  Vous en subirez les conséquences.  Mon corps handicapé exige un excellent repos.  Aussi bête que cela puisse paraître, les vitamines m’aident à me tenir en forme.  Pendant l’hiver, je passe pas mal de temps à l’intérieur.  Alors, je prends de la vitamine D, de l’Omega 3 et, à l’occasion du B50 Extra.  Je combats les insomnies avec de la mélatonine.

Les rendez-vous chez le médecin : essayez de les fixer en fin de journée et soyez prêt à compenser le temps requis.  Assurez-vous que votre environnement de travail soit bien installé,  selon vos besoins.  Vous aurez peut-être besoin d’un physiothérapeute ou d’un ergonome pour  vous aider à cet effet.

Les transports :  soyez responsable.  Assurez-vous d’arriver à l’heure au travail, même si cela vous oblige à partir plus tôt.  Arriver tôt ou rester tard vous aidera peut-être à compenser le temps perdu.

Vous pourriez avoir besoin d’un congé de maladie.  Si vous en êtes capable et avec l’accord de votre organisation, vous pourriez  peut-être travailler un peu à domicile.

Les années de service restantes :  Je continue en étant déterminée à continuer à travailler pendant quelques années encore.  Travailler pour un salaire n’est pas le principal atout d’un emploi; être socialement actif au travail et interagir avec les collègues vous permettront de forger de bonnes relations.  Les directeurs apprécieront vos forces et vos faiblesses.  Dans un milieu de travail, on finit par connaître la personnalité des autres.  Tous doivent essayer et lutter aussi.  Les affinités ne sont pas générales, les personnalités ne s’accordent pas forcément et pas seulement dans le milieu de travail.  Essayez de trouver un cadre professionnel qui vous convienne.  Les avantages sont multiples et à plusieurs niveaux.

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S’accepter : la clé du succès en emploi

Karen Lai

Je travaille actuellement dans un centre de réadaptation, au sein des services d’emploi pour adultes.  Je coordonne en fait un programme intitulé AIM (Aptitudes Ici et Maintenant)  (www.abilitiesinmind.ca).  Nous collaborons avec des entreprises à la production d’un manuel de formation aux fins d’embauche et de maintien en emploi des personnes avec des déficiences.  C’est surtout ma capacité de remettre la déficience en perspective et de ne pas la considérer en termes négatifs qui m’a permis de réussir dans cet emploi ainsi que dans mes réalisations passées.  C’est un véritable défi à cause de tous les comportements négatifs exercés à l’égard des personnes handicapées au sein de la société et du monde du travail.  Je sais, professionnellement et personnellement, que les personnes handicapées sont toujours confrontées à des comportements, à des problèmes d’accès et à un manque de possibilités d’emplois.

Je ne vais pas encore marteler  le fait que les personnes handicapées sont malheureusement défavorisées quand il s’agit d’emploi.  La plupart des employeurs ne voient pas au-delà de la déficience et assument que l’emploi disponible ne convient pas.  Atteinte de paralysie cérébrale depuis ma naissance, plus spécifiquement de diplégie spastique, j’ai des troubles de la parole, d’équilibre, de contrôle de motricité, de coordination et de dextérité.  Lorsque je cherchais un emploi, j’avais d’énormes difficultés à franchir la première étape.  Les employeurs s’arrêtent à mon élocution et ne me rappellent pas pour confirmer mon entrevue; certains me raccrochent même au nez.  Il y a aussi les compagnies qui demandent aux candidats de passer des tests dans un temps limite, ce qui ne me convient pas.  Par conséquent, si je n’ai pas la possibilité d’utiliser un ordinateur lors du test d’embauche et si on ne m’accorde pas un peu plus de temps, je n’ai aucune chance d’avoir l’emploi.

Trouver un emploi c’est comme aller sur les montagnes russes et c’est pire encore pour les personnes handicapées.  Les préjugés et la peur de l’inconnu encadrent les ouvertures d’embauche des personnes avec des déficiences.  Puisque je n’utilise pas d’aide à la mobilité, mes plus grands obstacles sont les attitudes des employeurs qui présument que je suis déficiente mentale ou sourde.  Je demande à mes employeurs de faire preuve de compréhension, d’ouverture d’esprit et de tolérance.  Certes, j’exécute les tâches différemment, à mon propre rythme, mais je les exécute.  Lorsque j’ai réussi à trouver un emploi, c’est parce que mes employeurs faisaient preuve d’ouverture d’esprit.  Nous avons collaboré pour trouver des mesures d’accommodements afin de me permettre d’exceller dans mes fonctions.  Par exemple, un collègue m’aidait en prenant des notes lorsque j’effectuais des entrevues sur le terrain ou lorsque la tâche était trop lourde (exigeant un certain degré de dextérité), ou en apportant certains correctifs ou autres fonctionnalités  sur mon ordinateur afin de ralentir ma souris.  Les progrès technologiques ont ciselé l’art des messages électroniques et désormais, j’envoie des courriels et utilise beaucoup moins le téléphone.

J’ai été privilégiée par le type de formation reçue lors de ma scolarité et tout au long de ma carrière.  Je suis une personne dynamique et motivée et j’aime collaborer avec les autres afin de trouver les meilleures pratiques de fonctionnement.  Je reconnais que les détails de ma déficience échappent à la plupart des gens.  Mais il m’a fallu  absolument mentionner que je voulais réussir dans mes études de premier et de second cycles, dans ma formation, dans mes promotions afin que des mesures de soutien soient instaurées pour maximiser ma participation.

Je voudrais que les gens, pas seulement dans le secteur de l’emploi, mais que tous les citoyens en fait soient assez ouverts pour accepter la diversité humaine.  Je rencontre souvent des personnes qui présument que je n’ai pas d’emploi.  Je réponds pratiquement toujours « Vous travaillez, c’est merveilleux.  Comment avez-vous fait pour obtenir un emploi? »  Les personnes handicapées sont tout simplement des personnes.  Il faut s’ouvrir aux deux réalités – les personnes avec des déficiences et les personnes sans.  C’est un virage perceptuel, un recadrage du terme « déficience » dans une orientation positive.  Ce n’est pas seulement voir les autres évoluer, c’est se voir aussi, s’accepter.  Une fois le virage effectué, j’ai me baser sur mes aptitudes et promouvoir les avantages d’une force active diversifiée.

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Obtenir un emploi et le conserver – Qu’est-ce qui fait la différence?

Donna J. Jodhan

Il est vrai que dans les Canadiennes et Canadiens aveugles sont encore confrontés à des obstacles dans le marché du travail.  Tout d’abord, nous faisons partie d’un paysage instable qui se reformate sans cesse sur une base continue; ensuite, les Canadiens aveugles subissent encore des obstacles tout aussi artificiels que réels.

Les obstacles artificiels sont des entraves comme les attitudes et le manque de sensibilisation; les obstacles réels sont notamment les technologies et le manque d’accès aux installations.  En ce qui a trait aux premiers, des améliorations ont certes été apportées, mais il reste encore beaucoup de chemin à parcourir avant que ces obstacles ne soient jugés surmontables.  Quant aux deuxièmes, ce sont de véritables défis pour les employés aveugles qui doivent faire preuve d’imagination pour les surpasser.

Je suis ingénieure-système depuis plus de 20 ans et tout au long de ces années, ma description de tâches a été modifiée à plusieurs reprises…depuis celle de programmeur à celle d’une conseillère aidant les clients à concevoir et à développer leurs propres systèmes.  Mon succès est dû à ma capacité d’établir de saines relations avec mes collègues, mes clients et mes employeurs, basées sur des concessions mutuelles, des compromis, de la sensibilisation et de la conscientisation.

J’ai appris au fil des ans à ne jamais rien prendre pour acquis; en ce qui a trait aux promotions et changements de carrières, j’ai dû travailler deux fois plus pour atteindre mes objectifs.  J’y suis arrivée grâce à une éducation continue et un engagement soutenue et la volonté de collaborer avec mes collègues pour mettre sur pied des processus axés sur la réalisation de buts réalistes.

Pour réussir, j’ai dû faire preuve de réalisme dans mes performances et j’ai dû utiliser la technologie disponible.  Les technologies d’adaptation seront toujours un ou deux pas en arrière par rapport aux technologies générales mais cela n’implique pas forcément que les obstacles ne peuvent être surpassés.

Nous serons toujours confrontés à des obstacles en matière de formation et de promotion.  Mais tant que nous le reconnaîtrons, la bataille sera à moitié gagnée et nous pourrons alors nous concentrer sur la recherche de solutions réalisables.  Pour moi, le clou du métier a été et continue à être ma capacité de canaliser mon énergie en pensées positives et d’atteindre des résultats favorables.

L’emploi continue à être une importante plate-forme dans la vie des Canadiennes et des Canadiens aveugles, une plate-forme à consolider si nous voulons améliorer et étendre la toile des possibilités d’emplois pour les futures générations de Canadiens aveugles.

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Prendre sa carrière en main

Chris Stark

À la veille de ma retraite et au moment de raccrocher mes patins, il est bon de faire le bilan de ma réussite professionnelle, de revoir comment j’ai gagné ma vie et, avec ma femme, j’ai élevé une famille.

Je crois que pour réussir, vous devez assurer votre destin, vous devez prendre vos propres décisions après avoir évalué tous les facteurs et puis, assumer vos choix.  Fixez vos buts et tentez résolument de les atteindre.

N’acceptez pas les jugements des autres, comme ceux de mes premiers enseignants à l’école pour aveugles qui, devant la classe, me taxaient « d’idiot du village », N’écoutez pas ceux qui, comme mes premiers conseillers professionnels, affirment que votre seule option est de vivre dans un établissement pour aveugles.

J’ai osé rêver d’inclusion et de vie confortable.  J’ai trouvé des amis, des modèles et des mentors.  Certes, ce ne fut pas toujours facile.  J’ai travaillé dur, fait d’énormes sacrifices et j’ai eu une carrière satisfaisante.  Je ne me suis jamais arrêté d’apprendre.  J’ai été loyal envers mes amis, essayant toujours de les aider et je me suis efforcé de ne jamais blesser personne.

J’ai relevé de nombreux défis, notamment celui de devoir travailler pour payer mes études universitaires (cours, subsistance et logement).  J’ai donc été gérant de nuit dans une résidence; là, sauf pendant les célébrations estudiantines de fin de semaine, la tranquillité des nuits me permettait d’être payé pour étudier et faire mes travaux, comme les essais et les exposés.  J’ai même optimisé mes compétences en résolution de problèmes à l’université car il n’y avait aucun service chargé de produire des manuels en formats accessibles. J’ai donc trouvé des personnalités radio qui m’en ont enregistré plusieurs.

J’ai obtenu mon premier emploi à plein temps dans le secteur caritatif, que j’ai quitté après onze (11) ans de services pour entrer dans la Fonction publique fédérale. C’est grâce à un camarade aveugle que j’ai pu obtenir les contacts nécessaires pour ce changement de carrière.  Les personnes handicapées peuvent être d’inestimables ressources si elles décident de s’affirmer et de s’entraider les unes les autres.  Ce changement professionnel m’a permis de réaliser que les reculs ne sont pas des fins en soi.  Bien au contraire, ils ouvrent la porte à de nouvelles voies.

Mon premier emploi en tant que fonctionnaire relevait du programme d’amélioration de la productivité énergétique.  Et oui, le gouvernement fédéral avait  vraiment institué un programme visant à travailler plus intelligemment dans ce domaine.  J’y ai rencontré de nombreux ingénieurs qui se déplaçaient à travers le pays, faisaient leurs courses dans le magasin de la Baie d’Hudson à Resolute Bay et avaient eu l’honneur de passer la nuit  dans le lit où la Reine Elizabeth et le Prince Philip avaient dormi quarante ans plus tôt,  lors de leur voyage de noce dans le Nord canadien.

Mais j’ai surtout cherché à améliorer la qualité de vie des personnes avec des déficiences.  Quand j’ai eu la chance de travailler sur la question des transports accessibles, j’ai sauté sur l’occasion – la promotion en fait – et j’ai fait des exposés, formé du personnel, traité les plaintes, élaboré et appliqué des règlements.  J’ai voyagé dans plusieurs pays comme le Japon où l’article que j’avais co-rédigé a remporté le prix du meilleur document au Congrès mondial.

J’ai énormément été aidé tout au long de mon parcours.  Certes, j’ai subi les inévitables politicailleries du milieu du travail, les exclusions, les problèmes d’accessibilité notamment en ce qui a trait aux communications électroniques et écrites.  J’ai été confronté à de nombreux obstacles, physiques, systémiques et comportementaux.  J’ai essayé de les éliminer chaque fois que possible en négociant, suggérant des solutions ou en les contournant.  Je n’ai jamais totalement réussi.

Je me suis toujours efforcé de suivre les cours offerts aux employés afin de perfectionner mes aptitudes et d’optimiser les possibilités de valorisation de mes compétences en milieu de travail.  J’ai insisté pour obtenir les accommodements requis pour mon travail, incluant des lecteurs pour traiter l’énorme volume de documents bureaucratiques.  Lorsque je postulais de nouveaux postes, j’ai toujours réseauté, cherché les possibilités et analysé l’environnement de travail.  J’ai également accepté de ne pas obtenir tous les postes que je sollicitais.  J’ai donc profité de ces concours pour apprendre et peaufiner mes compétences afin d’ouvrir la porte à d’autres possibilités.  J’ai appris à chercher la place qui me convenait le mieux et, quand j’avais obtenu le salaire et le niveau de responsabilités requis, je m’installais dans un travail que j’adorais et où je pouvais œuvrer pour l’accessibilité des personnes avec des déficiences.

Donc, prenez votre carrière en main.  Ne vous laissez pas décourager par les reculs.  Donnez le meilleur de vous-mêmes et soyez fiers de vos réalisations.  Et n’oubliez pas de vous vanter vous-mêmes.  Nul ne le fera pour vous.

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Les emplois d’hier et d’aujourd’hui

Catherine S. Fichten

C’était en 1981 – l’Année internationale des personnes handicapées.  Mon Ph.D nouvellement en poche, j’avais soumis ma première demande de subvention pour un projet de recherche sur le préjudice et la discrimination.  Avec ses six pieds de haut, mon père que j’avais toujours admiré au sens propre comme au figuré, était désormais en fauteuil roulant.  Il continuait à travailler car il avait eu la chance d’être l’un des premiers Montréalais à obtenir un siège dans le nouvel autobus adapté.  Et à cette époque-là, il n’y en avait qu’un.

Un jour, je l’ai accompagné à la banque.  Je suis restée sur le côté pendant qu’il effectuait ses transactions.  Un jeune agent est sorti de derrière le guichet, beaucoup trop haut pour mon père.  Il lui a tapoté la tête et lui a demandé poliment « que puis-je faire pour vous, pépé?  Mon père était sidéré. À cette époque-là, on s’adressait aux gens par « Monsieur, Madame… ».  D’autre part, PERSONNE n’avait jamais tapoté sa tête…sauf peut-être ma mère.  Et comme le caissier avait parlé à mon père très lentement mais à voix forte, tout le monde l’avait entendu à la banque.  Le message était très clair : les personnes en fauteuil roulant sont comme des enfants, lents mentalement, et sans dignité.

Inutile d’aller plus loin dans ma quête de sujet de recherche pour ma thématique sur le préjudice et la discrimination.  Trente ans plus tard, j’ai à mon tour rejoint les rangs des usagers de fauteuil roulant.  Mais tout est différent maintenant, surtout pour les jeunes étudiants handicapés du niveau postsecondaire.

J’enseigne au Collège Dawson.  Dans le cadre de mon travail au Réseau de recherche Adptech, que je codirige avec Maria Barile et Jennison Asuncion, j’ai étudié les facteurs facilitants et les obstacles des étudiants handicapés du niveau postsecondaire.  Même si tout n’est pas parfait, loin de là, notre recherche montre la plupart de nos luttes pour les étudiants des collèges et universités ont été gagnées.

Ainsi, sur les huit mille (8000) étudiants inscrits dans mon collège, mille (1000) environ ont des limitations fonctionnelles. Le campus est entièrement accessible, quelle que soit la déficience.  Les étudiants ont accès, sans trop de difficultés,  à des appareils et à des logiciels adaptés.   La plupart des professeurs sont prêts accorder des accommodements. En général, les affichages en ligne de la faculté sont en Power Point.  Rien n’est parfait certes.  Mais de nombreux changements sont survenus depuis 1981 et selon nos recherches, les étudiants handicapés obtiennent leur diplôme en grand nombre.

Mais quelles sont les perspectives d’emploi pour les diplômés?  C’est la thématique de notre travail actuel, subventionné par le Conseil de recherches en sciences humaines du Canada.  Existe-il des emplois pour nos jeunes?  Quels sont les obstacles et les éléments facilitants pour un emploi désiré?  Que pourrait-on faire aux fins d’améliorations?  Selon nos résultats préliminaires, 2/3 des  étudiants des collèges et universités obtiennent un emploi un an après l’obtention de leurs diplômes.  Et la plupart d’entre eux sont satisfaits.  Est-ce un bon point?  C’est certainement mieux que cela ne l’était à l’époque de mon père, où moins de cinq étudiants handicapés étaient inscrits dans mon collège.   Les emplois pour personnes handicapées n’étaient pas problématiques.  Pourquoi l’auraient-ils été  puisqu’il n’y avait pratiquement pas de diplômés.  La plus grande difficulté était de passer la porte.  À présent,  selon nos recherches, les étudiants handicapés obtiennent leurs diplômes en nombres record.  Est-ce qu’un taux d’emploi de 2/3 suffit? Ce n’est pas catastrophique en cette période de vache maigre.  Mais est-ce suffisant?  Certainement pas!

Selon les étudiants, quels  sont les obstacles qui entravent leur quête d’emploi? Par ordre de grandeur : leur santé, leur déficience, la perte éventuelle totale ou partielle de leur revenu actuel/ soutiens supplémentaires et le découragement dans les recherches d’emploi.  Peut-on alors apporter des changements?  Oui, aux politiques qui rendent les emplois à temps partiel peu attrayants, à celles qui empêchent l’acquisition d’expérience de travail pendant la scolarité, à celles qui encouragent (obligent?) les employeurs à embaucher des diplômés handicapés. Autre aide possible : des ateliers sur l’emploi, organisés par les collèges et universités et adaptés aux préoccupations des étudiants handicapés.

Quant à moi, je crois tout simplement qu’il s’agit d’une question de temps.  Avec le départ des babyboomers, le taux de chômage va diminuer et un besoin pressant de « travailleurs intellectuels » se fera sentir.  L’avenir est  prometteur pour les nouveaux diplômés des collèges et universités.

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Mon parcours professionnel

Paula Ann Stewart

Je voudrais tout d’abord commencer cet article en affirmant que dans ma vie, j’ai toujours focalisé le bien-être au lieu de la maladie, la capacité au lieu de la déficience et l’amour au lieu de la haine.  Cette approche a été la plus déterminante.

Ultra présente dans le monde du travail, la discrimination peut affecter votre estime personnelle et vos contacts avec votre entourage – c’est-à-dire la façon dont vous approchez les étrangers, les partenaires, la famille, les amis et les enseignants ainsi que vos futurs employeurs.  Si vous avez vécu une terrible expérience, vous devez éradiquer l’humiliation, la colère, la frustration et la douleur avant de vous lancer dans un nouvel emploi.  La vie est courte.  Ne restez pas dans la négativité – vous vous défavorisez tout simplement.

J’ai travaillé comme gérante de magasin pour une compagnie américaine d’articles de bains et de toilettes, chef de file dans son domaine et possédant des succursales à travers le monde.  J’ai commencé comme vendeuse; après avoir travaillé avec zèle  pendant six mois, j’ai été promue au poste de première vendeuse adjointe; puis, pratiquement six mois plus tard, j’ai été nommée gérante d’une boutique dans l’Ouest de l’Île de Montréal (Centre commercial Fairview Pointe Claire).

En tant que gérante, je devais quotidiennement former un personnel de six à huit associé(e)s aux ventes, contrôler l’inventaire, m’occuper du marchandisage (arranger le magasin et présenter les articles en fonction des plans envoyés par le siège social situé aux États-Unis), veiller à l’entretien ménager, participer à des conférences téléphoniques aux deux semaines, fixer des buts et enfin servir d’exemple et de leader en atteignant quotidiennement, hebdomadairement et mensuellement des objectifs de vente pour le magasin.

Je n’ai jamais expliqué mon état de santé.  Je me suis assurée d’avertir mes employeurs lorsque j’étais stressée ou lorsque j’avais besoin d’aide supplémentaire pour mes fonctions et mes responsabilités.  Je savais en prenant cet emploi qu’il se trouvait à Montréal, Québec.  Dans cette ville, les employeurs ne sont pas sensibles aux personnes/travailleurs handicapés et je savais donc que je me tirerais une balle dans le pied si j’avouais que j’avais une déficience mentale.  Cela aurait pu me coûter ma promotion; par conséquent, j’ai décidé de me prouver et de laisser parler mes chiffres de ventes et de gérance.

J’ai quelques difficultés de mémorisation et j’ai souvent fait ce que déconseillent fortement certains professionnels du milieu des affaires -- j’ai apporté du travail à la maison afin d’étudier les données dans un environnement moins trépidant.  Quelquefois, à la boutique, le rythme est affolant; il faut tout faire en même temps : essuyer les étagères, vérifier les stocks, traiter les ventes à la caisse et aider les clients à choisir.  Incroyable!  J’ai donc dû m’assurer que mon personnel soit extraordinairement bien formé et performant.  Pendant les périodes plus tranquilles, le cas échéant, je devais étudier – consolider ma connaissance du produit -, mémoriser les prix, calculer mentalement, etc…  En fait, le meilleur moment pour étudier était le soir, vers 21 h, dans mon lit.

Malheureusement, en ce qui a trait à la formation, j’avais des employeurs extrêmement impatients qui ne voulaient pas former les nouveaux employés.  Ils ne veulent pas vous former et s’ils doivent le faire, ils veillent à ce que ce soit rapide et que vous appreniez encore plus rapidement.  Pour de nombreuses compagnies hélas, la formation est du temps pris sur la réalisation de profits.  Elles ne la perçoivent pas comme un investissement dans leurs employés, investissement qui consoliderait les compétences et la solidité du personnel, ainsi mieux préparé à travailler efficacement et à réaliser de grands profits à long terme.  La situation a changé.  Les compagnies veulent des gérants avec des B.A.  Si vous n’en avez pas, et c’est mon cas - la plupart des personnes handicapées n’ont pas de diplôme universitaire, un très grand désavantage dans tous les secteurs, quels qu’ils soient -, vous partez avec un handicap.  Vous devez travailler plus fort pour prouver que vous pouvez exécuter les tâches malgré le manque d’expérience en gestion/ventes institutionnelles.  Je n’ai jamais rien quémandé.  J’ai juste démontré comment je pouvais être un atout pour la compagnie; je n’ai pas parlé de mes besoins et mes attentes; j’ai bien plus expliqué les avantages que j’apporterais grâce à mon expertise et mes connaissances.  Ce n’est pas parce que vous n’avez pas de baccalauréat ou de maîtrise que vous ne pouvez lire des livres ou des articles sur les sites commerciaux, trouver un mentor (un homme ou une femme d’affaires bien établi-e).  Or j’ai tout fait, et plus encore.

Je ne me plaindrai pas trop puisque j’ai entendu dire que la situation était pire à Toronto en ce qui a trait à la concurrence dans l’emploi.

Les clés de ma réussite?  Certainement mon attitude positive dans la vie et dans le travail.  J’ai toujours été fière de moi et de mon travail.  J’ai une très solide éthique professionnelle.  Et j’ai toujours veillé à mon apparence, être propre et présentable.  Croyez-moi, ce n’est pas facile quand votre blouse est tâchée de crème et de poussière et que vous devez vous précipiter pour servir des clients et courir après dix (10) heures de travail pour attraper votre autobus.  Mais c’était le choix que j’avais fait quand je me suis intégrée dans ce secteur.  Je me suis préparée pour le pire et espéré le meilleur.  Je me suis aussi assurée d’économiser par précaution.  Et cela a été fort utile quand j’ai eu une alerte de santé qui m’a obligée à dépenser une grande partie de mes épargnes et de reprendre, une fois encore, ma quête d’emploi.

Ce qui a fait la différence en emploi, c’est de rester proche de ma famille et de mes amis, grâce aux courriels, appels téléphoniques et télé-messages.  Ils ont constaté mon stress et les difficultés que je subissais; ils m’ont servi de miroir.  Ils m’ont rappelé que je devais ralentir et ne pas glisser dans une spirale aussi stressante au travail; ce sont eux qui m’ont remonté le moral et m’ont offert leur appui.

J’ai travaillé pendant deux ans et demi pour la compagnie avant que ma boutique soit fermée (pas à cause de moi – cela faisait partie du plan).  J’ai personnellement généré 211 000 $ de revenus pour la firme et plus de 1 000 $ de bonis spéciaux pour moi.  Très satisfaisant.

Bonne chance.  Ne laissez personne vous dire que vous n’êtes pas capable!

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Les clés du succès : Aimer son travail et bien performer

Derek Legge

Après  avoir obtenu un diplôme en commerce de l’université du Manitoba en 1972, je me suis intéressé à l’administration des soins de santé.  Je boitais à l’époque.  J’avais précisé, dans mon curriculum vitae, que je cherchais une possible formation en administration des services de santé.  J’ai alors trouvé un emploi d’été comme agent dans un service hospitalier.  J’ai aussitôt envoyé des CV à divers établissements, même à l’extérieur de la ville.  Et c’est ainsi que j’ai débuté comme directeur adjoint du service d’entretien ménager de l’hôpital général de Brandon. J’ai ensuite pris des cours par correspondance en entretien ménager des hôpitaux.  C’est à  ce moment-là que j’ai commencé à me déplacer en fauteuil roulant.  J’ai ensuite  été promu directeur du service puis directeur des ressources humaines de l’hôpital.

Dès que l’occasion s’est manifestée, je suis revenu à Winnipeg comme directeur des ressources humaines du Victoria General Hospital. Étant donné l’accès limité aux fauteuils roulant à partir des aires de stationnements, plusieurs bateaux de trottoirs ont dû être construits.

J’ai quitté mon poste à cause de problèmes de santé et je me suis alors tourné vers les questions touchant les personnes handicapée et vers les questions d’emploi.  J’ai commencé une nouvelle carrière, travaillant pour des organisations d’entraide comme la Manitoba League of Persons with Disabilities et Employment Equity où j’ai énormément appris sur les enjeux des  personnes avec des déficiences.

Je suis ensuite travaillé au fédéral puis  provincial dans les services favorisant l’emploi des personnes handicapées et j’ai étendu ma sphère d’expertise à d’autres groupes confrontés à des problèmes d’emploi.  J’ai fini par travailler pour la Commission des droits de la personne du Manitoba où j’ai terminé ma carrière officielle.

J’ai pu facilement identifier les obstacles auxquels j’ai fait face : l’inaccessibilité physique du lieu de travail.  J’ai eu la chance de travailler pour de grandes entreprises qui n’ont pas hésité à apporter les changements requis.   Plus important encore, mes employeurs se sont expressément engagés à appliquer les principes d’égalité des chances d’emploi.  De plus petits employeurs auraient probablement hésité à se lancer dans d’aussi grandes dépenses.

Chaque fois que j’ai dû souligner le besoin de modifications aux fins d’accessibilité (salles de bains ou bateaux de trottoirs), je me suis toujours efforcé de faire comprendre
à mes employeurs que ces améliorations ne m’étaient pas uniquement destinées;  d’autres en profiteraient au fil des ans.  Ce n’était pas très difficile de m’accommoder puisque ma déficience était visible.  C’était mon rendement au travail qui allait éclipser ce « handicap » apparent.

Les clés de mon succès?  Aimer mon travail et bien performer.  Trouver l’emploi qui corresponde à ses intérêts facilite aussi la tâche. Il est également très important d’avoir un poste qui vous enseigne une partie du  travail que vous recherchez. Les références sont certainement cruciales.  Mon principal objectif : développer ma confiance en moi, avoir foi en ma capacité d’apprendre, ne pas avoir peur de poser des questions et m’assurer subtilement que mon patron sache que je faisais du bon travail.  Ce furent les clés de mon succès. 

Les possibilités d’apporter des changements dans l’emploi sont survenues à diverses occasions. N’ayez pas peu de faire des changements, qu’ils soient directs,  latéraux ou encore, oui, à rebours s’il le faut.  Soyez absolument conscient de ce que vous aimez faire, du domaine dans lequel vous excellez et également, de ce que vous n’aimez pas faire.  La satisfaction dans l’emploi est aussi enrichissante que mentalement saine.

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Annexe


Analyse documentaire de la mesure des interrelations entre les personnes handicapées et le maintien en emploi/la progression professionnelle

Centre canadien d’études sur les personnes handicapées

En 2009, le Centre canadien d’études sur les personnes handicapées (CCDS) a effectué une analyse documentaire de la mesure des interrelations entre les personnes handicapées et le maintien en emploi/progression de carrière.  Le rapport complet, avec les références, est disponible sur le site http://disabilitystudies.ca/research-areas/.


Maintien en emploi et avancement professionnel

Le maintien en emploi se réfère soit aux années de services d’une personne dans un emploi donné, soit les années passées par la personne dans la force active.  La mobilité d’emploi peut être volontaire (à savoir changer de travail ou prendre un congé) ou involontaire (à savoir les licenciements, la mise à pied).  Le maintien en emploi est une question importante car le roulement de personnel peut s’avérer onéreux pour les employeurs et se répercuter longuement sur le cheminement professionnel des employés.  Le cheminement de carrière ou avancement professionnel est lié à l’augmentation salariale et aux responsabilités accrues.

Plusieurs facteurs affectent le maintien en emploi et l’avancement professionnel.  Les principaux se rattachent aux :

  • .  situations économiques exogènes,
  • .  caractéristiques sociodémographiques/liées au handicap
  • .  stimulations/dissuasions de l’emploi et du revenu, et
  • .  caractéristiques en milieu de travail
  • .  Attitudes et  perceptions personnelles vis-à-vis de l’emploi.


Situations économiques exogènes

Conditions macroéconomiques – ces conditions se répercutent grandement sur la qualité et la quantité de possibilités d’emplois.  Les personnes handicapées sont particulièrement touchées par les conditions macroéconomiques car elles sont souvent « les dernières embauchées/les premières licenciées » lors de récessions.  Lorsque s’accroît l’insécurité au travail (temps partiel, emploi saisonnier ou à contrat), les pertes d’emploi non voulues augmentent et la satisfaction professionnelle diminue.

Industrie et profession - Les taux de maintien en emploi et les possibilités d’avancement professionnel diffèrent selon les métiers et les secteurs.  Ainsi, les industries de camionnage et de l’accueil connaissent un taux élevé de roulement de personnel.  L’avancement professionnel est limité dans les emplois à spécialisation réduite, où les personnes handicapées ont tendance à être sur-représentées.  Par ailleurs, il semble y avoir une égale représentativité des personnes handicapées dans l’administration publique et le secteur des soins de santé.


Caractéristiques sociodémographiques/liées au handicap

Âge.  L’incidence de la rétention d’emploi s’accroît avec l’âge, jusqu’à 55 ans.  Puis, elle baisse à cause des départs à la retraite.  En revanche, l’incidence de l’avancement professionnel diminue avec l’âge.  La croissance salariale se produit au cours des dix premières années de service.
Sexe.  Peu d’écart entre les taux de maintien en emploi chez les hommes et chez les femmes.  En revanche, les femmes sont nettement derrière les hommes en ce qui a trait à l’avancement professionnel, et ce à cause de divers facteurs comme les attentes liées aux rôles des sexes, le soin des enfants et les attitudes relatives aux promotions.
Niveau d’éducation.  Les personnes à faible niveau d’éducation se retrouvent souvent dans des emplois à spécialisation réduite, avec peu de garantie.  Un plus haut niveau d’éducation engendre en général un plus haut salaire d’embauche et de plus grandes possibilités d’avancement.  Même si de plus en plus de personnes handicapées terminent leur secondaire et ont accès à l’enseignement postsecondaire, leur participation à ce niveau d’études demeure faible, comparativement à leurs concitoyens.
Type et gravité de la déficience.  Les personnes ayant des déficiences physiques et des troubles d’apprentissage semblent mieux réussir leurs carrières que celles ayant d’autres types de limitations fonctionnelles.  L’incidence du chômage est élevée chez les personnes ayant des déficiences psychologiques, des troubles de la mémoire et des troubles de communication.  Le taux de maintien en emploi est faible chez les personnes ayant des problèmes de santé mentale.  D’autre part, depuis les quinze dernières années, la participation au marché du travail des personnes ayant des troubles de développement, est demeurée faible.  Plus grave est la déficience, plus faible est l’incidence de la participation à la force active, du maintien dans l’emploi, de l’avancement professionnel et plus bas sont les niveaux de revenus.


Stimulations/dissuasions  de l’emploi et du revenu

Les programmes d’emploi et de revenu du gouvernement offrent à la fois des incitatifs et des irritants en matière d’emploi.  Par exemple, les programmes d’indemnisation des accidents de travail encouragent les employés à conserver leur emploi après un accident de travail ou une maladie professionnelle.  De plus, les lois du travail offrent aux employeurs des mesures incitatives d’accommodement des employés.  Mais certains programmes de revenu et/ou d’aide aux personnes handicapés, dissuadent la quête d’avancement professionnel en recouvrant l’aide aux personnes handicapées ou l’aide au revenu en fonction de la hausse de revenu.


Caractéristiques du marché du travail

Grandeur de l’entreprise.  Dans une grande entreprise, les employés handicapés ont tendance à conserver leur emploi plus longtemps.  Ces entreprises ont en effet une meilleure infrastructure pour offrir des accommodements en milieu de travail.
Attitudes des employeurs/collègues.  Ces attitudes ont un impact direct sur le maintien en emploi des personnes handicapées.  Devant l’acceptation et la compréhension de leurs employeurs et collègues, les employés handicapés sont davantage enclins à dévoiler leur déficience et/ou à demander des mesures d’adaptation, si nécessaires.
Accommodements en milieu de travail.  La prestation des mesures d’adaptation est cruciale pour le maintien en emploi.  Ces mesures sont multiples depuis l’équipement d’adaptation jusqu’aux heures de travail et tâches flexibles.  Le soutien naturel est un exemple de stratégie de maintien en emploi.  Il aide les personnes handicapées à réussir dans leur cheminement professionnel.  L’aide à l’emploi accordée sur place par les collègues s’inscrit dans cette catégorie de soutien naturel.


Attitudes et perceptions personnelles vis-à-vis de l’emploi

L’attitude et la perception d’une personne vis-à-vis de l’emploi sont cruciales pour le maintien de l’emploi et l’avancement professionnel.  La souplesse, l’ouverture, l’initiative, l’autonomie et l’auto motivation sont des indicateurs positifs de personnalité.  La confiance en soi est également un déterminant de réussite professionnelle.  Bien sûr, le maintien en emploi se bonifie avec la satisfaction dans son travail, laquelle dépend aussi de plusieurs facteurs comme l’équilibre vie-travail, les relations avec le superviseur, l’autonomie, le salaire et les avantages sociaux.

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Auteurs

Marie Ryan (qui s’appelait à l’époque Marie White) a présenté les renseignements contenus ici au cours d’un discours prononcé le 23 mars 2011 à la conférence du gouvernement sur les droits des personnes handicapées, qui a eu lieu à Victoria Hall, 111, promenade Sussex (l’ancien Hôtel de Ville), Ottawa (Ontario).

Tracy Odell est née à Ottawa mais a déménagé à Toronto où elle a été placée, de 7 ans à 18 ans, dans un établissement de soins chroniques pour enfants.  Refusant les limites dues à la maladie d’Aran-Duchenne dont elle était atteinte, Tracy a commencé à se lancer dans l’intervention communautaire dès l’âge de 12 ans.  Au fil des années, elle  s’est frayée une voie vers la liberté par des mobilisations  pour les transports accessibles, pour l’amélioration des services d’auxiliaires communautaires, pour des logements accessibles et pour l’implantation   «d’une assistance psychologique » susceptible d’aider les parents d’enfants handicapés à s’occuper de leurs êtres chers.   Enseignante agréée de l’Ontario en anglais et en éducation spécialisée, Tracy est titulaire d’un B.A. avec honneur et d’un B.Ed.  En 2006, elle a obtenu sa Maîtrise en Critial Disability Studies de l’université York.  Tracy demeure à Toronto avec son mari David.  Ils ont deux grandes filles et sont extrêmement fiers d’être grands-parents pour la première fois. Tracy continue à travailler à temps plein dans la Fonction publique ontarienne et est une active bénévole de Citizens With Disabilities – Ontario (CWDO) et de l’Église Unie du Canada.  Elle est profondément convaincue qu’une conscientisation accrue s’impose pour maximiser le besoin d’accessibilité et d’éducation et prouver que l’accessibilité peut  être implantée facilement et souvent.

Depuis de nombreuses années, Vangelis Nikias est activement engagé dans le secteur des droits de la personne et des personnes handicapées.  Actuellement employé par le Conseil des Canadiens avec déficiences (CCD), il est chargé de conscientiser la population à la Convention des Nations Unies relative aux droits des personnes handicapées (CDPH).  Lors des négociations de la CDPH qui ont eu lieu aux Nations Unies, Vangelis a représenté le ministère des Ressources humaines et du Développement social du Canda au sein de la délégation officielle en tant qu’expert du contenu.

Au cours des années 1990, Vangelis a présidé le Comité des droits de la personne du CCD et a siégé au Comité de politique sociale.  Doté d’une formation en décision arbitrale – ayant été pendant neuf ans, le vice-président de la Commission de révision de l’aide sociale (CRAS).  Vangelis est convaincu que l’application de la CDPH contribuera à l’avènement d’un Canada accessible et inclusif.  Et à cette fin, une véritable collaboration s’impose entre les gouvernements canadiens et une collectivité conscientisée et mobilisée de personnes handicapées.

Rhonda Wiebe est actuellement analyste des politiques au Bureau des personnes handicapées du Manitoba, nommée par décret du Conseil manitobain d’appel en matière de santé.  Elle multiple ses engagements bénévoles, notamment en coprésidant le Comité d’éthique en fin de vie du CCD et en siégeant aux Conseil/Comité de Centraide Winnipeg, de la Manitoba League of Persons with Disabilities, de l’Euthanasia Prevention Coalition et de Not Dead Yet.  Mais l’optique le plus percutant de son travail, c’est la vision qu’elle a développée en tant que personne handicapées depuis l’âge de treize ans.

Leah Simeone est née avec une perte  auditive bilatérale.  Elle a étudié l’histoire à l’université Queen’s et le droit à l’université d’Ottawa.  En 2012, elle a réussi un stage d’avocate, critère obligatoire pour être membre du Barreau  ontarien et pouvoir pratiquer dans la province.

Marie Laporte-Stark travaille dans la Fonction publique fédérale depuis 1987.  Maman de Jeff et de Chantal et grand-maman de Rowan et d’Abigale, elle est mariée à Chris Stark avec qui elle vit à Ottawa, Ontario.  Ils attendent tous deux la retraite avec impatience et sont prêts à relever de nouveaux défis en tant qu’aînés avec des déficiences.

Shelley Ann Morris est née et a grandi à Ottawa.  Malgré sa déficience à vie, elle progresse grâce aux nombreuses avancées technologiques qui ont aidé les personnes handicapées à se faire une place dans le milieu du travail.  Elle estime néanmoins qu’il nous reste encore beaucoup de chemin à parcourir pour éradiquer tous les malentendus qui entravent divers cheminements.  Les personnes handicapées doivent adopter une approche positive et proactive dans la planification de carrière et la recherche d’emploi.  Pendant ses loisirs, Shelley est une triathlonienne en « courte distance » et une avide mélomane, faisant du bénévolat pour de nombreux festivals de musique.

Paula Keirstead a été pendant ses trente-huit années de carrière et de bénévolat, aux niveaux local, provincial, national et international,  une activiste acharnée pour les enjeux des femmes handicapées, l’éducation, l’emploi, les droits de la personne, les soins de santé, la pauvreté, les loisirs, les questions de parentalité/famille et les nouveaux arrivants. 

Susan Forster a travaillé pendant de nombreuses années sur les questions liées aux limitations fonctionnelles, sur les droits de la personne et la diversité.

Diane Driedger est coordonnatrice provinciale de la Manitoba League of Persons with Disabilities.  Elle a publié son dernier livre Living the Edges :  A Disabled Women’s Reader (Inanna, 2010).

Harry Wolbert est un intervenant handicapé anti-pauvreté.  Il habite Winnipeg, Manitoba, avec sa femme Valerie.

Gary Malkowski, est né à Hamilton, Ontario, d’un père Polonais, travaillant à Stelco et d’une mère francophone, serveuse dans une cafétéria.  Il a grandi dans cette ville.  Il est titulaire d’un B.A. en travail social et en psychologie et d’une maîtrise en Counseling en réadaptation professionnelle de la Gallaudet University, de Washington, DC, la seule université au monde agréée pour les personnes sourdes.  Gary est actuellement conseiller du Président, Affaires publiques, de la Société canadienne de l’ouïe.  Il enseigne également  à temps partiel (civisme) à des étudiants sourds de l’International Yeshivas High School for the Deaf and Hard of Hearing à Toronto.

Mary Ennis a travaillé pour diverses organisations locales, provinciales, nationales et internationales, notamment pour des groupes de femmes, de personnes handicapées, de populations multiculturelles, de jeunes et d’aînés.  Elle possède plusieurs cordes à son arc professionnel notamment en élaboration et analyse de politiques, planification stratégique, développement de conseils, gestion financière, consolidation des capacités et développement de partenariats.  Elle coordonne actuellement le Peer Support Volunteer Program du Seniors Resource Centre de Terre-Neuve et Labrador.  Elle travaille également à contrat, spécialisée en méthodologies de recherche qualitative, incluant des entrevues, des groupes de discussion et des études de cas.

David Best a été un spécialiste T.I. pendant plus de 30 ans; en tant qu’intervenant pour l’inclusion et la diversité corporatives, il cherche à optimiser les chances professionnelles pour les Canadiennes et Canadiens avec des déficiences.  Bien qu’atteint très jeune de cécité, David a relevé les défis de la vie en plein air dans quelques parcs éloignés et grandioses du pays.

Mai Nhu Nguyen a obtenu un Baccalauréat ès sciences en psychologie de l’université de Montréal. Associée en recherche auprès du Réseau de recherche Adaptech, elle termine actuellement une certification en traduction.

Alena Wickware étudie à l’université Carleton (UC) et a commencé à l’automne sa dernière année de premier cycle en travail social, avec mineure en American Sign Language.  En tant que personne malentendante, elle s’est acharnée à combattre les problèmes d’accessibilité dans ses études ainsi qu’à maximiser l’accès de ses cours aux autres étudiants.  L’an passé, elle a travaillé pendant deux semestres comme assistante à l’enseignement en première année du cours d’ASL de l’université Carleton; elle est également une tutrice émérite pour les étudiants de première et deuxième années, dans le cadre du Course Specific Tutor Referral System de l’UC.  Chaque mardi, elle anime dans différents lieux, un groupe social d’utilisateurs d’ASL et de personnes malentendantes, organisant des activités et des sessions d’information basées sur les intérêts des participants.  Elle est une active bénévole du Mayfest Committee d’Ottawa et a participé à l’organisation des événements culturels de 2011 et de 2012.  Employée dévouée, elle cherche passionnément à améliorer l’accès des malentendants, des personnes sourdes oralistes et des personnes sourdes culturellement au Canada.  Elle est extrêmement heureuse de travail pour l’Association des malentendants canadiens et fière de représenter cette organisation.

Alan Conway est titulaire d’un Bac avec mention très bien en littérature française, de l’université de Saskatchewan et une Maîtrise en traduction de l’université de Montréal.  Il a travaillé d’octobre 1981 à décembre 2011 – trois ans comme traducteur et 27 ans comme interprète.

Anne M. McPhee demeure à Rollo Bay, IPE, avec son mari Billy MacMaster.  Ils possèdent et dirigent une petite entreprise mais Anne travaille également à temps partiel comme coordonnatrice dans un centre de soins palliatifs.  Bénévole acharnée dans sa communauté et auprès de nombreuses organisations provinciales, Anne a siégé pendant dix ans au Conseil d’administration du PEI Council of People with Disabilities.  Passionnée de musique, elle joue du violon, comme son père.  Si elle ne joue pas, vous la trouverez en train de prendre des photos pour promouvoir l’activité du jour.

Carole Willans siège à  l’Association des malentendants canadiens dont elle est présidente nationale sortante.

Doreen Gyorkos est membre du Conseil national des représentants du CCD.

Anu Pala, coordonnatrice du programme Virtual Employ-Ability, animatrice et assistante professionnelle, enrichit son travail quotidien de son positivisme et de sa pro-activité.  Au cours des quinze dernières années, Anu s’est attachée à des initiatives favorisant, par le biais d’ateliers, d’engagement des employeurs, des médias et de d’encadrement psychologique,  l’habilitation des femmes et l’inclusion des personnes handicapée.

Diplômée en perfectionnement professionnel de l’Université Simon Fraser et détentrice d’un certificat en encadrement professionnel proactif, Anu est fière d’encourager les gens à maximiser leur potentiel   et leurs choix et de s’orienter vers une vie épanouie et positive.  Avec sa cécité, elle s’inspire de son cheminement personnel pour motiver et responsabiliser ses clients et les amener à atteindre leurs buts personnels et professionnels.

Colleen Watters est analyste des politiques au Bureau des personnes handicapées (BPH) du Manitoba.  Elle siège au Conseil provincial de la Manitoba League of Persons with Disabilities (MLPD) et préside le Comité d’éthique de cette organisation.

John Rae est coprésident du Comité d’accès aux technologies du CCD

Natalie Martiniello a récemment obtenu, avec désignation au Palmarès du Doyen, son B.A. en anglais avec mineure en éducation, de l’université McGill.  Elle étudie actuellement à l’université de Montréal, accompagnée de son chien-guide Carlina, pour l’obtention d’une maîtrise d’Enseignement en réadaptation visuelle (sciences de la vision).  Elle travaille comme adjointe à la recherche au Réseau de recherche Adaptech, - une équipe menant des études sur les expériences scolaires et ultérieures des étudiants handicapés du niveau postsecondaire.

Gary Birch O.C., est un athlète paralympique canadien, un expert en Interface neuronale directe (IND ou Interface Cerveau-Machine) et directeur général de la Neil Squire Society.  En 2008, il a été élevé au grade d’Officier de l’Ordre du Canada.  Il continue à défendre ardemment l’accessibilité dans ses travaux de recherche et de développement sur les technologies adaptées, à l’université de la Colombie britannique et auprès de la Neil Squire Society.

Le Dr. Sukhai a obtenu, en 2007, un   doctorat en biophysique médicale de l’université de Toronto.  Il est actuellement chercheur en cancérologie et directeur de projets au laboratoire de diagnostic moléculaire du University Health Network de Toronto.

Yvonne Peters exerce le droit en pratique privée depuis 1993, se spécialisant dans les droits de la personne et les droits à l'égalité. Ses activités actuelles regroupent : « conseillère juridique du Conseil des Canadiens avec déficiences, vice-présidente de la Commission des droits de la personne du Manitoba, co-chercheure dans un projet de l'Alliance de recherche universités-communautés, intitulé Pauvreté ivalidante/Citoyenneté habilitante.

Sandra Carpenter est directrice executive du Centre for Independent Living in Toronto.

David Martin est Conseiller principal, Bureau des personnes handicapées, Manitoba.

Traci Walters, retraitée de son poste de directrice nationale de Vie Autonome Canada, est lauréate du Prix des Anciens de la Conférence canadienne du Gouverneur général sur le leadership, catégorie Leader de Vie autonome/éducatrice pour les personnes handicapées et récipiendaire de l'International Meritorious Service Award for Endless Effort and Passionate Heart du Global IL Network.  Elle continue à promouvoir passionnement le mouvement de vie autonome en tant qu'ambassadrice bénévole

Neil Graham – J’ai obtenu mon B.Sc en Mathématiques en 1997 de l’université de Winnipeg et en 2000, une Maîtrise en sciences de l’informatique de l’université de Toronto.  J’ai travaillé comme programmeur chez IBM en C, C++ et Java et j’ai dirigé quatre équipes différentes.  Je suis actuellement responsable d’une équipe chargée d’optimiser les équipements et logiciels d’IBM afin d’en maximiser le rendement quand ils fonctionnent ensemble.  On peut me rejoindre sur  LinkedIn ou à neilg@teksavvy.com.

Traductrice, réviseure et romancière, Marie-Josée Martin a la passion des mots. Enfant, elle a déjoué les pronostics des médecins et survécu à un neuroblastome métastatique; elle a grandi à Beloeil (Québec), à une époque où les rampes d’accès passaient encore pour des objets insolites. Elle habite aujourd’hui Ottawa.


Nancy Blain a représenté l’Association canadienne des victimes de la thalidomide (ACVT) au Conseil national des représentants du Conseil des Canadiens avec déficiences (CCD).

Audrey Thorhaug travaille à Regina.

Jim Derksen, père d’une famille monoparentale de deux enfants, a occupé divers emplois, développant et gérant des organisations de personnes handicapées puis analysant des politiques publiques pour le gouvernement et les groupes communautaires.

Daniel Halechko a travaillé comme charpentier pendant dix ans jusqu’à ce qu’une blessure au dos le force à changer de carrière. Après avoir obtenu un Bac en sociologie, il a vite réalisé qu’il ne pouvait accéder aux traditionnels emplois « garantis » à cause d’un manque d’expérience. Pour y pallier, il s’est lancé dans le bénévolat, notamment dans des sphères non traditionnelles d’intervention, comme l’Injured Workers Association (IWA), la Manitoba League of Persons with Disabilites (MLPD), Reaching E-Quality Employment Services.  L’expérience ainsi acquise lui a ouvert les portes et lui a permis d’obtenir d’enrichissants emplois comme directeur général de l’IWA, coordonnateur du  projet Workers with Disabilities et coordonnateur du projet Thums Up for Access de la Manitoba League of Persons with Disabilites (MLPD). 

Avec plus de trente d’an d’expérience comme travailleuse communautaire auprès des femmes handicapées, Maria Barile est l’une des dix-sept femmes qui ont mis sur pied le Réseau d’action des femmes handicapées du Canada (RAFHC) et l’une des fondatrices de Action des femmes handicapées (Montréal).  Au cours des années 1980, Maria Barile  a travaillé à L’ÉTAPE comme  conseillère en emploi des personnes ayant des limitations fonctionnelles.  Auteure de plusieurs ouvrages sur les personnes handicapées, le féminisme et les technologies, Maria anime des ateliers et donne des conférences sur les questions de discrimination et non discrimination fondées sur la capacité physique.  Au cours des vingt dernières années, elle a témoigné auprès de diverses commissions et comités sur l’usage du depo provera, la violence et les autres problèmes auxquels sont confrontées les femmes handicapées;  elle est intervenue pour améliorer l’accès  des femmes avec des déficiences au système de soins de santé et aux refuges pour femmes battues.  Diverses organisations la sollicitent régulièrement pour son expertise sur les personnes en  situations de handicap.

Becky Brownlee, âgée de 31 ans, réside à Brandon, Manitoba.  Elle est une fille, sœur, amie, athlète et surtout, en montrant comment la participation à la force active peut être fructueuse, elle est un modèle pour les Canadiens handicapés.

Amber-Joy se définit comme une enthousiaste de la collectivité des personnes handicapées.  Elle travaille pour la Saskatchewan Voice of People with Disabilities à Regina, Saskatchewan.  Dans ses fonctions, elle aide les gens à résoudre des problèmes inhabituels et contribue à la sauvegarde de la planète en la rendant plus conviviale pour les personnes handicapées.  Pendant ses loisirs, elle adore lire, faire de la photographie, du géocaching et aller savourer de petits gâteaux avec des amis.

Teresa Beauregard est une mère qui lutte pour que l’avenir de sa fille soit entre bonnes mains.

Greg Plosz est le père de Jay Plosz.

Jay Plosz a été le premier étudiant à multi-déficiences à être diplômé de son école secondaire. Il a d’ailleurs reçu le prix d’étudiant le plus exceptionnel.  Très malheureux de quitter l’école, il a fait une dépression.  Depuis, il a son propre appartement qu’il partage avec un colocataire.  Il a occupé  plusieurs emplois et a constaté qu’il aimait travailler dans un bureau.

La créativité transcende la déficience, comme le démontre l'artiste-papetière Mill Flaig-Hooper.  Elle possède sa propre entreprise qu'elle gère avec l'aide de son réseau.

Nora Carnegie est née avec une rotoscoliose congénitale, axée sur la cage thoracique et la zone cervicale, avec chevauchement de vertèbres, hémivertèbre et des vertèbres soudées, ainsi qu’avec une surdité partielle (surdité rétrocochléaire moyenne  portant sur les sons graves).  Elle a été atteinte d’ostéoarthrite de la colonne vertébrale (qui a provoqué une détérioration des disques et des facettes vertébrales) ainsi que d’une légère surdité portant sur les sons aigus, depuis les dix dernières années.

Sarah Wilson est diplômée du programme des intervenants en services sociaux, du Collège Algonquin.

Né à Meteghan, Comté de Digby, Nouvelle-Écosse, Claredon Robicheau a six frères et sœurs; ils sont quatre, lui inclus, à se déplacer en fauteuil roulant.  N’ayant été atteint que par la dystrophie musculaire, il s’est estimé privilégié d’avoir pu jouer au hockey et de baseball. C’est aussi un plongeur en scaphandre agréé.  Obtenir un Bac en commerce de l’université Saint Mary et travailler pendant douze (12) dans une banque du Nouveau-Brunswick ont beaucoup compté pour lui.  En 1993, il est retourné dans sa ville natale; depuis, il consacre pleinement son temps à faire du bénévolat pour le Club Lions (20 ans), le Conseil des Canadiens avec déficiences (6 ans), la Nova Scotia League for Equal Opportunities (19 ans); il a également été membre du Groupe de travail anti-pauvreté de la N-E et de la West Nova Scotia Inclusive Employment Society (15 ans).  Il a été le précurseur et le fondateur, en 1996, du premier programme de transport communautaire de la Nouvelle-Écosse, Le Transport de Clare Society.  Son entreprise s’est développée et, dit-il, grâce à l’altruisme de plusieurs personnes compte désormais quatorze (14) programmes du genre dans la province.  En 2002, il a été récipiendaire de la Médaille du jubilé d’or de la Reine Elizabeth II et en 2012 de la Médaille du jubilé de diamant de la Reine Elizabeth II.

Monique Beaudoin, malvoyante depuis la naissance, a fait ses études primaires et secondaires à l’Institut Nazareth de Montréal, une école pour les Francophones ayant une déficience visuelle.  Elle est diplômée en Relations industrielles de l’Université du Québec à Hull, maintenant appelée l’Université du Québec en Outaouais.  En 1979, Converto-Braille Services lui a offert un poste de lectrice d’épreuves en Braille.  Monique a toujours activement participé aux organisations communautaires.  Elle est actuellement directrice générale du Regroupement des associations de personnes handicapées de l’Outaouais, à Gatineau (Québec).

Paul Young est consultant dans le domaine de la condition des personnes handicapées.  Ex président de Personnes d’Abord du Canada, il a été président fondateur de People First of Nova Scotia et première personne étiquetée à présider le Conseil des Canadiens avec déficiences.

Emily est née et a grandi à Winnipeg avec une sœur plus âgée et un frère plus jeune.  Elle a été atteinte d’une déficience congénitale, la spina bifida.  Elle a habité à East Kildonan et a fait sa scolarité élémentaire et secondaire dans une école privée de filles.  Elle est ensuite allée à l’université de Winnipeg puis à celle du Manitoba et a également suivi des cours de rédaction média au Collège communautaire Red River.  Impliquée depuis plus de vingt-cinq ans dans la collectivité des personnes handicapées, Emily lutte pour les droits à l’égalité des citoyens avec des déficiences.  Elle travaille actuellement en communication et en revendication des droits de la personne auprès de la Manitoba League of Persons with Disabilities.  Pendant ses loisirs, elle joue avec ses trois petits enfants.  Elle écrit également de la poésie.

Frances Sinclair-Kaspick est une femme membre d’une bande indienne (Première Nation) de la Réserve Peguis du Manitoba.  Elle est née avec une déficience, appelée amputation quadrilatérale congénitale.  Dès sa naissance, Francs a été élevée par sa grand-mère maternelle, Frances Sr., qui lui a inculqué la détermination, l’indépendance et la volonté de se battre pour atteindre ses objectifs.

Karen Lai est coordonnatrice du programme Aptitudes Ici et Maintenant (AIM).  Elle travaille avec des entreprises afin de les sensibiliser et les conscientiser aux questions de diversification de leur force active avec des personnes handicapées.  Depuis quinze ans, elle travaille avec passion pour l’accessibilité des personnes avec des déficiences et leur intégration dans la communauté et ce, en par le biais d’activités de loisirs et en collaborant avec diverses gouvernances afin de revoir leurs politiques.  Elle aime travailler avec des particuliers, des compagnies et des municipalités dans le but de mettre sur pied des initiatives et des ateliers visant à maximiser la participation des personnes handicapées dans diverses communautés de la Colombie britannique.  Elle a acquis de nombreuses connaissances en vivant avec la paralysie cérébrale, renforcées par son Baccalauréat en gestion des loisirs et une Maîtrise en sciences de l’activité physique de l’université de la Colombie britannique.  Elle a axé sa thèse sur les significations de l’intégration sociale des personnes handicapées et les stratégies afférentes.  Elle espère vivre assez longtemps pour voir un jour disparaître « la ligne de démarcation » entre les personnes handicapées et les autres citoyens car, en bout de compte, nous sommes tous des personnes d’abord.

Donna Jodhan est présidente de l’Alliance pour l’égalité des personnes aveugles du Canada (AEBC).  Elle a entrepris une cause-type contre le gouvernement fédéral afin d’obliger ce dernier à rendre ses sites Web accessibles aux personnes handicapées.

Chris Stark est fonctionnaire fédéral depuis 1984.  Il est l’époux de Marie Laporte-Stark avec laquelle il a eu deux enfants, Jeff et Chantal et deux petits enfants, Rowan et Abigale.  Chris et Marie résident à Ottawa, Ontario et attendent leur retraite avec impatience et surtout, de relever de nouveaux défis en tant qu’aînés handicapés.

Catherine S. Fitchen (PhD en psychologie de l’université McGill) est co-directrice du Réseau de recherche Adaptech, professeure au département de psychologie du Collège Dawson, professeure agrégée au département de psychiatrie de l’université McGill, psychologue clinicienne à l’Unité de psychothérapie comportementale et de recherche de l’hôpital général juif.

Paula Ann Stewart (AKA Vaquous 2013) est une auteure à la pige, poète, artiste visuelle et interprète, demeurant dans l’arrondissement de Notre-Dame-de-Grâce à Montréal, Québec, Canada,.un quartier connu pour sont activisme social et sa vibrante communauté d’artistes et d’étudiants.  Paula a soumis et publié la majorité de ses œuvres en ligne et a tenu un blogue pendant une certaine période.  Une de ses œuvres a récemment été publiée par «MindFreedom », une organisation venant en aide aux victimes d’abus psychiatriques.  Elle se prépare à entrer en studio pour enregistrer ses chansons originales, musique et paroles, tout en travaillant sur toute une gamme de sérigraphies africaines qui seront terminées à la fin de l’an prochain.  Et enfin, elle va s’attaquer à son dernier projet :  un livre de poésie sur son séjour dans un centre de désintoxication d’un service hospitalier local.

Derek Legge a commencé à travailler pour la Manitoba League of Persons with Disabilities(MLPD) en 1975 après avoir créé la première section locale à Brandon, MB.  De retour à Winnipeg en 1977, il s’est engagé dans le secteur de l’emploi et des questions touchant les personnes handicapées, jusqu’à devenir, en 1987,  un agent d’information de liaison pour la Commission des droits de la personne du Manitoba, poste qu’il occupera jusqu’à sa retraite en 2004.  Le Prix du CCD lui a été décerné en 2003 en reconnaissance des nombreux projets   qu’il a menés au fil des ans pour promouvoir l’accessibilité.

Le Centre canadien d’études sur les personnes handicapées (CCDS) a pour mandat de se consacrer à la recherche, l’éducation et la diffusion d’informations sur les questions touchant les personnes handicapées.

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