Rapport final: Les efforts entrepris par les Nations Unies pour élaborer une Convention globale et intégrale pour la protection et la promotion des droits et de la dignité des personnes handicapées

du
Conseil des Canadiens avec déficiences

de la

Deuxième
Consultation nationale de la collectivité

sur

Les efforts entrepris par les Nations Unies pour élaborer une
convention globale et intégrale pour la protection et la promotion
des droits et de la dignité des personnes handicapées

Ottawa, 18 et 19 mars 2005

Table des matières


Sommaire

Contexte

Depuis 2002, le gouvernement du Canada participe aux Nations Unies, à des négociations pour la création d'un nouveau Traité de droits humains visant à protéger les droits humains des personnes handicapées. Le Canada a également participé aux cinq réunions du Comité spécial, établi le 19 décembre 2001 par la Résolution 56/168 de l'Assemblée générale ainsi qu'à des réunions régionales complémentaires et à des sessions d'élaboration du libellé.

Lors de ces réunions, le Canada a émergé comme un chef de file dans l'élaboration de la version préliminaire du traité. D'importantes consultations avec les ministères fédéraux concernés, les gouvernements provinciaux et territoriaux et la société sociale en vue de façonner la position canadienne et notre leadership aux Nations Unies. Ce document fait le bilan de nos plus récentes consultations auprès de la société civile canadienne.

La réunion a eu lieu à la mi-mars 2005 à Ottawa, entre la cinquième et la sixième réunion du Comité spécial. Cette dernière devrait se dérouler du 1er au 12 août 2005. Les membres devraient y poursuivre les négociations sur les projets d'articles laissés en suspens lors de la cinquième réunion du 4 février 2005. Le Comité spécial devrait plus particulièrement reprendre les discussions sur le projet d'article 15, portant sur l'intégration communautaire et progresser, peut-être, vers la version finale de l'article sur le suivi.

Remarques générales

Les participants à la réunion d'Ottawa se sont donc concentrés sur ces articles spécifiques et sur le projet de libellé qu'examinera le Comité. Dans l'ensemble, et tout en reconnaissant les efforts louables réalisés pour formuler l'actuel libellé, les participants ont estimé qu'il restait encore beaucoup de chemin à parcourir. Plusieurs faiblesses ont été soulignées dans la formulation du texte actuel, notamment en comparaison avec d'autres traités des droits de la personne. De même, plusieurs articles tentent de couvrir trop de concepts ou de droits et, ce faisant, n'accentuent pas suffisamment l'impact des principes fondamentaux en jeu.

Par très fort consensus, les participants ont recommandé que le texte soit sérieusement examiné au cours des prochaines réunions afin que le libellé de ce traité soit aussi puissant que celui de principes de ce genre. Le projet de l'article 22 sur le Droit au travail (parmi d'autres), illustre nettement ce sentiment. Il a été reconnu que la formulation du libellé actuel n'était pas aussi puissante que celle des dispositions analogues de la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes. (CEDAF).

Dans le même ordre d'idées, les participants ont soutenu que certains articles auraient tout avantage à être coupés en articles distincts, comme l'illustre l'article 23 sur la Sécurité sociale et le niveau de vie correct. Il est nettement apparu, en examinant ce projet de texte, qu'il y avait beaucoup de droits en jeu et que la séparation de cet article en deux articles distincts, avec peut-être un troisième libellé sur le Logement, favoriserait une plus claire formulation.

Il a également été souligné, que les dispositions de certains articles seraient beaucoup plus pertinentes si elles étaient placées ailleurs. Cela permettrait d'éviter une certaine confusion d'interprétation et l'impression générale d'avoir un texte désordonné. Comme le prouve l'insertion, dans l'article 24, Participation à la vie culturelle, aux loisirs et aux sports, du principe d'accès physique.

Enjeux spécifiques et recommandations pour la poursuite des travaux.

  • Répercussions financières et contraintes excessives

Le membre de phrase liminaire de l'article 15 stipule que les États Parties «prennent toutes les mesures efficaces et appropriées» mais ne précise pas lesquelles. Quelques préoccupations ont également été soulevées quant à l'absence de référence à la question de ressources et le manque de suggestion d'un certain type de test, comme celui de la norme de contraintes excessives.

Il a en outre été noté que la question de «niveau d'obligation» surviendrait également dans d'autres secteurs et, partant, qu'un clair énoncé du test s'avèrerait particulièrement important dans ce cas précis comme dans tout autre cas de la procédure rédactionnelle.

C'est pourquoi, il a été suggéré qu'il judicieux d'en élaborer une version préliminaire avant la prochaine réunion du Comité spécial et de la soumettre à la délégation canadienne aux fins d'étude.

  • Droits des enfants distincts des droits des parents

Pour plusieurs participants, il s'agit d'un secteur crucial. Les récentes expériences vécues dans les affaires Latimer et Auton sont, a-t-on décrété, d'importants indicateurs de la nécessité d'avoir un article distinct pour les enfants. La discussion a également porté sur le fait que ces questions engendrent souvent des conflits parents-enfants et que, dans un tel contexte, il est très important de protéger les enfants. Il faut, a-t-on ajouté, préciser clairement que les enfants et parents ne s'entendent pas sur certains points et traduire cette réalité dans le libellé.

Le CCD a émis quelques commentaires au sujet de la sur-protection et sur le fait que des adultes sont encore perçus comme des enfants par leur famille qui prennent des décisions en leur nom. Cela pourrait servir de trame à un autre document de travail, a-t-on suggéré. On explorerait, entre autres, les enjeux des enfants avec des limitations fonctionnelles ainsi que les valeurs relatives à l'autonomie et aux droits inhérents qui peuvent être dévolues à d'autres enfants dans de terribles situations.

  • Immigration

Cette discussion émane du débat sur l'absence, dans le projet de libellé, de toute disposition relative aux déplacements d'un pays à l'autre. Pour plusieurs, il s'agit d'un principe important que l'on devrait ajouter et ce, malgré l'éventuelle opposition de plusieurs membres. Plusieurs participants ont estimé que cette idée valait la peine d'être approfondie et méritait d'être hautement considérée lors des discussions sur la circulation, du projet d'article 20.

  • Entités privées

Les participants ont longuement discuté des normes auxquelles devraient se conformer les entités privées et des mécanismes de participation qui permettront aux personnes avec des limitations fonctionnelles d'identifier et de corriger les obstacles et obstructions. Le libellé, tel qu'actuellement formulé, est trop faible. Par exemple, dans l'alinéa 19.2.d, le libellé «encourager des entités privées à prendre en compte tous les aspects de l'accessibilité» ne paraissait assez rigoureux pour protéger adéquatement les droits humains des personnes avec des limitations fonctionnelles.

  • Accommodements

La discussion a encore porté sur le besoin de formuler clairement le principe de l'accommodement et des contraintes excessives. Les Nations Unies peuvent réfuter la terminologie utilisée au Canada en ce qui a trait aux contraintes excessives. Dans un tel cas, il faudra absolument trouver un libellé adéquat pour ce concept.

De même, malgré le libellé positif de l'alinéa 22 (e), à savoir que les États Parties doivent garantir un aménagement raisonnable, un rigoureux libellé devra être utilisé pour l'autre facette de ce principe. En d'autres mots, l'absence «d'accommodement raisonnable» est non seulement une violation de la disposition mais exerce en outre une distinction illicite. Et ceci devra être très clairement établi.

  • Coopération internationale

La discussion a principalement porté sur ce qui a été nommé les «autres secteurs de coopération» comme la coopération technique entre les gouvernements, les échanges d'informations, etc. Le Canada, a-t-on fait remarquer, encourage ce concept par le biais de l'appui accordé depuis vingt ans à l'OMPH. Par conséquent, la délégation devra se baser sur cette forte tradition dans tout futur débat.

Pour d'autres participants, on devrait réclamer l'application de l'optique des personnes handicapées afin de s'assurer, qu'au minimum, aucun nouvel obstacle ne sera créé ou - en d'autres mots - , qu'aucun tort ne sera exercé. Plus particulièrement, les participants attendaient avec impatience de voir comment la Convention pourrait être utilisée pour recentrer ces efforts et contrecarrer tout tort éventuel.

  • Suivi

De l'avis général, et sans en avoir nécessairement examiné tous les détails, nous ne pouvons appuyer cette convention si elle ne comporte aucun mécanisme rigoureux de suivi. Il est certain que ce mécanisme devra intégrer plusieurs facettes, mais comme «pré-requis»cette Convention devra intégrer un mécanisme de suivi, efficace.

Il est crucial, a-t-on suggéré, que de concert avec d'autres groupes, le CCD en fasse une priorité et l'inscrive à l'avant-plan de ses préoccupations. Il doit en outre combattre tout précepte selon lequel il s'agirait d'un point secondaire. C'est en effet un principe qui doit se retrouver à l'avant-plan de tous nos débats. Les personnes handicapées doivent en être assurées. La phrase «des droits sans recours ne sont pas des droits du tout» a été répétée à maintes reprises.

Accueil et vue d'ensemble

Mary Ennis, vice-présidente nationale du CCD et membre du comité international du CCD, a ouvert la séance en souhaitant la bienvenue à tous les participants et en contextualisant la participation du CCD dans le processus rédactionnel de la Convention. Mme Ennis a rappelé que le CCD s'était impliqué dès les tous débuts, à savoir depuis l'adoption de la résolution avancée par le Mexique lors de l'Assemblée générale des Nations Unies de décembre 2001 et établissant le Comité spécial. Le CCD, a-t-elle ajouté, a été représenté à toutes les réunions de ce Comité spécial ainsi qu'aux réunions régionales qui ont eu lieu en Équateur et en Afrique du Sud. Le CCD a en outre participé aux réunions du Groupe de travail et a rencontré des intervenants majeurs à Ottawa et au siège des Nations Unies à New York. Dans ce processus d'élaboration de la Convention, le CCD est au premier rang de la société civile canadienne.

Le processus progresse rapidement, a-t-elle observé. Puisque le Comité spécial est en phase d'élaboration du véritable libellé, les événements vont se précipiter. Selon certains, la version finale de la Convention pourrait être terminée en 2006. Cette réunion, a ajouté Mme Ennis, n'a pas pour but de libeller le texte exact. Nous devons plutôt discuter des articles et déterminer ce qui devrait y être inclus, puis soumettre des conseils et des suggestions à la délégation canadienne pour ses prochaines délibérations aux Nations Unies.

En concluant, Mme Ennis a précisé le déroulement de cette réunion qui portera précisément sur les articles 15 à 25. Ce seront certainement les principaux points inscrits à l'ordre du jour de la prochaine réunion du Comité spécial qui aura lieu en août 2005. Nos discussions, a-t-elle ajouté, seront précédées d'un débat d'experts visant à tisser la trame de nos délibérations.

Débat d'experts

Comme prémisse à la session de consultation, les organisateurs ont réuni un groupe d'experts sous le thème «Le droit international en matière de droits de la personne: les leçons apprises, les enjeux et répercussions clés afin d'élaborer une efficace convention pour les personnes avec des limitations fonctionnelles». Le but était de créer un contexte ou une base sur lequel (laquelle) s'appuieraient des discussions plus pointues. Le débat, animé par Jim Derksen, membre du comité international du CCD et regroupant quatre conférenciers, a été suivi d'une période animée de questions et réponses.

Alan Kessel Directeur général, Direction générale des affaires juridiques, ministère des Affaires étrangères du Canada

Alan Kessel a commencé en déclarant que le développement d'un cadre international de droits de la personne s'est principalement produit au cours des soixante (60) dernières années, suite à la Deuxième guerre mondiale et à la création des Nations Unies. Ce processus, a-t-il souligné, était fortement soutenu par le Canada. Il débuta par la Déclaration universelle des droits de l'homme, adoptée par l'Assemblée générale des Nations Unies le 10 décembre 1948, et enchâssant un ensemble de droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels.

Les négociations entreprises au cours des années suivantes sur ces droits particuliers, se sont en quelque sorte traduites par l'adoption de deux instruments juridiquement contraignants, à savoir le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIRDCP) et le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (PIRDESC). Ces instruments, nota M. Kessel, ont été élaborés après la Deuxième guerre mondiale, époque caractérisée par des chamailleries idéologiques qui compliquèrent les négociations et l'élaboration de ces traités. Il déclara: «c'était une époque instable, une époque où les défenseurs des droits de la personne mirent leur vie en danger pour que soient adoptés les principes fondamentaux que nous jugeons essentiels aujourd'hui.»

Il est important de se rappeler, étant donné le type de chemin parcouru, qu'au sein du système des Nations Unies, les droits économiques, sociaux et culturels sont dans un état progressif de développement et, par conséquent, peuvent être acquis au fil des ans par un processus connu sous le nom de «réalisation progressive.» En revanche, les droits civils et politiques sont considérés comme les droits d'une personne contre toute mesure injuste et illégale d'un pays. Ils sont donc très différents et, partant, immédiatement exécutoires. Ainsi, un État ne pourrait justifier qu'il a besoin d'un certain temps pour déterminer comment mettre fin à une arrestation arbitraire.

M. Kessel a ensuite examiné les autres instruments des droits de la personne, partant de la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale, adoptée en 1965. (CIEFDR) pour inclure d'autres instruments internationaux juridiquement contraignants, notamment la Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, connue comme la CEFDF et adoptée en 1979, la Convention contre la torture, (CCT), 1984 et la Convention relative aux droits de l'enfant (CRDE), de 1989. Le Canada, a-t-il rappelé, a joué un rôle décisif lors de la négociation et de la concrétisation de cette dernière Convention.

De plus, a souligné, la CIEFDR et la CEFDF n'instaurent pas de nouveaux droits. Elles ciblent d'une part la discrimination raciale spécifique et, d'autre part, la discrimination envers les femmes dans toutes les autres sphères de la vie. La CRDE porte sur les questions spécifiques touchant les enfants et, de ce fait, en créant de nouveaus droits pour ce groupe. Il s'agit d'une distinction importante dont il faudra tenir compte au fur et à mesure que nous évoluerons dans le développement de ce nouveau traité pour les personnes handicapées.

De ce survol de la structure, M. Kessel est passé aux mécanismes de rapports et de suivi. Ils diffèrent d'un traité à l'autre, a-t-il fait remarquer. En général, en vertu de chaque traité, les États Parties doivent soumettre des rapports périodiques sur les progrès d'application, à un comité des Nations Unis créé en vertu dudit traité et chargé d'examiner ces rapports; ces comités sont usuellement appelés les «organes de suivi des traités.» Cette procédure est particulièrement onéreuse pour les pays en voie de développement qui n'ont souvent pas les ressources requises pour répondre à ces attentes de rapports.1

Chaque organe examine les rapports dès réception puis, invite une délégation du pays à venir répondre à d'importantes questions découlant de cet examen et portant sur l'application du traité. Une fois l'examen terminé, le Comité des Nations Unies émet ses «observations finales», résumant son évaluation des progrès réalisés et formulant des recommandations et des suggestions pour de nouvelles mesures que pourrait implanter le pays afin d'assurer l'exercice des droits humains en question.

À l'instar d'autres États Parties et à cause du considérable volume d'informations requis le Canada a eu des difficultés à soumettre ses rapports à temps, a souligné M. Kessell. De plus, le Canada étant un système fédéral, doit colliger les rapports des dix provinces et des trois territoires en un rapport fédéral global; il s'agit d'un processus complexe et chronophage.

En ce qui a trait au mécanisme de plaintes individuelles, le processus est basé sur le concept de l'épuisement des voies de recours nationales, ce qui implique que le pays doit d'abord tout mettre en œuvre dans son propre champ de compétence avant de se tourner vers la scène internationale. Les statistiques sur les pliantes individuelles sont intéressantes. Par exemple, depuis 1977, environ mille (1000) plaintes, touchant soixante (60) États Parties ont été enregistrées au Comité des droits de la personne. Plus de deux mille cinq cents (2 500) sont déposées chaque année. Elles sont attentivement examinées et seules, les plaintes valides et appropriées sont traitées. À l'heure actuelle, huit cent soixante treize (873) ont été terminées et les autres sont distillées à travers le système.

En résumé, l'objectif du Droit international en matière de droits de la personne est de trouver une base universelle pour certains principes susceptibles d'être internationalement approuvés. Par exemple, tout le monde veut éliminer la torture et les exécutions; la libre circulation dans et hors d'un pays est également une revendication internationale. Il existe des concepts fondamentaux que nous pouvons tous soumettre. Un droit international réellement efficace cerne ces concepts et les matérialise ensuite sous forme d'un traité international, a conclu M. Kessel.

Allan McChesney Professeur de droit et représentant des affaires étrangères, Commission internationale des juristes (Section canadienne)

Allan McChesney a axé son discours sur les droits économiques, sociaux et culturels. En cette ère de compressions budgétaires, a-t-il commencé, les gouvernements ont tendance à traiter ces droits beaucoup moins sérieusement qu'auparavant. De plus, a-t-il ajouté, les tribunaux canadiens ont traditionnellement occulté le droit international quand ils se prononcent sur ces droits.

Il a également souligné que depuis la fin du Régime d'assistance publique du Canada (RAPC), au début des années 1990, le Canada avait perdu beaucoup d'influence dans ce domaine. Le RAPC avait permis d'instaurer certaines normes nationales, notamment en ce qui a trait à l'assistance publique. À cette époque-là, le gouvernement fédéral avait davantage de pouvoir et pouvait forcer les provinces et territoires à se conformer aux engagements stipulés dans les traités internationaux. Dans ses rapports aux Nations Unies, le Canada se félicitait du RAPC. Il déclarait tout particulièrement que nos normes de procédure garantissaient la concordance de notre bien-être social et autre aide aux engagements internationaux. Mais avec le Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux, (TCSPS), Ottawa n'a plus le même pouvoir qu'auparavant, ce qui entrave fortement l'exécution de l'imputabilité.

Ceci étant dit, M. McChesney a quand même présenté quelques exemples positifs résultant de l'exécution de ces droits. Notamment l'application de lois non discriminatoires, tel que stipulé dans l'article 15 de la Charte, pour garantir certains de ces droits. Le plus bel exemple, a-t-il ajouté, est l'affaire Eldridge en Colombie britannique, qui revendiquait une meilleure prestation des services destinés aux personnes sourdes, notamment en garantissant l'accès aux interprètes. Il ne s'agissait pas d'un droit relevant précisément des questions de santé, ce qui aurait pu être réglé par le biais du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (PIRDESC). Les tribunaux ont préféré juger cette plainte en vertu des garanties de non-discrimination et d'égalité de la Charte des droits et libertés. Ce qui était juste, a-t-il précisé. Malheureusement, cette optique n'ouvre pas la porte à d'autres discussions sur les droits économiques, sociaux et culturels.

La discussion a également porté sur l'affaire Gosselin contre le Québec. Dans ce cas, la Cour d'appel du Québec a explicitement précisé qu'elle avait jugé pertinent de se prévaloir du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et que ce PIRDESC l'avait aidée à établir son jugement. Par la suite, cinq des neuf juges de la Cour suprême du Canada ont fait référence au PIRDESC pour interpréter l'article de la Charte portant sur la sécurité de la personne.. Il est intéressant de noter que dans leur décision, les juges minoritaires ont stipulé que l'application existait déjà. Ce qui crée un précédent pour de nouvelles applications du PIRDESC. Donc, a suggéré M. McChesney, la porte est quelque peu ouverte.

Avant de soumettre ses rapports à l'organe de suivi du PIRDESC, le Canada consulte largement les gouvernements provinciaux et territoriaux ainsi que quelques groupes non gouvernementaux. Mais dans quelle mesure le Canada implante-t-il les recommandations? C'est très discutable et, selon plusieurs, cela mériterait d'être approfondi.

En conclusion, M. McChesney a soutenu qu'il serait judicieux que la Convention pour les droits des personnes handicapées comporte de nombreuses spécificités, susceptibles d'être examinées par les parlements et pouvant être éventuellement citées par les tribunaux pour tenter d'influencer les gouvernements canadiens au cas où il leur faudrait trop, trop de temps pour les appliquer sérieusement. Les gouvernements, a-t-il précisé, font attention quand les tribunaux leur ordonnent d'agir!

Rebecca Netley Ministère des Affaires étrangères du Canada, Chef adjoint de la délégation à la 5ème réunion du Comité spécial

Rebecca Netley a abordé quelques uns des principaux enjeux des négociations actuelles. Elle ne voulait pas entrer dans les détails mais certaines précisions d'avéraient nécessaires pour ce débat. Certains projets d'articles sont difficiles à négocier, a-t-elle précisé et ce, à cause des fortes positions qui se sont manifestées.

Mme Netley a commencé par plusieurs questions d'ordre général, notamment la nature et la portée de la Convention. Le Canada, a-t-elle précisé, estime que la Convention devrait être un instrument basé sur des principes et des droits, évitant toute exagération de détails normatifs et programmatiques afin de garantir la plus vaste adhésion possible des États. Le CCD avait d'ailleurs avancé ce point de vue dans le passé. Le Canada et la plupart des États membres soutiennent que la Convention devrait viser l'application de garanties efficaces et la jouissance des droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels existants et particulièrement pertinents pour les personnes handicapées. Mme Netley s'est ensuite attaquée aux questions et articles spécifiques.

  • Article 13

La plupart des participants avaient des vues similaires sur la question des détails. Mais la volonté d'étayer certains droits d'une multitude de détails normatifs diffère selon les États et les ONG et surtout, selon les droits considérés. C'est ce que prouvent les négociations portant sur l'article 13, relatif à la liberté d'expression et à l'accès à l'information. Le texte du Groupe de travail incluait de nombreux détails sur l'accès aux médias, détails qui ne s'appliquent peut-être pas dans un contexte de droits civils et politiques. Le Canada a suggéré de fusionner certains principes de cet article à d'autres principes, comme ceux du projet d'article 19 sur l'accessibilité ou du projet de l'article 20 sur la mobilité. C'est une suggestion que les participants devraient examiner, a-t-elle déclaré. Plus précisément, devrait-on élargir l'article sur l'accessibilité afin d'y inclure des concepts du projet de l'article 13? Le cas échéant, que devrait alors contenir cet article et comment éviter qu'il soit exagérément normatif?

  • Article 7

Il porte sur la question de l'égalité et de la non-discrimination. Le Canada revendiquait fortement un rigoureux article 7 et a nettement contribué à la formulation du libellé de l'ébauche actuelle de la Convention. Le Canada, a souligné Mme Netley, voulait inclure le concept d'aménagement raisonnable, ou comme l'appellent certains, l'obligation d'accommoder.

Le CCD préfère l'expression «obligation d''accommoder» à l'expression aménagement raisonnable, a-t-elle expliqué. Mais cette approche n'a pas obtenu beaucoup d'appui à New York car elle est peu connue. C'est pourquoi, selon Mme Netley, il a très peu de marge de manœuvre pour des modifications. Elle a donc demandé aux participants d'y réfléchir et de suggérer une orientation à la délégation canadienne. Bien sûr, négocier dans un environnement international comporte certaines limites…c'est du donnant, donnant. La question se pose donc: sommes-nous prêts à accepter le libellé: aménagement raisonnable?

Il est également question des mesures «positives» et de la suppression de ce mot dans le texte. La délégation apprécierait des commentaires sur l'absence ou l'insertion de cette disposition. Mme Netley a souligné que les autres conventions, comme la CEFDF, n'ont aucune exception explicite analogue et leurs dispositions sur l'égalité non plus. Dans ce contexte, a-t-elle ajouté, le concept a été matérialisé par le Comité des droits de la personne qui, dans un commentaire général, faisait référence aux mesures «positives». Le Canada a d'abord insisté pour cette référence, a-t-elle déclaré, mais il estime à présent qu'il peut s'en passer.

  • Suggestion d'une réalisation progressive de certains droits politiques et civils

Pour plusieurs États, une jouissance efficace de certains droits civils et politiques par les personnes handicapées, exige un volume raisonnable d'accommodements. Ces droits feront donc l'objet d'une réalisation progressive, mentionnée ailleurs en référence aux droits économiques, sociaux et culturels. Le Japon a donné l'exemple du droit de vote. De plus, certains intervenants ont soulevé le besoin d'accommoder des préoccupations soulevées par certains États quant à la cherté de certains aménagements.

Le Canada a explicitement affirmé qu'il ne voulait pas que le concept de réalisation progressive soit lié aux droits civils et politiques. Il récusera en outre toute référence générale à la réalisation progressive.

  • Article 9

Nous avons deux questions fondamentales ici, litigieuses et complexes: la définition de la capacité et les paramètres du processus décisionnel.

Le Canada a été nommé facilitateur pour ce projet d'article. Nous envisageons donc, en ce qui a trait à la capacité, de formuler un article allant au-delà de la capacité juridique pour enchâsser une plus large vision de la capacité et du processus décisionnel. Des préoccupations ont été notamment exprimées en ce qui a trait au processus décisionnel visant la propriété et le traitement médical.

Dans sa proposition soumise à la troisième réunion du Comité spécial, la délégation canadienne a tenté de se baser sur l'article 15 de la CEFDF, portant sur la capacité juridique. Nous avons essayé d'élaborer un article à partir de l'article 15, pensant qu'il s'agissait de mots familiers pour les délégations, enchâssant d'autre part une plus vaste notion de la capacité. Mais notre mention de l'article 15 semble avoir été rejetée lors de la dernière réunion. Nous nous retrouvons donc avec l'expression «capacité juridique», sans aucune contextualisation. Il semble y avoir des tensions car plusieurs délégations, aptes à accepter des notions limitées du libellé de cet article, demandent une définition limitée de la capacité. Nous préférons une plus vaste définition et un libellé plus progressif. Par conséquent, vous pouvez vous poser la question suivante: devons-nous avoir une définition plus large de la capacité ou pas de définition du tout?

La deuxième question porte sur l'appui au processus décisionnel, tel que formulé dans le texte, ou en dernier recours, la prise de décisions au nom d'autrui. Le Canada aimerait que cette prise de décisions au nom d'autrui soit intégrée dans un continuum d'aide offerte aux personnes handicapées. Nous voulions, au départ, que le processus décisionnel et la prise de décisions au nom d'autrui soient intégrés dans article neuf car occulter un tel principe laisserait un vide flagrant dans le libellé. C'était notre orientation initiale et il semble que notre point de vue soit à présent largement compris. Si vous décidez d'examiner cet article, communiquez vos commentaires sur ce concept. La délégation l'appréciera grandement, a ajouté Mme Netley.

  • Traitement non sollicité

Selon le caucus des ONG, tout traitement non sollicité équivaut à de la torture et le Comité veut traiter ce principe dans le projet d'article 11. Mais les États estiment que cela ne risque pas de se produire car ils n'appuieront pas une définition élargie de la torture. Une fois de plus, vos commentaires à ce sujet seront appréciés.

La Nouvelle Zélande, a-t-elle déclaré, a essayé de régler cette question en proposant un nouvel article, provisoirement intitulé: «consentement au traitement» et portant explicitement sur le traitement dans un contexte de santé mentale. La proposition (12 bis) favorise des interventions non-consensuelles et impose certaines limites. Les ONG se sont opposées à la présentation de cet article mais la Nouvelle Zélande essayait de régler directement les questions qu'elle jugeait litigieuses en soumettant une proposition qui pourrait être discutée au lieu de voir émerger un débat sous-jacent à divers articles. Votre opinion vis-à-vis de cette optique sera appréciée.

  • Droits économiques, sociaux et culturels

Selon Mme Netley, Le Canada estime en général que la portée des droits ESC enchâssés dans la convention ne devrait ni être amplifiée ni restreinte, comme c'est le cas dans d'autres instruments internationaux. C'est un fait particulièrement important à noter surtout en ce qui a trait au principe de «réalisation progressive» et à son traitement dans la convention. Le libellé actuel semble acquérir un certain appui, à savoir le libellé de l'article quatre de la Convention relative aux droits de l'enfant (CRDE). La deuxième partie de l'article quatre de cette Convention pourrait constituer le genre de référence polyvalente à la réalisation progressive. La délégation aimerait aussi obtenir votre point de vue quant à l'utilisation de ce libellé basé sur la CRDE.

  • Article 17

Jusqu'à présent, a déclaré Mme Netley, les discussions sur le droit à l'éducation ont principalement impliqué les ONG. Les rigoureux points de vue émis à cet égard par différentes ONG semblent avoir écarté la contribution des États. Le groupe des ONG a apparemment adopté une position commune à ce sujet. Mme Netley a alors sollicité la rétroaction des participants.

  • Populations spécifiques

Ceci fait référence à la situation des femmes et des enfants. Au départ, la délégation canadienne trouvait que l'insertion que des articles autonomes sur les femmes et sur les enfants était judicieuse. Mais il semble que plusieurs États qui avaient auparavant des vues similaires, incluant la Norvège, les UE, la Nouvelle Zélande et l'Australie , se soient opposés à l'idée d'articles distincts sur les questions spécifiques des femmes et des enfants handicapés.

Tout d'abord, ont-il récusé, cette convention doit s'appliquer à toutes les personnes handicapées et ne doit pas, par conséquent, isoler certains secteurs de cette population. C'était leur principal argument. Leur deuxième argument portait sur la teneur de l'article 43 de la Convention relative aux droits de l'enfant, article traitant des enfants handicapés. Pourquoi avoir deux différents jeux de normes pour les enfants handicapés, l'un dans la convention pour les personnes handicapées, l'autre dans la Convention relative aux droits de l'enfant. Il faut penser aux difficultés que cela engendrerait.

Le Canada s'est fortement positionné sur la nécessité d'inclure l'égalité des sexes dans le libellé. Il a suggéré que l'égalité entre les hommes et les femmes soit traitée comme un principe fondamental de cette convention. Nous avons, a déclaré Mme Netley, suggéré une formulation qui, de l'avis quasi général, devrait être incluse dans le projet d'article 22, sous remarques générales.

La délégation canadienne a également encouragé les références, dans le préambule, aux questions de discrimination multiple. Certaines délégations craignaient que la discrimination multiple ne soit explicitement traitée dans un article distinct. En fait, ont suggéré certains, les motifs de discrimination multiple devraient être énumérés dans le préambule aux fins de règlement. Avec une telle approche, les motifs de genre et d'âge seront inscrits dans la liste. Mais devrait-on inscrire d'autres facteurs?

  • Coopération internationale

Il s'agit de l'article 24 bis de l'ébauche actuelle, une question épineuse et qui n'a pas fait l'objet de nombreuses discussions. Notons toutefois que certaines discussions officieuses ont eu lieu dans les couloirs des Nations Unies. Il s'agit d'une question où la division nord-sud est flagrante. Elle ne s'applique pas vraiment à cette convention mais davantage aux discussions générales qui se déroulent aux Nations Unies sur les obligations inter-étatiques de fournir de l'aide.

Le Canada soutient, à l'instar de la plupart des pays donateurs, que nous devons accepter les références générales à la coopération internationale, en s'inspirant du libellé utilisé dans les traités sur les droits de la personne, comme le PIRDESC. Les problèmes sont survenus avec le libellé très détaillé proposé par le Mexique, et à présent intégré dans le projet d'article 24 bis. Il est beaucoup trop détaillé et il sera réfuté par les pays donateurs.

Ceci étant dit, a déclaré Mme Netley, on a constaté une évolution vers le développement de la coopération technique et, nous sommes certainement ouvert à des discussions à cet égard. Le Canada, a-t-elle souligné, met l'accent sur le renforcement des capacités et sur la coopération technique dans son aide aux pays sous développés. Nous sommes donc certainement prêts à examiner ce libellé.

  • Suivi

Et enfin, Mme Netley a brièvement parlé du suivi, qu'elle estime être une autre question épineuse. À l'heure actuelle, le Canada soutient que l'on devrait voir la forme de la convention avant de parler de suivi. Aucun texte n'a été soumis quant au suivi au niveau international. Seuls certains textes préliminaire ont été déposés pour le suivi national. À l'heure actuelle, la situation est difficile à déchiffrer.

Le suivi international n'a pas encore été abordé dans l'ébauche de traité. Les Canadiens souhaitent des solutions créatives car le système de suivi des Nations Unies connaît de graves difficultés avec un énorme arriéré de travail. Le Canada est impatient de voir un mécanisme plus créatif qui s'avèrera efficace mais, et quel qu'il soit, pas aussi lourd en terme de suivi.

Steven Estey Président du comité international du CCD et membre de la délégation canadienne aux réunions du Comité spécial

Steven Estey a tout d'abord précisé que son point de vue était celui d'une personne d'ONG et non d'un expert quasi-juridique. Il a souligné que le CCD s'était retrouvé engagé dans le processus du Comité spécial par accident et non à dessein et qu'une véritable bousculade s'était instaurée pour rester au courant des enjeux, ce qui a été un véritable défi.

M. Estey a de plus ajouté qu'avec l'actuel débat d'experts, le CCD visait à établir un solide contexte d'informations sur les tenants et aboutissants de cette consultation et de son intégration dans le processus en vigueur aux Nations Unies. L'objectif a été réalisé, a-t-il souligné. Par conséquent, ses propos seront brefs.

Cette consultation a principalement pour but de dégager le point de vue de la société civile canadienne, particulièrement des organisations de personnes handicapées, sur les délicates questions examinées lors des réunions du Comité spécial. Les conférenciers précédents ont cadré les enjeux fondamentaux et, avant de passer aux spécificités, il serait bon de réfléchir aux attentes raisonnables de la collectivités des personnes handicapées vis-à-vis de ce nouveau traité.

Partant, M. Estey s'est référé à une observation préalable d'un conférencier, selon laquelle les conventions des Nations Unies sont comme des glaciers: elles bougent très lentement mais, elles peuvent en même temps creuser des vallées et soulever des montagnes dans le paysage international des droits humains. De la même manière, la nouvelle convention ne va pas provoquer des changements rapides ni radicaux. En revanche, nous avons devant nous un instrument qui peut engendrer des changements systémiques à long terme. Nous devons donc maintenir une vision à long terme, vision qui doit se traduire tout au long du processus de formulation dans lequel nous sommes engagés.

La diversité est un autre facteur à ne pas oublier dans nos discussions sur la forme éventuelle de la convention. En effet, a expliqué M. Estey, la convention doit faire écho aux conditions des personnes handicapées du monde entier, dans une variété de cultures et de situations socio-économiques. Donc, même si nous voulons encourager les valeurs canadiennes, nous devons également respecter les autres valeurs en lice dans ce processus et nous devons être attentifs afin de ne pas vouloir imposer le point de vue canadien au détriment de celui de personnes issues d'autres cultures et d'autres contextes. C'est un équilibre délicat et nous devons en tenir compte.

Dans le même ordre d'idée, M. Estey a dit espérer que cette consultation permettra d'orienter les discussions portant sur des secteurs que des groupes ont déjà abordés avec une rigoureuse inflexibilité. Il craignait en effet que des positions musclées vis-à-vis de certains articles fassent dérailler les discussions. Par exemple, selon la plupart des intervenants, le libellé est en général utile et progressiste. Mais si les ONG poursuivent leur optique draconienne, nous risquons de perdre nos avancées pour nous retrancher dans des compromis de suppression de principes n'ayant fait l'objet d'aucun accord. La véritable question qui se pose est: jusqu'où pouvons-nous aller pour coaliser encore plus d'appuis; notre traité pourrait devenir le plus bel acte législatif sur terre mais si personne ne le ratifie, nous avons perdu notre temps.

Autre question qui se greffe à cette préoccupation, jusqu'où pouvons-nous accepter que le libellé actuel intègre, ou n'intègre pas, certains concepts traditionnels, sous-tendant le droit traditionnel en matière des droits de la personne? Par exemple, les articles 9 et 10 portent actuellement sur la capacité juridique et sur certains types de privation de liberté. Ce sont d'importants principes pour les personnes handicapées. Mais ces articles occultent carrément d'autres sphères cruciales de droits humains, comme l'application régulière de la loi, l'accès aux tribunaux, etc…bref, des droits qui ont été traditionnellement niés aux personnes handicapées.

Pour répondre à cette préoccupation, quelques ONG et gouvernements ont réclamé un nouvel article portant sur l'accès à la justice, article 12 bis dans l'ébauche de la convention. Cette omission peut se retrouver ailleurs aussi. C'est pourquoi, M. Estey a suggéré que nous examinions attentivement le texte afin de nous assurer qu'il intègre tous les éléments que nous nous attendons à retrouver dans une Convention sur les droits de la personne.

En terminant, a déclaré M. Estey, rappelons-nous que nous avons un document, nous avons un texte la-bas qui n'est peut-être pas aussi étoffé qu'il devrait l'être. Certains éléments doivent peut-être y être intégrés. Alors, espérons que cette consultation nous permettra d'approfondir ce sujet et d'approfondir également les autres importantes remarques formulées par tous les membres de ce panel.

Note du rédacteur: Après le débat d'experts, les participants ont examiné les projets d'articles devant être examinés lors de la prochaine réunion du Comité spécial qui aura lieu en août 2005. Cette discussion en table ronde est résumée ci-après.

Projet d'article 15: Vie autonome et insertion dans la collectivité

Introduction et questions pour discussion:

Lors de la cinquième réunion du Comité spécial, l'expression «vie autonome» a été longuement débattue. Pour certains, ce terme était trop empreint d'une idéologie politique ancrée dans le vécu occidental et n'ayant que très peu d'équivalents dans d'autres parties du monde. En y réfléchissant bien, on peut affirmer que le mouvement de vie autonome dans l'Ouest a été extrêmement profitable pour les personnes handicapées et il a acquis une importance cruciale du point de vue historique et politique. Le mouvement de vie autonome a, en essence, joué un rôle capital en aidant les personnes handicapées à mener une vie autonome et è prendre leurs propres décisions. Cette approche est considérée comme un résultat désirable, quel que soit le contexte culturel de la personne. À partir de ces éléments, le groupe a été prié de discuter des deux questions suivantes:

  1. Est-ce que l'article, tel qu'intégré dans l'ébauche du Groupe de travail, regroupe toutes les composantes de la philosophie de vie autonome?
  2. Au cours des négociations effectuées jusqu'à présent, des pressions ont été exercées pour supprimer ou restreindre les observations sur la vie en institution. En tant que collectivité d'ONG, appuyons-nous cette tendance?

Discussion

  • Institutionnalisation

Le «paragraphe 15b» et la manière dont il semble présumer que les personnes handicapées vivent dans des institutions, sembla inquiéter plusieurs personnes. Ces préoccupations provoquèrent une discussion sur le cas esté devant la Cour suprême du Canada et qui, par pure coïncidence, rendait son jugement le même jour.2 Le jugement portait sur l'institutionnalisation forcée. Ce jugement unanime, rédigé par le juge Abella, semble être positif. Il s'agissait du cas d'une personne handicapée, placée dans une institution malgré la possibilité d'une intégration communautaire que le gouvernement de la Nouvelle Écosse avait refusé de financer.

Il a également été noté que le gouvernement agissant comme facilitateur dans la rédaction de ce projet d'article (Nouvelle Zélande) a restructuré considérablement le texte afin de dissiper le concept de lieu de résidence.3

Il a également été noté (lors de la période de questions et réponses du débat d'experts sus-mentionné), que le problème de l'institutionnalisation et du traitement forcés touchait particulièrement les personnes ayant des incapacités psychosociales. De plus, le caucus (groupe) des ONG a réclamé une interdiction de portée générale sur le traitement et l'institutionnalisation forcés, ce qui a provoqué un environnement de négociation stimulant. Certains concepts comme le «principe du moindre effet restrictif» peuvent s'avérer utiles. Comment le Canada interprète-t-il ce concept et est-ce que la délégation sera forcée de l'introduire lors de la prochaine ronde de négociations, a-t-on demandé aux représentants du gouvernement? La question excédait les compétences des membre du panel qui ont affirmé qu'elle serait probablement considérée par le ministère de la Justice.

Un document de discussion produit à ce sujet pourrait s'avérer fort utile lors des prochaines négociations, a-t-on suggéré. De plus, les membres de la collectivité des personnes handicapées devraient s'attendre à être consultées à cet égard .

  • Définitions

Lorsque la collectivité canadienne des personnes handicapées parle de vie autonome, elle s'appuie sur une certaine définition de ce concept, mais qui n'est pas universellement acceptée. C'est pourquoi, on remarque une tendance vers l'utilisation de l'expression «vivre indépendamment». Dans certains contextes, la signification des concepts de vie autonome et d'intégration communautaire varient selon les groupes d'une même collectivité de personnes handicapées. C'est un défi que nous posent non seulement ce type de libellé mais encore cet article au sein duquel nous, qui appartenons pourtant au même contexte canadien, avons une différente compréhension de la vie autonome.

Soulignons que l'expression vie autonome a déjà été discutée lors de réunions du Comité spécial. Il a d'ailleurs été suggéré que si la philosophie sous-jacente au principe de vie autonome résonnait positivement en Amérique du Nord et dans certains pays occidentaux, elle n'avait que très peu d'équivalence dans d'autres pays. Le problème est qu'utiliser cette expression, revient pratiquement à essayer de disséminer sur une vaste échelle l'optique occidentale de l'intégration des personnes handicapées. D'où la suggestion de s'abstenir d'utiliser l'expression mais de maintenir le concept.

  • Répercussions financières et contraintes excessives

La phrase liminaire stipule que les États Parties «doivent prendre des mesures efficaces et appropriées», sans élaborer sur lesdites mesures. Plusieurs préoccupations ont été soulevées quant à l'absence de référence aux ressources et au manque de suggestion de test, comme celui de la norme de contrainte excessive. L'affaire Fernandez du Manitoba a été citée en exemple4. Les participants ont estimé que le niveau de l'obligation d'assurer un soutien pour l'intégration communautaire, devait être clarifié.

De plus, a-t-on noté, cette question de niveaux d'obligation va surgir dans d'autres secteurs. Par conséquent, le test devrait être clairement énoncé, ici comme ailleurs dans le processus d'élaboration.

En tenant compte de ce qui précède, il a donc été suggéré, comme contribution utile pour la prochaine réunion du Comité spécial, d'élaborer une ébauche de libellé que la délégation canadienne soumettrait aux fins d'examen.

Projet d'article 15 bis Les femmes handicapées

Introduction et questions pour discussion

Tel que souligné lors du débat d'experts, la question d'articles distincts pour les femmes (et les enfants) a été débattue lors des réunions du Comité spécial. Les paramètres de ces discussions sont établis dans le chapitre de ce rapport consacré aux débat d'expert. Aux fins de discussion, les deux questions suivantes ont été proposées au groupe:

  1. Devons-nous continuer à appuyer l'article distinct pour les femmes handicapées ou existe-il un meilleur moyen pour s'assurer que les enjeux spécifiques soient traités et que leurs droits soient maintenus dans la convention?
  2. Si nous estimons qu'un article distinct s'impose, qu'envisageons-nous d'y inclure?

Discussion

Une note de l'OMPH nous a appris, au début de la discussion, que cet organisme envisage de commander un document sur le sujet avant la prochaine réunion du Comité spécial. Tous les enjeux spécifiques aux femmes y seraient répertoriés et comparés aux projets d'articles de la convention. Une analyse serait ensuite effectuée pour déterminer si l'ébauche actuelle de la convention couvrait efficacement, ou non, la situation particulière des femmes. Avec cette analyse, l'OMPH serait mieux placée pour établir le besoin, ou non, d'un article distinct pour les femmes.

Cette annonce a déclenché une discussion sur plusieurs facteurs qui, selon les participants, devraient absolument être traités dans ce document:

  • La santé maternelle
  • La santé génésique
  • La stérilisation forcée
  • La vie familiale, incluant l'adoption
  • La violence et les abus

Il a été suggéré de faire preuve de prudence en répertoriant les enjeux actuels des femmes et de ne pas oublier les questions émergentes. Même s'il est évidemment impossible de prédire l'avenir, cette liste doit être suffisamment générale. À cause de la rapide évolution des technologies inhérentes aux questions biomédicales, bioéthiques et génésiques, un article trop détaillé deviendrait vite désuet et n'attirerait pas beaucoup d'appui lors des négociations.

De l'avis général, cette discussion devrait être poursuivie. Il serait intéressant d'obtenir une copie du document et d'en discuter séparément avec les Canadiennes handicapées.

Projet d'article 16 Les enfants handicapés

Introduction et questions pour discussion

Lors du débat d'experts, on a fait référence à ce projet d'article et au besoin d'harmonisation avec la Convention relative aux droits de l'enfant (CRDE). Certains États refuseront d'avoir deux jeux de normes, l'un intégré dans le CRDE, l'autre dans le nouveau traité pour les personnes handicapées. Dans sa forme actuelle, l'article intègre pratiquement le libellé de l'article 23 du CRDE, où il est également question des incapacités.

À titre d'introduction, les participants ont été avisés que le Comité spécial n'avait que peu discuté de cet article jusqu'à présent. De plus, il est reconnu, dans cette ébauche, que le fait de dédoubler l'article 23 du CRDE risque de ne pas bien servir les enjeux des enfants handicapés. Le Comité a été prié (dans les notes en bas de page du Groupe de travail), de revoir cet article afin de s'assurer qu'il tienne bien compte des questions touchant les enfants handicapés, susceptibles d'être occultées dans le reste de la convention. Et en particulier, la vulnérabilité des enfants relativement aux abus sexuels et à l'exploitation.

Les participants ont également été avisés que le CCD n'avait pas de politique sur les questions touchant les enfants handicapés. Mais nos collègues de l'ACIC, qui traitent constamment ces questions, ont décidé de revendiquer l'inclusion d'un article distinct pour les enfants handicapés.

L'ACIC soutient en effet que les caractéristiques de vulnérabilité uniques aux enfants handicapés seront mieux traitées dans un article distinct. Par exemple, les questions touchant la capacité juridique dans lesquelles, tout au long de la convention, les enfants n'ont pas les mêmes droits que les adultes. Par conséquent, l'ACIC estime que le nouveau traité doit, dans un article particulier ou autre, reconnaître les droits des enfants handicapés et leur garantir la protection contre tous les abus, quels qu'ils soient. Dans untel contexte, deux questions ont été proposées:

  1. Existe-il de nouveaux enjeux pour les enfants handicapées qui ne soient pas couverts dans le CRDE?
  2. Si c'est le cas, est-ce que ces enjeux devraient être intégrés dans un article distinct, comme le projet d'article 16?

Discussion

  • Les droits des enfants sont distincts des droits des parents

Pour la majorité des participants, il s'agissait d'un élément crucial. Les récentes expériences vécues dans les cas Auton et Latimer furent citées pour justifier le besoin net d'un article distinct.

Les participants ont ensuite longuement discuté du fait que ces questions engendraient souvent des conflits entre les parents et les enfants. Dans un tel contexte, ont-ils déclaré, le besoin de balises s'imposent. La sur-consommation de drogues qui est devenue un problème crucial dans plusieurs pays occidentaux, a été citée en exemple. Il y a de plus en plus de cas où ces questions de consommation de drogue sont traitées dans les critères d'accès à certains services, y compris l'accès à l'éducation. Par conséquent, ont décrété les participants, la présence de conflits générationnels doivent être clairement absolument stipule et, cette réalité doit être reflétée dans l'article.5

  • Harmonisation

Les participants se sont ensuite lancés dans une passionnante discussion sur l'harmonisation avec la CRDE, telle que soulignée plus avant. Il a été indiqué que certains organisations internationales de personnes handicapées se sont déjà attaquées à ce sujet et des exemples de défis ont émergé. L'ACIC et d'autres ont particulièrement discuté du fait que les enfants handicapés ne devraient pas être obligés de vivre en institutions. Mais la CRDE n'offre aucune garantie à ce sujet. Par conséquent, on pourrait s'en aller vers l'établissement d'un nouveau droit, celui de ne pas être institutionnalisé.

Si l'on pousse pour de nouveaux droits, les États risquent de ne pas être prêts à signer et ratifier la convention. Il serait donc plus judicieux de cadrer cette discussion, chaque fois que possible, dans un contexte d'expansion et de clarification des droits existants. Ainsi, cette revendication sera perçue comme un ajustement supplémentaire et non comme une expansion majeure.

En même temps, certains ont estimé que le Canada devrait être enjoint d'affirmer que la CRDE n'était en aucun cas maximal, qu'il ne stipulait aucune limite infranchissable. Ainsi, ont recommandé certains participants, le CCD devrait se positionner carrément et soutenir que nous ne sommes nullement tenus de refléter la convention relative aux droits de l'enfant. Nous sommes absolument libres de l'améliorer.

Cette approche n'a pas suscité de consensus. Le document de position suggéré permettra peut-être de formuler une résolution. L'un des participants a déclaré que le document de recherche de Gerard Quinn et Theresa Degener de 2002, constituait sans doute le point de départ de ces travaux. Les auteurs y soulignent le manque de visibilité des personnes handicapées au sein des Nations Unies.6 Dans un tel contexte, on a préféré se dire: laissons les personnes handicapées jouir des droits existants au lieu d'en créer de nouveaux.

  • Préoccupations relatives au «libellé comparatif»

L'article 16 commence en stipulant que les États Parties veillent à ce que tous les enfants «jouissent des mêmes droits et libertés fondamentales que les autres enfants». Certains auraient préféré un libellé plus rigoureux quant aux droits des enfants, par exemple «s'assurent que les enfants jouissent d'une vie pleine et décente dans des conditions qui garantissent leur dignité et favorisent leur autonomie et leur participation active». Cette approche écarte la comparaison aux autres enfants et stipule plus clairement les droits.

Projet d'article 17 Éducation

Introduction et questions pour discussion

Bien que long et détaillé, le texte du Groupe offre néanmoins un bon équilibre et, tout en accentuant l'enseignement favorisant l'inclusion, ouvre la porte à l'éducation spécialisé ou aux systèmes spécialisés.

Il s'agit du facteur crucial dans cet article et en fait, du débat international sur l'éducation des personnes handicapées. Certains groupes revendiquent un enseignement totalement inclusif, rien d'autres. Mais d'autres groupes réclament ce qu'ils appellent des systèmes spécialisés. Et enfin, d'autres groupes demandent un mélange des deux. Les deux questions à se poser pour amorcer la discussion sont les suivantes:

  1. Quel est le meilleur compromis entre ces deux optiques? Et est-ce que ce texte offre un équilibre approprié?
  2. Une question connexe se pose: le principe du choix. La liberté de choix et le choix réel, non le choix foré ou imposé. C'est la base même de ce débat. Est-ce que le texte proposé garantit efficacement cette liberté?

Discussion

  • Élargir la vision de l'éducation

Le problème ici était d'élargir le focus sur l'enseignement primaire pour y incorporer l'enseignement secondaire et tenir compte du fait qu'il s'agit d'un continuum ou, de ce que certains appellent «l'acquisition continue du savoir». L'article doit aller au-delà de l'éducation des enfants; il devrait être lié, d'une manière ou d'une autre, au projet d'article 22 sur «Le droit au travail». Certains participants redoutaient d'aller au-delà des exigences «éducatives proprement dites» et d'inclure des facteurs liés au milieu éducatif comme les activités extrascolaires, les stages en entreprises ou d'autres facteurs liés directement à l'emploi.

La discussion a également porté sur le besoin de mentionner spécifiquement l'enseignement post-secondaire afin d'élargir le focus sur les enfants et l'enseignement de base. Il a été toutefois noté que les principes inhérents à la transition entre l'école et le travail ne sont inclus ni dans ce projet d'article ni dans l'article 22. La formation d'une personne est de plus en plus effectuée en milieu de travail, par exemple dans le cadre d'un placement professionnel, ou toute autre forme d'apprentissage. Plusieurs participants ont estimé que le libellé devait tenir compte de cette réalité, soit ici, soit dans le projet d'article 22.

  • Accommodements liés aux incapacités

Tout en reconnaissant la teneur très programmatique du texte actuel, et par conséquent sujette à changements, les participants ont convenu que des éléments devraient être ajoutés la liste des accommodements établie à l'alinéa 2b, au cas où elle serait maintenue. Les participants ont spécifiquement parlé des auxiliaires pour les personnes ayant des incapacités physiques ainsi que des tests appropriés pour les personnes ayant des troubles d'apprentissage. Un participant a d'ailleurs déclaré:

«Une mention spécifique des évaluations serait sans doute utile…à moins que nous puissions identifier diverses capacités d'apprentissage, ou des termes semblables, pour nous assurer d'inclure cette collectivité, nous assurer qu'elles bénéficieront des dispositions de cet article au cours des prochaines décennies puisque les membres de cette collectivité ne sont pas réellement perçus, sur la scène internationale, comme des personnes ayant des limitations fonctionnelles. Pourtant, en matière d'éducation, ce sont sans doute les plus handicapés par un système traditionnel et rigide qui crée des obstacles pour les personnes ayant ce type d'habileté ou de capacité d'apprentissage. Notre défi sera donc de nous assurer que ce groupe sera reconnu dans cet article.»

Un question distincte a surgi, portant sur la mention, dans le paragraphe 4, au langage gestuel qui semble être traité comme un accommodement. Mais, selon le point de vue des personnes sourdes, il s'agit d'une question de langue, d'une question de culture et pas du tout d'un accommodement. Il serait peut-être judicieux de supprimer le langage gestuel dans ce paragraphe.

  • Obstacles comportementaux

La discussion a également porté sur la nécessité de tenir précisément compte, dans cet article, des attitudes négatives (de la part des enseignants). Il a été rappelé que le projet d'article 5 est axé sur les attitudes et satisfait plusieurs États. Mais les participants ont estimé qu'une mention spéciale s'imposaient quand même et ce, à cause de l'énorme influence que les enseignants peuvent avoir sur les enfants handicapés.

  • Liens avec les traités existants

On devrait également tenir compte des dispositions des autres traités portant sur le droit à l'éducation. Ainsi, la Convention relative aux droits de l'enfant (CRDE) stipule que des méthodes de rééducation et des services de formation professionnelle doivent être offerts aux enfants; cela pourrait devenir une référence utile et nous servir d'exemple de libellé pour garantir les droits des personnes handicapées.

Nous pourrions également, aux fins d'orientation sur cette question, nous référer à l'organisation internationale du travail (OIT) et à l'Unesco auxquels nous pourrions emprunter certains points et nous en servir de trame pour édifier certaines des préoccupations sus-mentionnées.

Projet d'article 18 Participation à la vie politique et publique

Introduction et questions pour discussion

Ce sujet a été lancé par une discussion sur l'absence de personnes handicapées dans le système politique canadien. Certes, on retrouve des exemples d'engagement au niveau local mais la représentation aux niveaux provinciaux et fédéral demeure extrêmement limitée. Et si cela arrive, on s'attend à ce que ces élus deviennent des «symboles d'affiches».

La discussion a également porté sur la situation dans d'autres pays ayant différents systèmes électoraux (représentation proportionnelle) et où les personnes handicapées sont considérées comme l'un des groupes dans l'estimation des proportions. De ce fait, des sièges de l'assemblée législative sont réservés aux représentants des personnes handicapées ainsi qu'à ceux d'autres groupes en quête d'égalité.

Dans un tel contexte, les deux questions suivantes ont été posées au groupe, aux fins de discussion:

  1. Comment cet article peut-il contribuer à l'éradication des obstacles systémiques afin que les personnes handicapées puissent participer à la vie politique sans devenir des symboles d'affiche.
  2. Que pensez-vous du modèle de sièges garantis?

Discussion

  • Sièges garantis

À ce sujet (sièges garantis), l'un des participants a décrit avec moules détails, la situation prévalant en Afrique du Sud. Voici une transcription de ses propos:

Lorsque j'effectuais mon internat en Afrique du Sud, en 1999, je travaillais pour sept parlementaires handicapés. Ils venaient tout juste d'être élus…En Afrique du Sud, le mouvement de défense des droits des personnes handicapées était puissant et vigoureux, étroitement lié à l'ANC. Lorsque l'ANC a pris le pouvoir, il a remercié tous ceux qui l'avaient aidé…notamment la collectivité des personnes handicapées à qui il a réservé un certain nombre de sièges….

Le système électoral est basé sur la représentation proportionnelle; ce sont donc les partis les plus puissants qui prédominent. Par conséquent, l'ANC a pu obtenir autant de sièges et en distribuer à certaines collectivités. Je crois que c'est bien car cela a conscientisé la population au fait que les personnes handicapées pouvaient être au pouvoir et y occuper des postes d'autorité. Cela n'a pas semblé poser de problèmes et fut bien accepté. Ah oui, plusieurs personnes étaient assez connues, ayant engrangé plusieurs succès dans les communautés où elles jouaient un rôle actif. Je pourrais même dire que certaines d'entre elles étaient des célébrités. Donc, ce n'est pas simplement une question de conscientisation. À mon avis, le problème au Canada c'est que nous n'appliquons pas le système de représentation proportionnelle (RP), nous n'avons pas de listes des partis. Nous avons à la place le premier système passé et le post-système. Vous devez d'abord passer à travers toutes les étapes pour recueillir les fonds nécessaire pour la candidature, puis coaliser les meilleurs partisans, puis participer aux élections et vous engager dans tout le processus politique qui, même au Canada, est à plusieurs niveaux inaccessible. Comment se traduit-il dans d'autres régions du monde, je ne sais pas vraiment mais un système de RP est plutôt efficace en ce sens alors que notre système est plus difficile…..

  • Nécessité d'un libellé plus puissant

Outre les fonctions politiques, cet article porte sur la capacité de permettre aux personnes handicapées de participer, sur un pied d'égalité, à tous les processus décisionnels, et en particulier à ceux visant les personnes avec des déficiences. Il a été suggéré de renforcer le libellé, en rappelant que le libellé du Programme mondial d'action de 1981 était beaucoup plus rigoureux.

La privation du droit de vote subie par certaines personnes handicapées institutionnalisées a été mise de l'avant. Au Canada, a-t-on rappelé, nous avons dû lutter pour des personnes vivant des situations analogues, notamment les personnes ayant des déficiences psychiques ou celles qui, dans le système de justice criminelle, sont privées de leur droit de vote.7

  • Demande de gouvernance responsable

Quelques participants ont avancé l'idée d'inclure le principe d'un comité parlementaire dans l'article. Il garantirait la création d'un organe parlementaire national, chargé d'entendre directement les personnes handicapées et leurs organisations se prononcer sur d'importants enjeux.

D'autres ont suggéré d'élargir l'envergure de ce comité pour que l'organe en question soit chargé de produire un rapport annuel. Cela pourrait peut-être être rattaché à un plus vaste mécanisme de suivi de l'application de la convention.

Projets d'articles 19 et 20 Accessibilité et mobilité individuelle

Introduction et questions pour discussion

Le premier point de la discussion a été d'ordre organisationnel, tel que soulevé par les membres du panel au début de la réunion: dans quelle mesure les concepts du projet d'article 13, portant entre autres sur les technologies spécifiques liées aux incapacités ainsi que sur les conditions d'accès à l'information, peuvent-ils être transférés dans cet article-ci? De même, l'article 20 risque d'apporter certains chevauchements. Il serait sans doute judicieux de transférer également son libellé dans l'article 19. C'est la raison pour laquelle nous avons décidé de les examiner conjointement.

L'autre domaine de préoccupations, est que l'article tel qu'ébauché actuellement occulte les vastes questions de liberté de circulation. Si ce n'est pas corrigé, la convention occultera carrément certaines graves difficultés qu'éprouvent les personnes handicapées pour se déplacer d'un pays à un autre, notamment les problèmes d'immigration, la capacité d'obtenir des passeports et autres documents favorisant la libre circulation - telle qu'en général comprise-, le droit à une nationalité, le droit d'en changer, etc…Ces questions doivent absolument être réglées. Ce qui est moins clair, c'est de savoir si ce règlement doit tenir compte d'autres principes comme l'accessibilité en général, incluant les aides techniques et autres aides à la mobilité individuelle.

Oc devrait peut-être axer cet article sur l'accessibilité, incluant les aides techniques, les dispositifs et les services, afin que l'article 19 devienne un article fourre-tout des questions inhérentes à l'accès et tirées des articles 13 et 20. Ainsi, les rédacteurs aurait suffisamment de marge de manœuvre ailleurs pour régler efficacement l'autre question, celle des droits à la mobilité.

Afin de résumer ces remarques, les deux questions suivante ont été proposées comme amorce de discussion:

  1. Devrait-on restructurer ce projet d'article pour y incorporer des éléments d'autres d'articles portant sur l'accès, notamment la technologie et la mobilité individuelle?
  2. Comment proposons-nous de régler certains facteurs dont on n'a pas réellement tenu compte, notamment l'immigration, etc.?

Discussion

  • Englober une plus vaste compréhension de l'incapacité

La discussion a porté sur le besoin de différencier les concepts de «transférabilité» et de «mobilité» (surtout tels que conçus dans le projet d'article 20 et qui pourraient être aussi bien absorbé dabs un article 19 révisé). Au Canada, le terme «transférabilité» indique la capacité d'accéder aux même type de services de soutien liés aux incapacités, quelle que soit la province ou le territoire de résidence. En revanche, le terme «mobilité», tel que développé dans l'article 20, porte sur les handicaps moteurs et les moyens de les corriger.

  • Immigration

La discussion s'est tournée sur une question connexe portant sur l'omission, dans le projet de texte, du principe de circulation d'un pays à un autre. Ce concept est très important pour plusieurs participants; il doit être ajouté malgré l'éventuelle opposition de plusieurs États membres. Il a été noté que cette question avait déjà été soulevée lors de la précédente session de consultation du CCD et qu'une ONG basée à Montréal, l'Association multi-ethnique pour l'intégration des personnes handicapées, avait produit un excellent document à ce sujet pour la Conférence sur le racisme qui s'est tenue à Durban, Afrique du Sud, en septembre 2001.8 Pour plusieurs participants, cela méritait un suivi et certainement, une mise en évidence lors des discussions sur la mobilité.

  • Entités privées

Les participants ont longuement discuté des mécanismes de participation et des normes auxquelles devraient se conformer les entités privées et des mécanismes de participation qui permettront aux personnes avec des limitations fonctionnelles d'identifier et de corriger les obstacles et obstructions. Le libellé, tel qu'actuellement formulé, est trop faible. Par exemple, dans l'alinéa 19.2.d, le libellé « encourager des entités privées à prendre en compte tous les aspects de l'accessibilité» ne paraissait assez rigoureux pour protéger adéquatement les droits humains des personnes avec des limitations fonctionnelles.

Si la question d'accessibilité est intégrée dans cet article, comme composante des droits économiques et sociaux, elle sera soumise à des normes de réalisation progressive. Elle deviendra un vague concept, ce qui serait une erreur selon les personnes handicapées. Dans cette ligne de pensée, on a alors fait référence à l'alinéa 2 (d) qui, pour de nombreux participants, offrait plus de transparence quant au droit à exercer, avec totale responsabilité des entités privées et entière participation des personnes handicapées. Dans la même veine, et comme l'a souligné un participant à titre d'exemple, les questions d'accès sont liées au droit au travail. Or, le projet d'article tel qu'actuellement libellé préconise que seuls les édifices gouvernementaux doivent être accessibles. Par conséquent, seuls les gouvernements offriraient des lieux de travail accessibles. Ce qui, il va de soi, serait totalement inacceptable.

À partir de cette discussion, les participants ont convenu que le projet d'article 19 offrait globalement la possibilité de renforcer la compréhension des accommodements liés aux incapacités et l'obligation de les dispenser et que, tel qu'actuellement libellé, le texte n'atteint pas cet objectif.

Il a été souligné que, comme l'ont déclaré des délégations d'autres pays, nous ne pouvons demander aux gouvernements de se prévaloir d'un traité international pour forcer des entreprises privées à effectuer certains aménagements. Cet argument irait alors à l'encontre du renforcement des dispositions sus-mentionnées. Quoiqu'il en soit, les participants ont convenu que la délégation canadienne devrait revendiquer un libellé plus musclé. En effet, plusieurs ont estimé que ce principe devrait être valorisé car c'est très souvent dans le secteur privé que les personnes handicapées affrontent le plus d'obstacles.

On a toutefois noté que plusieurs pays membres des Nations Unies (comme les Etats-Unis, le Canada, la majorité des pays européens, l'Australie et bien d'autres), ont adopté des lois exigeant que les installations du secteur privé soient conformes à des normes d'accessibilité. La nouvelle Convention ne suggèrerait certainement rien de moindre.

  • Organisations de personnes handicapées

L'alinéa 2 (g) de l'article 19 prévoit que les organisations de personnes handicapées doivent être consultées. Ce concept est perçu par certains comme étant plus générique et plus intersectoriel et mériterait une place plus prédominante. En effet, toute petite mention dans un article pourrait, par mégarde, affaiblir l'importance du concept. Par conséquent, il serait sans doute plus efficace d'envisager une version plus détaillée du concept et de l'intégrer ailleurs dans la Convention, peut-être dans l'article 4 sur les obligations générales.

  • Une suggestion de structure

En ce qui a trait à la nature détaillée de certaines spécifications du projet d'article 19 et étant donné que nous ignorons la forme que prendra le système de suivi, les participants ont convenu qu'il était prématuré de penser perdre ces dispositions utiles et étayées. Mais certains ont rétorqué que des États n'accepteront pas ce volume de détails. Par conséquent, devrait-on envisager une annexe ou des règlements pour la convention? De tels éléments sont faciles à actualiser en fonction de l'évolution de la technologie, etc…Dans la même veine d'idée, il a été jugé primordial d'inclure le concept d'aménagement universel. En effet, ont souligné certains, de nombreux pays, autres que les pays occidentaux et du Nord, portent beaucoup d'attention au concept d'aménagement universel.

Il a également été mention des Normes d'égalisation des chances des personnes handicapées, ainsi que de l'efficacité de les inclure (ou un document de ce genre) en annexe au nouveau traité.

Dans cet ordre d'idées, il a été noté que certains traités de droit international de l'environnement comportent des protocoles techniques supplémentaires, protocoles approuvés et basés sur les traités fondamentaux. Il serait sans doute judicieux de se souvenir de ce précédent. Un autre précédent de ce genre existe dans la Convention sur la bio-médecine de la C.E. Il a été précisé qu'un examen du système financier international pourrait dévoiler d'autres modèles utiles.

Projets d'articles 21 et 21 bis Santé et réadaptation et réadaptation basée sur la communauté

Introduction et questions pour discussion

Le contexte de ce projet d'article émane en fait d'autres instruments internationaux c et, plus particulièrement de l'article 12 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. (PIRDECSC). Il est intéressant de noter qu'en mai 200, le Comité du PIRDECSC avait émis le Commentaire général 14 pour clarifier la nature et la teneur des droits individuels inhérents au droit à la santé ainsi que les obligations des États. Dans ce document, le Comité reconnaît que le droit à la santé est étroitement lié aux autres droits comme le droit à l'alimentation, au logement, au travail, etc…Il fixe quatre critères pour évaluer l'application du droit à la santé, à savoir:

  1. Disponibilité - les services de soins de santé doivent être disponibles en quantités suffisantes.
  2. Accessibilité - les établissements, les produits et les services de santé doivent être accessibles à tous, sans discrimination.
  3. Acceptabilité - les établissements les services de santé doivent être culturellement adaptés, sensibles au sexe et respecter la confidentialité, etc…et,
  4. Qualité - les services, les produits et les établissements de santé doivent être de qualité suffisante

Les mesures intégrées dans ce projet d'article tentent de refléter ces critères. Ainsi par exemple, quand on dit que les établissements, les produits et les services de santé doivent répondre à certaines normes d'acceptabilité, il s'ensuit logiquement que les personnes handicapées doivent avoir la possibilité de participer à l'élaboration de ces services. À cet égard, le dernier alinéa 21 (m) préconise que les États Parties doivent promouvoir la participation des personnes handicapées et de leurs organisations à l'élaboration des lois et politiques relatives aux soins de santé ainsi qu'à la planification, la prestation et l'évaluation de ces services.

1) Dans ce contexte, estimez-vous que le libellé, tel que rédigé, soit assez puissant?

Il est important de noter que le Comité spécial envisage un nouvel article, 21 bis, afin de séparer le droit à la santé et le droit à la réadaptation en deux articles distincts. Pour contextualiser ce point, soulignons que la réadaptation est définie comme suit dans les Règles pour l'égalisation des chances des personnes handicapées:

La "réadaptation" vise à permettre aux personnes handicapées d'atteindre et de préserver un niveau fonctionnel optimal du point de vue physique, sensoriel, intellectuel, psychique ou social et à les doter ainsi des moyens d'acquérir une plus grande indépendance.9

Par conséquent, le processus de réadaptation ne comporte pas les soins médicaux en tant que tels; il inclut davantage une vaste gamme de mesures et d'activités visant une réadaptation plus fondamentale et plus générale pour des activités axées sur des buts, comme par exemple la réadaptation professionnelle.

Plusieurs délégations gouvernementales ont appuyé cette structure distincte. Des ONG ont également soutenu que cette séparation traduisait la distinction entre les services de santé et les services de réadaptation qui répondent à différents besoins.

2) La deuxième question clé sera donc: approuvez-vous un article distinct pour la réadaptation?

Discussion

  • Structure de l'article 21

Les participants ont convenu que tel qu'actuellement libellé, l'article sème la confusion entre les concepts. Il n'y a, par exemple, aucune distinction nette entre le droit à la santé et l'accès aux services de soins médicaux. Alors que l'accès aux soins de santé sans discrimination est une caractéristique intégrale du droit à la santé, il ne doit, en aucun cas, être l'unique élément du concept. Il existe toute une gamme de facteurs qui sont souvent discutés sous le titre «déterminants sociaux de la santé» et dont l'actuel libellé ne tient pas suffisamment compte.

Par «déterminants sociaux de la santé», on vise largement les enjeux liés à la santé génésique et à la santé de la population ainsi que d'autres déterminants sociaux comme la pauvreté, le logement et l'alphabétisation. Les participants ont convenu que cela devrait être davantage accentué dans le texte. Tout ceci doit vraiment être clarifié. En effet, le refus des services de soins de santé, directement ou à cause des déterminants sociaux, est l'un des principaux problèmes qu'affrontent les personnes handicapées dans le monde entier. Par conséquent, les participants ont suggéré de recadrer cet article afin de s'assurer que l'accès soit clairement identifié comme une composante primordiale du droit à la santé.

Une autre préoccupation a été soulevée quant au volume de détails dans certaines parties et aux deux points où ce volume a engendré un libellé inapproprié: l'alinéa 21 (d) sur les services de relève. Les personnes handicapées ont estimé qu'il était inhabituel de dire que les services de santé et de réadaptation devraient inclure des services de relève. Certes, le répit est un enjeu important dans certains cas, mais l'intégrer dans le contexte des droits aux soins de santé noie le poisson. On devrait donc envisager de supprimer tout cet alinéa. De même, l'alinéa 21 (g) qui encourage la formation d'un nombre suffisant de professionnels de la santé et de la réadaptation, semble superflus et sans doute inapproprié dans cet article.

  • Article 21 bis

Cette discussion sur un article distinct pour la réadaptation rappelait à certains participants l'expérience vécue au Canada il y a vingt cinq ans et qui a mené, entre autres, à la création de l'OMPH. À l'époque, les personnes handicapées considéraient la réadaptation comme un univers distinct, quelque peu oppressif et dirigé par des professionnels de la santé qui ne visaient qu'à nous laisser à notre place. Cela touchait toutes les facettes de la vie, tel que reflété par une série de termes comme la réadaptation professionnelle, la réadaptation récréative, la thérapie musicale, etc.) La collectivité des personnes handicapées a intensément œuvré pour supplanter ce principe mais la lutte n'est pas encore terminée au Canada, et elle ne l'est certainement pas dans d'autres parties du monde. Par conséquent, les participants avaient quelques réserves quant à l'élaboration d'un article distinct sur la réadaptation.

À ce moment-là, la discussion devint animée et aucun consensus ne fut atteint. Pour certains, la création d'un nouvel article distinct sur la réadaptation pourrait donner à ce principe plus d'importance que nous le désirons vraiment. Mais pour d'autres, cette distinction était capitale car elle occultait toute analogie entre la réadaptation et les services de santé.

Même si aucun consensus n'a été atteint, les participants ont convenu que quelle que soit l'évolution de ce dossier lors de la réunion du Comité spécial, il nous incombe de revendiquer une claire définition de la réadaptation. Cette définition doit souligner plusieurs éléments fondamentaux, comme par exemple la nature limitée de la réadaptation, et ce, afin d'éliminer la situation souvent vécue par les personnes handicapées, à savoir que la réadaptation est un processus continu visant à réparer la personne pour qu'elle s'adapte à la société au lieu d'essayer d'éliminer les obstacles sociétaux qui entravent leur participation.

Et plus important encore, nous devons, selon plusieurs participants, revendiquer un libellé reconnaissant que la réadaptation a, à maintes reprises, privé les personnes handicapées de leur droit d'accès aux services et programmes généraux et stipulant que dans la quête de la pleine jouissance des droits humains, cette situation ne doit jamais se reproduire.

Projet d'article 22 Droit au travail

Introduction et questions pour discussion

Il a été souligné, en introduction, que le Comité spécial n'a pratiquement pas discuté de la formulation actuelle du texte et qu'il y a par conséquent place à améliorations et modifications. Notons toutefois que les principes fondamentaux d'un bon article semblent être intégrés mais ils méritent certainement d'être davantage approfondis.

La phrase liminaire de l'article établit un fondement d'accès à l'égalité et est suivie d'une série d'alinéas intégrant diverses mesures positives pour éradiquer la discrimination. Mais pour certains, ces mesures ne sont pas assez explicites, pas assez rigoureusement formulées.10 C'est nettement évident si l'on compare ce texte avec celui de la CEDAF dont le libellé est plus musclé. Par exemple, dans ce contexte, le libellé de la CEDAF se lit «garantir l'accès au marché du travail» alors que le libellé de l'alinéa (a) demande aux États de «encourager un marché du travail et un environnement du travail ouverts…». Par conséquent, les participants ont été priés d'examiner deux points:

  1. Le concept de la discrimination n'est pas traité dans cet article et cela peut s'avérer inquiétant. Quel est votre point de vue?
  2. La question d'accommodement en milieu de travail n'est pas matériellement traitée et cela peut également provoquer des problèmes. Que suggérez-vous pour corriger cette omission?

Discussion

  • Accommodement

La discussion a encore porté sur le besoin de formuler clairement le principe de l'accommodement et des contraintes excessives. Les Nations Unies peuvent réfuter la terminologie utilisée au Canada en ce qui a trait aux contraintes excessives. Dans un tel cas, il faudra absolument trouver un libellé adéquat pour ce concept.

Certains participants ont fait valoir que malgré le libellé positif de l'alinéa 22 (c), à savoir que les États Parties doivent garantir un aménagement raisonnable, un rigoureux libellé devra être utilisé pour l'autre facette de ce principe. En d'autres mots, l'absence «d'accommodement raisonnable» est non seulement une violation de la disposition mais exerce en outre une distinction illicite. Et ceci devra être très clairement établi.

À l'avenir, les personnes handicapées voudront se prévaloir du droit international pour revendiquer davantage que la non-discrimination. Nous devons commencer à formuler le droit au travail comme un droit fondamental, imposant aux gouvernement l'obligation de s'assurer que les personnes handicapées puissent intégrer la force active au lieu d'en laisser la responsabilité au marché du travail. Il faut intégrer une obligation beaucoup plus vaste pour garantir la pleine participation à la société. C'est un facteur fondamental. Cet article pourrait-être la garantie la plus cruciale de toute la convention. Il doit donc être percutant et non ambigu.

Une discussion a suivi sur les paramètres appropriés pour cet article, incluant le secteur privé. Il a été noté que l'alinéa 22(h) ne mentionne que le secteur public et doit être élargi. De plus, les conditions de recrutement, omises ici, devraient être prises en considération.

  • Conditions de travail

La discussion a longuement porté sur les ateliers protégés et sur leur éventuelle insertion dans cette convention. Les participants ont appris que l'ACIC avait déclaré qu'ils n'étaient pas appropriés pour la convention et qu'elle ne voulait pas d'un traité encourageant ou faisant la promotion des ateliers protégés. Nous voulons une convention visant la pleine intégration dans un marché du travail ouvert.

Une discussion a alors suivi sur la situation des personnes handicapées dans les pays en voie de développement. Plusieurs participants ont appuyé l'adjonction d'un alinéa non pas axé en tant que tel sur les ateliers protégés mais plutôt sur les conditions extrêmes d'esclavage et de servitude et sur le besoin de traiter de ces facteurs, d'une manière ou d'une autre. Il a été suggéré d'ébaucher un libellé spécifique à ce sujet, contraignant les États Parties à s'assurer que les personnes handicapées ne soient pas soumises à l'esclavage, à la servitude ni au travail obligatoire.

Il a alors été noté que le CCD, de concert avec plusieurs autres organisations au Canada, s'était opposé au «travail obligatoire» imposé par le gouvernement de l'Ontario et d'autres et qui liait la prestation de l'aide sociale à la participation «volontaire» au marché du travail. Dans ce cas, une telle disposition serait conforme à l'approche adoptée dans le passé par le CCD.

Projet d'article 23 Sécurité sociale et niveau de vie correct

Introduction et questions pour discussion

Dans son libellé actuel, cet article combine les droits à la sécurité sociale aux droits à un niveau de vie correct. Cela élargit beaucoup ce secteur, surtout si l'on considère la portée du «niveau de vie» qui outre l'aide au revenu, doit inclure le logement, l'eau salubre, etc…Certaines discussions ont déjà eu lieu pour séparer cet article en deux articles distincts, l'un sur la sécurité sociale et l'autre sur le niveau de vie. Chacun de ces deux concepts étant déjà assez complexe. Par conséquent, les questions fondamentales seront:

  1. Cet article serait-il plus efficace s'il est séparé en deux articles distincts?
  2. Si oui, quelle structure suggérez-vous pour cette séparation?

Discussion

  • Formulation beaucoup trop étirée

Plusieurs personnes ont fait remarquer qu'avec les nombreux éléments de vie dont il était gavé, cet article n'arrivait plus à articuler une vision précise du droit, tel qu'il devrait s'appliquer aux personnes handicapées. Pour corriger cette situation, l'article deux être séparé en au moins deux parties distinctes. D'autre part, un facteur aussi important que le logement devrait être plus approfondi

Parlant de la question de logement, une recherche après la réunion nous a permis de retrouver un document du Centre on Housing Rights and Evictions (COHRE), basé à Genève, et soumis au Comité spécial pour fins d'examen. Il est reproduit ici pour faciliter la référence.11

Modifications proposées au projet d'article 23 (soulignées dans le texte)

«Les États Parties reconnaissent le droit de toutes les personnes handicapées è un niveau de vie correct pour eux et pour leur famille, notamment en matière d'alimentation, d'habillement, de logement et d'accès à l'eau salubre, et à l'amélioration constante de leurs conditions de vie et prennent les mesures voulues pour garantir et promouvoir la réalisation de ce droit.

  1. En ce qui a trait au droit à un logement correct, les États Parties s'engagent à n'exercer aucun acte ni aucune pratique discriminatoire fondée sur la déficience dans tous leurs programmes et politiques de logement et à prendre les mesures appropriées pour s'assurer que tous les pouvoirs publics, les établissements publics et les entités privées respectent cette obligation. À cet égard, les États Parties tiendront particulièrement compte des personnes qui subissent une distinction illicite non seulement à cause de leur incapacité mentale ou physique mais aussi à cause de leur sexe, leur orientation sexuelle, leur race, leur origine ethnique et/ou leur âge.

  2. Les États Parties s'engagent à garantir la pleine participation des personnes handicapées à l'élaboration et la mise en vigueur des politiques et programmes et à veiller à ce que l'élaboration et la mise en vigueur de lois liés au logement traduisent leurs besoins.

  3. Les États Partie prennent toutes les mesures appropriées pour s'assurer que les personnes handicapées exercent librement leurs droits au logement et puissent participer totalement et à part égale à la société. Les États Parties prennent les mesures appropriées pour garantir aux personnes handicapées;
    1. le droit au maintien dans les lieux et à aucune éviction forcée
    2. la sécurité physique à tous les occupants et la protection contre toute menace de santé, de danger de structure et de vecteur de maladies;
    3. un logement abordable qui ne compromet pas la capacité des personnes handicapées de satisfaire leurs autres besoins fondamentaux;
    4. un logement contenant tous aménagements requis pour la santé, la sécurité, le confort et la nutrition;
    5. un logement situé à une proximité adéquate de services de soutien, des possibilités d'emploi, des services de soins de santé et d'autres aménagements sociaux.
  4. Les États Parties élaborent des programmes spéciaux pour garantir aux personnes handicapées l'accès à de l'eau abordable, y compris pour les personnes ayant besoin de quantités d'eau supplémentaires pour leurs besoins personnels et domestiques et les personnes ayant des difficultés à accéder physiquement aux installations sanitaires et aux points d'approvisionnement en eau.
  • Absence de règlement de la pauvreté systémique

Il a été noté que le droit à une pension d'invalidité est, en quelque sorte et même au Canada, un ticket pour la pauvreté. C'est pourquoi, de nombreux participants ont convenu que le texte devait revendiquer davantage. La barre devrait être plus haute car, a-t-on fait remarquer, le libellé actuel du texte semble être assez «minimaliste», Tel qu'actuellement formulé, cet article semble préconiser que les personnes handicapées n'ont droit qu'au minimum d'existence en matière de nourriture, de logement et d'habillement. Ceci, a-t-on souligné, va à l'encontre des autres objectifs visant la dignité et l'intégration social, créant donc des incohérences internes et un risque de confusion surtout lorsque viendra le moment d'interpréter le libellé pour le suivi.

Partant, de nombreux participants ont exprimé le besoin de régler les questions inhérentes à la pauvreté systémique et à son caractère cyclique car jusqu'à présent, les limitations fonctionnelles engendrent la pauvreté et la pauvreté provoque de plus grandes incapacités. Cette relation cyclique doit être reconnue afin que la Convention tienne efficacement et pleinement compte de la réalité des personnes handicapées.

Dans le même contexte, la discussion a porté sur les seuils des programmes de sécurité sociale et sur le fait que, dans une certaine mesure, cela justifierait une demande ultérieure d'élaboration d'une définition de la déficience. La discussion a particulièrement porté sur le problème des incapacités invisibles et sur la forte possibilité d'exclusion des programmes susceptibles de survenir en cas d'incapacité invisible. Cette discussion pourra servir de référence lors de débats ultérieurs sur l'article trois, portant sur les définitions.

Projet d'article 24 - Vie culturelle, activités récréatives, loisirs et sports

Introduction et questions pour discussion

Le projet d'article 24 est l'un de ces très longs articles normatifs, regorgeant de concepts. Malheureusement, ces concepts ne sont pas bien définis, notamment en ce qui a trait à la culture. Les concepts inhérents aux activités récréatives et aux sports ont paru beaucoup plus directs et n'avaient pas besoin de définitions détaillées. Telle que formulé actuellement, le principe de culture semble viser la culture nationale, raciale ou ethnique. C'est sans doute un horizon un peu limité surtout lorsque l'on commence à penser à la culture des personnes handicapées, à la culture des personnes sourdes, etc… Cet article tente de garantir l'accès des personnes handicapées à la culture, mais une culture étroitement définie, tel que mentionné plus avant. Il est probable également que des dispositions comme l'accès physique soient plus efficacement traitées dans les autres parties du traité portant précisément sur l'accessibilité.

Autre caractéristique intéressante de ce projet d'article: la mention des médias substituts, lesquels, une fois encore, pourraient mieux être réglés dans d'autres dispositions. Ceci étant dit, et quel que soit le placement, le projet actuel demande aux États de prendre les mesures appropriées pour harmoniser leurs droits de la propriété intellectuelles afin que les livres et documents puissent être imprimés en médias substituts.

D'éventuels problèmes pourraient surgir avec les Accords commerciaux couvrant déjà les questions de droits d'auteur. Il faut éviter de créer des conflits avec ces normes établies, conflits qui pourraient entraver la procédure de signature et de ratification.

Aucune question n'avait été posée pour cet article. Les participants avaient été invités à donner leurs impressions et réflexions.

Discussion

La discussion a débuté par la révision du commentaire préalable du CCD et sur la référence à la culture des personnes handicapées et des personnes sourdes. Cet article, a-t-on soutenu, devrait en tenir compte afin d'assurer la reconnaissance et les garanties appropriées.12

Il a ensuite été question des alinéas portant sur l'accès aux sites culturels. De l'avis général, de telles mentions seraient mieux placées dans les dispositions sur l'accessibilité. Dans le même ordre d'idée, les définitions normatives et détaillées des cinémas, théâtres et autres lieux de spectacles semblaient préoccuper plus d'un., surtout dans un contexte de culture évolutive, où outils culturels changent, la langue aussi, où dans vingt ans, le théâtre n'existera peut-être plus et sera remplacé par quelque chose d'autre. Par conséquent, avec une liste aussi détaillée, l'article pourrait rapidement devenir désuet.

Sur une note différente, un participant a constaté que le projet d'article ne faisait nullement référence aux minorités ni à la protection de l'héritage culturel. Serait-ce parce que de tels facteurs sont traités par le PIRDCP plutôt que par le PIRDESC? Quoiqu'il en soit, il a été résolu que cette question devrait être intégrée, quelque part, dans le traité.

  • Activités sportives et récréatives

L'European Disability Forum a demandé, dans sa contribution, que la convention adopte une approche à deux volets, l'une portant sur les sports en général et l'autre sur les activités sportives pour les personnes handicapées. De l'avis général, cette recommandation a été jugée judicieuse.

Il a été alors suggéré de tenir compte des questions d'accès aux sites récréatifs. Le projet d'article traite de l'accès aux services récréatifs mais ne mentionne pas l'accès aux sites. Plusieurs participants ont approuvé le besoin d'élargir ce concept.

Projet d'article 24 bis Coopération internationale

Introduction et questions pour discussion

Dans les autres traités sur les droits de la personne, la mention de la coopération internationale est un tout simple énoncé sur le devoir des États d'exécuter leurs obligations, mais ne précisant aucun cadre d'implantation. Dans le passé, plusieurs pays en voie de développement ont allégué qu'il y avait une obligation légale à fournir de l'aide et de l'assistance et qu'ils (les pays en voie de développement) n'étaient pas tenus de matérialiser les droits humains si cette aide n'était pas accordée. En même temps, les pays donateurs soutiennent que chaque pays a le devoir et l'obligation de respecter et de promouvoir les droits humains de ses propres citoyens et que cette obligation est inconditionnelle et qu'elle n'est surtout pas subordonnée à l'obtention d'une aide.

Dans le passé, afin de combler cet écart, les négociateurs ont réduit la référence à la coopération internationale à une simple reconnaissance de l'aide que certains États accordent à d'autres. Mais le lien explicite entre l'exécution des obligations et la prestation d'aide n'a jamais été établi. Il ne sera pas probablement pas appuyé dans les négociations en cours.

Ceci étant dit, le projet de texte de l'article 24 bis, préparé par le Mexique, est très normatif et établit un niveau de détails justifiant l'orientation des pays donateurs, à savoir que d'abord et avant tout, l'obligation d'un État ne doit jamais être subordonnée à l'obtention d'aide. Il faut se rappeler que tout libellé normatif de la coopération internationale provoque ce type de sensibilité. Nombreuses sont les personnes qui estiment que les traités internationaux de droits humains ne constituent pas un lieu de discussion des politiques d'aide.

Le Canada a préconisé une plus grande ouverture quant à la mention de la coopération internationale mais, pour les motifs sus-mentionnés, qu'elle soit maintenue à un minimum. À partir de cette vue d'ensemble, la question suivante a été posée au groupe comme amorce de discussion:

  1. Comment pouvons-nous influencer la délégation canadienne et bâtir sur les réalisations positives du gouvernement du Canada dans le domaine de la coopération internationale - personnes handicapées?

Discussion

L'une des stratégies utilisées par les organisations internationales de personnes handicapées a été de soustraire l'aide bilatérale et l'aide officielle au développement de toutes les discussions pour se concentrer davantage sur les autres secteurs de coopération comme la coopération technique entre les gouvernements, les échanges d'informations, etc. Le Canada, a-t-on fait remarquer, encourage ce concept par le biais de l'appui accordé depuis vingt ans à l'OMPH.

Pour d'autres participants, on devrait réclamer l'application de l'optique des personnes handicapées afin de s'assurer, qu'au minimum, aucun nouvel obstacle ne sera créé ou - en d'autres mots -, qu'aucun tort ne sera exercé. L'exemple le plus souvent cité, et très débattu, est celui des efforts de reconstruction post-désastre où l'on dépense souvent des millions de dollars pour recréer des environnements inaccessibles. Plus particulièrement, les participants attendaient avec impatience de voir comment la Convention pourrait être utilisée pour recentrer ces efforts et contrecarrer tout tort éventuel. Ce qui a provoqué un intéressant débat. Et, qu'il y ait ou non un article sur la coopération internationale, ont affirmé des participants, tout État Partie de la convention sera obligé de garantir l'application des principes d'aménagement universel, car il se sera engagé envers l'accessibilité par le biais d'autres dispositions de la convention.13

Il a alors été fait référence au plus récent compromis, tel que libellé dans la CRDE qui stipule:

Les États parties s'engagent à prendre toutes les mesures législatives, administratives et autres qui sont nécessaires pour mettre en oeuvre les droits reconnus dans la présente Convention. Dans le cas des droits économiques, sociaux et culturels, ils prennent ces mesures dans toutes les limites des ressources dont ils disposent et, s'il y a lieu, dans le cadre de la coopération internationale.

À partir de cette référence, on a alors examiné la possibilité d'intégrer la coopération internationale dans un nouvel alinéa de l'article 4 sur les Obligations générales. Étant donné que les États Parties ne vont vraisemblablement pas accepter une disposition les engageant à aider les pays du sud, financièrement incapables de se conformer pleinement au traité, on pourrait peut-être suggérer un compromis, à savoir l'addition d'un alinéa à l'article 4, en espérant les États pourraient être convaincus du fait que leur aide n'empire pas les choses, surtout dans les domaines peu onéreux (comme la reconstruction).

De plus, le nouveau libellé devrait engager les États à proposer les personnes handicapées en affacturage dans les traités commerciaux ou d'investissement. Cela risque d'entraîner ultérieurement des coûts pour une société mais en attendant, cela ne coûte pratiquement rien aux gouvernements qui décideront peut-être d'accepter juste pour montrer qu'ils veulent respecter ce principe.

En résumé, la majorité des participant a convenu que la coopération internationale devrait faire l'objet d'un article distinct et a espéré que le Comité spécial fera preuve de créativité, peut-être en élargissant l'article 4 tel que suggéré, pour relever les défis qu'engendre le processus de formulation.

Projet d'article 25 Suivi

Introduction

Lors de la dernière réunion du Comité spécial, le Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme14, avait organisé une très passionnante table ronde. Des personnes possédant une bonne expérience en matière de suivi, avec divers points de vue incluant ceux d'États membres, de la CEDAF, et d'autres personnes engagées depuis plusieurs années dans le suivi des traités des droits de l'homme, ont expliqué l'importance du suivi dans la vie d'une convention.

La forme que devra prendre le suivi suscite un débat continu. Nous n'en sommes peut-être «qu'aux tous débuts» mais, en tant que collectivité, nous devons établir une forte vision des principes que nous estimons être les pré-requis d'un suivi, que nous jugeons essentiels pour l'efficacité de la convention et qui nous paraissent indispensables pour faire avancer et réaliser nos droits. À partir de ce court exposé, les participants ont été priés de préciser leurs «pré-requis» en matière de suivi.

Discussion

De l'avis général, et sans en avoir nécessairement examiné tous les détails, nous ne pouvons appuyer cette convention si elle ne comporte aucun mécanisme rigoureux de suivi. Il est certain que ce mécanisme devra intégrer plusieurs facettes, mais comme «pré-requis» cette Convention devra intégrer un mécanisme de suivi, efficace.

Il est crucial, a-t-on suggéré, que de concert avec d'autres groupes, le CCD en fasse une priorité et l'inscrive à l'avant-plan de ses préoccupations. Il doit en outre combattre tout précepte selon lequel il s'agirait d'un point secondaire. C'est en effet un principe qui doit se retrouver à l'avant-plan de tous nos débats. Les personnes handicapées doivent en être assurées. La phrase «des droits sans recours ne sont pas des droits du tout» a été répétée à maintes reprises.

Il a été suggéré de modifier un peu le libellé de «suivi» pour «mécanismes participatifs et recours efficaces». Il faut s'assurer que le mécanisme doit refléter le point de vue des consommateurs et qu'il doit permettre aux personnes handicapées de se faire entendre. Vous ne pouvez bien appréhender les besoins à combler si vous n'écoutez pas les personnes handicapées. De plus, ont estimé plusieurs, un mécanisme de participation pour les plaintes et pour l'évaluation est indispensable pour garantir l'efficacité du suivi.

Dans une certaine mesure, il a été convenu que nous devrions travailler avec nos acquis, ce qui s'oppose carrément à ce que nous semblons entendre de certains États membres, à savoir: «le concept proposé est si ruinant que nous préférons ne rien avoir du tout»

Cette optique n'engendrera pas un suivi efficace. Les participants ont alors discuté des mesures que pouvaient prendre les gouvernements pour assurer une plus grande efficacité du système. Vous n'avez pas besoin par exemple d'un rapport de trois cents (300) pages qui ennuiera les gouvernements et les comités. On pourrait avoir des rapports plus pointus, plus focalisés. Ils pourraient, nationalement, organiser des audiences annuelles au cours desquelles les détenteurs de droits pourraient identifier les problèmes et permettre aux gouvernements de réagir et d'examiner les observations finales du comité.

Il a été souligné que les observations finales émises au cours des dix dernières années par les divers comités se sont avérées très utiles. Elles ont permis de cerner les enjeux clés. Si, au Canada, nous les avions traitées sérieusement et assuré une réponse appropriée, nous aurions énormément progressé en ce qui a trait au respect des droits humains.

Dans un tel contexte, les participants ont convenu qu'il ne s'agissait pas d'un disfonctionnement du système; c'est un système que nous ne faisons pas fonctionner efficacement au niveau national; nous ne savons pas nous prévaloir du système international pour soulever ces questions et les régler avec une gouvernance beaucoup plus transparente et imputable.

C'est pourquoi, l'organe de suivi du nouveau traité devra insister pour un mécanisme participatif avec des évaluations périodiques. Nous devrions, quant à nous, insister pour un mécanisme de plaintes, pour un protocole optionnel établissant un mécanisme de plaintes, et qui pouvant être ratifié en même temps que la convention, - comme ce fut le cas pour le Pacte international sur les droits civils et politiques dont le mécanisme de plaintes a pu être ratifié au moment de la signature du Pacte par les États Parties-.

Aux fins de justification, on pourra alléguer que ce suivi doit être articulé autour des droits de participation. Il s'agit de l'essence même des droits humains. Un droit est illusoire s'il n'a pas de recours. Il n'a aucune valeur pour les personnes handicapées si aucune voix ne lui est rattachée.

La discussion a également porté sur le protocole optionnel qui faciliterait les recours individuels et, par le biais du comité qui statuera sur les plaintes individuelles, établirait une jurisprudence imposant une teneur normative aux vaste énoncés des droits répertoriés dans le traité.

Pour d'autres, puisque la question du suivi est une question de structure/procédure, par opposition à une question de droit fondamental, nous avons la possibilité de faire preuve de créativité et d'imaginer comment améliorer les structures existantes. Par exemple, l'idée de recours participatifs nationaux peut s'avérer très utile. C'est discuté dans le document du HCNUDH, cité à la note 14.

Finalement, en ce qui a trait à la suggestion d'effectuer, comme élément de suivi, un examen parlementaire annuel de la conformité à la Convention, il a été rappelé qu'en Afrique du Sud, la Constitution prévoit un examen annuel de la conformité à ses dispositions sur les droits économiques et sociaux. De la même manière, peut-être lors de la signature et de la ratification d'un nouveau traité pour les personnes handicapées, chaque État Partie pourrait désigner une ou deux institutions nationales chargées d'effectuer les examens et d'en rapporter les résultats à l'organe international. Ce rapport pourrait s'ajouter aux rapports périodiques censés être produits par les gouvernements. Cela exigerait, en d'autres mots, d'effectuer un examen annuel dans le support utilisé par le pays et d'en aviser l'organe international.

Annexe 1

21 mars 2005
Pour distribution immédiate
Toronto - ON

La Cour suprême du Canada statue que les tribunaux sont responsables de protéger les intérêts primordiaux des adultes vulnérables

Le 18 mars 2005, la Cour suprême du Canada a rendu son jugement dans l'affaire JJ contre la Nouvelle Écosse. L'Association canadienne pour l'intégration communautaire (ACIC) et Personnes d'Abord du Canada (PDC) étaient intervenus dans cette affaire alors que ARCH - A Legal Resource Centre for Persons with Disabilities - avait agi comme conseiller juridique. Selon l'ACIC et PDC, ce jugement est en faveur des personnes handicapées du pays.

Il s'agit du cas de JJ, une femme ayant une déficience intellectuelle et une maladie mentale. Elle a résidé dans le Nova Scotia Hospital et voulait déménager dans la communauté afin d'accéder aux soutiens requis. Elle y était encouragée par son mari, ses parents et par le personnel de l'hôpital. Mais puisqu'elle avait été placée sous le Adult protection Act de la Nouvelle Écosse, le ministre de la Santé avait pleins pouvoirs quant à son lieu de résidence et à ses arrangements de services de soutiens, à condition bien sûr que le plan proposé soit dans l'intérêt majeur de JJ. Mais le plan approuvé par le ministre l'obligeait à déménager dans un centre régional de réadaptation, situé à 125 kilomètres de sa famille et de ses amis et de son village natal.

La Cour familiale de la Nouvelle Écosse a statué que le plan du ministre de placer JJ dans un centre si éloigné de sa communauté et de sa famille, n'était pas dans son intérêt. La ministre a allégué que la cour dépassait son champ de compétence en imposant des termes et des conditions à un plan de soins de santé. La portée du champ de compétence de la cour pour déterminer si le plan du ministre était en fait dans l'intérêt majeur de la personne, était également en litige dans cette affaire.

Par un jugement unanime rédigé par le juge Abella, la Cour suprême a statué qu'en ayant approuvé la perte d'autonomie en vertu de l'Adult Protection Act, les tribunaux avaient non seulement la compétence mais en outre la responsabilité de s'assurer que le plan de soins de santé était en effet dans l'intérêt majeur de la personne. La Cour a déclaré: «On ne saurait sur-évaluer l'importance d'un examen judiciaire indépendant d'une action d'un état quand, sur ordre dudit état, un adulte vulnérable a été privé de son droit à fonctionner de manière autonome.»

Heather Tracey, présidente de Personnes d'Abord du Canada et résidant en Nouvelle Écosse, a affirmé: «c'est une véritable victoire pour les personnes avec des déficiences. C'est un pas dans la bonne direction pour s'assurer qu'à travers le pays, les personnes handicapées puissent vivre dans la communauté entourées de leurs famille et amis et non pas dans des institutions».

Zuhy Sayeed, présidente de l'ACIC a déclaré: «Bien que ce jugement ne traite pas directement du droit d'une personne à vivre dans la communauté, il a toutefois réaffirmé qu'un gouvernement provincial ne peut unilatéralement prendre des décisions pour des individus dont il a la garde. Nous pourrons énormément bâtir sur ce jugement, particulièrement avec nos efforts de désinstitutionnalisation et de garantie des soutiens communautaires aux personnes handicapées».

Annexe 2

Libellé de l'article 15, proposé par la Nouvelle Zélande Janvier 2005

1. Les États Parties réaffirment le droit des personnes handicapées de circuler librement et d'être libres de choisir leur lieu de résidence. Les États Parties garantissent en outre que les personnes handicapées ont le droit, en toute égalité avec les autres personnes, comment, de décider où et avec qui elles veulent vivre.

(Dérivé de l'article 12 (1) du PIRDCP)

2. Les États Parties de cette Convention prennent toutes les mesures efficaces voulues pour permettre aux personnes handicapées de vivre en toute autonomie dans la communauté et d'y être totalement intégrées en tant que membres. Les États Parties doivent prendre des mesures incluses pour s'assurer que:

(Dérivé de la phrase liminaire de l'article 15 de l'ébauche du Groupe de travail.)

  1. les services collectifs et les équipements proposés à l'ensemble de la population soient également offerts aux personnes handicapées et adaptés à leurs besoins.
  2. (Dérivé de l'alinéa 15.1(d) de l'ébauche du Groupe de travail)
  3. les personnes handicapées aient un accès égal aux programmes de logement du gouvernement; et
  4. (Dérivé de l'alinéa 23.1(d) de l'ébauche du Groupe de travail)
  5. les personnes handicapées aient accès aux renseignements sur les services communautaires, incluant les services de soutien.

(Dérivé de l'alinéa 15.1(e) de l'ébauche du Groupe de travail)

3. Les États Parties s'engagent à prendre les mesures efficaces pour promouvoir la prestation des services de soutien à domicile, dans les établissements et dans la communauté, incluant l'assistance personnelle nécessaire pour afin d'aider les personnes handicapées à vivre et à participer à la communauté et d'y être intégrées sur le même pied d'égalité que d'autres personnes, avec les mêmes choix et de ne pas souffrir d'isolement ou de ségrégation. Les États Parties s'assureront que ces services de soutien soient dispensés de manière à reconnaître l'autonomie, l'individualité et la dignité des personnes handicapées et en particulier, que l'accès aux soutiens personnel soit conforme au droit de liberté de circulation et à la liberté de choisir le lieu de résidence.

(Dérivé de l'alinéa 15.1(c) de l'ébauche du Groupe de travail)

4. Les États Parties de cette Convention s'engagent à prendre des mesures efficaces pour assurer la liberté de circulation et la mobilité des personnes handicapées dans la plus grande indépendance possible, notamment en leur facilitant l'accès à des aides techniques, technologies de compensation et formes d'assistance directe ou intermédiaires de haute qualité qui favorisent la mobilité. et en s'assurant que ces aides soient disponibles à prix abordable.

(Dérivé de la phrase liminaire et de l'alinéa (a) de l'article 20 de l'ébauche du Groupe de travail)

5. Les États Parties prennent toutes les mesures appropriées et efficaces pour garantir le droit à l'égalité aux personnes handicapées et s'assurer qu'elles aient des possibilités de développement économique, d'indépendance financière, incluant le droit de louer, posséder, d'hériter de biens, de gérer elles-mêmes leurs affaires financières et d'avoir une égalité d'accès aux prêts bancaires, hypothèques et autres formes de crédit financier et ce, sur le même pied d'égalité que les autres personnes.

(Dérivé de l'alinéa 9 (e) de l'ébauche du Groupe de travail)

Annexe 3

Liste des participants

Collectivité des personnes handicapées

  1. April D'Aubin Conseil des Canadiens avec déficiences, membre du personnel
  2. Laurie Beachell Conseil des Canadiens avec déficiences, membre du personnel
  3. Jim Derksen Conseil des Canadiens avec déficiences, comité international
  4. Mary Ennis Conseil des Canadiens avec déficiences, comité international
  5. Steve Estey Conseil des Canadiens avec déficiences, comité international
  6. Jason Mitschele Conseil des Canadiens avec déficiences, comité international
  7. David Shannon Conseil des Canadiens avec déficiences, comité international
  8. Stephanie Marinich Conseil des Canadiens avec déficiences, comité des droits de la personne
  9. John Rae National Federation of the Blind - Advocates for Equality
  10. Anna MacQuarrie Association canadienne pour l'intégration communautaire
  11. Rachael Ross Association nationale des étudiants handicapés du niveau post- secondaire
  12. Rick Goodfellow Association canadienne des centres de vie autonome
  13. Sara Jarvis Association canadienne des centres de vie autonome
  14. Moira Jones Organisation mondiale des personnes handicapées
  15. Zephania Matanga African Canadian Association of Disabled People

    Milieu académique
  16. Marcia Rioux Disability Rights Promotion International, Université York
  17. Rita Samson Disability Rights Promotion International, Université York
  18. Allan McChesney Commission internationale des juristes, Université Queens
  19. Aaron Dhir Faculté de droit, Université de Windsor

    Gouvernment
  20. Vangelis Nikias Ministère du Développement social du Canada
  21. Dennis Steubing Ministère du Développement social du Canada
  22. Rebecca Netley Ministère des Affaires étrangères
  23. Alan Kessel Ministère des Affaires étrangères
  24. Marthe St-Louis Ministère des Affaires étrangères
  25. Kathryn Hamilton Commission canadienne des droits de la personne

1 Une importante vague de refonte, actuellement en cours aux Nations Unies, risque d'avoir des répercussions sur la manière dont les organes de suivi des traités - notamment la Commission des droits de la personne - effectuent leur travail.

2 Se référer à l'annexe 1 pour le communiqué portant sur ce jugement.

3 Se référer à l'annexe 2 pour une copie du texte proposé.

4 Cette affaire portait sur le cas d'une personne handicapée qui avait besoin de services de soutiens à domicile, lesquels avaient été dispensés par sa compagne. Mais après leur séparation, M. Fernandez a réclamé de l'aide pour couvrir les coûts des services de soutiens requis à domicile. Il alléguait qu'en vertu du droit à la sécurité, il devait recevoir de l'aide spéciale afin d'éviter d'avoir à séjourner dans les hôpitaux pour obtenir les services. La Cour d'appel du Manitoba a statué qu'il ne s'agissait pas d'un droit judiciaire, à savoir le droit d'une personne de vivre dans une maison mais que c'était plutôt le droit de recevoir les soins de santé requis au titre de l'Article 7 de la Charte, soins offerts dans un cadre institutionnel.

5 Le CCD a émis quelques commentaires au sujet de la sur-protection et sur le fait que des adultes sont encore perçus comme des enfants par leur famille qui prennent des décisions en leur nom. Nous avons vu à plusieurs reprises au Canada, des cas de parents qui tuent leurs enfants handicapés et qui, quelquefois, ont mis fin à leurs jours. Le CCD a beaucoup longuement approfondi ce domaine. Cela pourrait servir de trame à un autre document de travail, a-t-on suggéré - analogue à celui proposé sur l'article 15 bis. . On explorerait, entre autres, les enjeux des enfants avec des limitations fonctionnelles ainsi que les valeurs relatives à l'autonomie et aux droits inhérents qui peuvent être dévolues à d'autres enfants dans de terribles situations.

6 G. Quinn and T. Degener, Human Rights and Disability: The Current Use and Future Potential of United Nations Human Rights Instruments in the Context of Disability (Genève: Haut-Commissariat des Nations Unies pour les droits de l'homme, 2002). Disponible en ligne à l'adresse: http://193.194.138.190/disability/index.htm

7 Un participant a rappelé qu'à l'époque où il était Rapporteur spécial sur les normes internationales pour droits électoraux des personnes handicapées, Bengt Lindquist avait effectué un sondage à ce sujet. Il serait peut-être utile de se procurer ce document avant la prochaine réunion du Comité spécial. Il est disponible à l'adresse: http://www.electionaccess.org/

8 Ce groupe a récemment soumis ce document au Comité spécial, aux fins de considération. Ce document est donc disponible à l'adresse: http://www.un.org/esa/socdev/enable/rights/ahc5docs/ahc5multiethnic.doc

9 AG des N.U., rés.48/96 (48 ème session, décembre 1993), page 8. (ci-après appelée les Règles pour l'égalisation des chances des personnes handicapées).

10 On a ici déclaré que la faiblesse du libellé et de la formulation transparaissait dans toute la convention. De l'avis général, une attention particulière devra donc être apportée au libellé au fur et à mesure qu'évoluera la rédaction de la convention.

11 Le texte complet de la soumission est sur le site web du Comité spécial, à l'adresse:http://www.un.org/esa/socdev/enable/rights/ahc3cohre.htm

12 Il a été suggéré que le CCD consulte Catharyn Frazee qui s'est attaquée à ce secteur et a établi une intéressante re-conceptualisation de la culture et des personnes handicapées.

13 Il a également été noté que plusieurs organismes d'aide internationale se sont regroupées en un organisme appelé le «Sphere Project» afin d'inclure les principes de droits humains dans tout projet d'aide humanitaire. Il a donc été suggéré que la nouvelle convention soit utilisée dans ce forum pour faire avancer l'intégration comme composante des principes de contrôle de qualité et des principes de droits humains appliqués à la gestion de l'aide, revendiquée par le Sphere Project.

14 Le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme a produit un document à ce sujet, disponible à l'adresse: http://www.un.org/esa/socdev/enable/rights/ahc5ohchr.doc