Réduire la pauvreté et favoriser la participation sociale ?

Bénéfices et limites des mesures d'activation de l'emploi et des services d'insertion professionnelle pour les personnes handicapées au Québec

Document produit dans le cadre de l'Alliance de recherche université-communautés «Pauvreté invalidante et citoyenneté habilitante»

Par Léonie Archambault

Sous la direction de Lucie Dumais et Yves Vaillancourt

15 février 2011

Introduction

Le présent document s'inscrit dans le contexte d'une Alliance de recherche universités-communautés (ARUC) coordonnée à partir du Conseil des Canadiens avec déficiences (CCD) et portant le titre « Pauvreté invalidante/citoyenneté habilitante ». Au sein de ce groupe canadien de recherche, notre équipe québécoise a choisi de porter une attention particulière aux mesures actives stimulant la participation sociale des personnes handicapées. Ce champ d'intérêt n'est pas étranger à notre appartenance au Laboratoire de recherche sur les pratiques et les politiques sociales (LAREPPS), au sein duquel plusieurs travaux en lien avec l'insertion sociale ont été effectués au cours des dernières années. Ainsi, nous accordons beaucoup d'importance à cette affirmation de l'Office des personnes handicapées du Québec (OPHQ) selon laquelle « le travail est un puissant vecteur de participation sociale, et ce, autant pour la population en général que pour les personnes avec incapacités »[1] (OPHQ, 2007). Ainsi, en s'appuyant sur les travaux de l'OPHQ, de St-Germain (2010), de Dumais, Prohet et Mailhot (2007), ainsi que plusieurs autres, nous amorçons le présent travail avec la conviction que l'emploi peut jouer un rôle important dans le processus d'intégration sociale. Toutefois, une question centrale demande encore à être observée avec attention : l'emploi, s'il peut favoriser la participation citoyenne des personnes handicapées, peut-il aussi contribuer à l'amélioration des conditions financières pour ces dernières ?

Pour répondre à cette question ainsi que dans l'optique de raffiner notre compréhension des enjeux liés à l'emploi pour les personnes handicapées, nous avons d'abord procédé à une recension des principales politiques et mesures (fédérales et provinciales) favorisant l'insertion professionnelle des personnes éloignées du marché du travail, en insistant sur les mesures dédiées aux personnes handicapées. La première section de ce document offrira une vue d'ensemble de ces politiques et mesures. Ensuite, pour mieux saisir les impacts concrets de ces politiques et programmes, nous avons effectué des entrevues auprès de représentants de trois Services spécialisés de main-d'oeuvre (SSMO) montréalais. La présentation de ces organismes et des données issues des entrevues sera offerte en deuxième portion du document. En troisième section, nous proposons une série de scénarios permettant d'estimer les bénéfices et limites liés à la sécurité du revenu et à l'emploi. Enfin, la quatrième section du présent document sera dédiée à la mise en relation des données recueillies avec certaines pièces de littérature autour d'une analyse prenant en considération les enjeux micro et macrosociaux en présence.

1. Orientations politiques, programmes et mesures

Parmi les grandes lignes de notre histoire québécoise récente en termes de politiques sociales, la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale (Loi 112) présente un intérêt incontestable, et ce, non seulement en regard de son processus de construction, mais aussi en raison des impacts concrets qui en ont découlé. Adoptée en décembre 2002, cette loi «a été précédée, sinon engendrée devrait-on plutôt dire, par un mouvement qui s'est étalé sur plusieurs années et qui réunissait des organisations communautaires, des groupes de femmes et de citoyens animés par la volonté de jeter les bases d'un Québec sans pauvreté. Résultat d'une mobilisation exceptionnelle et d'un processus de consultation bien structuré, auquel des personnes en situation de pauvreté ont constamment été associées, cette loi fait une large place aux préoccupations portées par le secteur communautaire québécois depuis plus d'une décennie.»(Aubry, 2010). La loi 112 «vise à guider le gouvernement et l'ensemble de la société québécoise vers la planification et la réalisation d'actions pour combattre la pauvreté, en prévenir les causes, en atténuer les effets sur les individus et les familles, contrer l'exclusion sociale et tendre vers un Québec sans pauvreté» (Gouvernement du Québec, 2002). Cette loi institue une Stratégie nationale de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale et engage le gouvernement à produire un plan d'action en matière de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale.

En 2008, le ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale proposait d'implanter ou d'améliorer une panoplie de programmes et mesures visant à favoriser l'adéquation entre la main-d'œuvre et les besoins du marché du travail par le biais du Pacte pour l'emploi. La prémisse évoquée par le gouvernement comme constituant la base de ce projet était la suivante : «le travail est le meilleur gage de prospérité individuelle et collective» (MESS, 2008a).

Enfin, la Stratégie nationale pour l'intégration et le maintien en emploi des personnes handicapées, déposée en 2008, est associée au Pacte pour l'emploi dans le sens où elle «en constitue en quelque sorte le prolongement pour les personnes handicapées» (MESS, 2008b).

En dépit de partager les principes mis de l'avant par la politique canadienne À l'Unisson (accessibilité, inclusion, services, insertion au travail), le Québec a choisi de donner suite à sa propre politique globale pionnière parue en 1984, À part…égale. C'est ainsi qu'a été produite, en 2009, À part entière : pour un véritable exercice du droit à l'égalité, proposant une conception renouvelée de la participation sociale. Le portrait dressé par l'OPHQ dans le cadre de cette politique permet de constater que la situation des personnes handicapées et leurs familles demeure à être améliorée sur plusieurs plans. Entre autres, À part entière souligne que par rapport au reste de la population leur taux d'emploi reste deux fois moindre. La politique insiste aussi sur l'accentuation du risque de pauvreté lié aux frais supplémentaires engendrés par l'incapacité (OPHQ, 2009).

Enfin, mentionnons qu'en 2003, toutes les provinces à l'exception du Québec ont conclu, sur la base d'un cadre multilatéral, des ententes sur le marché du travail visant les personnes handicapées (EMTPH), où le gouvernement du Canada s'engage à verser 50 % des dépenses annuelles encourues à l'égard des programmes et services des provinces et territoires. De son côté, le Québec n'a pas endossé le cadre multilatéral, bien qu'il souscrive aux principes généraux qui le sous-tendent. C'est ainsi qu'il a conclu, en 2004, l'Entente Canada-Québec visant la participation des personnes handicapées au marché du travail, qui engage le fédéral à hauteur de 50% des coûts et qui le lie, encore aujourd'hui, au financement de mesures actives d'Emploi-Québec (Aide à l'employabilité des personnes handicapées).

Voyons maintenant en quoi consistent les principaux programmes instaurés au cours des dernières années et ayant pour but de favoriser l'insertion professionnelle des personnes éloignées du marché du travail (en l'occurrence, les personnes handicapées). Certaines mesures découlent des orientations politiques présentées plus haut, alors que d'autres ont été implantées dans d'autres contextes. Nous présenterons ici le détail et l'analyse des mesures sous forme de texte suivi. Un tableau synthétique est aussi disponible en annexe.

Programmes et mesures relevant d'Emploi-Québec

Le Contrat d'intégration au travail (CIT), auparavant géré par l'Office des personnes handicapées du Québec (OPHQ) et administrée par Emploi-Québec depuis 2001, propose des subventions organisées selon huit volets (soutien au salaire, accessibilité des lieux de travail, adaptation du poste de travail, évaluation des capacités, interprétariat, compensation salariale pour traitements médicaux, accompagnement, considération spéciale). Notons, entre autres, que le soutien au salaire consiste en une compensation financière accordée à un employeur et pouvant atteindre jusqu'à 85% du salaire de l'employé pour lequel elle est octroyée. Avec la Stratégie nationale pour l'intégration et le maintien en emploi des personnes handicapées, on prévoit de rehausser de 16,4 millions de dollars sur cinq ans le budget de 24,5 millions alloué aux CIT en 2008 (MESS, 2008b). Cette mesure, très utilisée par les organismes d'employabilité pour personnes handicapées, s'avère, tel qu'on peut le constater dans Dumais, Prohet et Maillhot (2007, p.71), être un outil fort utile pour favoriser l'embauche de personnes éloignées du marché du travail.

Le programme de Subventions aux entreprises adaptées (PSEA), a été transféré de l'OPHQ vers Emploi-Québec en 2006. Les entreprises adaptées (EA) embauchent au moins 60% de personnes handicapées et leur fournissent un travail utile et rémunéré. La création de 825 nouveaux emplois en EA, grâce à la Stratégie nationale pour l'intégration et le maintien en emploi des personnes handicapées, implique l'injection de 33,5 millions de dollars supplémentaires sur cinq ans. Le budget annuel en 2008 était déjà de 50 millions (MESS, 2008a). Une étude de Proulx et coll. (2006) nous permet d'observer que les personnes présentant une déficience intellectuelle sont les plus représentées en entreprise adaptée. Ils composaient, à l'époque, 43% des travailleurs dans ce type de milieu de travail.

Les Programmes d'aide et d'accompagnement social (PAAS) ont été mis en place en 2006-2007 et s'inscrivent dans les cadres légaux de la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale ainsi que de la Loi sur l'aide aux personnes et aux familles. Les mesures «Devenir» et «Interagir» ont été mises en place pour aider les personnes qui ne sont pas prêtes à intégrer le marché du travail. Ces mesures s'adressent principalement aux prestataires du Programme d'aide sociale et du Programme de solidarité sociale. Elle permet aux participants d'obtenir 130$ par mois en supplément de leur prestation habituelle et elle permet aux organismes d'accueil d'obtenir une subvention de 150$ par mois par participant. Il est à noter que si le programme «Devenir» a pour objectif de préparer le participant à intégrer une mesure ou un programme offert par les services publics d'emploi, le programme «Interagir» s'adresse à des personnes plus éloignées du marché du travail et a pour objectif le cheminement personnel et social du participant. Or, il semble que « les participants à Interagir doivent néanmoins s'inscrire dans un continuum vers l'emploi et que le programme [ne soit] pas conçu pour que les personnes puissent en bénéficier «à vie» (Proulx et Dumais 2010).

La mesure Subvention salariale d'Emploi-Québec s'inscrit dans la politique active du marché du travail et est financée par le Fonds de développement du marché du travail. Ce programme ne s'adresse pas spécifiquement aux personnes handicapées, mais aux personnes éprouvant une difficulté à intégrer le marché du travail. Il s'agit d'une subvention pouvant être renouvelée jusqu'à un maximum de 52 semaines. Dans le cadre du Pacte pour l'emploi Plus (2009), on prévoit investir dans cette mesure, sur une période de deux ans, 21,1 millions de dollars supplémentaires (dont 10 millions issus de fonds privés). Proulx et Dumais (2010) nous permettent de constater que ce programme est utilisé par certaines initiatives dans le champ de l'employabilité des personnes handicapées.

La mesure Supplément de retour au travail a été instaurée en juin 1998. Elle consiste en une aide financière de 500 $ ayant pour but d'aider les prestataires des Programmes d'aide financière de dernier recours ou de l'assurance-emploi qui viennent d'obtenir un emploi à temps plein à assumer les dépenses reliées à leur entrée sur le marché du travail. Si cette mesure est intéressante sur le plan de l'incitation à l'emploi, plusieurs déplorent qu'elle ne soit pas accessible aux personnes qui intègrent le marché du travail à l'aide d'un CIT ou d'un poste en entreprise adaptée. Cette restriction la rend moins accessible aux personnes handicapées.

La prime au travail a été mise en place en janvier 2005 et elle remplace le programme APPORT. Elle consiste en un crédit d'impôt remboursable dont le montant est déterminé en fonction du revenu de travail et de la situation personnelle et familiale. Ce programme s'adresse aux personnes ou aux familles à faible revenu (par exemple, une personne seule est éligible si elle gagne un revenu de travail annuel se situant entre 2400 $ et 15 343,80 $). Le montant maximal du crédit d'impôt remboursable pour une personne seule est de 532,98 $. Cette mesure ne s'adresse pas spécifiquement aux personnes handicapées, mais un programme similaire a été instauré en 2008, dans le cadre de la «Stratégie nationale pour l'intégration et le maintien en emploi des personnes handicapées», pour les personnes ayant une contrainte sévère à l'emploi. La prime au travail adaptée se présente aussi sous la forme d'un crédit d'impôt remboursable dont le montant est déterminé en fonction du revenu de travail, du revenu familial et de la situation familiale. Le demandeur ou son conjoint doivent être reconnus comme ayant une contrainte sévère à l'emploi. Cette prime s'adresse aussi aux personnes ou familles à faible revenu (par exemple, une personne seule est éligible si elle gagne un revenu de travail annuel se situant entre 1200 $ et 22 837 $). Le montant maximal de ce crédit d'impôt remboursable pour une personne seule est de 1024,92 $. Il est à noter que les deux primes ne peuvent être jumelées. Toutes deux rendent le travail des salariés à faible revenu plus payant et par conséquent plus attrayant. Dans le contexte où elles peuvent être versées par anticipation, les primes peuvent apparaître comme un incitatif à l'insertion sur le marché de l'emploi. Lorsque demandées dans le cadre de la déclaration de revenus, ces primes peuvent constituer un incitatif pour le maintien en emploi.

Compris dans le Pacte pour l'emploi Plus, le supplément à la prime au travail est en vigueur depuis 2008. Ce crédit d'impôt remboursable de 200 $ par mois vise à aider les ex-prestataires d'un programme d'aide financière de dernier recours à se maintenir en emploi. Cette mesure, valide pour une période maximale de douze mois, s'avère fort pertinente sur le plan de l'incitation à l'emploi.

Programme relevant du Secrétariat du Conseil du trésor et du Centre de services partagés du Québec

Le Programme de développement de l'employabilité à l'intention des personnes handicapées (PDEIPH) est intégré au plan d'embauche du Gouvernement du Québec pour les personnes handicapées adopté en 1984. Ce programme de développement de l'employabilité consiste en un emploi occasionnel (douze mois) dans la fonction publique québécoise et implique la possibilité de décrocher ensuite un emploi dans le ministère ou organisme où le programme a été complété. Ce programme est critiqué par certains intervenants qui soulignent le peu de chances qu'ont les participants de décrocher un emploi à la fin du programme.

Programme relevant de l'Agence du revenu du Canada

La Prestation fiscale pour le revenu de travail (PFRT), mise en place en février 2007, se présente sous la forme d'un crédit d'impôt remboursable pour les travailleurs à faible revenu dont les revenus de travail sont supérieurs à 3000 $. Le montant de la prestation est calculé en fonction du revenu. Pouvant être versée par anticipation ou demandée dans le cadre de la déclaration de revenus elle agit comme incitatif à l'insertion ou au maintien en emploi (Dumais et Morrissette, 2009).

Programme relevant du ministère des Ressources humaines et Développement des compétences Canada (RHDCC)

Le Fonds d'intégration pour les personnes handicapées (FIPH) investit 30 millions de dollars par année au Canada pour aider les personnes handicapées à se préparer à l'emploi, à intégrer le marché du travail, à devenir travailleurs autonomes ou à acquérir des compétences sur le plan socioprofessionnel. Le fonds offre une aide financière aux particuliers ainsi qu'un financement à des employeurs et organismes. Au Québec, le volet individuel de cette mesure est administré par Sphère-Québec, alors que son volet collectif est géré par Services Canada (Proulx et Dumais, 2010). Le financement accessible par le biais du FIPH est utilisé par les services spécialisés d'aide à l'emploi pour compléter les mesures d'Emploi-Québec, dans des cas particuliers pour lesquels le financement sous forme de coût forfaitaire ne couvre pas les dépenses (Dumais et Morrissette, 2009).

Ce survol des principales politiques et mesures ayant modifié le paysage de l'insertion professionnelle des personnes handicapées au cours des dernières années, nous aura aidé à dresser la table pour mieux comprendre dans quel contexte et avec quels outils travaillent les organismes oeuvrant dans le champ de l'employabilité pour personnes handicapées. Voyons maintenant comment les données colligées lors d'entrevues effectuées auprès de trois Services spécialisés de main-d'œuvre (SSMO) montréalais nous permettent de procéder à une lecture plus précise de la situation dans ce domaine.

2. Les Services spécialisés de main-d'œuvre pour personnes handicapées : partenaires de l'État dans le domaine de l'employabilité

Avant de présenter les organismes rencontrés ainsi que les données issues des entrevues effectuées, il nous paraît pertinent de procéder à un retour historique permettant de situer le contexte d'émergence des groupes communautaires spécialisés dans le champ de l'employabilité, ainsi que les événements qui ont mené à la relation qu'ils entretiennent aujourd'hui avec l'État en tant que «ressources externes». Cet aperçu nous permettra non seulement de mieux saisir les enjeux qui marquent la pratique de ces organismes, mais nourrira aussi les réflexions et les analyses que nous proposerons plus loin.

Le secteur à but non lucratif dans le champ de l'insertion professionnelle

Dans les années 1980, le Canada est appelé à réformer son régime de protection en matière d'emploi et d'assistance sociale. C'est dans ce contexte que s'effectue un transfert de responsabilités vers certaines provinces, afin que ces dernières mettent en place un système de prestation de services dans le cadre des mesures actives proposées par la réforme (Shields, 2010). En 1997, la ratification de l'Entente de principe Canada-Québec relative au marché du travail engendre le rapatriement par Québec des pouvoirs en matière de gestion des programmes de main-d'œuvre. En 1998, Emploi-Québec, nouvelle entité paragouvernementale, est créée avec pour mandat d'actualiser une nouvelle structure de services basée sur une gestion partenariale, décentralisée et orientée sur les résultats (Shields, 2010).

Dans ce contexte d'implantation de la réforme par les provinces, il est intéressant de noter que, tel que le soulignent Gorlick et Brethour (1998, cités par Larose et coll., 2005 et Shields, 2010), le Québec se démarque en faisant surtout appel au secteur à but non lucratif pour mettre en œuvre l'activation de sa politique d'emploi. Cette spécificité québécoise ne saurait surprendre lorsque l'on sait que le secteur communautaire, dans le champ de l'employabilité, n'en était pas à sa première collaboration avec l'État. En effet, depuis le début des années 1980, les expérimentations de l'économie sociale dans ce domaine se sont développées, gagnant au fil des ans la reconnaissance ainsi que le soutien financier des deux paliers de gouvernement (Larose et coll., 2005).

Suite à sa création, en 1998, Emploi-Québec récupère les ententes de services qui liaient les gouvernements provinciaux et fédéral avec les organismes. Ces derniers sont dès lors qualifiés de partenaires au sein d'un nouveau modèle de partage des responsabilités entre l'État, le privé et le secteur associatif (Shields, 2010). Dans la réalité, il est possible de remettre en question le style partenarial qui caractérise la relation entre Emploi-Québec et les organismes d'employabilité désignés comme «ressources externes». Une telle réflexion sera d'ailleurs développée dans la quatrième portion de ce document.

Pour le moment, attardons-nous à observer les enjeux liés à l'intervention et à l'administration de certaines de ces ressources externes (trois Services spécialisés de main-d'œuvre pour personnes handicapées), en fonction des informations que les représentants rencontrés nous ont fournies.

Présentation de trois Services spécialisés de main-d'œuvre (SSMO) montréalais pour personnes handicapées

Dans le but d'accéder à une meilleure compréhension des enjeux liés à l'emploi pour les personnes handicapées au Québec, nous avons jugé utile de nous adresser à des organismes impliqués auprès de cette clientèle. Les SSMO pour personnes handicapées travaillent avec les participants et les employeurs, ainsi qu'en partenariat avec d'autres intervenants du réseau de la santé et des services sociaux[2] pour favoriser l'insertion en emploi des personnes handicapées. Leur financement est assuré par Emploi-Québec, selon la formule de coût forfaitaire. L'information recueillie dans le cadre d'entrevues semi-dirigées auprès d'informateurs associés à trois SSMO basés à Montréal, ainsi que la lecture des rapports annuels 2008-2009, nous permettent de brosser ici un portrait de statistiques permettant de mieux situer l'intervention des organismes. Les informations présentées ci-dessous sont aussi disponibles en annexe sous forme de tableaux.

L'ÉTAPE

La clientèle de l'organisme se compose à 70% de personnes ayant une déficience physique et à 30% de personnes atteintes de surdité. Pour l'année 2008-2009, L'étape a admis 232 clients. De ce nombre, 105 ont été placés en emploi (dont 53% sans subvention salariale) et 55 ont été orientés vers des programmes de développement de l'employabilité. Le salaire moyen des usagers qui ont trouvé un emploi grâce à l'organisme se situe à 13,20$ de l'heure. 75% de la clientèle ayant décroché un emploi travaille à temps plein (30 heures et plus par semaine) alors que 25% travaille à temps partiel (moins de 30 heures). Pour l'année 2008-2009, 35% des clients qui se sont adressés à l'Étape étaient prestataires de la sécurité du revenu, 24% étaient sans revenu et 19% bénéficiaient de l'assurance-emploi. Les principaux outils utilisés par ce SSMO pour favoriser l'intégration professionnelle de sa clientèle sont les Contrats d'intégration au travail (CIT), les postes en entreprises adaptées, les Programmes d'aide et d'accompagnement social (PAAS), les Subventions salariales (plus rarement) et le Programme de développement de l'employabilité à l'intention des personnes handicapées (PDEIPH) (à l'occasion).

Action main-d'œuvre inc.

Cet organisme est composé de deux services distincts, soit Action Main-d'œuvre (AMO) et À l'emploi!. AMO s'adresse à une clientèle présentant une déficience intellectuelle. Des 225 clients admis pour l'année 2008-2009, 120 ont été placés en emploi et 12 ont été orientés en mesure préparatoire au marché du travail. Pour cette même période, les personnes ayant décroché un emploi avec l'aide d'AMO reçoivent un salaire moyen se situant à 9,59$ de l'heure et la majorité d'entre eux travaillent à temps plein. La clientèle admise chez AMO en 2008-2009 était constituée à 42% de personnes sans revenus, à 34% de personnes recevant la prestation de Solidarité sociale (contrainte sévère à l'emploi), à 14% de bénéficiaires de la Sécurité du revenu et à 10% de chômeurs recevant un chèque d'assurance-emploi. Les principaux outils et programmes utilisés par AMO pour faciliter l'intégration professionnelle de leurs clients sont les Contrats d'intégration au travail (CIT), les postes en entreprise adaptée, le Fonds d'intégration pour les personnes handicapées et la Subvention salariale d'Emploi-Québec.

En ce qui concerne le programme À l'emploi!, sa clientèle est composée de personnes atteintes d'un trouble envahissant du développement (TED). Sur 52 admissions pour l'année 2008-2009, 27 participants ont été placés en emploi et un client a été orienté en mesure préparatoire au marché du travail. La clientèle ayant décroché un emploi reçoit un salaire moyen de 11,38$ de l'heure et travaille à temps plein dans 82% des cas. À leur arrivée au programme, 41% des participants recevait des prestations de Solidarité sociale (contrainte sévère à l'emploi), 39% étaient sans revenus, 14% bénéficiaient déjà de revenus d'emploi et 4% encaissaient un chèque d'assurance-emploi. Les principaux outils utilisés par À l'emploi! pour intégrer leurs clients en emploi sont les Contrats d'intégration au travail (CIT), les postes en entreprises adaptées, le Fonds d'intégration pour les personnes handicapées, la Subvention salariale d'Emploi-Québec et le Programme de développement de l'employabilité (PDEIPH).

L'Arrimage

Cet organisme dessert une clientèle ayant un diagnostic de trouble de santé mentale. Pour l'année 2008-2009, 38% des usagers souffraient de schizophrénie, 25% éprouvaient des troubles de l'humeur, 19% étaient atteints d'autres psychoses, 7% avaient un trouble anxieux et 6% affichaient un trouble de la personnalité. Sur les 370 admissions pour l'année 2008-2009, 238 clients ont été placés en emploi et 41 participants ont été orientés en mesure de développement de l'employabilité. Le salaire moyen pour les usagers ayant décroché un emploi était de 10$ de l'heure et 53% des personnes travaillaient à temps plein, soit 30 heures et plus par semaine. La clientèle admise au programme cette même année était constituée à 41% de prestataires de la Solidarité sociale (contrainte sévère à l'emploi). 23% des participants étaient sans revenu, 19% bénéficiaient de la Sécurité du revenu et 8% recevaient un montant d'assurance-emploi. Les principaux outils et programmes utilisés par l'organisme pour favoriser l'insertion professionnelle sont les Contrats d'intégration au travail, les postes en entreprises adaptées ainsi que les Programmes d'aide et d'accompagnement social (PAAS).

Présentation des données qualitatives recueillies en entrevues

Outre les données quantitatives présentées précédemment, les entrevues effectuées dans les SSMO nous ont permis de relever des données de nature plus qualitative à travers le discours des personnes interrogées. D'abord, sur le plan du financement des SSMO, les répondants voient d'un oeil positif la nouvelle méthode de subvention par Emploi-Québec sous forme de coût forfaitaire. Certains soulignent que ce nouveau mode de financement favorise la collaboration et diminue la lourdeur administrative. Grâce à la fiche 4 et à la fiche 7, les SSMO reçoivent un financement pour le placement ainsi pour le maintien en emploi, en fonction de leurs cibles (nombre de clients). Selon certains, le financement des activités de maintien en emploi représente une reconnaissance financière, de la part d'Emploi-Québec, de services qui étaient déjà dispensés, mais sans être subventionnés.

Ensuite, les personnes interrogées quant aux impacts de la « Stratégie nationale pour l'intégration et le maintien en emploi des personnes handicapées » soulignent qu'il y a maintenant plus de budgets pour les CIT ainsi que pour leur renouvellement. L'un des répondants affirme que :

« Avec la stratégie, il y a plus d'argent pour les CIT, il y a plus de postes en entreprises adaptées, la personne handicapée devient une priorité auprès d'Emploi-Québec. »

En ce qui a trait à l'opinion des informateurs concernant les conditions économiques engendrées par l'insertion en emploi pour les prestataires de la Solidarité sociale, les réponses sont mitigées[3] . L'une des personnes interviewées nous dit être embêtée par la question. Elle souligne que les usagers qui décrochent un travail à temps plein peuvent gagner un revenu trois fois supérieur à leur chèque d'aide sociale. Toutefois, elle précise que cela ne signifie pas nécessairement qu'ils sortent de la pauvreté. Un autre répondant nous présente son opinion de la façon suivante :

« C'est des exceptions où tu vas regarder la situation pis tu vas dire, regarde, il n'y a rien à faire dans ton cas, c'est pas payant d'aller travailler. Ça commence à être pas mal l'exception parce que justement, toute la question des médicaments, il y a une assurance gouvernementale pour tout le monde. »

Enfin, voici ce qu'un troisième répondant nous dit sur la situation économique des personnes handicapées qui quittent l'Aide sociale :

« Ça vaut pas la peine de travailler à temps partiel, t'as pas de gains [financiers] quand t'es sur l'aide sociale. [...] Oui c'est vrai que travailler au salaire minimum ça paye pas, c'est vrai ça, sauf que si tu commences jamais à travailler, dix ans plus tard, tu n'auras pas ton quinze dollars de l'heure. Il faut ben commencer quelque part. »

Lors des entrevues, nous avons demandé aux répondants si, selon eux, les programmes et mesures en vigueur incitaient les personnes handicapées à intégrer le marché du travail. En premier lieu, les personnes interrogées ont abordé la décision du Conseil du Trésor d'exclure les travailleurs embauchés par une entreprise adaptée ou avec l'aide d'un CIT de la mesure « supplément de retour au travail ». Les répondants ont souligné à l'unanimité la nature désincitative et discriminatoire de cette initiative.

Un autre désincitatif à l'emploi ayant été nommé par plus d'un répondant se situe au niveau de la lourdeur des démarches pour récupérer la prestation de sécurité du revenu dans le cas où l'insertion professionnelle se solderait par un échec. L'anxiété générée par la crainte de se retrouver sans revenu pendant un certain temps peut suffire à faire abandonner à certains leurs démarches pour quitter la sécurité du revenu.

Enfin, l'un des informateurs questionnés souligne que la perte du «carnet de réclamation»[4] auquel ont droit les prestataires de la sécurité du revenu peut aussi constituer, dans certains cas, un désincitatif à l'emploi. Il précise qu'en 1997 une mesure a été mise en place pour permettre aux personnes ayant une contrainte sévère à l'emploi de garder leur carnet de réclamation lorsqu'ils quittent l'Aide sociale, à condition que leurs revenus de travail se situent en dessous de 1500 $ par mois. À cette époque, le salaire minimum se situait sous la barre des 7 $ de l'heure. Or, si l'on considère qu'en 2010 le salaire minimum se situe à 9,50 $ de l'heure, peu de personnes bénéficient encore aujourd'hui de cette mesure. En effet, bien que le plafond de 1500 $ est demeuré le même depuis 1997, le salaire minimum a, pour sa part, augmenté d'environ 30 %. Cette mesure n'est donc plus aussi incitative qu'à l'époque où elle a été instaurée.

Sur une note plus positive, l'une des personnes interrogées nous dit qu'à son avis, les mesures et les combinaisons de mesures sont généralement bonnes et qu'elles peuvent être incitatives lorsqu'elles sont connues. Selon cette personne, un désincitatif réside dans le fait que les personnes ne se rendent pas toujours à la démarche d'insertion professionnelle parce qu'elles calculent leurs gains potentiels avec des informations incomplètes ou erronées. Ainsi, elles peuvent avoir l'impression qu'il ne sera pas avantageux pour elles d'aller travailler, ce qui peut s'avérer faux.

À ce sujet, il est intéressant de noter que certains répondants ont souligné ne pas être habilités à aider leur clientèle à obtenir, ni même à connaître, certaines mesures fiscales pouvant permettre d'améliorer le revenu d'emploi.

Pour conclure, il est pertinent de souligner, tel que nous l'a fait remarquer l'un des répondants, que s'il peut être désavantageux de travailler à temps partiel au salaire minimum, il existe en outre des programmes d'aide et d'accompagnement social (PAAS) qui peuvent permettre à certains d'améliorer leurs conditions, sans perdre leurs acquis, tout en participant à un projet et en développant certaines habiletés.

Synthèse des données recueillies

Les entrevues effectuées dans les SSMO ainsi que la lecture de leurs rapports annuels nous ont permis d'améliorer notre compréhension de ce à quoi peut ressembler la réalité de l'insertion professionnelle pour les personnes handicapées à Montréal. La compilation des données recueillies auprès des trois organismes nous permet de constater que près de 68 % des 879 usagers qui ont demandé l'aide de ces trois SSMO ont réussi à se placer en emploi ou en programme de développement de l'employabilité. Le salaire moyen pour les personnes ayant trouvé un emploi en 2008-2009 était d'environ 11,04 $ de l'heure ce qui se situait, à cette époque, plus de 2 $ au-dessus du salaire minimum. La majorité des travailleurs occupaient un emploi à temps plein (plus de 30 heures par semaine). Enfin, il est intéressant de noter que près de la moitié des personnes ayant eu recours aux services des SSMO visités étaient des prestataires de la Sécurité du revenu/Solidarité sociale.

À l'unanimité, les personnes rencontrées dans les SSMO voyaient les nouveaux modes de financement par Emploi-Québec comme une amélioration. Les répondants percevaient aussi d'un bon œil les budgets supplémentaires qui avaient accompagné la Stratégie nationale pour l'intégration et le maintien en emploi des personnes handicapées.

Au niveau des conditions financières des prestataires de la Sécurité du revenu et de la Solidarité sociale qui s'insèrent en emploi, l'avènement de l'assurance médicament du Québec a été identifié par un répondant comme constituant un gain (incitatif à l'emploi), alors qu'elle est jugée par un autre informateur comme étant encore insuffisante pour les personnes ayant des besoins élevés en médicaments (désincitatif à l'emploi). Toutefois, toutes les personnes interrogées convenaient qu'il était généralement avantageux de quitter la Solidarité sociale pour un emploi à temps plein alors qu'il était souvent désavantageux pour les usagers de travailler à temps partiel, surtout si l'emploi était rémunéré au salaire minimum.

Sur le plan des programmes et mesures en vigueur, les répondants ont soulevé quatre principaux désincitatifs à l'emploi :

  • l'exclusion de l'accès au « supplément de retour au travail » pour les personnes engagées par une entreprise adaptée ou avec l'aide d'un CIT,
  • la lourdeur des démarches pour récupérer les prestations de Sécurié du revenu/Solidarité sociale en cas d'échec d'insertion en emploi,
  • la perte du carnet de réclamation pour les personnes ayant une contrainte sévère à l'emploi et dont le revenu de travail dépasse 1500 $/mois,
  • l'information limitée ou erronée sur laquelle certaines personnes s'appuient pour choisir de ne pas tenter l'insertion à l'emploi.

En outre, tous les répondants perçoivent les PSEA, les CIT ainsi que les PAAS comme des programmes favorisant l'insertion professionnelle ou la participation sociale des personnes ayant des incapacités.

3. Quelques scénarios concrets

Les sections précédentes nous ont permis de recenser certaines mesures intéressantes sur le plan de l'incitation à l'emploi et de l'aide au revenu. Les entrevues effectuées auprès de représentant d'organismes oeuvrant dans le champ de l'employabilité pour les personnes handicapées nous autorisent à envisager que, malgré la croyance populaire, les personnes ayant des incapacités peuvent trouver un avantage financier à intégrer le marché du travail. Dans l'optique de développer une idée plus précise des gains ou pertes potentielles qui peuvent résulter de l'obtention de revenus de travail pour un prestataire de la Solidarité sociale atteint d'une contrainte sévère à l'emploi, nous avons constitué quelques scénarios permettant d'estimer ces gains ou pertes[5]. On trouvera, à l'annexe 2, des tableaux illustrant ces scénarios.

Pour ce faire, nous avons tout d'abord établi qu'une personne seule recevant les prestations de Solidarité sociale et considérée comme ayant une contrainte sévère à l'emploi bénéficie d'un revenu de 10 596 $ par année et peut compter sur les avantages que lui procure le carnet de réclamation[6]. Si cette même personne souhaite intégrer le marché de l'emploi tout en conservant sa prestation de solidarité sociale, et par le fait même, son carnet de réclamation, elle peut gagner jusqu'à cent dollars par mois sans qu'aucune coupure ne soit effectuée sur son chèque de Solidarité sociale. Son revenu annuel peut ainsi augmenter à 11 796$. Une autre option consiste à s'investir dans un Programme d'aide et d'accompagnement social (PAAS). Toujours en demeurant prestataire de la Solidarité sociale et en conservant sa prestation complète ainsi que son carnet de réclamation, cette même personne peut s'investir dans un tel programme. Cette activité lui permettra de recevoir une allocation de 130$ par mois ce qui fera augmenter son revenu à 12 156$ par année. Ajoutons que les frais de transport engendrés par la participation de la personne au programme PAAS lui seront remboursés. Enfin, une autre alternative pourrait consister en une adhésion à un Programme de préparation à l'emploi (PPE). Le participant continuera dans ce cas à bénéficier de sa prestation complète et de son carnet de réclamation. Il recevra de surcroît une allocation minimale de 180$ par mois et ses frais de transport seront remboursés. Il verra donc son revenu annuel s'élever à 12 756$.

Voyons maintenant quelles sont les conditions qui attendent notre prestataire fictif s'il quitte la Solidarité sociale pour s'insérer sur le marché du travail grâce à l'aide d'un Contrat d'intégration au travail ou d'un poste en entreprise adaptée. Pour éviter de peindre une estimation trop optimiste, nous supposerons que son salaire horaire sera de 9,50$[7]. En travaillant à temps partiel, disons 20 heures par semaine, son revenu annuel brut s'élèvera à 9880$[8]. À ce montant peuvent s'ajouter jusqu'à 1020$[9] en prime au travail adaptée pour les personnes ayant reçu des prestations d'aide sociale dans les cinq dernières années. L'ex-prestataire d'un Programme d'aide financière de dernier recours recevra aussi, pendant ses douze premiers mois de travail, le supplément à la prime au travail, d'une valeur de 2400$ pour l'année. De plus, le travailleur à faible revenu bénéficiera de la Prestation fiscale pour le revenu de travail (PFRT). Dans ce cas-ci, le «calculateur de PFRT de l'Agence du revenu du Canada» nous permet d'estimer ce crédit d'impôt remboursable à 1587$[10] . Grâce à ces mesures d'aide, le revenu disponible pour un ex-prestataire de la Solidarité sociale, lors de sa première année d'insertion sur le marché du travail s'élève à environ 14 887$. Ajoutons à cela que le travailleur conserve son carnet de réclamation puisqu'il peut le garder jusqu'à cinq ans après avoir quitté la Solidarité sociale, si son revenu mensuel n'excède pas 1500$. Il est à noter qu'après la première année d'emploi, le travailleur perdra son supplément à la prime au travail (2400$) alors que sa Prestation fiscale pour revenu de travail augmentera légèrement. En considérant qu'il travaille toujours 20 heures par semaine à 9,50$ de l'heure, son revenu passera ainsi à environ 12 932$. Après cinq ans en emploi, le travailleur perdra aussi sa prime au travail adaptée, qu'il pourra remplacer par la prime au travail[11]. S'il travaille encore à 9,50$ de l'heure, 20 heures par semaine, son revenu pourrait ainsi se situer autour de 11 945$. Ajoutons qu'il aura perdu son carnet de réclamation, mais qu'il pourra faire une demande de crédit d'impôt remboursable et de supplément remboursable pour frais médicaux pour aller chercher, en principe, jusqu'à un maximum de 2073$ en compensation.

Envisageons maintenant un scénario selon lequel notre prestataire quitterait la Solidarité sociale pour un emploi à temps plein (35 heures par semaine) au salaire minimum (9,50$ de l'heure). Il perdrait d'emblée son carnet de réclamation car son revenu mensuel excéderait 1500$. Toutefois, il serait éligible au crédit d'impôt remboursable ainsi qu'au supplément remboursable pour frais médicaux grâce auxquels il pourrait en principe récupérer jusqu'à 2073$ en compensation. Ses revenus de travail s'élèveraient à 17 290$ bruts[12] , auxquels s'ajouteraient la prime au travail adaptée[13], le supplément à la prime au travail[14] et la prestation fiscale pour le revenu de travail[15], pour un total pouvant atteindre 21 015$. Toutefois, lors de la deuxième année en emploi, l'ex-prestataire perdrait son supplément à la prime au travail, alors que sa prestation fiscale pour le revenu de travail augmenterait. En supposant qu'il travaille toujours à temps plein et au salaire minimum, il pourrait compter sur un revenu d'environ 19 095$. Enfin, après cinq années en emploi, le travailleur perdrait sa prime au travail adapté, mais pourrait demander la prime au travail régulière. Dans l'éventualité où il recevrait la prime au travail maximale et en estimant toujours sa prestation fiscale pour le revenu de travail grâce au calculateur disponible sur le site de l'Agence du revenu du Canada, on peut supposer que son revenu annuel serait d'environ 18 144$.

Quels constats peut-on tirer de l'analyse des scénarios élaborés autour du cas d'un prestataire du Programme de solidarité sociale considéré comme ayant une contrainte sévère à l'emploi concernant les bénéfices et les inconvénients d'une tentative d'insertion professionnelle ?

D'abord, nous pouvons établir qu'un prestataire peut améliorer ses conditions de revenu en gagnant une somme de 100$ par mois sans encourir le risque de perdre quel qu'acquis que ce soit. Cette activité lui donne accès à 1200$ de plus par année, ce qui n'est pas négligeable.

Ensuite, nous constatons que la participation à des mesures telles qu'un Programme d'aide et d'accompagnement social ou un Programme de préparation à l'emploi comporte un intérêt certain, puisqu'elles permettent au bénéficiaire de gagner jusqu'à 2160$ supplémentaires par année. Ce montant n'est pas amputé par les frais de transport liés à l'activité puisque ceux-ci sont remboursés. Le participant conserve la sécurité que lui procure sa prestation régulière en cas d'abandon du programme. Il conserve aussi le carnet de réclamation qui lui évite de débourser pour certains médicaments et services.

Les enjeux deviennent plus importants lorsque le prestataire décide de quitter la Solidarité sociale pour vivre de ses revenus de travail. Comme nous avons pu le constater à travers le discours des personnes interrogées dans les SSMO, la crainte d'un échec professionnel engendrant une perte de revenus peut faire naître de l'insécurité chez les personnes qui abandonnent leur statut de bénéficiaire. Il appert que la lenteur des procédures pour récupérer les prestations en cas de perte d'emploi peut laisser les individus dans la précarité pendant un certain temps. De plus, la perte du carnet de réclamation se présente aussi comme une source d'angoisse, puisque certaines personnes peuvent être amenées à débourser des sommes importantes en médicaments et autres soins et services. Pour mieux cerner les enjeux liés à la perte du carnet et aux coûts associés aux médicaments, voyons d'abord brièvement comment s'articule le système d'assurance médicaments au Québec.

Toutes les personnes résidant au Québec doivent être couvertes par une assurance médicaments. Celles ayant accès à une assurance privée (généralement par le biais de leur milieu de travail ou de celui de leur conjoint ou parents) doivent obligatoirement y souscrire. Les personnes n'ayant pas accès à un régime privé d'assurance médicaments peuvent et doivent s'inscrire au régime public administré par la Régie de l'assurance maladie du Québec. La prime annuelle devant être défrayée par les participants au régime public varie de 0 à 600$, en fonction du revenu familial. Lorsqu'ils se présentent en pharmacie pour faire remplir leurs prescriptions, les adhérents au régime public doivent s'attendre à débourser une franchise mensuelle de 16$ ainsi qu'une coassurance mensuelle totalisant 32% du coût de l'ordonnance moins le coût de la franchise. Par exemple, pour un médicament coûtant 60$, la coassurance sera de 14,08$. Toutefois, il est très important de noter qu'il existe des plafonds mensuels et annuels quant aux contributions exigées des participants du régime public. En effet, sauf exception[16], les individus débourseront un maximum de 80,25$ par mois et de 963$ par année pour l'achat de leurs médicaments. Au niveau des régimes privés, la prime peut varier puisqu'elle est fixée par l'assureur. Par contre la contribution annuelle maximale est la même qu'au public, soit 963$. Or, notons qu'en l'absence de plafond mensuel, il se peut que les frais soient difficiles à assumer au cours des premiers mois de l'année, en attendant l'atteinte du plafond annuel. À la lumière de ces informations concernant les régimes d'assurance médicaments et les frais qui leur sont associés, nous pouvons tirer quelques constats. D'abord, il semble qu'un participant au régime public d'assurance médicament puisse, en principe, devoir débourser jusqu'à un maximum de 1563$ par année en frais de médication. Deuxièmement, il apparaît impossible d'évaluer les frais encourus par les personnes assurées par un régime privé, puisque si la franchise et la coassurance sont régies par un plafond, la prime peut, quant à elle, varier. Enfin, le spectre de devoir se procurer un médicament qui ne soit pas remboursé par les régimes (public ou privés) auxquels sont inscrit les ex-bénéficiaires de la Solidarité sociale devenus travailleurs plane au-dessus d'eux, engendrant une compréhensible insécurité.

Lorsque l'on aborde les inconvénients liés à la perte du carnet de réclamation pour les ex-prestataires de la Sécurité du revenu, on pense non seulement aux frais engendrés par l'achat de médicaments, mais aussi à ceux entraînés par les coûts associés aux soins dentaires, aux examens de la vue et aux services requis pour pallier aux incapacités. Pour un travailleur à faible revenu, l'investissement de sommes pouvant dépasser deux mille dollars par année en médication et autres soins essentiels peut constituer un désincitatif au maintien en emploi.

Revenons maintenant aux scénarios élaborés plus haut. Tel que nous l'avons observé, un ex-prestataire de la Solidarité sociale travaillant 20 heures par semaine au salaire minimum pourra, les premières années de son insertion en emploi améliorer considérablement ses conditions financières, tout en conservant son carnet de réclamation. Par contre, après cinq ans en emploi, le travailleur perdra son carnet et son revenu pourrait se situer, s'il a maintenu les mêmes conditions d'emploi, à 11 945$ par année, soit seulement 1349$ de plus que ce qu'il recevait en prestations de Solidarité Sociale. En outre, cela pourrait ne pas suffire, selon les calculs effectués précédemment, à compenser pour la perte du carnet. Toutefois, il nous est permis de supposer qu'après cinq années en emploi, le travailleur a acquis une expérience de travail qui pourrait lui avoir valu une augmentation salariale. S'il gagne aujourd'hui un salaire horaire de 10,50$, soit un dollar de plus qu'à son arrivée sur le marché du travail, ses revenus annuels pourraient atteindre 13 004$, ce qui, en comptant sur le crédit d'impôt remboursable et le supplément remboursable pour frais médicaux pourrait peut-être lui permettre d'absorber les coûts en lien avec la perte de son carnet, tout en conservant une situation financière plus avantageuse que lorsqu'il bénéficiait de la Solidarité Sociale.

Si nous avons démontré que le travail à temps partiel peut, dans le scénario précis que nous avons élaboré, permettre à un bénéficiaire de la Solidarité sociale d'améliorer ses conditions financières, il ne fait pas de doute qu'en travaillant à temps plein, ce même prestataire verra sa situation budgétaire fortement rehaussée (nous estimons son revenu à 21 015$ la première année s'il travaille au salaire minimum). Par contre, nous présumons que pour plusieurs personnes atteintes d'une contrainte sévère à l'emploi, un horaire de travail à temps plein ne peut être envisagé. En effet, nous supposons que dans de nombreux cas, la personne atteinte d'une incapacité sera victime de contraintes telles que, par exemple, la nécessité de recevoir des soins particuliers ou celle d'allouer un temps plus élevé que la norme aux activités quotidiennes (ex. : hygiène, alimentation, etc.). Bien que dans les SSMO visités, nous avons constaté que la majorité de la clientèle insérée en emploi travaillait à temps plein, il ne faudrait pas omettre de considérer que cette option n'est pas toujours possible.

Le travail d'observation des programmes et mesures en vigueur dans le champ de l'employabilité pour les personnes handicapées, que nous avons effectué à partir d'un cas fictif et de scénarios potentiels, ne peut évidemment nous permettre de tirer des conclusions pouvant être généralisées. En raison du temps et des moyens dont nous disposons, nous n'avons exploré qu'un seul cas de figure. Or, chaque personne et chaque situation comportant son lot de particularités (contexte familial, besoins médicaux, limitations physiques ou intellectuelles, réseau social, etc.) il serait impossible de refaire ce même exercice pour chaque cas spécifique pouvant exister. De plus, nous nous sommes permis d'estimer les enjeux financiers reliés à l'emploi pour les personnes handicapées, malgré notre absence d'expertise dans le domaine de la fiscalité. Ainsi, nos calculs ne tiennent pas compte des différents crédits d'impôt non remboursables qui ont été instaurés dans le but de compenser les frais supplémentaires encourus par les personnes handicapées ou d'inciter celles-ci à intégrer le marché du travail (par exemple, les déductions fédérales et provinciales pour frais médicaux, le montant pour déficience grave et prolongée, la déduction pour produits et services de soutien à une personne handicapée, le crédit d'impôt pour personnes handicapées, etc.). Dans ce contexte, nous ne pouvons que supposer, grâce à nos calculs ainsi qu'aux observations terrain qui nous ont été rapportées lors des entrevues dans les SSMO, que l'emploi (surtout à temps plein) peut, dans certains cas, constituer une avenue pour permettre aux personnes handicapées bénéficiaires de la Solidarité sociale d'améliorer leurs conditions financières.

4. Le rôle des organismes du tiers secteur dans le champ de l'employabilité pour personnes handicapées : partenaires de l'État ou simples mandataires ?

Dans les sections précédentes, nous avons démontré qu'il existe des mesures et des programmes publics qui favorisent l'insertion en emploi pour les personnes handicapées grâce à des incitatifs financiers visant les travailleurs et les employeurs. Nous avons aussi fait ressortir, grâce aux entrevues effectuées dans les SSMO, que le taux de placement en emploi ainsi que les conditions de travail et de revenu révèlent la présence d'opportunités pour les personnes handicapées souhaitant intégrer le marché du travail. Nous avons corroboré ces informations grâce aux scénarios élaborés au point 3. Enfin, les personnes rencontrées dans les SSMO ont témoigné d'améliorations, non seulement sur le plan des nouveaux modes de financement, mais aussi sur la question des relations partenariales avec Emploi-Québec. Ce dernier point nous a particulièrement interpellés et c'est pourquoi nous nous attarderons, dans la présente section, à observer plus précisément la place qu'occupent les SSMO au sein de l'organisation des services québécois.

Au Laboratoire de recherche sur les pratiques et les politiques sociales (LAREPPS), nous accordons une attention particulière au rôle potentiel que les organismes associés à l'économie sociale (tiers secteur) peuvent jouer en matière de pratiques innovantes et démocratiques au sein des services publics. L'introduction d'une nouvelle forme de gouvernance à travers la réforme des années 1990 confère une place au tiers secteur, non seulement en ce qui a trait à la mise en oeuvre des politiques, mais aussi en ce qui concerne leur orientation et leur définition (Larose et coll., 2005). Le mode de gestion partenarial qui s'est implanté lorsque Emploi-Québec a fait appel aux organismes communautaires pour activer sa politique d'emploi ouvre en principe la voie, pour ces derniers, à participer à l'élaboration et à la mise en œuvre des politiques et programmes, à travers des processus de coconstruction et de coproduction.

Voyons d'abord comment Vaillancourt (2009) définit les concepts de coconstruction et de coproduction. Nous pourrons ensuite nous laisser guider par ces notions pour examiner les données recueillies dans le cadre de nos entrevues ainsi que quelques extraits de littérature qui s'intéressent à la place des organismes du tiers secteur dans le champ de l'employabilité.

La coproduction se présente comme une coopération se limitant à l'application des politiques publiques. L'État n'est pas le seul dispensateur de services puisqu'il partage cette responsabilité avec des acteurs non étatiques. La coproduction peut s'effectuer en collaboration avec le privé, avec le tiers secteur, ou avec les deux. Or, si la participation du tiers secteur dans l'application des politiques peut contribuer à la démocratisation des politiques publiques, ce serait surtout la qualité des relations entre l'État et le tiers secteur qui favoriserait cette démocratisation (Vaillancourt et Laville 1998, Lewis 1999, 2004, Perstoff 2006, Proulx, Bourque et Savard 2007, cités par Vaillancourt 2009).

La coconstruction, pour sa part, est déployée en amont du processus, au moment de la conception des politiques publiques. La coconstruction peut prendre une forme néolibérale, dans le contexte où l'État construirait les politiques publiques en collaboration avec les représentants du secteur privé et de l'économie de marché. Ce type de coconstruction favoriserait la compétition à travers une logique dictée par le marché. On distingue aussi la coconstruction corporatiste, caractérisée par une représentation inéquitable des acteurs (partenaires du marché du travail et société civile) impliqués avec l'État dans la construction des politiques. Ce mode de coconstruction accorderait plus de poids à certains groupes et les politiques seraient ainsi teintées d'intérêts particuliers (Bresser Pereira and Cunill 1998, Cunill 2004, Brugué 2004, Oszlak 2007, Enjolras 2006, Thériault 2003, Garretón 2007, Lévesque 2007, cités par Vaillancourt 2009). Enfin, la coconstruction solidaire, démocratique et visant l'intérêt général, se caractériserait par un développement des politiques en coopération avec les acteurs économiques et ceux de la société civile, à travers un processus de dialogue et de délibération. Même si l'État conserve un statut particulier dans le processus de coconstruction (il demeure l'acteur central et il a le dernier mot sur le plan décisionnel), il se place en position de proximité avec les autres acteurs pour éviter de se trouver en situation d'autosuffisance et d'omnipotence (Vaillancourt, 2009). De plus, l'État fait appel à des ressources issues de plusieurs milieux sociaux, s'appuyant sur une vision plurielle de l'économie (Lévesque, Bourque et Forgues 2001, cités par Vaillancourt 2009). La coconstruction démocratique s'appuie aussi sur un compromis entre la démocratie participative et la démocratie représentative (Thériault 2003, Cunill 2004, Enjolras 2006, cités par Vaillancourt). En ce sens, des formes de gouvernance inclusive sont privilégiées pour favoriser le dialogue entre les élus et les représentants socioéconomiques et sociopolitiques. Enfin, la coconstruction démocratique des politiques publiques nécessite une reconnaissance de la participation des acteurs de l'économie sociale à travers une relation partenariale permettant au tiers secteur de conserver un certain degré d'autonomie tout en évitant d'être instrumentalisé par l'État (Vaillancourt, 2009).

Voyons maintenant comment nous pouvons, en utilisant ces concepts, analyser l'évolution du rôle du tiers secteur dans le champ de l'employabilité.

Nous sommes en mesure d'établir d'emblée que l'État québécois et le tiers secteur coproduisent des services dans le champ de l'employabilité depuis près de 30 ans (Larose et coll., 2005). Or, pour mieux cerner la nature de la relation qui les unit à travers cette coproduction, il est essentiel de se pencher sur les spécificités qui caractérisent leurs rapports en ce qui a trait aux processus de coconstruction des politiques. À ce sujet, nous avons consulté quelques auteurs qui offrent divers éclairages sur la question.

En 2005, Larose et coll. soulignent que, si le tiers secteur est depuis quelques années invité à une plus grande participation sur le plan de la définition des orientations politiques, il n'en demeure pas moins que plusieurs organismes du champ de l'employabilité ont encore de la difficulté à influencer les décisions qui les concernent, ce qui tend à les enfermer dans un rapport de sous-traitance. Ajoutons à cela que les auteurs précisent que la relation entre Emploi-Québec et les organismes est caractérisée par une succession d'épisodes de discorde et d'ententes pragmatiques. Il semble, à la lumière des définitions présentées plus haut, qu'on ne puisse dans ce contexte parler de coconstruction démocratique.

En 2007, Proulx, Bourque et Savard admettent que les relations entre l'État et les SSMO pour personnes handicapées ont une dimension contractuelle, dans la mesure où l'État délègue au tiers secteur des activités très clairement définies à travers une relation formelle et régulée ainsi que par le biais de politiques gouvernementales établies. Les auteurs utilisent le concept de coconstruction pour caractériser la manière dont ont été négociés le partage des responsabilités et les termes de l'interface entre l'État et les organismes. Selon ces auteurs, le gouvernement québécois accepte d'être influencé par les représentants du tiers secteur, reconnaissant ainsi leur autonomie et leur droit de participer au développement des objectifs et politiques gouvernementales. Les auteurs témoignent ici d'une meilleure qualité de relation entre l'État et les organismes ainsi que de l'influence plus tangible de ces derniers. Il est difficile de savoir si les distinctions entre les propos de Larose et coll. et ceux de Proulx, Bourque et Savard relèvent d'une évolution en ce qui concerne les relations entre l'État et le tiers secteur, ou s'il s'agit plutôt d'une disparité sur le plan de la perception.

À la lumière des entrevues que nous avons effectuées dans les SSMO à la fin de l'année 2009, la thèse selon laquelle les rapports entre les organismes et l'État auraient évolué positivement semble possible. En effet, les personnes rencontrées ont témoigné d'une amélioration de la relation avec Emploi-Québec et des modes de financement qui favorisent la collaboration. Dans ce contexte, il nous est permis de supposer (bien que nos entrevues dans trois SSMO montréalais ne nous permettent pas de faire une analyse approfondie ou généralisable des relations entre les organismes d'employabilité pour personnes handicapées et l'État) que les organismes du tiers secteur ont eu, au cours des dernières années, une influence et une reconnaissance grandissantes au sein de l'appareil gouvernemental, favorisant ainsi des pratiques plus démocratiques sur le plan de la coconstruction des politiques publiques.

Toutefois, si l'influence et la reconnaissance grandissantes dont semblent jouir les organismes dans le champ de l'employabilité leur confèrent une certaine autonomie ainsi qu'un potentiel de démocratisation des politiques publiques, il demeure que les opinions ne se sont pas consensuelles en ce qui concerne les conditions nécessaires à l'innovation sociale. En effet, tel qu'on peut le lire dans l'étude portant sur la mise en oeuvre et les retombées de la Politique de reconnaissance et de soutien à l'action communautaire (PRSAC), White (2008) accorde une attention importante aux enjeux liés au financement. En effet, lorsque celui-ci serait attribué principalement sous forme d'ententes de service (comme c'est le cas pour les organismes du champ de l'employabilité pour personnes handicapées), il ne favoriserait pas la marge de manoeuvre nécessaire à l'expérimentation et à l'innovation qui peuvent découler d'un financement accordé en appui à la mission globale. En outre, l'auteure souligne que plusieurs organismes dans le champ de l'employabilité sont entièrement satisfaits de ces ententes de service. Elle ajoute que de nombreux groupes communautaires complémentaires apprécient le rapport d'affaires qu'ils entretiennent avec le gouvernement. Ils préfèrent la relation plus contractuelle au rapport parfois conflictuel associé à l'action communautaire autonome (White, 2008).

En somme, il semble, à la lumière des éléments dont nous disposons, que la relation entre l'État et les SSMO ait évolué, d'un rapport s'apparentant à la sous-traitance vers un lien contractuel favorisant une meilleure reconnaissance et une plus grande possibilité d'influence des organismes à l'échelle macro. Toutefois, l'apport de White (2008) nous permet de remarquer que, sur le plan de l'intervention au quotidien, les modes de financement auxquels sont soumis les organismes du champ de l'employabilité apparaissent rigides lorsqu'on les compare aux types de financements alloués à d'autres organismes du tiers secteur, surtout ceux associés à l'action communautaire autonome. Il apparait pertinent de se questionner sur le potentiel novateur que permet la relation uniquement contractuelle en ce qui a trait au renouvellement des pratiques d'intervention sur le terrain.

Conclusion

Quels constats pouvons-nous tirer de cette démarche de réflexion engagée dans le cadre de notre participation à cette Alliance de Recherche Universités-Communauté (ARUC) visant à mieux cerner les enjeux liés aux conditions économiques et à la participation sociale des personnes handicapées ? D'abord, la recension des principales politiques et mesures favorisant l'amélioration des conditions financières reliées à l'emploi pour les personnes ayant une incapacité nous autorise à constater que le gouvernement québécois s'est illustré dans les dernières années en instaurant ou en améliorant plusieurs programmes ayant pour objectif de rendre le travail plus payant et plus attrayant pour les personnes exclues du marché du travail, en l'occurrence pour les personnes handicapées. Deuxièmement, les entrevues effectuées dans les SSMO nous ont permis de prendre le pouls des enjeux dans le champ de l'employabilité pour les personnes ayant une incapacité, aussi bien sur le terrain qu'au niveau de la sphère administrative. Nous avons ainsi été à même de constater que plusieurs mesures ayant pour but de favoriser l'insertion professionnelle sont utilisées et jugées utiles par les intervenants, bien qu'il y ait encore place à l'amélioration. Troisièmement, nous nous sommes autorisés à estimer les impacts liés aux programmes et mesures en vigueur grâce à l'élaboration de scénarios, et ce, malgré les limites de notre expertise dans le domaine de la fiscalité. Nos calculs nous mènent de façon générale aux mêmes conclusions que celles recueillies lors des entrevues dans les SSMO, soit que le travail peut, dans certains cas, s'avèrer payant et permettre d'améliorer la situation financière des prestataires de l'aide financière de dernier recours. Enfin, la recension de certains travaux concernant l'interface entre l'État et les organismes d'employabilité nous aura permis de nous pencher sur la question de la conception et de la mise en oeuvre des politiques et programmes ayant un impact sur l'insertion professionnelle des personnes handicapées, ainsi que sur les conditions de participation des organismes à ces processus. Grâce à l'utilisation des concepts de coconstruction et de coproduction, nous avons procédé à l'examen des données dont nous disposions et nous avons ainsi été à même de constater une évolution dans les rapports entre l'État et les SSMO pour personnes handicapées. En somme, la démarche présentée dans ce document aura permis de faire ressortir, tel que nous le souhaitions initialement, certains enjeux liés au travail pour les personnes handicapées ainsi que d'autres liés à la place du tiers secteur dans le champ de l'employabilité pour les personnes handicapées. Nous aurons aussi été en mesure, par le biais des travaux effectués, de constater que l'emploi peut, dans certains cas, s'avérer un moyen de combattre la pauvreté pour les personnes handicapées bénéficiaires d'un Programme d'aide financière de dernier recours.

D'autre part, il ne faudrait pas oublier que les résultats obtenus font plutôt office d'hypothèses dans la mesure où ils se basent sur des données fragmentaires. En effet, nous n'avons procédé qu'à trois entrevues à Montréal et nous n'avons élaboré des scénarios que pour un cas de figure. Dans l'optique d'accéder à des résultats plus complets et plus valides, il pourrait être intéressant d'élargir nos entrevues à plusieurs organismes oeuvrant dans le domaine de l'employabilité, et ce, dans diverses régions québécoises. Il pourrait aussi être pertinent d'avoir recours à une personne spécialisée en fiscalité pour élaborer des scénarios plus diversifiés et plus solides sur le plan fiscal. Enfin, il serait potentiellement rentable d'interviewer des acteurs étatiques ainsi que des leaders du milieu associatif sur les mêmes sujets que ceux abordés avec les intervenants des SSMO. La triangulation de ces données permettrait de valider nos hypothèses.

Toutefois, il ne faudrait pas oublier que si le travail présenté ici demeure assez modeste, il se rattache toutefois à plusieurs recherches effectuées au LAREPPS au cours des dernières années en ce qui concerne la participation sociale et l'employabilité pour les personnes vivant avec un handicap. Dans cette perspective, le présent document s'articule avec les recherches précédentes comme une pièce de plus nous permettant d'évoluer vers une meilleure compréhension des enjeux liés au handicap, à la participation sociale, à la pauvreté, à l'emploi et aux potentialités issues du tiers secteur.


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  • Noël, A. (2004). Priorité au soutien du revenu : La mise en oeuvre de la Loi québécoise visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale, Réseaux canadiens de recherche en politiques publiques, (page consultée le 17 novembre 2010) [En ligne], adresse URL : http://www.cprn.org/doc.cfm?doc=828&l=fr
  • Office des personnes handicapées du Québec (2007). La participation sociale des personnes handicapées : Le travail, Québec, 101 pages
  • Office des personnes handicapées du Québec (2009). À part entière : pour un véritable exercice du droit à l'égalité. Politique gouvernementale pour accroître la participation sociales des personnes handicapées, Drummondville, 69 pages
  • Proulx, J., Bourque, D. et Savard, S. (2005). «Les interfaces entre l'État et le tiers secteur au Québec», Montréal, UQÀM, LAREPPS, juillet, 79 pages.
  • Proulx, J., Dumais, L., Caillouette, J., Vaillancourt, Y. (2006). Les services aux personnes ayant des incapacités au Québec. Rôle des acteurs et dynamiques régionales, Montréal, UQAM, Cahiers du LAREPPS no 06-12, juin, 216 p.
  • Proulx, Jean et Dumais, Lucie (2010). «De nouvelles pratiques interorganisationnelles pour une plus grande participation des personnes vivant avec une déficience intellectuelle», Montréal, UQÀM, LAREPPS, avril, 94 pages.
  • Ressources humaines et Développement des compétences Canada (RHDCC) (2003). Ententes sur le marché du travail visant les personnes handicapées, (page consultée le 15 février 2011) [En ligne], adresse URL : http://www.hrsdc.gc.ca/fra/condition_personnes_handicapees/ententes_marche_travail/index.shtml
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  • Vaillancourt, Yves (2009). «Social Economy in the Co-Construction of Public Policy», Annals of Public and Cooperative Economics, Volume 80, Issue 2, pages 275-313.
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Annexe 1 : Programmes et mesures

Programmes et mesures relevant d'Emploi-Québec
Programme ou mesure Détail Commentaire Analytique
Contrat d'intégration au travail (CIT)
Cette mesure, auparavant gérée par l'OPHQ, a été transférée à Emploi-Québec en 2001.
Huit volets : soutien au salaire, accessibilité des lieux de travail, adaptation du poste de travail, évaluation des capacités, interprétariat, compensation salariale pour traitements médicaux, accompagnement, considération spéciale.

Durée : 52 semaines (renouvelable sur recommandation d'une ressource externe mandatée par Emploi-Québec)

Compensation financière à l'employeur :
Jusqu'à 85 % du salaire.

Budget annuel en 2008 : 24,5 millions de dollars.

Avec la Stratégie nationale en 2008, le budget est rehaussé de 16,4 millions de dollars sur cinq ans.
Les CIT font partie des principaux outils utilisés par les SSMO pour favoriser l'insertion en emploi. L'augmentation du nombre de CIT grâce à la « Stratégie nationale pour l'intégration et le maintien en emploi des personnes handicapées » a été accueillie positivement par les organismes.
Programme de subventions aux entreprises adaptées (PSEA)
Programme de l'OPHQ transféré à Emploi-Québec en 2006
Les entreprises adaptées embauchent au moins 60 % de personnes handicapées et leur fournissent un travail utile et rémunéré. Ces entreprises peuvent recevoir des subventions salariales, des subventions de consolidation et des subventions de démarrage.

Budget annuel en 2008 : 50 millions de dollars.

Avec la Stratégie nationale en 2008, le budget est rehaussé de 33,5 millions de dollars sur cinq ans.
L'insertion professionnelle en entreprise adaptée constitue aussi un outil très utilisé par les SSMO. L'augmentation des places dans le contexte de la « Stratégie nationale pour l'intégration et le maintien en emploi » était bienvenue par les organismes.
Programmes d'aide et d'accompagnement social (PAAS)
Mesures mises en place en 2006-2007, dans le cadre de la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale et de la Loi sur l'aide aux personnes et aux familles
Les mesures « Devenir » et « Interagir » ont été mises en place pour aider les personnes qui ne sont pas prêtes à intégrer le marché du travail. Cette mesure s'adresse principalement aux prestataires du programme d'aide sociale et du programme de solidarité sociale. Elle permet aux participants d'obtenir 130 $ par mois en supplément de leur prestation habituelle et elle permet aux organismes d'accueil d'obtenir une subvention de 150 $ par mois par participant. Alors que le programme « Devenir » a pour objectif de préparer le participant à intégrer une mesure ou un programme offert par les services publics d'emploi, le programme « Interagir » s'adresse à des personnes plus éloignées du marché du travail et a pour objectif le cheminement personnel et social du participant. Or, il semble que « les participants à Interagir doivent néanmoins s'inscrire dans un continuum vers l'emploi et que le programme [ne soit] pas conçu pour que les personnes puissent en bénéficier «à vie» (Proulx et Dumais 2010).
Subvention salariale d'Emploi-Québec
Mesure s'inscrivant dans la Politique active du marché du travail et financée par le Fonds de développement du marché du travail.
Ce programme ne s'adresse pas spécifiquement aux personnes handicapées, mais aux personnes éprouvant une difficulté à intégrer le marché du travail. Il s'agit d'une subvention pouvant être renouvelée jusqu'à un maximum de 52 semaines. Moins privilégié par les SSMO puisqu'il ne s'adresse pas spécifiquement aux personnes ayant des incapacités, ce programme est malgré tout utilisé par ceux-ci à l'occasion.
Supplément de retour au travail
Mesure instaurée en juin 1998
Aide financière de 500 $ pour aider les prestataires de l'aide sociale ou de l'assurance-emploi qui viennent d'obtenir un emploi à temps plein à assumer les dépenses reliées à leur entrée sur le marché du travail. Si cette mesure est intéressante sur le plan de l'incitation à l'emploi, plusieurs déplorent qu'elle ne soit pas accessible aux personnes qui intègrent le marché du travail à l'aide d'un CIT ou d'un poste en entreprise adaptée.
Prime au travail
Mesure mise en place en janvier 2005 (remplace le programme APPORT)

OU

Prime au travail adaptée
Instaurée en 2008 dans le cadre de la «Stratégie nationale pour l'intégration et le maintien en emploi des personnes handicapées».
Crédit d'impôt remboursable dont le montant est déterminé en fonction du revenu de travail et la situation personnelle et familiale.
S'adresse aux personnes ou familles à faible revenu (par exemple, une personne seule est éligible si elle gagne un revenu de travail annuel se situant entre 2400 $ et 15 343,80 $)
Montant maximal du crédit d'impôt remboursable pour une personne seule : 532,98 $

Crédit d'impôt remboursable dont le montant est déterminé en fonction du revenu de travail, du revenu familial et de la situation familiale.
Le demandeur ou son conjoint doivent avoir une contrainte sévère à l'emploi.
S'adresse aux personnes ou familles à faible revenu (par exemple, une personne seule est éligible si elle gagne un revenu de travail annuel se situant entre 1200 $ et 22 837 $)
Montant maximal du crédit d'impôt remboursable pour une personne seule : 1024,92 $
Les deux programmes ne peuvent être jumelés.

Ces programmes rendent le travail des salariés à faible revenu plus payant et par conséquent plus attrayant.

Dans le contexte où elle peut être versée par anticipation, la prime peut apparaître comme un incitatif à l'insertion sur le marché de l'emploi. Lorsque demandée dans le cadre de la déclaration de revenus, cette prime peut constituer un incitatif pour le maintien en emploi.
Supplément à la prime au travail
En vigueur depuis 2008, cette mesure est comprise dans le Pacte pour l'emploi Plus.
Crédit d'impôt remboursable de 200 $ par mois visant à aider les ex-prestataires d'un programme d'aide financière de dernier recours à se maintenir en emploi.
Période maximale de douze mois.
Mesure fort pertinente sur le plan de l'incitation à l'emploi.
Programme relevant du Secrétariat du Conseil du trésor et du Centre de services partagés du Québec
Programme ou mesure Détail Commentaire Analytique
Programme de développement de l'employabilité à l'intention des personnes handicapées (PDEIPH)
Programme intégré au Plan d'embauche du gouvernement du Québec pour les personnes handicapées adopté en 1984.
-Programme de développement de l'employabilité dans le cadre d'un emploi occasionnel (douze mois) dans la fonction publique québécoise
-Possibilité de décrocher ensuite un emploi dans le ministère ou organisme.
Programme critiqué par certains intervenants qui soulignent le peu de chances qu'ont les participants de décrocher un emploi à la fin du programme.
Programme relevant de l'Agence du revenu du Canada
Programme ou mesure Détail Commentaire Analytique
Prestation fiscale pour le revenu de travail (PFRT)
Mise en place en février 2007
Crédit d'impôt remboursable pour les travailleurs à faible revenu dont les revenus de travail sont supérieurs à 3000 $. Peut être versée par anticipation ou demandée dans le cadre de la déclaration de revenu. Peut par conséquent agir comme incitatif à l'insertion ou au maintien en emploi.
Programme relevant du Ministère des ressources humaines et du développement des compétences Canada (RHDCC)
Programme ou mesure Détail Commentaire Analytique
Fond d'intégration pour les personnes handicapées
(administré par Sphère Québec)
Depuis 1997, le fédéral investit 30 millions par années pour aider les PH à atteindre leurs objectifs professionnels.
4 mesures :
- subvention salariale ciblée
- expérience de travail
- aide aux travailleurs indépendants pour démarrer une petite entreprise
- services accrus d'aide à l'emploi (stage)
Fonds utilisés par les SSMO pour compléter leurs services habituels dans des cas particuliers pour lesquels le financement sous forme de coût forfaitaire ne couvre pas les dépenses.

Annexe 2 : Données statistiques concernant les Services Spécialisés de Main-d'Oeuvre

L'étape (données tirées du rapport annuel 2008-2009 ainsi que de l'entrevue)
catégorie des données
Portrait de la clientèle Déficience physique : 70 %
Surdité : 30 %
Nombre de clients 232 admissions pour l'année 2008-2009
Nombre de placements 105 placements en emploi (53 % sans subvention salariale)
55 placements en programmes de développement de l'employabilité
Salaire moyen des clients 13,20 $/heure
Horaire 30 heures et plus : 75 %
moins de 30 heures : 25 %
Source de revenus à l'arrivée Sécurité du revenu : 35 %
Aucun revenu : 24 %
Assurance-emploi :19 %
Autres : 22 %
Principaux outils utilisés par le SSMO CIT : Contrats d'intégration au travail

EA : Entreprises adaptées

PAAS : Programmes d'aide et d'accompagnement social

Subventions salariales (parfois utilisées)

PDEIPH : Programme de développement de l'employabilité à l'intention des personnes handicapées (utilisé à l'occasion)
Financement principal Emploi-Québec (coût forfaitaire)
Action main-d'oeuvre inc. (données tirées du rapport annuel 2008-2009 et de l'entrevue)
2 services distincts Action Main-d'Oeuvre (AMO) À l'emploi!
Portrait de la clientèle Personnes présentant une déficience intellectuelle (DI) Personnes atteintes d'un trouble envahissant du développement (TED)
Nombre de clients 225 admissions pour l'année 2008-2009 52 admissions pour l'année 2008-2009
Nombre de placements 120 placements en emploi
12 placements en mesure préparatoire au marché du travail
27 placements en emploi
1 placement en mesure préparatoire au marché du travail
Salaire moyen des clients 9,59 $/heure 11,38 $/heure
Horaire Majorité à temps plein 82 % à temps plein
Source de revenus à l'arrivée Sans revenus : 42 %
Solidarité sociale
(contrainte sévère) : 34 %
Sécurité du revenu : 14 %
Assurance-emploi : 10 %
Solidarité Sociale
(contrainte sévère) : 41 %
Sans revenus : 39 %
Emploi : 14 %
Assurance-emploi : 4 %
Principaux outils utilisés par le SSMO CIT: Contrats d'intégration au travail

EA : Entreprises adaptées

Fond d'intégration pour les personnes handicapées dans certains cas (ex. : formation)

Subvention salariale d'Emploi-Québec
CIT : Contrats d'intégration au travail

EA : Entreprises adaptées

Fond d'intégration pour les personnes handicapées dans certains cas (ex. : formation)

Subvention salariale d'Emploi-Québec

PDEIPH: Programme de développement de l'employabilité à l'intention des personnes handicapées (utilisé à l'occasion)
Financement principal Emploi-Québec (Coût forfaitaire) Emploi-Québec (Coût forfaitaire)
L'Arrimage (données tirées du rapport annuel 2008-2009 ainsi que de l'entrevue)
catégorie des données
Portrait de la clientèle Schizophrénie : 38 % Troubles de l'humeur : 25 % Autres psychoses : 19 % Troubles anxieux : 7 % Trouble de la personnalité : 6 %
Nombre de clients 370 admissions pour l'année 2008-2009
Nombre de placements 238 placements en emploi
41 placements en mesures de développement de l'employabilité
Salaire moyen des clients Environ 10 $/l'heure
Horaire 30 heures et plus : 53 %
Source de revenus à l'arrivée Solidarité sociale
(Contrainte sévère à l'emploi) : 41 %
Sans revenus : 23 %
Sécurité du revenu : 19 %
Assurance-emploi : 8 %
Principaux outils utilisés par le SSMO CIT : Contrats d'intégration au travail

EA : Entreprises adaptées

PAAS : Programmes d'aide et d'accompagnement social
Financement principal Emploi-Québec (Coût forfaitaire)

Annexe 3 : Tableaux illustrant certains scénarios québécois

Revenus annuels potentiels pour une personne seule recevant les prestations de Solidarité Sociale (contrainte sévère)
Emploi Revenu Emploi t.partiel + PSS PAAS (devenir, interagir) PPE
Solidarité sociale: Emploi à temps partiel
Rémunération < 700 $
  Préparation à l'emploi
883$/mois 883$/mois 100 $ de revenus de travail admissibles 883$/mois Alloc. de 130 $/mois Frais de transport 883$/mois Alloc. min.180 $/mois Frais de transport
Total : 10 596 $/année + carnet de réclamation Total : 11 796 $/année +carnet de réclamation Total : 12 156 $/année + carnet de réclamation Total : min. 12 756 $/an +carnet de réclamation

* Dans les quatre cas présentés, la personne conserve son carnet de réclamation.

Revenus annuels potentiels pour une personne seule en entreprise adaptée ou contrat d'intégration : tableau explicatif
Année T. Partiel T. Plein
  9,5 $[17]/hX20h/sem 9,5 $/hX35h/sem
1ère année Revenu annuel brut: 9880 $

Prime au travail adapté[18]
Supplément à la prime au travail[19]
Prestation fiscale pour le revenu de travail (PFRT)[20]

Total : ad 14 887 $
+ carnet
Revenu annuel brut: 17 290 $

Prime au travail adapté
Supplément à la prime au travail
PFRT
Crédit d'impôt remboursable pour frais médicaux[21
Suppl. remboursable pour frais médicaux[22]

Total : ad 21 015 $
+Crédits d'impôts remboursables ad 2073 $ pour pallier perte carnet
Années 2-5 Revenu annuel brut: 9880 $

Prime au travail adapté
PFRT

Total : ad 12 932 $
+carnet
Revenu annuel brut: 17 290 $

Prime au travail adapté
PFRT
Crédit d'impôt remboursable pour frais médicaux
Suppl. remboursable pour frais médicaux

Total : ad 19 095 $
+Crédits d'impôts remb. Ad.2073$
Après 5 ans Revenu annuel brut : 9880 $[23]

PFRT Prime au travail
Crédit d'impôt remboursable pour frais médicaux
Suppl. remboursable pour frais médicaux

Total : ad 11 945$
+Crédits d'impôts remb. Ad.2073$
Revenu annuel brut : 17 290 $[240]

PFRT
Prime au travail
Crédit d'impôt remboursable pour frais médicaux
Suppl. remboursable pour frais médicaux

Total : ad 18 144$
+Crédits d'impôts remb. Ad.2073$

*Perte du carnet de réclamations

  • [1] Les SSMO sont des organismes à but non-lucratifs offrant des services spécialisés d'intégration en emploi aux personnes handicapées. Ces organismes issus du tiers secteur sont financés par Emploi-Québec et travaillent en partenariat avec ce dernier.
  • [2] Si un travail en partenariat avec le réseau de la santé et des services sociaux peut en principe être développé, il semble que dans la réalité, l'arrimage entre les professionnels de la santé et les intervenants des services d'aide à l'emploi ne soit pas toujours chose facile.
  • [3] On trouvera en annexe, sous forme de graphiques et tableaux, les conclusions que nous avons nous-mêmes tirées de l'élaboration de scénarios fictifs.
  • [4] Le carnet de réclamation permet d'obtenir gratuitement certains médicaments sous prescription ainsi que certains services tels que des examens de la vue et des soins dentaires.
  • [5] Pour cet exercice, nous n'avons pas tenu compte de l'ensemble des mesures fiscales existantes. Nous avons concentré notre attention principalement sur les mesures liées à l'incitation au travail pour les personnes ayant des incapacités.
  • [6] Le carnet de réclamation permet d'obtenir gratuitement certains médicaments sous prescription ainsi que certains services tels que des examens de la vue et des soins dentaires.
  • [7] Taux horaire minimum en 2010
  • [8] Bien que ce montant brut soit en principe amputé d'environ 12% payable en impôts, nous avons choisi de le laisser tel quel puisque plusieurs crédits d'impôts non-remboursables, dont nous ne tenons pas compte dans nos calculs, sont applicables.
  • [9] Montant maximal de prime au travail adaptée pour une personne seule
  • [10] Ce montant a été estimé en supposant que le candidat n'est pas admissible au montant pour personnes handicapées
  • [11] Le montant maximum de la prime au travail pour une personne seule est d'environ 532$.
  • [12] Bien que ce montant brut soit en principe amputé d'environ 28% payable en impôts, nous avons choisi de le laisser tel quel puisque plusieurs crédits d'impôts non-remboursables, dont nous ne tenons pas compte dans nos calculs, sont applicables.
  • [13] La prime au travail adaptée peut atteindre 1020$ pour une personne seule.
  • [14] Le supplément à la prime au travail s'élève à 200$ par mois (ou 2400$ par année).
  • [15] Nous estimons cette prestation à environ 305$ grâce au calculateur de PFRT disponible sur le site de Revenu Canada.
  • [16] Sur le site internet de la Régie de l'assurance maladie, il est précisé que le client peut être appelé à payer un excédent si le prix demandé par le fabriquant d'un médicament en particulier dépasse le prix maximal payé par la Régie.
  • [17] Salaire minimum (2010)
  • [18] Maximum 1020 $/année pour une personne ayant reçu AS dans les 5 dernières années
  • [19] 00 $ par mois pendant un maximum de 12 mois
  • [20] Les montants utilisés pour construire les scénarios ont été estimés grâce au calculateur de PFRT de Revenu Canada
  • [21] Maximum 1032 $/année
  • [22] Maximum 1041 $/année
  • [23] Bien que ce montant brut soit en principe amputé d'environ 12% payable en impôts, nous avons choisi de le laisser tel quel puisque plusieurs crédits d'impôts non-remboursables, dont nous ne tenons pas compte dans nos calculs, sont applicables.
  • [24] Bien que ce montant brut soit en principe amputé d'environ 28% payable en impôts, nous avons choisi de le laisser tel quel puisque plusieurs crédits d'impôts non-remboursables, dont nous ne tenons pas compte dans nos calculs, sont applicables.